ORIGINES ET HISTOIRE DU CHRISTIANISME


« En Elle était la Vie, et la Vie était la Lumière des hommes »
(Évangile de Jean, 1, 4.)


« Tout homme a en lui son Pathmos. Il est libre d’aller ou de ne point aller sur cet effrayant promontoire de la pensée d’où l’on aperçoit les ténèbres. S’il n’y va point, il reste dans la vie ordinaire, dans la conscience ordinaire, dans la vertu ordinaire, dans la foi ordinaire, dans le doute ordinaire, et c’est bien. Pour le repos intérieur, c’est évidemment le mieux. S’il va sur cette cime, il est pris. Les profondes vagues du prodige lui ont apparu. Nul ne voit impunément cet océan-là… Il s’obstine à cet abîme attirant, à ce sondage de l’inexploré, à ce désintéressement de la terre et de la vie, à cette entrée dans le défendu, à cet effort pour tâter l’impalpable, à ce regard sur l’invisible, il y revient, il y retourne, il s’y accoude, il s’y penche, il y fait un pas, puis deux, et c’est ainsi qu’on pénètre dans l’impénétrable, et c’est ainsi qu’on s’en va dans l’élargissement sans bornes de la condition infinie. »
 (Victor Hugo, William Shakespeare)


« On pourrait dire que l’origine première de la « modernité », son esprit profond, la raison de sa pénétration dans notre monde, c’est le refus de toute foi, qui suit le refus du mystère. La modernité refuse le mystère. Elle saura toujours plus, expliquera toujours plus, mais ne comprendra réellement plus rien parce qu’elle a refusé le mystère »
(Cardinal Lubac, extrait d'un entretien accordé à Angelo Scola pour le mensuel « 30 Giorni » et traduit en français dans l’hebdomadaire « France Catholique » du 19 juillet 1985)


Au commencement du Moyen Âge, les Israélites dispersés s'étaient répandus sur toute l'Europe. On les appelait Juifs, quoique les vrais Juifs eussent presque tous passé au Catholicisme, et fussent devenus les plus ardents adversaires des anciens représentants des tribus d'Israël. Ce sont les Juifs christianisés, par ironie sans doute, qui donnaient aux Israélites leur nom de Juifs qui était discrédité et détesté partout.
Aussi, il ne faut pas confondre les Juifs et les Israélites, comme sans doute le faisaient les Romains, et comme le font encore presque tous les historiens modernes. Les Sémites formaient deux partis en lutte. Les Israélites restèrent toujours séparés du monde juif, qui représentait pour eux l'usurpation du pouvoir religieux ; ils gardaient fidèlement leurs principes théogoniques et leur grande loi morale.
Rappelons que le Coran utilise deux expressions différentes pour désigner les juifs : soit « fils d'Israël » (banû Isrâ'îl) quand il s'agit des authentiques dépositaires de la tradition hébraïque, soit proprement « juifs » (yahûd) quand il s'agit des représentants de ses formes déviées.
La confusion qui s'établit entre les Juifs et les Israélites commence au premier siècle.
Les Juifs, qui sont partout méprisés, se font appeler « fils d'Israël », croyant par cette supercherie reconquérir l'estime perdue. C'est ceux là que Voltaire prend à parti lorsqu'il écrit : « Les juifs ne sont qu'un peuple ignorant et barbare qui allie depuis longtemps la plus répugnante avarice et la plus abominable superstition à une haine inextinguible pour tous les peuples qui les tolèrent et grâce auxquels ils s'enrichissent. ». Pour comprendre la persécution dirigée contre les Sémites, il faut savoir que ce sont les Israélites (féministes) qu'on persécute, et non les Juifs qui les ont renversés pour établir un régime masculiniste. Ces précisions sont susceptibles d'apporter un éclairage nouveau sur certains évènements tragiques de l'histoire, notamment ceux ayant eu lieu au cours de ces trois derniers siècles, et aussi sur l'utilisation abusive, voire la manipulation aujourd'hui, autour de l'argument, devenu l'argutie, de l'« antisémitisme », brandit à tout propos et en toute occasion par l'oligarchie « masculiniste » et toutes  ses marionnettes.


« Les voilà les fauteurs de discorde, êtres psychiques, qui ne possèdent pas l'Esprit »
(Épître de Jude, 19)


« Tous les Pères de l’Église furent des auteurs juifs, écrivant en grec, à destination d’un public juif, dans un esprit juif. Ils portaient tous des noms juifs, mis plus tard à la mode occidentale : Saül, persécuteur des Christiens (et non chrétiens, il s’agit d’une secte juive nationaliste) est transformé en Paul, par falsifications successives des scripteurs, suppression du tréma et remplacement du « S » par un « P », afin d’occidentaliser son nom. Les preuves de cette supercherie abondent. Concernant les faux en écriture dont il vient d’être question, l’une des meilleures preuves de cette assertion nous est fournie par l’un des Pères de l’Église et non des moindres. Ainsi, Eusèbe (IVe siècle) mentionnant Irénée (IIe siècle) indique que ce dernier tenait des disciples que le Christ « avait prêché jusqu’à sa cinquantième année » !!!? Au IVe siècle, les Pères de l’Église ignoraient donc que le Jésus des Évangiles était mort à trente-trois ans ! »
(Richard Khaitzine, Comprendre l'Alchimie)


« Les juifs en tant que peuple, malgré leurs prophètes et leurs penseurs qui se sont efforcés à toutes les époques de leur histoire de les ramener à la Vérité spirituelle, ont choisi la « voie de gauche », celle de Saturne le « condensateur ». Ne pouvant comprendre le LOGOS ils l'ont attaché à la croix Espace-Temps-Matière, cela non seulement en la personne de « Jésus », mais tout au long du cours des siècles, dans maints domaines où leur influence s'est fait sentir, et ils ont finalement réussi à entraîner dans cette voie la majorité de la race blanche qui se dit « chrétienne », mais qui, par une lâcheté coupable et une méconnaissance fondamentale de la Religion du Verbe, s'est, elle aussi, laissé tenter, enchaîner et dominer par l'appât du pouvoir, de l'argent, des jouissances matérielles, par une orgueilleuse et illusoire confiance dans le raisonnement étayé par des preuves sensibles et en une « science » qui trop souvent ignore tout des Réalités supérieures. Ainsi, la race blanche a renoncé à son « droit d'aînesse », la supraconscience. »
(Marcelle Senard, Le Zodiaque clef de l'ontologie appliqué à la psychologie)


« Il n’est pas étonnant qu’un peuple d’esclaves fugitifs, conquérants d’une terre paradisiaque aménagée par des civilisations au labeur desquelles ils n’avaient eu aucune part et qu’ils détruisirent par des massacres, — qu’un tel peuple n’ait pu donner grand-chose de bon. Parler de « Dieu éducateur » au sujet de ce peuple est une atroce plaisanterie. Rien d’étonnant qu’il y ait tant de mal dans une civilisation — la nôtre — viciée à sa base et dans son inspiration même par cet affreux mensonge. La malédiction d’Israël pèse sur la chrétienté. Les atrocités, l’Inquisition, les exterminations d’hérétiques et d’infidèles, c’était Israël. Le capitalisme, Israël. Tout est souillé et atroce comme à dessein, à partir d’Abraham inclusivement (sauf quelques prophètes). Comme pour indiquer tout à fait clairement : Attention ! là, c’est le mal ! Peuple élu pour l’aveuglement, élu pour être le bourreau du Christ. »
(Simone Adolphine Weil, La Pesanteur et la Grâce)


Toutes les religions de l'antiquité ont adoré la Femme. Le Catholicisme l'avait d'abord supprimée pour lui substituer un homme. Mais, comme l'homme n'adore pas un autre homme, il en est résulté que le Catholicisme n'a été qu'une religion pour les femmes faibles, qui ont adoré le Principe mâle dans Jésus. Quant aux hommes qui ont voulu retrouver une satisfaction à donner à leurs aspirations religieuses, ils ont introduit dans leur religion le culte de la Vierge Marie, pour perpétuer l'antique culte de la Femme.
Lorsque, après la conversion de Constantin, on chercha à introduire la religion nouvelle en Gaule, on comprit qu'il faudrait des siècles pour détruire le culte de la Nature, qui y régnait, et la glorification de Marie, l'antique Déesse égyptienne.
Puis, dans la Gaule, déjà, on attendait la Vierge qui devait enfanter (Virgini Parituræ) ; on était donc préparé à la recevoir, mais on n'attendait pas un homme, d'autant plus qu'on voyait déjà, dans ce culte renversé des Catholiques, qui adoraient l'homme et n'adoraient pas la Femme, la cause des mauvaises mœurs qui régnaient partout et allaient prospérer.


« En réalité, le Pape n'est qu'un homme, investi d'une fonction et de prérogatives sans égales au monde, prévenu de grâces d'état proportionnées à sa position privilégiée, mais auxquelles il peut, comme tout homme ici-bas, fort mal correspondre. »
(Roget Duguet Pseudonyme de l'Abbé Paul Boulin, Autour de la tiare)


On attribue à Paul Diacre la composition de l'hymne chrétienne Ave Maris Stella et de l’hymne de saint Jean-Baptiste : Ut queant laxis resonare fibris.
C'est à partir de la première syllabe de chacun des six premiers hémistiches de cette œuvre qu'au XIème siècle Guido d'Arezzo nommera les notes de Ut à La pour son système de solmisation : 
Ut queant laxis   (Que tes serviteurs chantent)
Resonare fibris   (D’une voix vibrante)
Mira gestorum   (Les admirables gestes)
Famuli tuorum   (De tes actions d’éclat)
Solve polluti   (Absous des lourdes fautes)
Labii reatum   (De leurs langues hésitantes)
Sancte Iohannes.   (Saint Jean)
La note SI, qui est composée des deux initiales du dernier vers de l'hymne, Sancte Iohannes, ne sera ajoutée qu'à la fin du XVIe siècle.
« Paul Diacre avait conçu la gamme musicale avec pour point de départ non pas la syllabe DO (Dominus pour Jésus), mais UT, point de départ de l'homme tel qu'il est né de la femme dans toute son imperfection. Il choisit ainsi la syllabe UT, du mot Uterus, organe de la gestation, précisément pour souligner la condition imparfaite, commune à tous les fidèles comme à tous les hommes, afin de les orienter sur les traces de saint Jean, au sujet duquel Jésus a dit : « en vérité je vous le dis, parmi ceux qui sont né de femmes, il n'en est point paru de plus grand que Jean-Baptiste ». Ainsi, UT (Uterus) symbolise la porte de la naissance selon la chair, et SI la porte de la deuxième Naissance, celle selon l'Esprit, sans laquelle l'homme ne peut pas voir le royaume de Dieu. La gamme ascendante de Paul Diacre comprend donc une octave de régénération, allant de la naissance sur la terre à la naissance dans les cieux. »
(P. Noyrigat)

« Il y avait au moyen âge une expression dans laquelle les deux aspects complémentaires de l’autorité se trouvaient réunis d’une façon qui est bien digne de remarque : on parlait souvent, à cette époque, d’une contrée mystérieuse qu’on appelait le « royaume du prêtre Jean. » »
(R. Guénon, Le Roi du Monde)


En attendant que le Roi s’éveille
Ce qui ne dépend
De personne au monde
Le seul devoir
La seule besogne
Et la seule voie
Est
La recouvrance des principes

C’est seulement lorsque la chrétienté
Cesse d'être royale
Qu’elle cesse d'être chrétienne.
Il en va de même sous tous les cieux
Dans toutes les formes.
La Royauté
Garde la doctrine
Par action de présence.

Ainsi,
Que nul ne se demande
Où retrouver de tels rois
Ce serait une vaine quête.
Car le Roi
Est le Soi.
Et ce n’est pas ailleurs
Qu’en toi-même
Que doit d'abord être restaurée
L ’Universelle Monarchie.
(Henry Montaigu, La Sagesse du Roi Dormant)


« À propos des Ordres de chevalerie, disons que l’« Église Johannite » désigne la réunion de tous ceux qui, à un titre quelconque, se rattachaient à ce qu’on a appelé au moyen âge le « Royaume du Prêtre Jean », auquel nous avons fait allusion dans notre étude sur Le Roi du Monde. »
(René Guénon, L'Esotérisme de Dante)

☆☆☆


PRÉAMBULE
Concernant le pape Léon X (1475-1521), les historiens font l'impasse sur un document troublant et fort dérangeant qui tendrait à prouver que les érudits de la Renaissance étaient très sceptiques quant à l'authenticité des écrits ayant présidé à la fondation de la chrétienté et de l'église catholique. Ce document consiste en une lettre adressée par le pape à son ami et ancien secrétaire l'érudit Cardinal Pietro Bembo, qui fréquentait Alde Manuce : « Quantum nobis prodest haec fabula Christi ! »
Traduction : « Combien cette fable du Christ nous est-elle profitable ! ».
Ce texte édifiant et surprenant fait partie des archives de la bibliothèque vaticane (Leonis X Petri Bembi... Epistolarum familiarum ; libri VI ; Venise, 1552). Une opinion aussi péremptoire et définitive de la part d'un pape oblige à réviser tout ce que nous croyions savoir de l'histoire des hommes, des religions et des arts qui en furent les supports.
(Richard Khaitzine, La Joconde, histoire, énigmes et secrets)

Conseils que des cardinaux donnèrent au Pape Jules III lors de son élection en 1550, quelques années après l'invention de l'imprimerie qui permit une diffusion massive de la Bible auprès du peuple (Source : Feuille Bibliothèque Nationale 1089. Vol II ; P.641-650 - Référence Fond Latin N° 12558. Année 1550) :
« La lecture de l'Evangile ne doit être permise que le moins possible surtout en langue moderne et dans le pays soumis à votre autorité. Le très peu qui est lu généralement à la messe devrait suffire et il faudrait défendre à quiconque d'en lire plus. Tant que le peuple se contentera de ce peu, vos intérêts prospéreront, mais dès l'instant qu'on voudra en lire plus, vos intérêts commenceront à en souffrir. Voilà le livre qui, plus qu'aucun autre, provoquera contre nous les rébellions, les tempêtes qui ont risqué de nous perdre. En effet, quiconque examine diligemment l'enseignement de la Bible et le compare à ce qui se passe dans nos églises trouvera bien vite les contradictions, et verra que nos enseignements s'écartent souvent de celui de la Bible et, plus souvent encore, s'opposent à celle-ci. Si le peuple se rend compte de ceci, il nous provoquera jusqu'à ce que tout soit révélé et alors nous deviendrons l'objet de la dérision et de la haine universelle. Il est donc nécessaire que la Bible soit enlevée et dérobée des mains du peuple avec zèle, toutefois sans provoquer de tumulte. »
Sans la référence sus-indiquée ainsi que l'article consacré à l'Histoire des hébreux, on pourrait presque reprocher à ce texte de n'être qu'un vulgaire « copié-collé » extrait directement des « Protocoles des Sages de Sion »... À moins qu'il ne s'agisse du « Monita secreta » de l'Ordre des Jésuites.


Petite et accipietis, quaerite et invenietis, pulsate et aperietur vobis... Pax in terra hominibus bonae voluntatis.





À vous les femmes, il revient d'être sentinelles de l'invisible
(Jean-Paul II, Lourdes, 15/08/2004)




Ce ne fut que l'an 325 que la secte catholique, qui avait complètement dénaturé le Christianisme depuis Paul, s'installa en maîtresse à Rome



Il manque à l'histoire des religions un grand chapitre : celui qui doit être consacré à l'origine réelle du Christianisme.
Cette science n'existe pas. Les vraies origines chrétiennes sont inconnues, et les Eglises diverses qui se rallient à ce titre ne désirent pas qu'on les connaisse.
René Guénon nous rappelle « l’obscurité presque impénétrable qui entoure tout ce qui se rapporte aux origines et aux premiers temps du Christianisme, obscurité telle que, si l’on y réfléchit bien, ajoute-t-il, paraît ne pas pouvoir être simplement accidentelle et avoir été expressément voulue » (Aperçu sur l'ésotérisme chrétien).
L'histoire réelle du Christianisme n'a rien de commun avec le récit qui nous a été donné sous le nom de Nouveau Testament.
Derrière ce Livre, caché par lui, est l'histoire d'un mouvement de rénovation sociale, grandiose, extraordinaire, d'une haute portée, qui brilla sur le monde pendant deux ou trois siècles, mais qui fut renversé, dénaturé et caché par des faussaires qui en firent une caricature grotesque et voulurent avec cela dominer le monde.
Dans ce vaste réseau d'intrigues, que nous allons démasquer, presque toutes les personnalités ont été dénaturées. Le mensonge a triomphé et la réalité a disparu sous l'amas d'absurdités qu'on lui a substituées.
La science religieuse des falsificateurs n'a été qu'une collection de mystères, jamais expliqués clairement, mais remplis de sous-entendus et de malentendus, de paraboles obscures, de rapprochements de termes sans signification, de jeux de mots pour les foules avides d'erreurs.
Il y a cependant, sous ce fatras, quelque chose de grand à étudier.
C'est à cette étude que nous consacrons ces lignes.


« Les défenseurs de l’historicité de Jésus doivent considérer sérieusement l’importance de leur position… Ils courent le risque de soutenir les titres historiques d’une personnalité qui peut se trouver entièrement différente de celle qu’ils imaginaient lorsqu’ils prirent sa défense. »
(Albert Schweitzer)


PREMIER SIÈCLE DE NOTRE ÈRE
Une ère historique commence. Nous pouvons l'appeler « le temps de la folie et de la cruauté ».
La première année de l’Ère, dite chrétienne, a été appelée « Anno Domini » (année de la domination).
C'est, en effet, la domination des faibles par les forts, de l'Esprit par la brutalité, qui commence.
Nous sommes à l'Aurore d'un monde nouveau, nous allons avoir à rectifier l'histoire mensongère qu'on nous a enseignée et à mettre en évidence le plus terrible des cataclysmes moraux que l'humanité ait subis, la plus grande des révolutions qui, par une antithèse qui est frappante, s'appelle « une religion », alors que son œuvre a été l'effondrement de « LA RELIGION ».
L'Eglise a elle-même, bien souvent, écrit son histoire. Ses adversaires ont eux aussi relaté ses luttes, ses ambitions et ses crimes. Et cependant la vérité qu'il fallait dire n'avait pas encore été écrite. Il restait donc à faire une œuvre plus utile peut-être que toutes celles qui ont été livrées à l'impression, celle qui devait expliquer comment le mal profond dont souffre l'humanité est venu d'un régime dit religieux, mais en réalité formidablement athée.
Terrible histoire que celle qui va nous montrer tout le passé glorieux de la Terre effacé, toute l’intellectualité torturée par un nouveau régime social, fait de bêtise, de cynisme et d'hypocrite justification.

LA FIN D’UN MONDE
La philosophie de l'homme qui avait étouffé la science de la Femme avait fait naître un tel malaise dans les esprits que partout on attendait un retour à la raison primitive.
La résurrection de la Déesse, qu'on espérait, devait faire cesser la domination de l'homme perverti. C'est en ce sens qu'on annonçait « la fin du monde » ; on entendait par là un changement de régime social.
Rappelons que le terme « Déesse » désigne le nom générique de toutes les femmes supérieures et qui n'indiquait alors que les qualités morales inhérentes à la Nature du sexe féminin ; rien de surnaturel.
Cette attente était devenue générale, quoique les hommes ne la comprissent pas dans le même sens que les femmes, qui les premières en avaient parlé. Les hommes répétaient les mots, les phrases, qui étaient courants dans les conversations, et prenaient pour eux ce qui avait été dit pour l'autre sexe, d'autant plus que la corruption, qui grandissait avec le despotisme, faisait perdre à la femme son autorité morale.
Plutarque nous apprend que, au moment où Marius, annonçant les Césars, s'apprêtait à bouleverser la constitution romaine, les haruspices d'Etrurie avaient été consultés sur divers prodiges : « Les habiles dans la science des Etrusques déclarèrent que ces prodiges annonçaient l'avènement d'une autre race d'hommes et le renouvellement du monde. Car il y a en tout, disaient-ils, huit générations d'hommes, de vie et de mœurs toutes différentes, à chacune desquelles est assignée une durée que la Divinité détermine par la révolution d'une grande année. Quand l'une prend fin et que l'autre va commencer, il se produit quelques signes merveilleux sur la terre et dans le ciel, montrant clairement, à ceux qui ont étudié et pénétré ces mystères, qu'il est né une humanité différente de celle qui la précède et moins aimée, ou, au contraire, plus aimée des Dieux. »
Ce passage se rapporte à l'année du premier consulat de Sylla (88 avant notre ère).
Dans Ovide, il est dit : « Toute race vivante sera renouvelée et le ciel donnera à la terre une humanité née sous de meilleurs auspices et qui ignorera le crime. Mais celle-là non plus ne conservera pas longtemps son innocence et elle doit la perdre en vieillissant. »
Tous les auteurs du temps étaient hantés de la même idée.
Lucrèce annonce la fin du monde comme prochaine.
Sénèque en dit autant, et il annonce que cette humanité condamnée va faire place à une autre plus innocente et plus heureuse, du moins pour un temps.
C'est l'ancienne idée des prophétesses dont l'écho était arrivé jusqu'à Rome, à moins que les Romaines, elles-mêmes, aient fait les mêmes vœux que les femmes israélites, ce qui est probable.
Virgile annonçait une ère de paix et de félicité à laquelle devait présider un « fils des Dieux », c'est-à-dire un régénérateur béni par eux dès sa naissance, qui établirait la paix universelle et avec qui naîtrait et grandirait l'Âge d'Or.
On retrouve dans Virgile les idées d'Isaïe. Dans une églogue, il est dit :
« Une nouvelle série de siècles va commencer : voici venir une Vierge, une nouvelle création descend du ciel. »
L'âge de fer est fini et nous allons revoir l'Âge d'Or.
« Les traces de nos crimes seront effacées et la terre sera délivrée de sa longue épouvante. Le serpent va mourir. » (Eglogue à Pollion.)
Qui sera ce sauveur ?
Du temps des Eglogues, c'était « le premier enfant venu de noble race à qui il plaisait à un poète de prédire une belle destinée ». Puis, du temps des Géorgiques, ce fut Octave. « Ah ! Que ce noble jeune homme vienne enfin au secours du monde détruit ! Ne lui refusez pas cette gloire. »
Le Sunnite croit que son Mahdi, prophète inspiré, doit vaincre l'Antéchrist, et fonder l'empire universel.
Le Chiite continue à croire à l'incarnation future de l'Imam.
Les femmes s'en mêlaient ; des inspirées vivaient dans une exaltation prophétique qui dura pendant toute la crise religieuse qui enfanta le Christianisme.
Rome était pleine de gens qui prophétisaient. On attendait la fin de la terre, soit par le feu (fin physique), soit par un déluge suivi d'une régénération.
Les Oracles sibyllins avaient annoncé un temps de destruction et de ruine et ce sont eux qui avaient dit la vérité.
Bien loin d'être une ère de paix, c'était une ère de guerre qui allait s'ouvrir ; loin d'être le triomphe de la justice, on allait voir l'injustice régner souverainement et répandre partout la douleur et les gémissements. Le mal grandissait et la nouvelle race d'hommes annoncée comme devant régner devait être plus mauvaise que toutes celles qu'on avait vues jusque-là. C'est la puissance romaine qui avait ouvert cette ère du mal qui devait se continuer dans la puissance de l'Eglise et laisser dans l'histoire une tache de boue et de sang.
Les métaphores par lesquelles on avait annoncé la fin du monde avaient été mal interprétées. Ainsi, quand les prophètes avaient dit que les fondements de la terre allaient s'ébranler, cela s'appliquait aux institutions sociales qui allaient être attaquées et détruites, et non au globe terrestre et à ses conditions physiques.
Quand ils avaient dit que le soleil, la lune et les étoiles allaient s'obscurcir et s'éteindre, cela se rapportait aux lumières de l'intelligence comparées aux astres du ciel et qui (suivant l'expression antique) allaient être mises sous le boisseau par l'homme pervers.
Et c'est bien ce qui se produisit, puisque les conquérants qui arrivaient au pouvoir avaient toujours pour premier soin d'étouffer la pensée, souvent même de faire brûler les livres dès qu'ils prenaient possession du trône.
Toutes les métaphores annonçaient le renversement du « monde intellectuel » et le règne de la brutalité.
Ainsi, quand Isaïe dit, apostrophant Babylone : « Brillante étoile, comment es-tu tombée du ciel ? », elle fait une allusion à la ruine du règne de l'Esprit féminin en Chaldée. Ce style était celui de l'époque.
Cicéron écrit à Atticus, en parlant de Pompée déchu de sa popularité et de sa grandeur : « En effet, il était tombé de la hauteur des étoiles. »
Cérinthe, Juif d'Antioche, avait inventé le millénarisme ; il annonçait la fin prochaine du monde et le retour du Christ sur la terre, pour y exercer sur les justes un règne temporel de mille ans, pendant lequel les saints jouiraient ici-bas de toutes les voluptés sensuelles. C'était la doctrine de Krishna mal interprétée, intervertie, donnant au sexe masculin les immunités du sexe féminin.

LA RÉSURRECTION
En même temps qu'on annonçait un Messie, on annonçait une « résurrection » (mot qui vient de re-surgere, surgir de nouveau).
Et les bons esprits entendaient par là le retour de la Femme à la vie sociale afin de faire cesser les calamités amenées par le règne de l'Homme. Mais cette idée simple, inséparable de celle du Messie, finit par prendre une forme surnaturelle. La Déesse antique, la Femme du passé éloigné, était devenue pour l'homme un Esprit sans corps. (On l'avait tant représentée par des têtes d'anges munies d'ailes et volant dans les airs !)
Aussi la Résurrection que les exaltés attendaient était celle d'un Esprit plutôt que celle d'un être réel. Du reste, c'était l'époque du merveilleux le plus extravagant, on croyait à tout excepté au réel. Et cela n'est pas étonnant ; la Femme n'était plus écoutée, n'était plus comprise, et c'est par des divagations qu'on voulait expliquer le verbe lointain de celles qui avaient parlé.
L'idée de la Résurrection de la Femme était partout dans les prophètes ; celle d'une Résurrection surnaturelle n'était nulle part. Et comment y aurait-elle été, puisque les femmes prophétesses ne connaissaient pas le surnaturel que l'homme inventa plus tard ? Mais ceux qui avaient révisé les Écritures avaient effacé les noms féminins. Dès lors, comment comprendre que c'était d'Elle qu'il s'agissait dans les rêves d'avenir qui avaient été faits ?
Les savants ont considéré l'idée de la résurrection comme une rêverie orientale, parce qu'ils n'ont pas compris le vrai sens du mot « résurrection », qui est le retour d'un régime, non d'un homme.
Il est bien certain que l'idée est orientale. Toute l'Asie, avant l'Europe, a attendu le retour de la Déesse, et nous voyons une croyance mazdéenne affirmer la Résurrection des morts (des femmes mortes socialement). Là, ce n'est pas non plus la résurrection des individus, mais la résurrection d'une autorité. C'est une idée abstraite dont on fait une idée concrète.
Mais la misogynie était si violente dans le cœur de l'homme, à cette époque, qu'il ne voulait pas comprendre cette signification du mot « resurgir », et probablement la niait quand les femmes l'expliquaient. Il voilait, sous une idée absurde, une réalité gênante.
Du reste, la femme était déjà assez avilie pour qu'on ne comptât plus sur Elle, ni avec Elle. On l'avait mise à l'écart. « Un oint a été retranché », avait-on déjà dit depuis longtemps.
L'homme avait pris le grand rôle dans la société, il avait si bien fait régner ses idées masculines qu'on avait perdu de vue que c'était justement pour cela que le monde féminin attendait un « sauveur ».
Dans l'esprit de la Femme, il s'agissait, non d'un être surnaturel, mais d'une femme comme Myriam, comme David, venant une fois de plus formuler la « loi morale », la donnant de nouveau aux hommes ; de là le mot de Rédemption.
L'Oint qu'on attendait pour délivrer « les bons » n'était pas un personnage qui allait ressusciter sous une forme humaine et qui, dans une seule existence, allait souffrir et mourir pour les péchés du genre humain ; c'est dans le passé que l’oint avait souffert et qu’il était mort, on n'attendait pas qu'il ressuscitât pour souffrir de nouveau, mais, au contraire, pour régner dans sa gloire.
Les épreuves douloureuses subies par la Femme dans le passé devaient cesser au moment de sa résurrection.
On répète encore tous les jours que les Juifs ne pouvaient comprendre un Messie souffrant et humilié.
Quand on a fait la légende de Jésus, on a rapproché les temps et résumé dans une seule vie ce qui avait duré des siècles. On a fait du passé un futur quand on a annoncé un Messie qui viendrait souffrir les douleurs et les humiliations de la Femme.

L’ANDROCRATIE ROMAINE
C'est par les yeux, par les trophées, les emblèmes, qu'on faisait entrer dans les esprits l'idée de la gloire masculine, qu'on ennoblissait le patriotisme, cette glorification du règne de l'homme et de ses conquêtes. « C'est toujours aux époques de décadence, nous dit M. Grillot de Givry (Le Christ et la patrie), que se manifeste cette hypertrophie du sentiment patriotique, lorsque les peuples ne croient plus à leurs dieux, à leurs mystères, à leurs prophéties ; lorsqu'ils ont perdu le sens des légendes ancestrales ; lorsqu'ils se rient du ciel et que la voix des initiés se perd dans le bruit des négations. »
Sur les temples, sur les fontaines, sur les portiques, les théâtres, les marchés, sur le socle des statues, on inscrivait des résumés de l'histoire de l'homme conquérant et triomphant, qu'on faisait glorieuse alors qu'elle était inique.
Tous les mâles statufiés avaient des biographies gravées sur le marbre, qui stimulaient les autres, qui créaient l'envie, invitant à la surenchère...
Même hors les villes, le long des routes, on trouvait des traces de la glorification du règne de l'homme, et sur les tombeaux les épitaphes en faisaient foi.
On ne voulait laisser perdre aucun fait de la puissance masculine.
Quand le Sénat s'assemblait, on rappelait le souvenir de tous les Romains qui avaient participé au pouvoir, et, pour que la trace en restât dans l'histoire, on ajoutait à leur cortège tous ceux dont les aïeux mâles avaient fait quelque chose.
La famille, constituée sur le régime paternel, glorifiait, dans des espèces de musées familiaux, les ancêtres guerriers ; aux funérailles, on portait leur image faite de cire, en grande tenue et revêtue des insignes du commandement ou du triomphe.
C'est ainsi qu'on enseignait aux masses, à la jeunesse, aux femmes !... à glorifier l'homme ; aux esclaves, aux faibles, à le craindre, mais peut-être aussi à le détester.
Et les Femmes, dans ce régime nouveau, étaient aussi avilies que les hommes étaient élevés.
Les plus grandes figures féminines, loin d'avoir, dans l'histoire, l'éclat des grands hommes qui se glorifiaient mutuellement, étaient enveloppées d'obscurité, le plus souvent anonymes ; leur modestie naturelle les avait diminuées, on l'exagérait encore, tant on les faisait petites. Elles paraissent même abjectes, suivant la nouvelle morale qui avilissait la grandeur intellectuelle et ne glorifiait que l'orgueil.
C'est l'époque où la Femme avilie se débattait contre ceux qui voulaient l'asservir. Triste histoire, terrible épopée d'une race de captives et d'esclaves, qui nous montre la Gynécaïa, cette belle harmonie féminine, comme dit Baschofen, finissant avec Cléopâtre, qui semble marquer la fin du règne de la Femme.
C'est alors que ceux qui protestent contre le régime nouveau vantent les vertus antiques, celles de l'ancien régime.
Les modernes ne doivent pas faire d'anachronisme à ce sujet : la vertu antique ce n'est pas celle de Rome et de la Grèce, c'est celle du « Matriarcat », qui, du temps de Rome et de la Grèce, était déjà antique.
Et, pendant que les Romains affirment ainsi la gloire de l'homme, ils se figurent qu'elle est éternelle.
Jupiter, suivant Virgile, leur a donné la domination qui ne finira pas. « A tout jamais, suivant Horace, on verra monter sur les marches du Capitole le Pontife et la muette Vestale. »
Sera-t-elle toujours muette, la Femme ? Là est la crainte perpétuelle ; aussi, que de crimes pour l'empêcher de parler !...
On construisait des écoles pour enseigner les idées masculines, des théâtres pour amuser le peuple et donner à la nation l'illusion de la vitalité intellectuelle, mais aussi des routes stratégiques pour porter par les armes la nouvelle légalité aux nations rebelles qui refusaient ce nouveau Droit.
Singulière éducatrice que Rome, qui enseigne aux hommes l'orgueil et qui appelle le triomphe de la force un droit !
Adieu la paix, les lois naturelles, la vie de l'esprit ; tout cela devait sombrer devant « la loi de l'homme », tout cela devait être renversé. L'antique sagesse féminine allait devenir la virtus du mâle, sa qualité virile.
Mais avec ce renversement naissait l'hypocrisie sociale, et le désordre ; c'est pourquoi, dès lors, on ne parla plus que par sous-entendus.
Quel martyre que celui des femmes de cette époque, alors que le Romain ne trouvait qu'un mot à dire à celle qui souffrait : « Oh ! Que tu me plais dans les larmes ! »
Donc la Femme pleurait dans cette société romaine où le mal sous toutes ses formes triomphait.
Et Vico a pu dire : « Dans le langage antique, qui dit vaincu dit Femme. ».
Ramsès II gravant ses victoires donne au vaincu le sexe féminin.
Tout cela prouve bien que c'est le régime gynécocratique qui finit, c'est l'Androcratie qui commence. Aussi un profond découragement éteint tous les élans de la Femme. On ne trouve presque pas de femmes de lettres dans Rome à cette époque, parce que déjà elles se cachent dans l'anonymat ou se couvrent d'un pseudonyme.
Mais les historiens se plaisent à nous montrer des dévouées, des sacrifiées qui se font le caractère qui plaît à l'homme : Clélie, Lucrèce, Virginie, Cornélie, Véturie, Porcie, et cette Arrie que les hommes trouvent sublime parce que, voyant son époux Poetus condamné par Tibère à se donner la mort, elle se frappa la première et lui tendit le poignard en lui disant : Poete, non dolet. (Pœtus, cela ne fait pas de mal.)
Cependant, toutes les femmes ne renoncent pas si facilement à la vie, ni même à la lutte ; seulement, elles vont être prudentes dans les moyens à employer, et Michelet nous dit à propos de leur influence sur l'homme :
« Les mœurs se rient des lois à Rome ; la femme est pauvre par écrit ; en fait, elle est très riche, elle agit et gouverne tout. Tullie, Volumnie, Cornélie, Agrippine, nous montrent assez qu'ici elles sont reines, tout comme les Marozia, les Vanozza du moyen âge. Ce sont elles qui, par deux fois, minèrent Rome en dessous. Au moment où celle-ci frappait Carthage, repoussait l'Orient, elles lui défaisaient sa victoire, introduisaient la nuit, dans la ville endormie par l'orgie orientale, y mettaient le cheval de Troie. La beauté de louage, la grande Dame puissante, à elles deux changeront le monde. » (La Bible de l’Humanité)
Non, ce n'est pas la Femme qui va changer le monde, c'est l'homme. C'est lui qui va prendre la place prépondérante partout et avilir la Femme, sans comprendre l'énormité de son crime.
L'homme prend chez les Romains une si haute dignité que l'on donne au fils qui naît quatre noms, le neuvième jour de sa naissance : nomen, praenonien, cognomen (surnom), agnomen (second nom).
Quant aux filles, on leur donne seulement un numéro d'ordre.
Depuis César, Rome vivait plongée dans un abîme de douleur.
Plus de confiance, ni dans la loi ni dans les mœurs. Partout régnait un égoïsme féroce ; les dévastations, les massacres, les coups de fouet, les viols de femmes étaient choses courantes.
Le césarisme considérait les esclaves comme les ennemis publics (hostes).
Sous Auguste, on décida que, si un maître était assassiné, tous les esclaves vivant chez lui seraient mis à mort, sans distinction de sexe. En un jour on en égorgea 400.
Caligula, Claude, Néron, étaient des fous tenus en échec par une philosophie qui était elle-même plus folle que sage. C'est la censure des écrivains qui représentait l'opinion, qui faisait dans ce monde dissolu ce que fait la Presse dans le monde moderne.
Mais l'Empire romain ne cessa pas un instant d'être inquiété par les protestations des opprimés, les plaintes des femmes, répétées par les hommes mécontents, toujours prêts à la révolte.
Dans la Rome impériale, où le burlesque donnait la main à l'horrible, il était défendu de rappeler le régime gynécocratique et la gloire passée des femmes.
Ovide, pour avoir parlé de l'Âge d'Or, mourut exilé à Tomes, près de la mer Noire. Il vivait au siècle d'Auguste.
Les dogmes étaient noyés dans la foule innombrable des superfétations parasites et des rêveries des rabbins, des Hermès, des Hiérophantes.
Dans ce chaos, toute vérité disparaissait, on avait perdu toutes les anciennes connaissances et, dans la foule des nouveaux dieux, on avait perdu la notion de la vraie Divinité Féminine.
« Le silence, dit Jamblique, était l'unique culte rendu à l'Unité individuelle » (l'entité féminine).
Pendant ce temps-là, on masculinisait tous les anciens titres pour donner à l'homme toutes les puissances.
Depuis qu'on avait annoncé qu'une vierge allait enfanter, une Emperière dont on annonçait le retour, cette place à prendre hantait le cerveau des hommes, et c'est ce qui fit adopter le mot empereur (masculin d'Emperière) (1) qu'on appliqua à une caste nouvelle de dominateurs, qui fondèrent l'Empire romain.
Auguste le premier prit ce titre qui jusque-là avait indiqué le privilège sexuel de la Femme.
Mais, s'il avait pris le nom, il n'avait pas pu prendre, en même temps, l'organisation physiologique et psychique de l'autre sexe.
Si bien que ce règne nouveau de l'homme ne fut qu'une parodie de plus, et la plus infâme ; on allait voir la corruption romaine descendre du haut des sept collines impériales et inonder le monde.
(1) « La pyramide n'est pas complète sans son sommet ; la hiérarchie n'existe pas lorsqu'elle est incomplète. S'il n'y a pas d'Empereur, tôt ou tard, il n'y aura pas de rois non plus. S'il n'y a pas de rois, tôt ou tard, il n'y aura pas de noblesse non plus. S'il n'y a pas de noblesse, tôt ou tard il n'y aura pas de bourgeoisie ni de paysan, non plus. Voilà comment on arrive à la dictature du prolétariat, de la classe hostile au principe hiérarchique qui est cependant le reflet de l'ordre divin. C'est pourquoi le prolétariat professe l'athéisme.
« L'Europe est hantée par l'ombre de l'Empereur. On sent son absence aussi vivement que l'on sentait autrefois sa présence. Le vide de la plaie « parle ». Ce qui nous manque sait se faire sentir.
« Napoléon, témoin oculaire de la Révolution Française, comprit la direction qu'avait prise l'Europe, la direction vers la destruction complète de la hiérarchie. Et il sentait l'ombre de l'Empereur. Il savait que ce qu'il fallait restaurer en Europe, ce n'était pas le trône royal de France, car les rois ne peuvent exister longtemps sans Empereur, mais bien le trône impérial de l'Europe. Ainsi décida-t-il de combler la lacune. Il se fit Empereur et de ses frères fit des rois. Mais c'est à l'épée qu'il se confia. Au lieu de régner par le « sceptre », il prit le parti de régner par l'épée. Mais « tous ceux qui prendront l'épée périront par l'épée ». Hitler , lui, eut le délire du désir d'occuper la place vide de l'Empereur. Il crut pouvoir établir « l'Empire millénaire » (« das tausendjährige Reich ») de la tyrannie au moyen de l'épée. Mais une fois encore « tous ceux qui prendront l'épée périront par l'épée.
« Non, le poste de l'Empereur n'appartient plus ni à ceux qui le désirent ni au choix des peuples. Il est réservé au choix du ciel seul. » (Auteur anonyme, « Méditations sur les 22 arcanes majeurs du Tarot », à propos de la Lame IV « L'Empereur »)

LES SECTES JUIVES ET ISRAÉLITES
La mauvaise traduction du Sépher (la Genèse biblique) en grec avait jeté un nouveau ferment de discorde dans le monde.
D'altération en altération, le sens des mots hébraïques devenait de plus en plus incertain, ce qui amena de violentes disputes sur l'interprétation qu'on donnait au Sépher. Car, pendant qu'on altérait ainsi les textes, il y avait la loi orale, la primitive tradition, que se transmettaient toujours les fidèles Israélites.
Ceux-là voulaient l'imposer, la faire entrer dans l'explication des textes.
Ceux qui avaient intérêt à dissimuler la vérité niaient l'existence de cette loi, rejetaient l'ancienne tradition et voulaient qu'on s'en tînt aux explications grossières données dans la nouvelle rédaction des Livres.
Plusieurs sectes naquirent de ces disputes, entre autres celle des Pharisiens et celle des Sadducéens.

LES SADDUCÉENS
Les Sadducéens étaient l'élite intellectuelle et morale de la nation, ceux qui conservaient les saines idées de la science antique et cherchaient à empêcher l'invasion du surnaturel. Ils ne croyaient ni à l'au-delà, ni aux esprits, ni aux anges.
Ils voyaient l'immortalité dans la durée du principe de la vie chez la Femme, dans son intégrité vitale, et non dans une existence future qu'ils niaient. Ils ne voyaient, dans ce que les Pharisiens appelaient l'âme, qu'une conséquence de l'organisation du corps, une faculté passagère qui devait s'éteindre avec lui.
Et ils montraient que le Sépher n'avait nulle part annoncé une immortalité postérieure à la vie actuelle. Ils rejetaient toutes les écritures révisées ou ajoutées par les Prêtres pour introduire des croyances nouvelles (1).
Les Sadducéens s'alliaient aux Samaritains qui avaient conservé intacts les enseignements du Sépher.
Ils formaient une aristocratie dont l'influence ne s'étendait pas sur le peuple corrompu et disposé à admettre toutes les erreurs nouvelles ; aussi le nombre des Sadducéens n'était pas grand, mais c'étaient les premiers de la nation.
D'après les Actes des Apôtres, Caïphe, le Grand-Prêtre du premier siècle, faisait partie de cette secte, ainsi qu'Ananias.
Prideaux pense que cette secte, qui était la religion des grands, a fini à la destruction de Jérusalem ; il ajoute qu'il n'en est plus parlé depuis ce temps-là.
D'après Fabre d'Olivet, le nom donné aux Sadducéens dérive de Shad, qui exprime diffusion, propagande, et aussi la nature productrice dont la mamelle est le symbole.
Ce nom signifie proprement « physicien ou naturaliste », c'est-à-dire savant. Mais le Talmud prétend que les Sadducéens ont tiré leur nom de Saddoc, qui aurait été leur fondateur, et qui était le disciple d'Antigone Sochœus, qui vivait peu de temps après Alexandre.
(1) C'est pendant la grande lutte pour le droit paternel que l’homme nie les conditions physiologiques de la Femme, et prétend que son âme à lui est immortelle aussi. Ainsi il déplace la source de l'immortalité, qui n'est Plus, pour lui, dans la Femme, mais dans le principe qui engendre, lequel, il est vrai, se perpétue à travers la descendance.
Il se revêt de la gloire de la Divinité, et cette idée est défendue avec un tel fanatisme par les hommes que Platon dit : « La croyance à l'immortalité est le lien de toute société ; brisez ce lien et la société disparaît. »
Il s'agit, bien entendu, de la Société masculine, car la Société gynécocratique avait nié l'immortalité surnaturelle et donnait à ce mot « immortalité » un sens physiologique.

LES PHARISIENS
Les Pharisiens, plus nombreux, étaient composés de gens plus préoccupés de paraître que d'être des êtres supérieurs.
Leur nom signifie, en général, ce qui est élevé, illuminé, glorieux, illustre.
II dérive de la racine « Aor » (la lumière), régie par l'article « Phe », qui exprime l'emphase ; de là Phoer, une auréole, une tiare (peut-être aussi phare).
Les docteurs lui donnent une autre origine ; ils font venir Pharisiens de Phares qui signifie séparer, ce qui indique qu'ils se sont séparés des anciens orthodoxes, appelés Am haaretz, le peuple de la terre, qu'ils regardaient avec un souverain mépris.
Ce sont donc des orgueilleux qui créent une fausse aristocratie, basée sur une prétention hypocrite de posséder une sainteté supérieure à celle des autres.
Ils se donnaient comme des êtres dignes de vénération et d'admiration. Ils étaient fort unis entre eux et donnaient à leur vie tous les dehors de la sainteté.
Ils se piquaient d'une extrême exactitude dans la pratique de la Loi, (non celle du Sépher mais celle d'Esdras) ; ils donnaient la dîme, non seulement des gros fruits, mais encore des moindres herbes, du cumin, de la menthe, du millet.
Ils avaient un très grand soin de se laver, de purifier leur corps, leur vaisselle et tous leurs meubles.
C'étaient des pratiquants fanatiques de la religion judaïque ; ils observaient le Sabbat juif avec scrupule, ils jeûnaient souvent et affectaient de porter des totaphoth ou téphilim ; on appelait ainsi des écriteaux contenant quelques passages de la Loi (d'Esdras), attachés sur le front, ou au bras gauche, suivant le précepte des Prêtres d'avoir toujours la Loi de Dieu devant les yeux ou entre les mains.
Le peuple était plus favorable aux Pharisiens qu'aux Sadducéens, à cause de leur extérieur de grande piété.
Dans Matthieu (VI, 2-5-16), on nous dit : « Les Pharisiens donnaient l'aumône en public, ils priaient dans les places, ils se jaunissaient le visage pour paraître plus grands jeûneurs ; c'eût été leur faire injure que de les toucher étant impur ; et ils tenaient pour tels non seulement les Gentils et les pécheurs publics, mais tous ceux qui exerçaient des professions odieuses. Enfin, la plupart ne montraient de la dévotion que par intérêt. Ils séduisaient par leurs beaux discours le peuple ignorant et les femmes qui se privaient de leurs biens pour les enrichir ; et, sous prétexte qu'ils étaient le peuple de Dieu et dépositaires de sa Loi, ils méprisaient les Grecs et les Romains et toutes les nations de la terre. »
C'est pour cela qu'ils ne voulurent pas payer le tribut aux romains lorsqu'ils en dépendirent.
Ils joignaient aux textes de la Loi les traditions des Prêtres, qui se propageaient sans écritures, et dont certaines, sous prétexte d'expliquer les livres, en cachaient le sens et y mêlaient quantité de superstitions.
Les Pharisiens admettaient la résurrection des corps ; ils croyaient aux anges et aux esprits surnaturels et voyaient dans les Écritures un sens spirituel ; ils traitaient d'allégories toutes les antiques vérités qu'ils ne voulaient plus admettre.
Les Pharisiens ont été continués par les spiritualistes religieux, les Sadducéens par les matérialistes scientifiques.

LES ESSÉNIENS
En face de ces deux sectes rivales, une troisième se forma qui arriva à compter 4.000 membres d'après Philon et Josèphe, et qui était infiniment plus instruite et plus sage ; ce fut celle des Esséniens.
Ces sectaires considéraient que le spiritualisme des Pharisiens tombait souvent dans des visions ridicules, mais que la science des Sadducéens paraissait trop sèche ; ils prirent un terme moyen ; ils conservèrent la lettre et le sens matériel à l'extérieur et gardèrent la tradition et la loi orale pour le secret du sanctuaire.
Les Esséniens formèrent, loin des villes, des sociétés particulières dont le caractère fut celui de la tradition gynécocratique et théogonique, ce qui nous fait croire que cette secte se forma de ce qui restait des fidèles Israélites.
On trouvait des Esséniens partout où il y avait des Israélites, ce qui nous fait supposer que c'était des tribus détruites qu'ils s'étaient formés.
Livrés à l'étude de la Nature, ils ne s'occupaient ni de la politique de leur pays, ni du sacerdoce de la religion juive. Ce peu d'ambition et leur préoccupation des choses de la morale nous confirment dans l'idée que c'était une secte féministe. On faisait d'eux le plus grand éloge.
C'est en Judée, en Syrie, en Egypte qu'on les rencontrait surtout. Attirés par l'éclat de l'Ecole d'Alexandrie, ils s'établirent près de cette ville sur un mont qu'ils appelèrent Moria et qui fut leur principale retraite.
Moria, qui deviendra Maria, est une forme altérée du nom de Myriam. Moria signifiait alors la lumière réfléchie, la splendeur.
On a toujours cru que c'était parmi les Esséniens que la loi orale de Myriam s'était conservée, cette science primitive, cette tradition secrète, que les chercheurs modernes étudient avec tant de curiosité.
On s'est demandé qui avait été le fondateur de la Société des Esséniens, et jamais on n'a trouvé un nom à proposer ; ce fut une fondation anonyme, donc féminine ; les femmes seules exagèrent à ce point la modestie, l'homme signe toujours ses œuvres. Une multitude de faits le prouvent :
1°) L'enseignement donné, qui est la continuation de celui des Prophétesses et des anciennes Prêtresses. Les Esséniens, en effet, passaient pour des Prophètes.
2°) Leur préoccupation de se cacher à l'époque où la femme est persécutée, de se constituer en société secrète, après la captivité.
3°) Leur attitude vis-à-vis du pouvoir masculin qu'ils condamnaient. Proclamant que « la foule impure des Juifs n'était pas le vrai peuple de Hévah » (Strauss) ; leur soin de s'éloigner des agitations effrénées des hommes, de leurs querelles oiseuses, bruyantes et puériles, surtout celles qui régnaient entre les Sadducéens et les Pharisiens. L'insistance qu'ils mettent à parler de « la misère des temps » à une époque où l'homme triomphe, où la femme est vaincue.
4°) Leur opposition au culte masculin des Juifs, l'abolition qu'ils font des pratiques extérieures et brutales instituées par le sacerdoce des Lévites, l'épuration de ce culte, la condamnation des sacrifices d'animaux.
En cela les Esséniens se trouvaient d’accord avec toutes les femmes qui avaient déjà rejeté la religion masculine. Le même esprit de sagesse de toutes ces femmes se retrouve dans la secte des Esséniens, « où s'est réfugié tout ce qui restait, alors de religion sincère et de vraie force morale chez l'ancien peuple de Hévah ».
5°) Les Esséniens ne laissaient à l'homme aucun franc arbitre, aucune liberté de choisir dans aucune de ses actions.
L'homme dépendait de la Raison Divine qui règne dans la Femme et qui devait diriger ses jugements.
C'est de là qu'est venue la discussion sur le libre arbitre, dont on a fait une question de métaphysique, alors qu'elle n'était, d'abord, qu'une question de psychologie sexuelle impliquant la subordination de l'homme à l'esprit féminin.
Les Esséniens connaissaient les propriétés des simples, guérissaient par une sorte de magnétisme physique et psychique tout à la fois, enseignant les lois de la Nature aux malades qui les appelaient, leur faisant connaître les aphorismes de leur haute morale, soignant l'âme autant que le corps.
On croit que le mot Essénien vient de Hasidéens qui signifie en hébreu Saints. De hassidim (ou hasidim) on aurait fait Sâh-ah (soigner), ou bien il viendrait de Asah, guérir. Mais il peut venir aussi de Hâshah, « se taire », Hashaïm, « qui cherche le silence ».
Leur manière de vivre était sans luxe et sans orgueil, ne voulant ni serviteurs, ni esclaves, vivant en communauté et s'habillant de pur lin blanc. Ils s'occupaient de divers métiers, d'agriculture, mais surtout d'éducation. Ils mettaient leurs biens personnels en commun et les revenus de leurs travaux entre les mains d'administrateurs électifs qui présidaient à l'entretien de l'ordre et aux œuvres de charité.
Leur pureté est restée proverbiale, puisqu'on les appelait « les Purs » (Pulchra, dont on fera Pulchérie, nom féminin qui n'a pas de masculin).
L'historien Josèphe rapporte que la secte se partageait en deux branches : l'une qui vivait dans les collèges d'Engaddi, sur les bords de la Mer Morte (ancien refuge des Amazones grecques), et l'autre répandue dans les villes, mêlée à la population, exerçant des métiers, militants moins austères, mais cependant astreints aux règles de l'ordre.
Les Esséniens étaient persécutés par les Judéens orthodoxes de Jérusalem, qui les poursuivaient « au nom de la loi de Moïse » et les classaient parmi les idolâtres, comme du reste tous ceux qui n'admettaient pas leur dogme. « Un prophète ne peut venir de Galilée », disait le Sanhédrin, parce que les Esséniens occupaient surtout la Galilée et la Samarie.
Les Esséniens furent imités par des groupes masculinistes.
Nous retrouvons leur organisation dans des couvents d'hommes sortis des sectes qui se formèrent dans les siècles suivants, mais qui n'auront des Esséniens que la forme, non l'esprit.
Ces faux Esséniens n'avaient pas de femmes parmi eux, passaient une partie de leur temps en prières et en méditations comme les cénobites bouddhistes ou chrétiens, et prétendaient s'interdire toute volupté. (Il y avait cependant, d'après Josèphe, des Esséniens mariés.)
Cette secte de faux saints s'était formée sous l'influence bouddhiste.

ORIGINE LOINTAINE DU CHRISTIANISME
Dans l'article intitulé « De l'Israélisme au Judaïsme », nous avons fait l'histoire de l'origine secrète de la Bible.
Le Christianisme aussi a une origine secrète que nous allons dévoiler maintenant.
Mais, pour comprendre le mouvement qui le provoqua, il faut remonter aux écrits des Prophétesses qui furent les premières à l'annoncer.
Toute la littérature des prophètes est messianique ; c'est une continuelle exhortation adressée au peuple pour l'engager à revenir à Hévah, c'est-à-dire au régime gynécocratique qui doit ramener la paix et la prospérité (1).
Chaque événement malheureux, pour les femmes est suivi de lamentations, de déchirements, de menaces et de promesses.
Durant la période d'anarchie et d'usurpation qui précéda la ruine de Samarie, Osée exprime l'espoir que le royaume d'Israël acceptera le culte de Ihaveh et se soumettra à la maison de Daud - David - (qui personnifie le régime féminin).
Rappelons que le nom de David est la traduction du nom hébreu Daud, nom féminin qui était celui de la dernière souveraine qui fut martyrisée à Jérusalem après y avoir régné 33 ans.
Son nom reste dans l'histoire du peuple d'Israël pour caractériser le règne de la femme, le régime gynécocratique dont l'unique Divinité est la Déesse Hévah, devenue par des altérations successives Ihaveh.
D'autres femmes décrivent l'idéal de bonheur et de paix qui suivra la réunion des deux royaumes et tracent le portrait de l'homme juste et pieux qui amènera cette heureuse réconciliation.
Mais ces espérances n'étaient jamais réalisées, et le royaume d'Israël devait être à jamais détruit et pour longtemps dispersé avant le retour du règne de la Femme encore attendu.
Michée promet que de Bethléem Ephrata sortira « le Régent d'Israël », parce que Daud (David) était de Bethléem. On avait aussi gardé l'idée que le sauveur d'Israël serait un Isaïde, nom d'Isa la Grande.
Jérémie indignée dit : « Ils serviront Ihaveh et leur roi (c'est-à-dire Reine) David, que je leur susciterai. »
Elle montre Rachel, l'ancêtre d'Ephraïm, sortant de sa tombe près de Ramah et pleurant la perte de ses enfants. Jérémie annonce aussi « que David aura une progéniture juste, et qu'il ne lui manquera jamais un successeur assis sur le trône de la maison d'Israël ».
Après le retour de la captivité, on avait adopté l'usage de lire publiquement le Livre de la Loi, et plus tard aussi celui des Prophétesses (devenues des prophètes).
C'est en entendant cette belle littérature, ces idées élevées, que l'imagination se frappa et s'enthousiasma pour les promesses de grandeur et de gloire qui devaient être réalisées par le futur Messie.
On cherchait à les faire naître par une sorte de suggestion ; ces prédictions défi venaient des ordres à exécuter. On voyait dans les prophètes quelque chose de surhumain, l'imagination les ayant grandis de siècle en siècle. Les Prophétesses devenaient des personnages extraordinaires, des voyantes qui avaient annoncé les choses futures, leurs écrits étaient regardés comme des oracles qui ne pouvaient pas manquer de s'accomplir, tant est grand le prestige qui s'attache aux idées qui émanent de l'esprit féminin.
Quand la Rome brutale de l'Homme fut à l'apogée de sa colossale puissance, quand le despotisme masculin eut fait naître une époque d'orgie et de sang, on se souvint de la vieille prédiction annonçant qu'une vierge belle et pure comme la lumière relèverait l'espoir d'une race déchue.
La vieille tradition populaire, perpétuée à travers la mémoire des hommes, annonçait qu'une Femme Messie devait paraître sur la Terre d'infamie.
« Une Vierge viendra qui écrasera la tête du serpent et régénérera la race coupable. »
C'est le Shilo de Jacob ; Le Messie des Oracles ; Le Christos des Chrétiens.
C'est le retour de la Vierge-Mère, qui est au fond de toutes les Théogonies.
Les Druides, avant le Christianisme, élevaient dans les forêts de la Gaule un autel à la Vierge qui doit enfanter (Virgini Parituræ) . (Mais ce qu'elle enfante, ce n'est pas une créature vivante, c'est un livre, c'est une doctrine.)
Les Chinois attendaient le Saint que devaient mettre au jour les régions occidentales de l'Asie.
Les Brahmanes soupiraient après le glorieux avatar de celle qui devait purger le monde du péché, et le demandaient à Vishnou.
Dans les livres de la Sybille de Cumes (contemporaine d'Homère-Hemœra), que lisaient les Romains, et qui étaient si jalousement et si politiquement gardés, on lisait que l'Âge d'Or devait être rendu à la Terre par la Vierge Divine.
(1) « Que Hévah juge les extrémités de la Terre, qu'elle donne la puissance à son roi et exalte la force de son oint ». C'est la première fois que l'idée du Messie apparaît, du temps de Samuel, donc avant David, dont le règne fut une affirmation du pouvoir féminin déjà attaqué.

CHRIST
Avant de commencer l'histoire du Christianisme, il faut savoir d'où vient le nom qui va servir à désigner la doctrine et dont la signification a été si dénaturée par les prêtres des religions modernes.
Burnouf, dans son livre La Science des religions, dit : « Avant d'aborder la question des monuments figurés, je dois encore appeler l'attention du lecteur sur le nom même de Christ et sur la qualité de roi qui l'accompagne. C'est un point controversé parmi les Chrétiens dès l'origine de l'Eglise, les uns entendant cette qualification dans son sens réel, les autres dans un sens figuré, personne ne pouvant dire pourquoi le Christ l'avait reçue et conservée, quand on savait que les Juifs ne la lui avaient donnée que par dérision. »
Quelle est donc la signification de ce nom ?
C'est l'ancien mot sanscrit Çrêyas qui signifie suprématie. L'être appelé Çri, c'est l'être suprême (mais terrestre) ; il indique la suprématie de la Déesse et, par extension, tout ce qui vient d'Elle, comme le bonheur, la bonté, désignant alors « le bonheur suprême », « la bonté suprême ».
II se met devant les noms de femmes et leur donne un caractère d'élévation : Çrî-Krishna. Ce mot entre dans la formation d'une quantité de noms, tels ceux-ci donnés à Vishnou-Krishna :
Çrîdhara, le porteur de bonheur.
- Çrîpati, l'époux de la Déesse Çrî.
- Çrîvatsa, nom de la figure mystique formée de quatre boules en croix et considérée comme un signe de prospérité.
- Çrîvatsabhrit, portant sur sa poitrine le Çrîvatsa.
Mais, si ce terme a glorifié la femme aimée, il sert, en même temps, à avilir la femme détestée, la femme jalousée, il devient alors une ironie, on en fait le mot chriein qui signifie oindre. La personne sacrée, Çrî, devient alors celle qui a reçu l'onction.
C'est dans la réaction masculine, qui met sur le plan sexuel ce que les femmes mettent sur le plan spirituel, que le mot Chri changea de signification ; il ne représenta plus l'Esprit Féminin, mais le sexe féminin qui reçoit une onction, une imprégnation.
On avait dénaturé tous les mots à l'époque du Phallicisme bacchique et mis l'obscénité partout.
Déjà, aux Indes, la Femme qui recevait le soma recevait l'onction, elle était l'oint.
Les Femmes à qui on l'appliquait, par ironie sans doute, pour leur rappeler le rôle que l'homme leur destinait lorsqu'elles voulaient prendre leur élan vers les choses spirituelles, devaient considérer ce terme comme une injure. En effet, il servait à les désigner comme le vase qui sert de réceptacle, le « vase sacré », le « vase d'élection », etc.
C'est par l'onction que les femmes consacraient ceux qui les servaient. Mais d'abord ils ne la recevaient pas, ils la donnaient.
Avec le temps, les idées s'obscurcissent, l'homme, prenant la place de la femme et sa suprématie, voulut aussi recevoir une onction, de là le sacre des rois.
Dans les Psaumes, on trouve le mot oint pour désigner celui qui conduit le peuple au nom de Hévah. On y représente les hommes comme des conjurés contre Hévah et contre son oint. On espère que Hévah délivrera son oint menacé. « Regarde la face de ton oint, tourne le visage en arrière ».
Ce sont les Psaumes qui, dans le monde hellénique, avaient mis le nom de Christ dans toutes les bouches. Ce nom était devenu un idéal flottant, quelque chose d'imprécis, renouvelé plusieurs fois, mais qui n'avait plus de figure concrète.
C'était Krishna, c'était David, c'étaient toutes les grandes femmes qui avaient été crucifiées.
« J'allumerai, dit Hévah, une lampe pour mon oint ».
Ces expressions étaient-elles dans le livre primitif, ou y ont-elles été introduites par ceux qui en firent la révision ?
C'est très probable.
Dans le récit fait dans le livre de Samuel, l’« oint », c'est David.
Quand ceux qui révisèrent les livres voulurent représenter Saül comme un roi, c'est lui qu'ils appelèrent « oint », oubliant sans doute la signification primitive du mot.
Et puis, quand cette appellation sera masculinisée, on la justifiera en créant un nouveau genre d'onction, répandant sur le front le Saint Chrême.
Tout cela constituait une comédie destinée à donner à l'homme l'apparence de la sainteté féminine, et cela devait, peu à peu, faire perdre de vue la signification réelle des choses, d'autant plus que, dans ces travestissements de la pensée, les hommes ne prenaient jamais pour eux que la signification glorieuse des idées, laissant au sexe féminin la signification outrageante qu'ils y avaient ajoutée.
En syriaque, l'« oint » est appelé Mesha, ou Meshiha ; en hébreu Meshiah. C'est de là qu'on fait le mot Messias en latin (Messie).
Et ce mot Messias semble être le substantif de Missa, féminin de Missus, participe passé passif de Mittere (mise).
(Celle qui est mise sur la table ou sur l'autel du sacrifice, la sainte table.) (1)
C'est ainsi que, par une confusion fréquente, on arrive à désigner la table par le mot mesa.
Mais ces expressions devaient être des mots mal vus à l'époque dont nous nous occupons ; on devait les exclure du langage correct et décent parce qu'ils exprimaient un outrage au sexe féminin.
Le Çrî sanscrit vient de la langue celtique, c'est l'abréviation de Kyrie, nom donné aux Déesses, les Val-Kyries.
Ce mot, devenu Kyria en grec, désignera l'être suprême au féminin. Il est resté dans la liturgie catholique, « Kyrie ». Les Grecs le masculiniseront et en feront Kyrios, que l'on traduit par Seigneur. Mais primitivement ce mot n'existe qu'au féminin.
En Grèce, le Kri celtique fut représenté par un monogramme formé de deux lettres grecques, le  X (chi) et le P (ro), enlacées.
La terminaison féminine « I » n'y est pas représentée, mais elle était conservée dans les traditions.
Ce symbole était adopté par un parti nombreux. On le trouvera sur les monnaies d'Hérode le Grand. (Voir le médaillon juif de Madden.)
Mais ce vocable va encore changer de signification en se complétant par l'annexion de nouvelles lettres.
Au Chri primitif, on ajoutera stos et nous aurons Chri-stos.
Voici l'origine de cette modification : La plupart des grandes Déesses de l'antiquité avaient été crucifiées. Krishna est représentée crucifiée dans le temple de Madura. Daud (David) fut crucifiée sur le Mont des Oliviers, mais n'en mourut pas, puisqu'elle dit elle-même dans les Psaumes : « Ils ont percé mes pieds et mes mains. »
On crucifie des femmes en masse dans la forêt de Dodone à l'époque des Bacchanales, et, pour comble d'ironie, c'est sur leur signe sacré, le tau (T) que les Déesses portaient à la main comme signe de suprématie, qu'on les clouait.
Le tau (qui devint la croix) représentait d'abord l’Arbre de vie, le grand secret de l'origine de l'homme trouvée par une femme, la grande Myriam-Hathor, qui avait été tant persécutée et trahie à cause de cette découverte dont on gardait le souvenir dans les « Mystères de Jérusalem ».
A propos de cette première signification du Tau, S. Bernard dit, dans son livre La Révélation : « L'arbre de la sagesse, de la connaissance, l'arbre symbole de vie divine et de salut, est devenu l'arbre de la croix, symbole d'infamie et d'humiliation. La réaction contre le principe féminin est accomplie. Le symbole de l'arbre devient le terme mystérieux et caché, mystère du mystère qui attend son heure marquée pour sa révélation »
En grec, la croix se dit stauros ; on ajouta ce mot au monogramme XP et cela fit Chri-stauros.
C'est ce terme qui devint Christos.
C'est parce que les femmes étaient crucifiées sur leur signe sacré, le T qu'elles portaient à la main, qu'on les appela d'abord Christophoros, et cela signifia Çrî « qui porte sa croix. »
S. Bernard dit encore à ce sujet (La Révélation, p. 192) : « Mais si cette seconde signification, celle de mort et de sacrifice a prévalu, et si elle se change enfin en celle de supplice, de honte et de péché, ne faut-il pas voir en cela une indication de plus qu'il y avait là-dessous la haine d'anciennes idées et de principes qu'on réprouvait maintenant, et que la croix n'était plus pour l'homme des temps ultérieurs que le souvenir de cette doctrine féminine et de son ancienne suprématie religieuse et spirituelle qu'il anathématisait dans le symbole de la croix, devenu l'instrument d'infamie et de condamnation ? »
Ces explications étaient nécessaires pour nous faire comprendre la véritable signification de la doctrine qui va s'appeler le Christianisme.
(1) Dans le Coran, le rite Chrétien de la Messe, dont l'acte central est l'Eucharistie, est symbolisé par la « table servie » (Cor. V, 114).


Le véritable spiritualisme s’occupe exclusivement du développement spirituel de l’homme, de la recherche du « Christ » au dedans, du Logos divin ou de la Parole de l’Eternel. Connaître le Christ c’est entendre la Parole vivante qui parle en nous et qui vient de l’Être divin infini. Ce Christ-là est le véritable Christ ; ce n’est pas celui qu’enseigne l’Église et qui est journellement immolé sur ses autels comme un sacrifice fait à un Dieu jaloux et cruel ; un sacrifice expiatoire pour les péchés du peuple. Cette manière de comprendre le Christ, qui est la doctrine officielle de l’Eglise, a rabaissé le Christianisme, et d’une religion spirituelle qu’il était en a fait une religion matérielle.


LE PREMIER CHRISTIANISME
Qu'est-ce alors que le Christianisme ?
Ce ne fut évidemment pas la doctrine qui triompha sous Constantin.
Ce fut un enseignement donné par quelques initiés formant un parti violemment persécuté et dont le souvenir fut effacé par la doctrine qui triompha plus tard.
Il y eut donc deux Christianismes :
Le premier (le vrai), qui est aujourd'hui inconnu, et le second (le faux), qui s'édifia sur ses ruines, avec ses matériaux utilisés, mais mutilés.
Ils ne se confondent pas, ils sont en opposition complète.
Burnouf dit (La Science des religions, p. 83) : « C'est un fait connu de tout le monde que dans les premiers temps du Christianisme il existait une doctrine secrète transmise par la voie de la parole et en partie peut-être par l'écriture. Cet enseignement mystérieux excluait d'abord ceux qu'on appelait catéchumènes, c'est-à-dire les païens convertis, mais non encore instruits dans les choses de la foi et n'ayant pas reçu le baptême. Une fois chrétiens, ils n'étaient pas pour cela initiés aux plus profondes doctrines, car celles-ci se transmettaient, en quelque sorte, de la main à la main entre les hommes dont la foi ardente était éclairée par une intelligence plus vive ; à ce titre, ils pouvaient devenir docteurs à leur tour, instruire et diriger la masse des fidèles.
« Sur quel point de doctrine portait le mystère ?
« C'est une question qu'il est presque impossible de résoudre a priori et que l'étude des textes peut seule éclairer. On est néanmoins en droit de penser que le voile du secret couvrait, comme les Mystères d'Eleusis, les parties les plus profondes de la science sacrée et celles qu'il eût été le plus dangereux de découvrir à tous, au milieu du monde païen, dans une société chrétienne composée de personnes pour la plupart ignorantes.
« Vint-il un temps où la doctrine cachée cessa de l'être ?
« On s'accorde généralement à dire qu'après Constantin il n'y eut plus de tradition secrète dans aucune Église, ni en Orient ni en Occident.
« C'est à cette époque que l'Eglise sentit le besoin de fixer ses principes essentiels dans une profession de foi désormais invariable qui les mît à l'abri des attaques de ses ennemis.
« Ce fut l'œuvre d'Eusèbe (268-338) pour la partie historique et du Concile de Nicée (325) pour le dogme. L'un et l'autre accomplirent leur tâche sous l'impulsion et presque par l'ordre de Constantin.
« Les premiers siècles abondent en renseignements de toutes sortes. Il y en a de trois espèces, les livres, les rites primitifs de l'Eglise conservés ou abolis, et enfin les monuments figurés tels qu'il s'en trouve un si grand nombre dans les catacombes de Rome. Les doctrines, surtout quand elles sont mystérieuses, sont quelquefois exprimées avec plus de netteté dans les cérémonies du culte que dans les livres. Ceux-ci, d'ailleurs, peuvent n'offrir que la pensée personnelle de l'auteur, ou la tradition, comme il l'a comprise. Il n'en est pas de même des prières, des formules de foi et des autres parties du rituel, qui, devant se reproduire constamment dans le lieu saint, peuvent être justement considérées comme exprimant la pensée commune (primitive). Quant aux monuments figurés, ils sont naturellement symboliques et faits pour parler aux yeux ; ils sont comme autant de comparaisons et de souvenirs pleinement intelligibles pour les seuls initiés et ne livrant au vulgaire que la partie la plus superficielle de ce qu'ils veulent exprimer ; rapprochés des livres et des formules, ils répandent sur eux une lumière inattendue. Et, se répétant de siècle en siècle, ils peuvent quelquefois nous conduire aux vraies origines de tout un ordre d'idées ou de faits. »
Il est hors de doute que l'enseignement donné par les premiers Chrétiens était celui des lois de la Nature, tel qu'il avait été donné dans les Ecoles Pythagoriciennes. Du reste, il existait encore des Ecoles de ce genre au commencement de l'ère actuelle, puisque Justin, martyr, raconte qu'à cause de son ignorance de quatre sciences préparatoires (l'arithmétique, l'astronomie, la géométrie et la musique) on refusa de l'admettre comme candidat à une de ces Ecoles.
Donc, la science primitive, cachée dans les Mystères, avait cependant toujours été enseignée. La secte des Esséniens, dont Daniel peut être considérée comme le fondateur, sort de l'Ecole Pythagoricienne.
Burnouf le constate ; il nous dit (p. 112) : « En dehors des Écritures, il y avait aussi, dans le Levant, une doctrine secrète, transmise verbalement dans certaines Ecoles dissidentes et dont l'identité avec celle des Apocryphes a été mise en lumière. Les gardiens de cette tradition étaient, durant les siècles antérieurs à notre ère, les deux sectes appelées les Esséniens et les Thérapeutes. Les premiers étaient en Judée et habitaient particulièrement les bords de la Mer Morte ; ils y étaient nombreux. Au temps de Josèphe, on en comptait 4.000. Ils avaient pour méthode d'interpréter allégoriquement la Loi mosaïque, ce qui les conduisait à ne point reconnaître les interprétations officielles des rabbins et à substituer, à la caste des prêtres, un sacerdoce universel (féminin). Ils n'enseignaient point en public leur doctrine secrète, et ne parlaient jamais que par paraboles ; leur morale avait pour base l'abstinence pour soi-même, la charité pour les autres, l'égalité des hommes et la négation de l'esclavage. Un lien étroit les unissait aux Alexandrins ; ils connaissaient leurs livres, parmi lesquels il y en avait un intitulé La Science de Salomon (1) qui leur était familier. La doctrine essénienne et sa transmission orale forment donc un passage qui conduit de la doctrine des Apocryphes à la doctrine secrète des Chrétiens.
« Aux Esséniens de Palestine répondaient les Thérapeutes d'Egypte. C'était, comme eux, une sorte d'anachorètes d'un caractère tout à fait oriental. Ils vivaient dans les monastères, s'occupant de commenter la Loi et les prophètes, de composer et de chanter des hymnes ; ils faisaient la prière au lever et au coucher du soleil ; dans celle du matin, tournés vers l'Orient, ils demandaient d'être éclairés par la lumière intérieure (l'intuition). (Cette prière est un salut au soleil et un effort fait en soi.) Ils avaient des symboles profonds et cherchaient la science du secret.
« Eusèbe et Jérôme les considéraient comme chrétiens ; mais Philon en fait une secte juive. On ignore cependant l'origine de ces deux sectes. Nous trouvons les Esséniens dans l'histoire au milieu du 11ème siècle avant notre ère ; mais, à cette époque, ils se présentent comme une secte déjà fort ancienne, opposée aux Sadducéens (masculinistes) et se donnant pour rôle de conserver une tradition orale et secrète, différente de la tradition mosaïque des rabbins et destinée à la remplacer un jour. Nous savons de plus, par Eusèbe, par saint Epiphane et par saint Jérôme, qu'il existait chez les Juifs une pareille tradition orale longtemps avant le 11ème siècle, transmettant les mêmes idées qui furent adoptées par les Esséniens et les Thérapeutes et finalement par les Chrétiens. »
Si l'on, étudie attentivement les livres du canon hébreu (masculin), on n'y trouve aucune trace de cette doctrine.
Est-il nécessaire de faire remarquer que l'antique tradition conservée par ces Esséniens était celle des Féministes, leur science, leur morale, leur loi, en opposition avec celle que les Rabbins appelaient mosaïque, c'était celle qui avait été donnée par Myriam dans le Sépher et qu'on avait si soigneusement cachée ?
C'est cette science secrète, cette morale cachée, cette loi persécutée qui est le fond de l'enseignement des premiers Chrétiens, qui s'intitulaient Christiens.
Tout cela est antérieur au personnage que la légende appelle Jésus, et en opposition avec sa doctrine.
Ce n'est pas un homme qui révèle cette science et cette loi, puisqu'elle existe depuis une haute antiquité, c'est un parti une secte si l'on veut, qui la conserve et l'enseigne.
(1) Pendant plus de mille ans, une foule de livres contenant des règles de sagesse pratique ou même d'art manuel ont été mis sous le nom de Salomon.


JOHANA
C'est au milieu de la préoccupation générale de cette époque qu'une femme s'éleva qui vint prêcher le retour à l'ancienne doctrine israélite et la restitution de la science antique.
Cette femme s'appelait Johana ; ses disciples s'intitulent eux-mêmes Mandaïe de lohana.
Les Mandaïtes sont ceux qui croient au Manda de hayyé (esprit de vie), littéralement connaissance de la vie.
On dit aussi « Chrétiens de saint Jean », depuis qu'on a masculinisé le nom de cette femme.
Mais, nous l'avons déjà dit, ils ne s'intitulaient pas Chrétiens, mais Christiens.
La doctrine de Johana a pris le nom de Sabéisme, comme celle des anciens Iraniens et comme celle des Ethiopiens dont cette secte va restaurer la morale.
Donc les premiers Christiens sont des Sabéens (mot dérivé de sabba, baptistes).
Le nom de baptiste vient de ce que les hommes avaient l'habitude de se purifier tous les huit jours pour se présenter purs à la Déesse.
Dans la confusion des explications modernes, on nous dira que Johana représente le Feu sacré.
Sa fête, célébrée le 24 juin, le jour le plus long de l'année, est destinée à perpétuer la gloire de sa lumière spirituelle. C'est pour cela que, depuis deux mille ans, on allume les feux de la Saint-Jean.
C'est la grande fête du peuple, le grand jour, ou jour du Soleil (1).
Johana, comme une multitude de noms de femmes, vient de la racine Ana ou Hana.
Précédé de la lettre idéographique Iod, il devient lo-hana. Ana est un nom Chaldéen qui signifie Ciel ou lumière astrale : on disait Anima mundi, d'où vint Anaïtia.
Ana-Kanya est un nom ésotérique qui signifie « Vierge de lumière » (Cailleux, La Judée en Europe).
En roumain, Jeanne est encore Iana. Nous trouvons aussi Juana et Ivana, d'où Ivan.
C'est le nom symbolique de la Femme.
La colombe qui représente le Saint-Esprit est appelée Iona en hébreu.
Et, parmi les surnoms donnés à Johana, nous en trouvons un qui rappelle ce principe de lumière spirituelle : c'est Saint-Jean-de-Luz.
Le mot Yoni en sanscrit, d'où Yonijas, qui a la même racine, est porté par les partisans du Principe féminin.
(1) Le Solstice d'été (Saint-Jean) a dû servir de fête, célébrant la Divinité, longtemps avant saint Jean. On a dû substituer son nom à d'autres noms plus anciens
Burnouf fait remonter les deux fêtes du Solstice, Noël et Saint-Jean, à 7.000 ans. Pour lui, saint Hélie a succédé à Hélios, le Soleil, saint Démétrius à Déméter ou Cérès, la sainte Vierge à la Vierge Minerve, qui fut l’aurore, etc.

LA NAISSANCE ET L’ENFANCE DE JOHANA
D'après les antiques traditions d'Iran, recueillies par Abulfarage Zerdasht, le restaurateur du Magisme, homme de science, grand astronome, annonça sous les premiers successeurs de Cyrus et peu de temps après le rétablissement du Temple qu'un Enfant divin, appelé à changer la face du monde, naîtrait d'une Vierge pure et immaculée dans la région la plus occidentale de l'Asie (2).
Or cette prédiction ne pouvait se rapporter qu'à Johana. C'est bien elle qui est Jean le Divin, Jean de Dieu, Jean bouche d'or.
L'histoire du petit saint Jean a précédé celle du petit Jésus, qui en a été la copie.
Elle est racontée dans l'Evangile selon Luc. Dans le chap. I, tous les versets de 1 à 25 s'y rapportent, puis de 57 à 80. Une coupure est faite au milieu de cette histoire pour y introduire une copie maladroite s'appliquant à Jésus.
(2) Autour de la statue de Kwan-Shi-Yin, on lit l'inscription suivante : « Le Sauveur universel de tous les Êtres vivants ». Kwan-Shi-Yin (femme messie), sauveur des nations, fut le « créateur », l'artisan du monde. En lui était la vie et la vie fut la lumière des hommes. Ce sauveur apparaîtra comme Maitreya (Messie) durant la 7e race. Cette croyance et cette attente sont universelles dans tout l'Orient. C'est une forme du 7° Principe (dernière création, génération). C'est un agrégat synthétique de tous les esprits. Il est l'auto-manifesté.

LA FAMILLE DE JOHANA
Les Évangiles nous parlent souvent des frères et sœurs du Seigneur.
Or le mot Seigneur a été introduit dans les Ecritures par saint Jérôme, dans sa Vulgate, au 4e siècle.
Quel était donc le mot antérieur que ce terme est venu remplacer ?
En remontant aux origines, c'est-à-dire aux étymologies, nous avons montré que c'est le mot Cri ou Kri, sanscrit, abrégé du grec Kyria, qui indique toujours une suprématie. On explique ailleurs que c'était le nom des déesses gauloises : Val-Kyrie.
Ce mot, dans le grec moderne, signifie Ma-dame. On lui a donné un masculin, Kyrios. Mais c'est le féminin seul qui est resté dans la liturgie catholique.
C'est Johana qui est appelée par ses disciples « Kyria », et, quand on dira dans les traductions modernes « les frères du Seigneur », cela signifiera les frères de Johana, qui avait aussi des sœurs.
Jacques est son frère, Jude est sa sœur (Jude, c'est Judith),
André et Pierre sont ses fils, Simon est le fils de Jude, donc le neveu de Johana.
Dans les Évangiles révisés, Pierre est encore appelé « fils de Johana ».
Chez les premiers Christiens, l'enfant porte encore le nom de sa mère.
Quant au père de Pierre, il n'apparaît pas, il a un rôle effacé ; cependant, nous avons pu le découvrir.
Dans le Dictionnaire des Sciences religieuses de Lichtenberger, nous lisons au mot Jean-Baptiste, après avoir rappelé la vie de Jean :
« Josèphe, dans sa biographie, nous parle d'un autre ermite, nommé Banus, qui fut son maître, pendant quelques années et s’était acquis par son genre de vie, tout à fait analogue à celui du Baptiste, un grand renom de sainteté et de sagesse.
Il y a pourtant, sous la ressemblance du costume et des habitudes, cette différence entre Jean et Banus, que celui-ci ne poursuit qu'un but de sanctification personnelle par des ablutions et des privations volontaires, et que celui-là est surtout préoccupé des péchés et du salut de son peuple. Aussi le premier n'est-il qu'un moine assez parent des Esséniens, tandis que le second se rapproche des anciens prophètes. »
Cet ermite que nous voyons près de Johana fut évidemment son associé dans la vie et le père de ses enfants.

COMMENT JOHANA DEVINT JEAN-BAPTISTE
C'est sous Tibère, qui régna de l'an 14 à l'an 37, que Johana s'éleva comme une réformatrice, prêchant l'antique morale naturelle et le règne prochain de « Hévah », la Femme, ressuscitée à la vie sociale, ce qui irritait beaucoup les masculinistes.
Elle voulait qu'on se préparât à cette résurrection par la réforme des mœurs. Elle prêchait aussi la « justice » ; elle ajoutait à son enseignement des rites, invitant ceux qui venaient l'entendre à recevoir le baptême du feu, ce qui voulait dire l'initiation aux Mystères.
L'idée cachée au fond de ce mythe venait d'un fait de haute science enseigné par les Prêtresses dans les Temples, mais où seuls étaient admis les initiés.
« Le besoin du secret, dit Burnouf, fut un des besoins aujourd'hui les mieux constatés de la primitive Eglise. »
« Le centre duquel ont rayonné toutes les religions de la Terre est donc la Théorie d'Agni. » C'est-à-dire la glorification de l'amour féminin qui engendre le feu sacré, l'Esprit divin.
Quand les masculinistes écriront, plus tard, la légende relatée dans leurs Évangiles (les synoptiques), ils feront de Johana, Jean-Baptiste, et de son « baptême par le feu » un baptême par l'eau, laissant croire qu'il s'agissait d'une ablution (baptisma en grec) dans le Jourdain, supposant que l'âme se lave quand on lave le corps. Mais ce n'est pas de cela qu'il s'agissait.
Le baptême de Johana avait une signification symbolique. Nous savons déjà que l'eau représentait le principe opposé au feu et que le feu symbolisait l'Esprit. L'eau qui est son contraire représentait l'ignorance, l'erreur et le despotisme, c'est-à-dire tout ce qui éteint l'Esprit et fait l'obscurité.
Le grand déluge symbolique, mis dans le passé de l'évolution humaine, représentait déjà l'effort tenté par les hommes pour éteindre la lumière de l'Esprit féminin.
Depuis, une multitude de légendes s'étaient propagées, rappelant ou amplifiant ce symbolisme.
Une secte dont nous allons bientôt citer le fondateur et étudier la doctrine, prenait le contrepied de tout ce qu'avait dit la Femme, renversant par ironie, et aussi par ignorance, toutes les vérités cachées dans les symboles.
C'est cette secte qui vint dire « c'est l'eau qui purifie ». C'est que l'eau, symbole de l'ignorance qui éteint les lumières, était le domaine du dieu mâle dans l'ancienne mythologie : Poséidon, Neptune, et on créa le baptême par l’eau, par opposition à la purification spirituelle par le feu.
On retrouve donc, au fond de ces disputes sur les rites, les luttes de sexes, éternellement entretenues par le malentendu qui résulte de l'ignorance de la loi qui régit la différence de polarisation sexuelle.
Les hommes se mirent à baptiser « par l'eau », et l'on fit remonter à Jean-Baptiste l'introduction de ce système.
Les ablutions étaient un souvenir du grand déluge symbolique dans lequel on avait représenté les hommes submergés pendant que la Déesse surnage dans la barque d'Isis qui porte le monde : Fluctuât nec mergitur. Et ceux qui renversent tout diront alors que Christos est un poisson.
Puis, dénaturant l'idée qui s'attachait au symbole, les Prêtres, qui représentaient le déluge comme une punition, prétendirent calmer la colère « des dieux » en jetant dans les flots des victimes expiatoires, des enfants, et c'est ainsi qu'on arriva à baptiser les enfants pour les purifier des fautes des pères.
Dans l'évolution des idées de l'antiquité, la vertu expiatoire de l'eau suit une gradation déterminée. Celle de la mer, qui primitivement avait symbolisé le grand déluge, passait pour plus efficace.
A son défaut, on employait celle des fleuves ; c'est pourquoi toutes les grandes religions masculines avaient leurs fleuves saints : le Gange, le Nil, le Jourdain sont célèbres sous ce rapport dans la mémoire des hommes.
Cependant, les historiens nous disent qu'on fut obligé de supprimer le baptême par immersion et l’ospasmos ou baiser baptismal, parce que tout cela provoquait la raillerie des contemporains.
Une des ruses des imposteurs qui renversèrent le premier Christianisme fut de mettre dans la bouche de Jean des propos qui n'ont aucun rapport avec sa doctrine ; ainsi on lui fait dire : « Pour moi, je baptise d'eau pour vous porter à la repentance ».
Puis on crée l'équivoque autour de la personnalité divine et on nous représente « Jean » voulant mettre « le Père » à la place de l'antique Déesse Hévah. On lui fait dire : « Afin que nous ne restions pas les fils de la fatalité et de l'ignorance, mais pour que nous devenions ceux de l'élection et de la science et que nous obtenions le pardon des péchés commis, on prononce sur ceux qui doivent être régénérés et qui se sont repentis de leurs péchés, le nom de Dieu, le Père et le Seigneur de tous, et ce nom EST SEUL prononcé par celui qui conduit à l’eau, celui qui doit recevoir l'ablution. Car personne ne saurait dire le nom inexprimable (l'antique Hévah dont les Juifs ne prononçaient jamais le nom), et, si quelqu'un osait lui donner un nom, il se tromperait infailliblement. Cette ablution est appelée « illumination », parce que ceux qui apprennent ces choses sont éclairés dans leur esprit. »
Tout ceci n'est, au fond, qu'une parodie de la doctrine des initiés dans laquelle on a introduit les mots Père et Seigneur de tous, alors que Johana, qui appelait la Divinité « Sophia », ne voulait pas d'autres dieux que la Déesse-Mère « Hévah ».
La doctrine initiatique des premiers Chrétiens a été conservée dans les Ordres secrets ; on la retrouve dans le rituel des Rose-Croix dont nous parlerons plus loin.
La secte qui trahit le premier Christianisme, composée d'hommes vulgaires et ignorants, fit de Johana un personnage adapté à leur taille, lui donna leurs idées et mit dans sa bouche des propos violents contre les Pharisiens et les Sadducéens, qui étaient les intellectuels du temps, alors que ce sont eux qui tenaient ces propos.
Dans Matthieu, ch. III, 7, on fait dire à Jean : « race de vipères ».
On appellera Jean « fils du Tonnerre ».
On nous le montre comme attaquant avec âpreté les grands, auxquels il donnait tous les vices. Il inquiéta ainsi le tétrarque de la Galilée et de la Pérée, Hérode Antipas, fils d'Hérode le Grand, qui l'emprisonna d'abord, puis le fit mourir, dira-t-on.
La manière dont sa mort est racontée dans les Évangiles a pour but de faire croire que c'était un personnage odieux aux femmes.
Autre preuve psychologique qui nous fait comprendre que Jean était Johana, car c'est toujours en déléguant à des femmes leurs haines et leurs vengeances que les lâches font attaquer celles qu'ils n'osaient pas sacrifier eux-mêmes. On raconte que c'est la fille d'Hérodias, femme de Philippe, frère d'Hérode, qui demanda sa tête (Matthieu, chap. XIII. 1 à 12), et que c'est vers l'an 30 que la décollation de Jean-Baptiste eut lieu.
Or nous ne croyons pas à cette mort, parce que nous avons la conviction que Jean l’Évangéliste et Jean le Baptiste sont deux formes masculinisées de la même femme, laquelle, après avoir été emprisonnée à Jérusalem par Hérode, fut envoyée en exil, à l'île de Pathmos, où elle écrivit l’Apocalypse, dans un âge avancé, on dit à 95 ans.
La réalité historique de ce personnage ne peut pas être mise en doute, d'abord parce qu'elle a laissé des livres ; ensuite parce qu'une multitude d'auteurs du temps se sont occupés du Christianisme primitif qu'elle a fondé, et l'ont nommée ; enfin parce que l'historien Josèphe, qui ne connut pas Jésus, connut Johana et lui consacra quelques lignes dans son Histoire des Juifs. Les voici :
« Plusieurs Juifs ont cru que cette défaite de l'armée d'Hérode était une punition de Dieu à cause de Jean surnommé le Baptiste. C'était un homme de grande piété, qui exhortait les Juifs à embrasser la vertu, à exercer la justice, et à recevoir le baptême après s'être rendu agréables à Dieu en ne se contentant pas de ne point commettre quelques péchés, mais en joignant la pureté du corps à celle de l'âme. Ainsi, comme une grande quantité de peuple le suivait pour écouter sa doctrine, Hérode, craignant que le pouvoir qu'il aurait sur eux n'excitât quelque sédition, parce qu'ils seraient toujours prêts à entreprendre tout ce qu'il leur ordonnerait, crut devoir prévenir ce mal pour n'avoir pas sujet de se repentir d'avoir attendu trop tard pour y remédier. Pour cette raison, il l'envoya prisonnier dans la forteresse de Mâchera, et les Juifs attribuèrent la défaite de son armée à un juste jugement de Dieu d'une action si injuste. »
Si ce qu'on appelle la décollation de Jean-Baptiste avait eu lieu réellement, Josèphe l'aurait raconté. Au lieu de cela, on trouve que le texte primitif de cette citation a été altéré.
Finalement, on l'a rendu par ceci : « Redoutant l'éloquence et la popularité de Jean, car les Juifs étaient prêts à suivre tous ses conseils, Hérode trouva bien meilleur de prévenir tout mouvement populaire, et de le faire périr, que d'avoir, une fois la révolution déchaînée, à gémir sur la catastrophe. »
Nous ne savons pas si c'est Josèphe qui a masculinisé Johana, ou si ce sont les réviseurs qui ont remanié son livre, les mêmes, sans doute, qui y ont intercalé un passage sur Jésus.
C'est pour effacer la personnalité de Johana et la supprimer de l'histoire qu'on raconte la mort tragique de Jean-Baptiste.
Mais l'histoire de Jean se déroule après cet événement avec d'autres surnoms : l’Ancien, l’Evangéliste, etc.
M. Leblois, dans Les Bibles, nous dit : « Il y eut dans les temps apostoliques plusieurs Jean ; le Nouveau Testament seul en connaît six ; comme il y a eu plusieurs Jacques, plusieurs Simon, plusieurs Marie, etc. »

LES LIVRES SACRÉS
Les apôtres de Johana avaient des Livres sacrés au nombre de quatre.
Le premier s'appelle le Divan et traite de la « chute des Anges » et de la création de l'homme.
Le second, nommé Sedra Ladam, est le livre d'Adam.
Le troisième, Sedra Yahya, est la révélation de saint Jean.
Le dernier, Cholastech, contient l'ensemble des cérémonies religieuses.
Nul doute à avoir : Johana est bien le fondateur d'une doctrine et l'instaurateur d'une religion, et cette religion, c'est le Christianisme primitif.
Or n'oublions pas que Jona, Johna ou Johana est un nom féminin dont on fera un masculin plus tard, Johannes. Du reste, la psychologie vient toujours à notre secours pour nous faire retrouver le sexe des auteurs.
Nous savons que les « Chrétiens » furent d'abord ridiculisés et outragés. L'accueil fait aux livres de Johana par les masculinistes va nous montrer qu'il s'agit bien ici d'une lutte de sexes.
Le mot Divan, qui sert de titre à son premier livre, est un mot resté dans les langues, mais il sert bien plus à désigner un siège allongé sur lequel on se couche qu'à désigner un livre sacré (1).
Ce mot, dérivé de Dêva (mot composé des mêmes lettres que le mot Véda, le livre Sacré de l'Inde, mais placées autrement) ou Diva (la Déesse), employé pour désigner le livre (on donne à la chute des anges un double sens), est resté comme une ironie : la Dêva tombée, avilie, est devenue le Divan.
Autre exemple : Le Christos mystique, l'Etre sacré, prend, dans la doctrine des premiers Chrétiens gnostiques, le nom de Sophia, la sagesse féminine. Or le mot Sophia eut le même sort que le mot Divan. Après avoir désigné la Femme dans sa suprême sagesse, il arriva à désigner le meuble sur lequel l'homme aimait à la voir étendue, le sopha. Et ceci s'appelle faire litière d'une doctrine.
Mais les femmes ne se laissaient pas attaquer sans répondre.
On leur attribue l'idée de donner à ce meuble un autre nom : canis pedes (d'où canapé), chien à mes pieds (d'après Fabre d'Olivet, Les Vers dorés).
La psychologie, qui est la clef de l'histoire, nous donne encore bien des lumières sur la personne de Johana.
D'abord le silence fait de son temps sur sa personnalité. Le silence d'écrivains qui avaient vécu avec Jean, de son temps, est significatif.
Papias se sert de l’Apocalypse et ne cite pas Jean.
Polycarpe, qui utilise presque tous les livres du Nouveau Testament, ne cite pas une fois l'Évangile de Jean, lui, le disciple de Jean à en croire Irénée.
Remarquons, du reste, combien la question de l’auteur est partout, dans les Livres sacrés, la question discutée.
Il n'est pas un prophète dont la vie soit laissée au grand jour ; on sent partout la préoccupation du plagiat, du démarquage.
On ignore qui a écrit la Sagesse. On supprime Myriam et Daud (David). Mais, si on supprime les auteurs, on garde les œuvres, qu'on met au nom d'un homme qui se déclare inspiré par Dieu.
Cependant, il dut exister un parti qui défendait Johana et voulait perpétuer sa mémoire, puisqu'on trouve de vieilles gravures du moyen âge qui représentent Jean sous les traits d'une femme. Dans une d'elles, il y a une inscription qui dit : « Quand vous vous rassemblerez, je serai au milieu de vous. »
Dans une autre se trouvent onze disciples réunis, la Vierge Marie est au milieu d'eux, elle tient le livre et les instruit.
Sabatier, dans un article qu'il consacre à Jean dans le Dictionnaire des Sciences religieuses de Lichtenberger, dit : « Il est digne de remarque que le nom de Jean ne revient dans les synoptiques qu'avec des reproches que les rédacteurs ne cherchent pas à atténuer par le souvenir de ce que le même apôtre serait devenu plus tard. Il y a là un singulier contraste avec l'image du disciple bien-aimé, qui se penche sur la poitrine de Jésus, reçoit ses confidences intimes, semble seul le comprendre quand tous les autres se méprennent, de ce disciple idéal enfin qui se cache et se dévoile en même temps dans le quatrième Évangile. Cependant, les Actes des Apôtres nous montrent Jean à côté de Pierre. Paul le rencontre encore à Jérusalem, et il nous confirme le rôle prééminent de Jean à cette époque dans la première communauté chrétienne. Il était le troisième membre du triumvirat apostolique. A partir de ce moment, il disparaît pour nous dans le nuage mystérieux de la tradition ecclésiastique, sous lequel il est bien difficile de le reconnaître et de constater son identité. »
(1) Divan, terme qui sert encore chez les Arabes, les Turcs et les Persans, à désigner des recueils littéraires qui renferment les œuvres de certains auteurs : c'est ainsi qu'on dit le Divan de Hafiz, le Divan de Djelaleddin, Roumi, etc.

L'APOCALYPSE
L'Apocalypse est un livre écrit par un auteur qui se répand en doléances sur le mal qui règne partout, sur le sort des opprimés victimes des religions et des institutions nouvelles des hommes.
Il s'élève contre Jézabel, désignant ainsi les femmes perdues qui suivent les Paulinistes. Il accuse les Nicolaïtes et les Juifs qu'il appelle « ceux de la synagogue de Satan », et annonce, une fois de plus, le retour de la Femme-Messie.
Ce livre, tout rempli de réminiscences de l'Ancien Testament, a évidemment été altéré par les Jésuites qui y ont mis, après coup, leur Jésus, leur Dieu Père, leur personnel ecclésiastique et les douze apôtres à la place des douze tribus, ce qui fait qu'ils apparaissent comme contemporains des prophètes. L'Apocalypse a dû être écrite avant la destruction du temple ; les remaniements qu'elle a subis, peut-être plusieurs fois, ont dû commencer dans le IIème siècle, L'ancien symbolisme, dont la signification était connue et facile à comprendre, y devient un surnaturel fantastique en prenant les idées abstraites symbolisées pour des réalités concrètes. Cette transformation de l'idée se retrouve dans tous siècles, c'est l'éternel manteau de l'ignorance et de la bêtise posé sur l'éternelle Vérité.
L'Apocalypse en est un des plus frappants exemples. Ceux qui savent la lire et la comprennent y voient de grandes choses, de tout temps elle a eu un grand prestige. Ceux qui ne comprennent que la lettre sans apercevoir l'esprit n'y voient qu'une vision étrange d'un illuminé.
On nous dit que c'est Jean l'Evangéliste qui est l'auteur de l’Apocalypse. Or, comme Jean, c'est Johana, nous ne doutons pas que c'est cette grande femme, fondatrice du premier Christianisme, le seul vrai, qui a écrit le livre dans lequel, découragée après toutes ses luttes, toutes les persécutions subies, elle met son dernier cri d'espérance : « Si la femme n'a pas triomphé avec nous, elle triomphera dans l'avenir », après que le règne de l'homme aura apporté au monde toutes les tribulations qu'elle annonce.
Johana, comme auteur de l'Apocalypse, est appelée saint Jean le Théologien ; c'est une façon nouvelle de la désigner.
Nous la connaissons déjà sous le nom de Jean-Baptiste, sous celui de Jean l'Evangéliste ; elle est aussi Jean l'Ancien, et nous ne savons pas si le Jean, chef des Zélotes, qui défendit les Israélites dans le Temple de Jérusalem lors du siège, ce n'est pas encore elle.
On intitule son livre « la Révélation de saint Jean le Théologien ». Or révéler, c'est re-voiler, et Johana, loin de revoiler, a au contraire dévoilé la science cachée ; ce sont, ceux qui sont venus après elle qui ont revoilé sa science.
Ainsi, le premier verset de son livre altéré par les Paulinistes dira : « La révélation de Jésus-Christ qu'il a reçue de Dieu pour faire connaître les choses qui doivent arriver bientôt et qu'il a déclarée et envoyée par son ange à Jean, son serviteur. »
Donc, c'est Jésus-Christ, le personnage inventé par Paul, qui envoie sa révélation (re-voilation) à Johana ! Qu'on juge, par ce premier verset, des absurdités qu'on va mettre dans le reste du livre.
L'Apocalypse semble avoir été, d'abord, le livre rituélique des « Mystères Johanites ».
Dans un lieu désert, à Pepuzza, voisin de l'île de Pathmos se tenaient les assemblées mystiques des Phrygiens qui attendaient la Jérusalem Céleste. C'est là qu'on se rendait pour célébrer les Mystères ; on allait s'y faire initier par Johana et ses disciples, en attendant la Théophanie, l'apparition de la Déesse Christ réintégrée dans sa suprématie. Synésius appelle les nouveaux venus « hommes initiés aux Théophanies ». « Le Temps est proche », disait-on, et on attendait le grand Juge, espoir qui berçait les initiés qui aspiraient au retour prochain de la Justice et de la Lumière qui devait éclairer la Terre.
Les Prêtresses de Pepuzza prenaient le titre de Prophétesses, Elles traçaient le tableau des malheurs des peuples sous le règne de l'homme et se lamentaient comme on s'était lamenté dans les Thesmophories des Mystères de Béotie (1).
C'est surtout contre la prétention de l'homme d'élever son sexe jusqu'à la hauteur des puissances cosmiques et d'en faire un Dieu créateur que ces femmes se révoltent, et, pour conserver la vérité que ce nouveau dogme obscurcit et prétend remplacer, on s'occupait surtout, dans ces Mystères, de faire connaître la Science qui explique l'action des sept « Principes cosmiques » organisateurs de l'Univers, dont on rappelle la puissance pour l'opposer aux rêveries de ceux qui ont grandi l'homme jusqu'à en faire le créateur de l'Univers.
Dans les Mystères de Phrygie, nous trouvons à Pepuzza une société secrète où, dans une cérémonie d'initiation, sept jeunes prêtresses vêtues de blanc entraient dans le Temple, tenant dans leurs mains chacune un flambeau dont la lumière était colorée ; en se plaçant les unes à côté des autres, les sept flambeaux reproduisaient l'arc-en-ciel.
Ce qui prouve que l'Apocalypse était le livre rituélique de ces Mystères, c'est que, dans la revision qui en a été faite, on retrouve la caricature des cérémonies faites à Pepuzza.
Ainsi, on fait dire à Jean que, étant dans l'île de Pathmos, il vit sept chandeliers d'or (I, 12), et au milieu des sept chandeliers quelqu'un qui ressemblait au fils de l'homme, vêtu d'une longue robe (le costume des Prêtresses) et ceint sur la poitrine d'une ceinture d'or (le cordon de l'ordre secret).
Apocalypse 1.16. Il avait dans sa main droite sept étoiles, une épée aiguë à deux tranchants sortait de sa bouche, et son visage resplendissait comme le soleil quand il luit dans sa force.
Et il dit :
Apocalypse 1.20. Voici le mystère des sept étoiles que tu as vues dans ma main droite et des sept chandeliers d'or. Les sept étoiles sont les anges des sept Églises, et les sept chandeliers que tu as vus sont les sept Églises.
Voilà le « fils de l'homme » qui va devenir un Dieu doué de la puissance des forces cosmiques. L'épée aiguë à deux tranchants qui sort de sa bouche, c'est la radiation astrale ; c'est pour cela que son visage resplendit comme le soleil quand il luit dans sa force.
Est-ce assez grotesque ? Pourquoi l'auteur de l'Apocalypse est-il appelé « le Théologien » ?
C'est que son livre a pour but de rétablir la science du Divin. Deux Prêtresses, Priscilla et Quintilia, enseignaient à Pepuzza. Origène dit de leur doctrine qu'elle contient la théorie mystique du retour des âmes vers les êtres divins (les femmes) ; c'est, en effet, un retour vers la Sagesse divine appelée ratio, ou mens, ou verbum ; c'est le Verbe chrétien, l'antique Logos dont Johana a tant parlé. (Voir l'Evangile publié selon Jean.)
C'est cet enseignement qui est l'inspiration donnée par la Femme-Esprit à l'homme qui est inspiré par elle ; c'est elle qui éveille en lui la conscience, le sentiment moral, la raison.
L'inspiration, c'est la communication des hautes vérités et des principes supérieurs de conduite que les hommes ne peuvent pas trouver par eux-mêmes ; c'est cela que les Catholiques vont appeler la Révélation, supposant qu'il existe un Dieu-homme extérieur à l'homme qui lui fait connaître sa pensée et sa volonté.
Dans le chapitre II, on parle de la synagogue de Satan (l'Église de Paul évidemment), de ceux qui ont été trouvés menteurs, lui ont abandonné la première charité (mis pour amour), qui se disent apôtres et qui ne le sont pas.
« Il arrivera que le diable en mettra quelques-uns en prison. »
On parle du lieu où Satan a son trône et où des gens font scandale en mangeant des choses sacrifiées aux idoles.
On parle de ceux qui ont connu les profondeurs de Satan.
Et on dit à la Femme : « Tiens-toi ferme afin que personne ne prenne ta couronne. »
Chapitre II, 17. — A celui qui vaincra, je lui donnerai un caillou blanc sur lequel sera écrit un nouveau nom que personne ne connaît que celui qui le reçoit.
Chapitre III, 12. — Celui qui vaincra, je le ferai être une colonne dans le temple de mon Dieu ; et j'écrirai sur lui le nom de mon Dieu et le nom de la cité de mon Dieu, de la nouvelle Jérusalem qui descend du Ciel (symbolique) venant de mon Dieu, et mon nouveau nom.
Ce nom nouveau, c'est la Gnose, destiné à remplacer le nom des premiers Chrétiens parce que ce titre, ayant été pris par les partisans de Paul, ne signifie plus les partisans de l'antique Christ. C'est, en effet, après l'Apocalypse que les premiers Chrétiens vont s'intituler Gnostiques.
On a cru que ce passage a été interpolé ou dénaturé par les réviseurs des livres, qui ont voulu laisser entendre par là que le nom nouveau, c'est Jésus que l'on va substituer à la Divinité des Israélites, Jhévah ; le nom de Jésus est si nouveau alors qu'il semble inconnu pendant tout le premier siècle. On croit même qu'il a été ajouté aux Épîtres de Paul par Marcion au IIème siècle.
Le chapitre IV nous donne la description du temple dans lequel s'accomplit la cérémonie d'initiation des Mystères Johanites.
Ces Mystères ont été conservés dans la Franc-Maçonnerie ; c'est le 17ème degré, intitulé Chevalier d'Orient et d'Occident.
Dans ce grade maçonnique, la salle est disposée de manière à rappeler l'existence et l'action du septénaire, elle est revêtue de tentures rouges parsemées d'étoiles d'or. Il y a sept colonnes de couleurs différentes, rouge, orange, jaune, vert, bleu clair, bleu foncé et violet.
Dans le fond de la salle, à l'Orient, est un trône élevé de sept degrés. Au haut du trône est figuré un arc-en-ciel ; sept lampes suspendues sont allumées devant ce trône. D'un côté, vers le Midi, le soleil ; vers le Nord, la lune.
Des deux côtés de la salle, sur deux lignes, sont 22 autres trônes, onze de chaque côté, chacun élevé sur trois marches, pour représenter les onze disciples de Johana (le 12ème, Judas-Paul, ayant, trahi) (2).
A l'Orient se trouve un transparent lumineux qui représente les sept sceaux de l'Apocalypse. Le sceau qui est au centre représente la femme revêtue du soleil, posant ses pieds sur le croissant de la lune, autour de ce sceau un serpent (l'homme méchant) ; sur un autre sceau, l'homme sous la figure d'un vieillard tenant à la bouche un sabre, etc.
Quand on découvre le transparent, tout le monde dit : Abaddon, qui signifie, dissolution, destruction.
Puis on apporte un livre avec sept sceaux semblables à ceux du transparent ; seulement, chacun de ces sceaux est une petite boîte contenant un symbole.
Dans l'une, un arc que le président donne à l'un des assistants en lui disant : « Partez et continuez la conquête. »
Dans une autre, une petite couronne.
Dans une troisième, de l'encens. Dans une quatrième, une tête de mort. On distribue tous ces symboles en disant : « Allez à Pathmos, il n'y a plus d'heure », ou bien : « Empêchez les profanes et les méchants Frères de trouver jamais justice dans nos Loges. »
Après cela, on distribue à chaque assistant une trompette pour annoncer la bonne nouvelle. L'assemblée se compose de 24 membres : le président, intitulé Très Puissant, qui représente le chef des 24 vieillards de l'Apocalypse et siège au grand trône ; les deux surveillants, intitulés Respectables Anciens ; et 21 Chevaliers d'Orient et d'Occident qui occupent les trônes latéraux.
Les Frères assis sur les trônes ont tous une longue robe blanche et portent une ceinture rouge ; sur leur tête est une couronne d'or.
Nous arrêtons ici les descriptions.
Tel est ce livre étrange qu'on a appelé « le livre de la Fatalités », parce que les malheurs du règne de l'homme, qu'il annonce, sont les conséquences fatales des instincts de sa nature masculine Dans sa forme altérée, il a un caractère surnaturel qui le rend ridicule ; mais on aperçoit, cependant, à travers ce voile qui cache et déforme, la pensée première, l'annonce du retour de la Femme à la vie sociale, du réveil de son Esprit refaisant la science, en un mot de sa Résurrection.
Les détails mêmes de cet événement étonnent ceux qui savent par leur exactitude, ce qui fait qu'une question se pose :
Johana, qui a écrit le livre, a-t-elle aperçu les événements futurs par intuition ? Si cela est, l'intuition est une faculté qui peut s'exercer à longue distance, ce qui supprime pour notre cerveau la notion du temps. Quel problème à méditer !
Il est probable qu'il existe des Loges, parmi celles qui propagent la doctrine johanite, qui possèdent des Rituels assez complets pour qu'on y retrouve l'Apocalypse dans sa forme première.
En France, on en a conservé peu de choses.
Après le serment prêté par le récipiendiaire, un des Respectables Anciens lui adresse un discours dans lequel il lui explique la tradition du grade ; il dit : « Les Johanites, vrais disciples de Jean de Pathmos, étaient les fidèles de la Gnose. Ils étaient humbles et ignorés ; les Chevaliers d'Orient maintenaient en Secret, dans toute sa pureté, le culte de la Déesse (le Grand Architecte de l'Univers). Ces Johanites donnèrent à quelques Chevaliers d'Occident la révélation de leurs sublimes mystères. Les Chevaliers d'Occident s'unirent aux chevaliers d'Orient. »
L'Apocalypse, qui annonce le retour de la Femme à la vie sociale et son triomphe sur le mauvais esprit, est toute remplie du septénaire qui retrouvé doit être le signal de la réconciliation des hommes avec la Déesse. C'est l'arc-en-ciel messager de paix.
Cette science des Forces cosmiques apparaît au commencement de chaque cycle, elle en est le point de départ, et cela s'appelle le commencement de chaque année sidérale (jour solaire) qui recommence une période de vie ; c'est de là que les Kabeiria (les Kabir ou Kabarin) tirent leur nom de la Chaldée, car ils signifient « les mesures du ciel » (du mot Kob, mesure, et d'Urim, les cieux).
Le feu éthéré (la radiation astrale) est l'émanation du Kabir. Cette radiation émane de sept principes comburants qui sont les sept forces cosmiques.
Aux Indes, on les avait appelés les « Prajâpati » ou les sept Conducteurs.
En Grèce, on appela cette science l'Heptade, et c'est de là qu'est venu l'Hebdomagène, la consécration du septième jour divisant les semaines.
Johana était venue rappeler la science perdue, la science que les hommes ne comprenaient plus et qu'ils avaient remplacée par leur conception masculiniste d'un homme-Dieu créant le monde (3).
C'est pour cela que les vieilles légendes nous disent qu'« au commencement de chaque cycle les huit grands (Dieux) descendent pour accomplir leur grande œuvre et laissent derrière eux d'impérissables monuments pour rappeler leur visite ».
Ce ne sont pas les huit principes de vie qui descendent parmi les hommes, c'est la Femme intuitive qui en rapporte la connaissance.

La légende de ce grade nous dit qu'à la suite de la prise de Jérusalem par les Romains, les Israélites quittèrent la Judée pour le désert et se mirent à la recherche d'une contrée où le respect des droits de la Femme serait une réalité. Ne la trouvant pas, ils fondèrent les sociétés des Thérapeutes, des Esséniens, des Johanites. (Ceci est inexact ; les Thérapeutes et les Esséniens existaient bien avant les premiers Chrétiens.)
Les Johanites étaient en possession des vrais Évangiles de saint Jean ; ils déclaraient entachés de falsification l'Apocalypse, les Épîtres et l'Évangile de saint Jean tels qu'ils sont adoptés par l'Église catholique et traitaient de faussaires les prétendus disciples des apôtres qui professaient un enseignement abominable tiré des livres de leur façon. C'est ainsi qu'ils avaient transformé l'Apocalypse en un ouvrage de cabale et de magie.
Après la mort de Johana, les « Mystères de Pepuzza » se perpétuèrent dans les « Loges de Saint Jean » qui existent encore et dans lesquelles on célèbre saint Jean le Blanc. Ces Loges sont très répandues, on les trouve notamment dans le Rite de Zinnendorf appelé aussi Rite Johannite, qui est pratiqué par 91 Loge dites Loges Johannites dépendant de la Grande Loge national d'Allemagne (siège central à Berlin) et qui comprend 8120 Maçons.
Et le Rite de Herodom, qui est le rite primitif dit Rite ancien et de perfection, qui est pratiqué par la Grande Loge Saint Jean d'Ecosse (siège central à Edimbourg), par 118 Loges dépendant de la Loge Mère aux Trois Globes (siège central à Berlin), par 19 Loges dépendant de la Grande Loge nationale d'Allemagne, par l'Union des Loges germaniques indépendantes (siège central à Leipzig), et par la Grande Loge de Hongrie (siège central à Budapest).
92.760 Maçons en tout pratiquent ce rite. (4)
C'est de ces sociétés secrètes que sortiront plus tard les Ordres de chevalerie fondés en l'honneur de saint Jean, tels les Hospitaliers de saint Jean, les Chevaliers de saint Jean de Jérusalem, successivement connus dans l'histoire sous les noms de Chevaliers de Rhodes et Chevaliers de Malte, en attendant les Chevaliers du Temple.
Dans l'héraldique des Druides, on retrouve la « Jona ».
Il faut remarquer que toutes les sectes secrètes des premiers Chrétiens se rattachent à Johana, aucune à Jésus.
(1) Dans les traditions gnostiques, on enseigne que Priscilla ou Quintilia, une de leurs prophétesses, s'était endormie à Pepuzza et que, là, le Christ lui était apparu sous la forme d'une femme vêtue d'habits d'une blancheur éclatante, qu'elle avait répandu en elle son esprit de sagesse, qu'elle lui avait appris que le lieu était saint. C'est pour cela qu'on s'y rendait pour se faire initier. Cette femme-Christ apparue, c'est Johana.
(2) Dans l'Apocalypse, il y a 12 disciples et non pas 11 ; on ne supprime pas le traître, puisque le traître, c'est Judas-Paul que les Paulinistes ne mentionnent jamais.
(3) Philon se moque des Chaldéens qui « faisaient tout dépendre du mouvement des astres, qu'ils regardaient comme souverains de l'œuvre du monde. Ils bornèrent leurs hommages à la cause visible et ne se firent aucune idée de l'être invisible et intellectuel » (Dupuis, Origine des cultes, t. 1, p.7)
Les esprits forts des temps modernes, héritiers de l'ignorance des Prêtres diront aussi que « les Priscilliens mêlent au Manichéisme quelques rêvent des astrologues et des Gnostiques ».
(4) informations datant de 1927

LES PERSÉCUTIONS
Tous les empereurs romains depuis Tibère jusqu'à Constantin persécutèrent les premiers Chrétiens. La première persécution eut lieu sous Tibère, en l'an 36.
La seconde en 44, sous Claude, fut terrible.
La troisième en 64, sous Néron.
Titus, qui se faisait appeler « les délices du genre humain », détruisit Jérusalem.
Domitien, fils de Vespasien, succéda à son frère Titus (81-96) et se signala par ses débauches et par la persécution qu'il dirigea contre les Chrétiens. Ce serait là la quatrième.
Sous Trajan (98-117), sous Hadrien (117-138), il y eut un peu de calme, mais sous Antonin le Pieux (139-161) eut lieu la cinquième persécution, et sous Marc-Aurèle (161-180) la sixième.
La secte johanite, si détestée, fut encore persécutée pendant le IIIe siècle par l'empereur Décius (249-251), qui fut tué en combattant les Goths après avoir ordonné la septième persécution.
Ses sucesseurs, Carus (282-283) et Numérien (288), continuèrent ce qu'il avait commencé, et Dioclétien (284-305) ordonna la dixième persécution.
C'est que le nouveau culte johanite embrasait les cœurs d'une exaltation inouïe ; les disciples de Johana se complaisaient dans l'admiration de ces vaillants défenseurs de la suprématie féminine résumée dans le Christ, qui savaient si bien mourir pour leurs croyances.
L'histoire ne connut jamais de sujet plus émouvant et plus capable de réveiller dans l'âme des peuples un intérêt si palpitant.
Paula, Principia, Marcella sont des femmes chrétiennes de cette société romaine en décadence. Sainte Théodore, dame riche, subit le martyre sous Dioclétien. Corneille l'a prise pour héroïne d'une de ses tragédies.
La foule suivit les obsèques de Fabiola, une des victimes de la persécution, comme elle avait autrefois suivi celles d'un imperator.
Ignace, le chef de la communauté d'Antioche, fut livré aux bêtes le 20 décembre 115, au moment où se produisit un tremblement de terre ; cela contribua à exciter la fureur du peuple inconscient contre les Chrétiens ; on le surnommait Théophore, « qui porte la Divinité ». Les Catholiques voient en lui l'auteur du chant d'église.
La première époque du Christianisme nous offre deux espèces de saints : les martyrs et les anachorètes (c'est ainsi qu'on désignait les végétariens).
Salomon Reinach, dans une communication à l'Académie des Inscriptions, a appelé l'attention de ses confrères sur un passage d'une lettre des communautés de Vienne et de Lyon, relative à la violente persécution de 177 en cette dernière ville.
Une esclave chrétienne, mise à la torture, à laquelle on voulait faire dire que les Chrétiens de Lyon tuaient les enfants pour les manger, répondit : « Comment nous soupçonner de pareille chose, puisque nous ne mangeons même pas le sang des animaux ? »
Donc ils étaient végétariens.
L'an 160 fut particulièrement terrible.
Ce siècle était plein d'horreur à cause de la violence des persécutions, qui durèrent encore longtemps. Toutes les provinces de l'Empire romain étaient arrosées du sang des Chrétiens ; tous les tribunaux en regorgeaient ; les supplices étaient horribles, la terreur universelle, les révoltes fréquentes.
Les sépulcres des martyrs étaient couverts d'opprobres (rappelons nous Messaline) et leur mémoire vouée à l'exécration, car la fureur de leurs ennemis ne se terminait pas par leur mort, mais elle allait encore persécuter leur os. Et, pour ôter aux Chrétiens l'espérance de la résurrection, on exposait leurs corps morts à la rage affamée des bêtes, mettant des gardes et des sentinelles jour et nuit pour empêcher que quelqu'un leur donnât la sépulture. Tout ce qui pouvait rester d'eux était brûlé et les cendres jetées dans les rivières ou éparses en l'air.
Les Chrétiens qui voulaient honorer leurs martyrs, n'ayant plus leurs corps dans une sépulture où on pouvait venir les honorer, se contentèrent alors de recueillir ce qui pouvait rester d'eux, et c'est de là qu'est venu l'usage des reliques.
II faut remarquer que le Christianisme ne se cacha et ne fut persécuté que tant qu'il fut féministe et fidèle à la doctrine de Johana. Il s'étala au grand jour dans la plus grande sécurité quand il devint masculiniste avec les partisans de Jésus. Alors ses principaux défenseurs nièrent la persécution antérieure, parce que, eux-mêmes, ils étaient soutenus par les empereurs qui avaient été les persécuteurs des premiers Chrétiens.
Ainsi, Origène dit qu'il y eut peu de persécutions et un très petit nombre de condamnés.
Cependant, quand les Catholiques triomphèrent, ils voulurent, pour se donner le prestige des premiers Chrétiens, mettre dans leur cause des martyrs et des saints. C'est ainsi qu'on inventa après coup le martyre de saint Césaire, ceux de saint Nérée, saint Achille, saint Domitille, saint Hyacinthe, saint Zédon, saint Macaire, etc. Elias Dupin, dans sa Bibliothèque Ecclésiastique, le déclare.

LES GNOSTIQUES
Nous avons vu que, dans l'Apocalypse (ch. n, 17), on nous parle d'un nom nouveau qui va être donné aux fidèles de la première doctrine chrétienne, afin qu'ils ne soient pas confondus avec les imposteurs qui s'intitulaient aussi Chrétiens tout en propageant une doctrine nouvelle en opposition avec celle des Johanites.
Le premier Christianisme va donc changer de nom et se fondre dans le Gnosticisme.
Mais cette nouvelle forme de la doctrine évoluera aussi.
Nous ne connaissons pas les premiers Gnostiques. On ne nous parle d'eux qu'à partir du IIème siècle, alors qu'ils ont eux-mêmes subi l'influence des idées régnantes et changé la primitive doctrine suivant leurs conceptions personnelles.
A cette époque troublée, les esprits étaient partagés en deux courants opposés : le courant des idées féminines, conservées dans les Mystères, et qui s'appuyaient sur la Nature et ses lois, et le courant révolutionnaire représentant la révolte masculine contre l'ancien régime gynécocratique et théogonique, et, qui par opposition aux lois de la Nature, créait le surnaturel.
Pour défendre cette mauvaise cause, les philosophes avaient déjà créé la casuistique ; mais entre eux se placent les Gnostiques qui créent la confusion.
La traduction grecque de la Bible et les écrits des docteurs juifs avaient jeté les esprits dans le doute et dans l'agitation ; on voyait de tous les côtés s'élever de petites sectes qui expliquaient, à leur manière, les croyances anciennes dénaturées ou les nouveaux Évangiles.
La Gnose, c'est, disent les Catholiques, la science humaine opposée à la science divine (1), alors que c'est au contraire la continuation de l'antique science divine, celle des Déesses ; c'est celle des Mystères, l'antique Théogonie que l'on ne comprend plus et que l'on va interpréter suivant l'esprit masculin, et c'est alors qu'elle deviendra la science humaine.
Le mot Gnose signifie « connaissance » (2). Il fut évidemment employé par les féministes johanites qui cherchaient un nom nouveau pour remplacer le mot « Chrétien » dont leurs adversaires s'étaient emparés et qu'ils dénaturaient. Mais le mot Gnose devait avoir le même sort. Il devait être pris par des sectes masculines qui allaient aussi le dévier de sa signification primitive.
C'est le sort de toutes les idées féminines d'être prises et dénaturées par des hommes. Tous les philosophes grecs peuvent être considérés comme les précurseurs des Gnostiques.
Le mot Gnose a été introduit dans les écrits de Paul, par exemple dans Romains, 2-20,11-33, 15-14, et dans Corinthiens, 1-5, etc., ce qui prouve que ces écrits ont été révisés après l'apparition du Gnosticisme, donc après le IIème siècle.
Ceux qui ont écrit l'histoire des Gnostiques nous disent qu'au début ils étaient divisés en quatre groupes, et dans ces groupes ils mettent toutes les sectes qui s'étaient formées depuis la propagande de Johana, pour soutenir sa doctrine ou pour la combattre ; confusion qui a pour but d'égarer l'opinion en mêlant le bien et le mal, la vérité et l'erreur sous le même nom.
Ces quatre groupes sont :
1° Les Écoles de Palestine, qui furent continuées par les Simoniens (disciples de Paul), les Corinthiens et les Nicolaïtes.
2° Les Écoles d'Asie, continuées par les Marcionites.
3° Les Écoles de Syrie, qui avaient pour chefs Saturnin et Bardesane d'Edesse.
4° Les Écoles d'Egypte, qui brillaient avec Basilide et Valentin.
Et on met parmi les principaux Gnostiques : Simon le Magicien (un des noms de Paul) et le diacre Nicolas qui tous deux trahirent la primitive École des Apôtres, puis Ménandre, Cérinthe, Basilide d'Alexandrie, Tatien, Ebion, Cerdon, Carpocrate, Saturnin, Marcion, Valentin, Marcus, Apelles, représentant des doctrines diverses.
Il faut y ajouter les Elxaïtes et les Stratiotiques ou Barbélites. Chacun se faisait le chef d'un petit groupe. Quelques-uns prirent une grande influence sur leur époque et arrivèrent à faire triompher cette science humaine qui contribua à fonder le catholicisme.
Le Christianisme, en discorde avec quelques-uns de ses premiers adeptes dès les premiers temps de son existence, fut l'objet de mille trahisons.
Toutes les sectes gnostiques, quoique séparées et divergentes, se disaient chrétiennes. Mais toutes donnaient au Christianisme une interprétation particulière. Chacun se déclarait partisan d'une secte quelconque, souvent de plusieurs à la fois.
Saint Epiphane compte 60 sectes.
Saint Irénée en connaît plus de 130. Elles avaient des évêques, des diacres, des lecteurs, des diaconesses. Toutes favorisaient la révolution religieuse.
Une de ces sectes avait une formule de serment que voici :
« Je jure de travailler à l'affranchissement de l'humanité, de ne rien distraire du patrimoine commun à tous, ni mes biens, ni mon amour. Je jure de mépriser toutes les lois, toutes les institutions qui oppriment l'homme et le pervertissent : mariage, famille, patrie, société, et, dans la conquête du bonheur universel, rien ne me paraîtra coupable. »
Le livre de perfection des Gnostiques s'appelait l'Évangile d’Ève. Saint Épiphane nous l'a conservé, et il nous dit que cet Évangile donne à l'arbre de vie douze fruits par an : Vidi arborem ferentem duodecim fructus in anno, et hoc est lignum vitae.
(1) N'y a-t-il pas un rapprochement à faire entre la Gnose et les Gnomes, anciens auteurs de sentences, évidemment féminines, puisque, dans la suite, on fit de ce mot le nom des Esprits qui président à l'élément de la terre, comparée à la Femme dans les religions masculines ?
(2) « La racine de gnose ramenée à ses consonnes G. N. est intéressante. Nous la retrouvons dans le « Cognoscere » latin et le « Gnôsis » grec, le « Knoledge » ou le « Kennen » anglais et allemand. La bénédiction est aussi associée à la posture spirituelle de l'agenouillement ; or, le genou, Knee en anglais, Knie en allemand, contient les mêmes consommes des langues indo-européennes = GN ou KN, que l'on retrouve dans la « puissance » du pouvoir « Können » en allemand, « can » en anglais, ainsi que dans le verbe connaître de ces deux langues : « to KNow » en anglais, et « KeNNen » en allemand. En russe, le même nom donne ZN, soit « Znati » connaître, et « ZNaK » le signe ou symbole, (« ZnaKomcto » la connaissance). On rapprochera de ces mots la GeNèse, (le « GeNetikos » grec). Quant au genou, il se « barak » dans les langues sémitiques (« baraquer » un chameau), mot qui provient de la même racine que Barakah et Berek bénédiction, éclair, foudre ou diamant. » (J. Tourniac, Principes et problèmes spirituels du RER et de sa chevalerie templière, note du chapitre X)

LES ÉBIONITES
Les Ébionites n'admettaient que les premiers Evangiles, ceux des Israélites, qu'on appelle « selon les Hébreux » ; ils ne faisaient pas cas des autres. Ils rejetaient absolument les Epîtres de Paul, parce qu'il le regardaient comme un apostat de la loi d'Israël. Ils niaient la divinité de Jésus.
Les Ébionites n'admettaient pas le mariage monogame. Pour eux, il n'y a pas de femme adultère, puisqu'il n'y a pas de femme mariée.
Cette secte dura jusqu'au VIIème siècle. Elle pratiquait la religion israélite de Johana, celle des Mystères.

LES EUCRATITES
Ceux-ci avaient pour chef Tatien. Ils soutenaient « qu'Adam était damné parce qu'il avait été le mari d’Ève et que le mariage était une débauche introduite par le démon ». Ce sont les Catholiques qui nous donnent ce renseignement.
Mais il est curieux de voir que le mariage est condamné par tous les vrais Chrétiens.
Les Eucratites, qui étaient les disciples de Justin, retranchaient des Évangiles la généalogie de Jésus. Ils rejetaient les Épîtres de Paul et recevaient plusieurs livres apocryphes, comme les Actes de saint André, de saint Jean, de saint Thomas, que nous n'avons plus.
Il est probable que ce sont ces Actes que nous ne connaissons pas qu'on a imités dans le livre écrit à la gloire de Paul et intitulé les Actes des Apôtres. Du reste, les Sévériens, une des branches des Eucratites, rejetaient les Épîtres et le livre des Actes, n'ayant que du mépris pour Paul.
Justin, leur fondateur, dit (dans le Dialogue avec Tryphon) : « Il en est certains de notre espèce, ô mes amis, qui professent que Jésus est le Christ, bien qu'ils le représentent comme un homme engendré par des hommes ; mais je ne partage point leur opinion, quand même la majorité de mes coreligionnaires la professeraient. »

LA TRINITÉ DES GNOSTIQUES
On avait discuté sur les trois degrés de Vishnou.
La Déesse de la Parole, que nous allons retrouver dans la divine Sophia des Gnostiques, fut aussi divisée, et c'est ce qui nous explique que les Ébionites et les Cérinthiens donnaient trois fils à Dieu : la Lumière, le Verbe, l'Unique engendré.
Les Pauliniens, qui avaient pour chef Paul de Samosate, évêque d'Antioche, soutenaient la doctrine unitaire contre les partisans de la Trinité.
Il en est qui font de Sophia la Mère des sept fils, parce que dans les Mystères on enseignait le septénaire.
D'autres, et Mme Blavatsky est de ce nombre, font de la Divinité un être sans sexe. Elle dit : « Le Christ ésotérique de la Gnose, Sophia, est nécessairement sans sexe, mais, dans la Théologie exotérique, il est mâle et femelle » (Doctrine Secrète, t. I, p. 55).
Les Monophysites, partisans de l'unité de nature, enseignaient que le Christ n'avait que la nature divine. Cette secte existe encore chez les Arméniens.

SYSTÈME DES VALENTINIENS (Valentin, né vers 140)
Dans l'Ecole de Valentin, le Dieu absolu, inaccessible, a été obligé, pour se révéler, de faire émaner de lui une série d'êtres supérieurs, les Éons (littéralement toujours étant, émanations personnifiées qui sortent de l'Esprit absolu). Chaque Éon porte un nom spécial.
Primitivement (car le système changea), la première série ou « tétrade » renfermait le Père antérieur et le Silence, le Père et la Vérité. Plus tard, on y introduisit la Cause première et la Pensée, d'où procède l'Esprit, le fils premier-né de la Vérité. Cela forme la tétrade sacrée, d'où sort une deuxième tétrade, le Verbe (Logos) et la Vie, l'Homme idéal et l'Eglise. Du Logos et de la Vie émanent à leur tour dix Eons, de 1'« Homme » et de 1'« Église » douze autres (tels que la Foi, l'Espérance, la Charité, et en dernier lieu la Sagesse), ce qui, avec les huit Eons primitifs, en faisait trente, constituant ensemble le Plérôme ou plénitude divine. La « Sagesse » (Sophia), le dernier des Eons, ravie à l'aspect des précédents, veut s'élever jusqu'à eux, mais elle tombe hors du Plérôme, dans le vide, d'où elle est ramenée par Horos, la vertu conservatrice du Plérôme.
Cette Sagesse (Minerve) qui veut s'élever et retombe, c'est la contrepartie de Prométhée, l'homme qui veut s'élever, ou de la fable d'Icare.
Pour préserver la Sagesse d'une nouvelle chute et affermir le Plérôme, l'Esprit (le 3e Éon) engendre le Christ et le Saint-Esprit. Le premier apprend aux Éons que le Père est incompréhensible ; le second leur enseigne à le louer. Dans leur joie, tous les Eons produisent ensemble Jésus le Sauveur, qui, doué de ce qu'ils ont de plus exquis, est comme la fleur du Plérôme et porte les noms de tous les autres Éons, particulièrement ceux de Christ et de Logos. D'autre part, « Sophia », la Femme, lors de sa sortie du Plérôme, avait, dans ses angoisses, procréé la matière, et de ses larmes s'étaient formés les fleuves de la mer. Elle avait aussi produit le Démiurge, le Dieu des Juifs (Hévah), l'ordonnateur de tout ce qui existe en dehors du Plérôme. C'est lui qui a formé le monde et fait l'homme à son image. Depuis lors, le Démiurge règne en roi sans connaître le Dieu suprême ; dans son ignorance, il se donne lui-même pour le vrai Dieu. Mais l'homme possède en soi un principe spirituel provenant de « Sophia » et qui le rend apte à connaître le vrai Dieu. L'Éon « Jésus », revêtant un corps apparent, est descendu du Plérôme pour éveiller ce principe, en apportant aux hommes la « Gnose » ou vraie science. C'est par elle qu'ils arrivent à la connaissance du Père et sont conduits au Plérôme.
Ce système est celui qui fut le plus combattu ; c'était de la pure folie.
C'est la littérature gnostique qui a porté au plus haut point l'exaltation divine de l'homme-Christ (1) ; c'était une sorte de débauche dans la licence de l'esprit se donnant le droit de divaguer.
Irénée, qui se plaint des Gnostiques, dit de Valentin : « Le docteur le plus profond de la Gnose croit qu'il avait existé avant Bythos (le premier Père de l'insondable Nature qui est le second Logos) un Éon parfait appelé Propator. »
Ceux qui appellent Dieu « Il » font de lui un mâle gigantesque.
Fabre d'Olivet nous donne sur l'origine du mot « Aion » ou Éon des explications qui nous font mieux comprendre de qui il s'agit. Il dit :
« Les Gnostiques donnent aux êtres intermédiaires le nom d'Eons. Ce nom, qui signifiait en égyptien un Principe de volonté se développant par une faculté plastique inhérente, s'est appliqué en grec à une durée indéfinie (l'immortalité, attribut de la Déesse).
« Le mot Eon, dérivé de l'égyptien « aï » un principe de volonté, un point central de développement, et iôn, la faculté génératrice (de la Femme).
« Ce dernier mot a signifié, dans un sens restreint, une colombe, et a été le symbole de Vénus. C'est la fameuse Yoni des Indiens, et même le Yn des Chinois, c'est-à-dire la nature physique de l'Univers. » (Vers Dorés, p. 204.)
Ce que Fabre d'Olivet ne dit pas, c'est que cette colombe qui représente la Yoni est aussi le symbole de l'Esprit-Saint, qu'on ne peut pas séparer des conditions sexuelles de la femme.
Donc les Esprits célestes des Gnostiques, les Eons, devraient être des représentations féminines, mais Valentin ne le comprend pas comme cela, car il donne à la Déesse Sophia un rôle singulier ; il dit d'elle : Sophia a voulu prendre la première place ; cela a engendré le désordre ; on l'a rejetée et on a remis en haut le Père.
Sophia a du chagrin, de la tristesse ; c'est cela qui est représenté par les puissances du mal. Elle engendre un avorton, Achamoth, qu'on appellera Sophia-Achamoth.
Nous supposons que c'est Johana qu'on désigne ainsi et que c'est sa doctrine qui est l'avorton, qui a été appelée Achamoth, dont on a fait escamoter quand on l'a cachée et plagiée.
Les Pères de l'Eglise, qui donnent cette interprétation de la Gnose de Valentin, ajoutent qu'il n'avait pas de morale, qu'il prêchait la débauche, disant que tout était permis.
Il y a évidemment là encore un renversement des facteurs : ce sont les Féministes qui ont dû dire cela, s'appuyant sur la loi du sexe féminin, et les Gnostiques ont pu le répéter sans comprendre que cette loi n'est pas celle de l'homme.
C'est en s'appuyant sur toutes ces absurdités qu'on arriva à supprimer la Déesse Sophia et à mettre à sa place le Père, c'est-à-dire le Dieu mâle.
Valentin parut à Rome un peu avant le milieu du IIème siècle. Tertullien dit de lui : « Il épargna les Écritures et il tâcha de les accorder avec ses erreurs en changeant la signification des termes. » Ses disciples composèrent un livre qu'ils appelèrent l'Evangile de Vérité. Ils s'efforcèrent, dit saint Irénée, d'accommoder à leurs rêveries les paroles du Seigneur (Kyria), les sentences des Prophètes et les discours des Apôtres.
Les Valentiniens donnent aux Êpîtres de Paul un autre sens que les Pères, puisque Irénée dit que ces hérétiques en pervertissent le sens naturel.
Ailleurs, il dit que les disciples de Valentin rapprochaient et réunissaient différents textes de l'Écriture pour en former un sens tout contraire à celui des auteurs sacrés. Il les compare à ces écrivains qui rassemblaient les vers des poèmes d'Homère et leur faisaient signifier tout autre chose que ce qui était admis. Il existe une méthode de Valentin (Langue universelle) que l'on appelle la Kabbale grecque.
(1) Irénée assure que ce sont les Gnostiques qui firent les premières images peintes de Jésus (Contre les Hérésies, I, 25, 5).

DE LA TRINITÉ ORIGINELLE EN RELIGION ET SON ÉVOLUTION
On discutait beaucoup dans les Ecoles d'Alexandrie sur les trois hypostases divines (suppôts, personnes, en grec hupostaseis), qui avaient formé primitivement une Trinité féminine : Mère-Sœur-Fille. Partout trois grandes Déesses représentaient la Femme sous ces divers aspects :
Nous trouvons le nombre trois dans la légende des trois patriarches Abraham, Isaac, Jacob, qui sont des matriarches formant une Trinité ; dans les trois enfants d'Adam, les trois enfants de Noah, les trois Grâces, les trois femmes qui se disputent la pomme, etc.
Cette Trinité s'était modifiée depuis qu'on avait introduit des Dieux masculins dans le Panthéon ; alors elle fut représentée par le Père, la Mère, l'Enfant ; telle la Triade égyptienne Osiris-Isis-Horus, greffée elle-même sur une plus ancienne Triade faite d'Ammon-Mauth-Khons.
Les Chaldéens avaient eu Anou, Nouah, Bel.
L'Inde fit d'abord sa Triade de Brahmâ, Nâri, Virâdj. Plus tard, elle fut composée de Brahmâ créateur (principe cosmique), Vishnou conservateur (la Femme), Çiva destructeur (l'homme) qui devint le transformateur, parce qu'il détruit et transforme le monde primitif fait par la Femme.
Enfin, les Scandinaves avaient Odin, Frigga, Balder ; les Finnois avaient Ukko, Luonnotar, Vainamoïnen ; et les Polynésiens ont encore Taaroa, Ina, Oro.
Quand les Bouddhistes fondèrent leur religion masculine, ils firent une Trinité composée de :
1° Bouddha, l'intelligence divine, l'Esprit ;
2° Dharma, la matière, les éléments concrets (sous-entendu la Mère) ;
3° Sangha, la réunion des deux principes ou des deux univers.
Cette Trinité fut apportée à Alexandrie de 270 à 303 par le philosophe Porphyre.
Mais, avant cette époque, Philon s'était occupé de la Trinité, et ses idées sur ce sujet avaient évolué, car nous trouvons qu'il nous indique une première Triade composée de : le Père créateur ; la Mère, qui est la sagesse, dans le sein de laquelle il engendre « non pas à la manière de l'homme » ; le Fils ou le monde conçu d'un germe divin.
Nous voyons dans cette façon d'engendrer l'origine de la conception miraculeuse de Marie.
Dans les Ecoles d'Alexandrie, les trois personnes divines étaient devenues :
- Le Père, duquel procède la création ;
- Le Fils, duquel procède l'âme ou l'Esprit ;
- Le Saint-Esprit, l'intellect divin.
Par le mot pro-cession, les Néo-Platoniciens croyaient échapper au dogme célèbre de l'émanation sur lequel reposaient les théogonies de l'Inde.
Les Catholiques paraissent avoir formé leur doctrine de la Trinité avec les démentis opposés aux systèmes antérieurs.
LE PÈRE, c'est la substitution masculine de la Mère : Déméter. Elle planait dans le ciel, c'est-à-dire dans la vie sereine et bienheureuse que donne la plénitude de l'être ; on fait de ce ciel allégorique un ciel réel où l'on va envoyer régner le Père dans une solitude infinie. Tous les attributs de la Mère deviendront ceux du Père, mais seront amplifiés. Elle créait l'enfant qu'elle faisait à son image et à sa ressemblance (morale surtout) : le Dieu-Père va créer tous les humains qu'il fera encore à son image et à sa ressemblance.
LE FILS, c'est l'homme, fils du Père, fils de l'homme. Et cela est dit dans un esprit de réaction contre ceux qui, dans le régime matriarcal, avaient été « fils de la Mère » dont ils portaient le nom. C'est la suprématie donnée à l'enfant mâle par un secret esprit de réaction contre l'ancien privilège de la fille (qui seule héritait).
L’Épître aux Colossiens (1,15-18) pousse jusqu'à l'extravagance l'idée de la suprématie de l'homme ; elle fait créer toutes choses par le Fils et pour le Fils, qui est « l'image du Dieu invisible, le premier-né de toute créature ». « Celui par qui toutes les choses ont été créées dans les cieux et sur la terre, les choses visibles et les choses invisibles, les Trônes, les Dominations, les Autorités, les Puissances ; tout a été créé par lui et pour lui. Et il est avant toutes choses et toutes choses subsistent en lui. Et il est la tête du corps de l'Eglise. Il est le commencement, le premier-né de ceux qui sont ressuscités des morts, entre tous le premier. »
Voilà « le Fils » mis, non seulement au-dessus de « la Fille », mais au-dessus de tout. Et pendant que le « Fils » est ainsi glorifié, la « Fille » va être avilie jusqu'au dernier degré.
LE SAINT-ESPRIT, c'est l'esprit féminin, qui était représenté à Rome par la Vénus-Lucifer (porte-lumière). Elle avait pour emblème la colombe, symbole que les Catholiques garderont pour représenter leur Saint-Esprit, sans sexe, ou ayant le sexe mâle. C'est l'antique Esprit qui flottait sur les eaux quand la Déesse émergeait de l'onde (1). C'est le feu de Vesta qu'on fait descendre en « langues de feu » sur les Apôtres pour illuminer leur intelligence.
Les Esséniens attribuaient au Fils la figure d'un homme et à l'Esprit celle d'une femme.
Le terme qui en hébreu signifie « esprit » est du genre féminin ; on le rencontre surtout dans le texte de la Genèse qui parle du chaos fécondé. Les théosophes hébreux ont déduit de cette particularité grammaticale toute une théorie métaphysique sur la troisième personne de la Trinité.
Chez les Orientaux, l'Esprit représente la Mère dans les Triades formées de trois personnes : le Père, la Mère, l'Enfant. (Voir la brochure de M. Ad. Kôster sur les traces de la doctrine de la Trinité avant le Christ, Francfort, 1845.)
En accouplant le Fils (Jésus) avec le Saint-Esprit (le Christ), le néo-christianisme ne faisait que rééditer ce qu'avait fait la Grèce quand elle avait accouplé Hermès et Aphrodite pour en faire un Dieu-couple, l'Hermaphrodite ou l'Andro-gyne, c'est-à-dire le partage des facultés.
Le Christ féminin accouplé à Jésus réalise encore ce couple fait des deux natures masculine et féminine, humaine et divine, et c'est sur ce thème que l'on discutera longtemps. En réalité, c'est le Christ qui est le Logos, la Parole de Vérité, l'Esprit. Cette substitution de sexe dut produire une grande exaspération chez les femmes et de profondes discussions, car nous voyons les premiers Chrétiens défendre avec vigueur ce « vol moral » et déclarer que « le péché contre le Saint-Esprit est le plus grand de tous les péchés » (Matthieu, 12, 32).
C'est que, en effet, la Femme est outragée dans son Esprit (et c'est cela qu'elle ne pardonne pas), quand on nie sa parole de Vérité, son « Logos », ou quand on vient l'assimiler aux hypothèses ou aux extravagances mentales des hommes.
Les premiers Chrétiens parlent « au nom du Saint-Esprit » féminin, ils ne parlent pas « au nom de Dieu ».
La théorie du Saint-Esprit était communiquée à tous les Chrétiens dans les Mystères ; elle se conserva chez les Gnostiques qui continuèrent à dire : Notre-Dame le Saint-Esprit.
Les néo-chrétiens qui vinrent après les philosophes d'Alexandrie exagérèrent leur système, et, pour qu'il soit bien entendu qu'ils ne laissaient à la Femme aucune place dans la Trinité, ils la représentaient symboliquement par trois Phallus (2). Cela dura jusqu'au Concile de Constantinople, où cet emblème fut remplacé par une croix.
Cette représentation qui sert de signe à la nouvelle religion prouve bien qu'elle a, au début, un caractère ironique, et qu'au fond de cette révolution il n'y a que la lutte des sexes : il s'agit de supprimer la Femme, du ciel d'abord, de l'Eglise ensuite. Mais, comme la substitution des sexes amène un résultat absurde, contre nature, on en fait un mystère qu'il est défendu d'examiner.
C'est depuis que l'on a supprimé l'Esprit de la Femme, l'Esprit dans la Femme, que l'on a inventé « les Esprits ». Celui qui figure dans la Trinité chrétienne vint consacrer le système ; après celui-là, une multitude d'autres apparurent ; cela devint une folie nouvelle dont la magie s'empara.
Les Kabbalistes distinguaient en Dieu trois attributs : l'un caché, l'Esprit de Dieu ; l'autre illuminant ou agissant, représenté par un homme qui trace les lettres ou les formes élémentaires du monde ; le troisième sanctifiant, une eau provenant de l'esprit, représentée par une femme qui façonne le chaos.
Et cependant, plus tard, les lois naturelles reprenant le dessus, on essaya de refaire une Trinité familiale composée de Jésus-Marie-Joseph.
Malgré lui, le Catholicisme tendait à réintégrer la Déesse dans son culte.
(1) C'est parce qu'Elle sort de l'onde amère qu'on La dit salée et que le mot sel indique encore une forme de l'Esprit. Avoir du sel, ou, avec les Espagnols, être « salada ». C'est l'origine du sel que l'on met sur la langue au moment du baptême. Dans les initiations au culte de Vénus, le grain de sel rappelait l'origine Marine de la Déesse pleine de « salacité ».
(2) Pour expliquer le rôle fécondateur de l'homme, on accolait le Phallus à la croix, comme on peut le voir dans les galeries du Musée égyptien, au Louvre (en 1927). C'est dans cette position, la crucifixion, que la Femme subissait « l'onction du mâle », d'où le nom d'oint qu'on lui donnait.

TRANSFIGURATION DE JOHANA
Vers 170, on publia un Evangile dit « selon Jean ». Ce livre avait pour but de faire affirmer Jésus par Jean lui-même.
Puis on y mêla un roman d'amour. On connaissait encore alors le sexe de Johana, puisque les Pères de l'Eglise s'en moquaient et l'appelaient « la vieille radoteuse ». Mais, dans cet écrit, on va la représenter jeune et aimant Jésus comme un époux.
Celui qui a écrit cela était un poète qui, de l’Évangile, fait un roman, qu'il mêle aux dissertations philosophiques du primitif auteur de ce livre.
Comme il copie un Évangile vrai de Jean, l'écrit d'abord anonyme désigné comme l’Évangile du Logos, il ne raconte pas la légende de l'enfance comme l'a fait Luc, parce que Jean n'a pas pu raconter lui-même la légende de sa propre enfance.
Cet auteur fait de Jésus un homme qui apparaît dans toute sa perfection divine, sans préparation, parce qu'on n'avait alors que la préoccupation de mettre un homme à la place d'une femme. On affirmait le Dieu sans penser aux contingences accessoires d'une vie d'homme. Aussi la vie de Jésus que cet auteur raconte n'est pas la même que celle qui nous sera donnée plus tard, quand d'autres écriront d'autres Évangiles. Ce n'est pas dans le même pays qu'il en met les principaux événements, ce n'est pas le même jour qu'il le fait mourir, c'est pendant trois ans qu'il le fait prêcher alors que Marc et Matthieu, plus tard, ne lui donneront qu'un an d'apostolat.
Toute cette histoire, dont nous trouvons ici la première ébauche, sera arrangée et amplifiée plus tard.
C'est Théophile d'Antioche, mort vers 180, qui attribua pour la première fois cet Évangile à Jean. Après lui, les Pères de l'Eglise n'auront plus qu'à affirmer ce qu'il osa dire le premier. Ce fut surtout Irénée qui affirma, dans son livre « contre les Hérésies », que Jean est l'auteur de cet Évangile et que c'est à Éphèse qu'il l'a publié. On en fera le 4ème Évangile quand, un siècle plus tard, on aura écrit ceux de Marc et de Matthieu pour en faire les deux premiers, et arrangé celui de Luc pour en faire le 3ème.
Personne avant 170 n'avait cité cet Évangile. Les vrais écrits de Johana étaient cachés, on ne les mentionnait pas ; cependant, aussitôt que celui-ci parut, il fut entre toutes les mains.
C'était la première fois qu'on affirmait l'existence de Jésus dans un Évangile. Les masculinistes s'en emparèrent parce qu'il donnait de l'élévation à leur doctrine, jusque-là bien mal présentée. La théorie du Logos lui donnait un cachet philosophique qui la rehaussait ; puis cet Évangile affirmait des idées flottantes comme la haine des Juifs, la suppression de leur Loi. C'est cet Évangile qui donna une consécration à toutes les idées folles qui, mal présentées comme elles l'avaient été d'abord, n'auraient jamais pénétré dans le monde philosophique. On accepta donc cet écrit anonyme avec enthousiasme, parce qu'on le publiait en lui donnant comme auteur l'Apôtre Jean qui avait eu un si grand prestige jadis et dont on conservait en secret la doctrine.
Mais le rédacteur de cette nouvelle version va nous présenter Johana sous un aspect nouveau ; il va la faire descendre sur le plan sexuel et en faire un type de tendresse, d'amour profane, une femme qui appuie sa tête sur l'épaule de l'homme qu'elle aime, Ce qui est un geste très féminin, mais qui ne cadre pas du tout avec la spiritualité de la vraie Johana. Son histoire de Jésus est un roman d'amour qui tend à faire croire que Johana a connu cet homme divin, que les autres disciples ne pouvaient comprendre comme elle. On lui fait dire qu'elle était « le disciple que Jésus aimait, qui était couché sur son sein ». Ces manifestations de tendresse qu'on lui prête sont toutes féminines ; un disciple masculin ne se couche pas sur le sein d'un autre homme (16, 12-13).
C'est à elle que Jésus mourant recommande sa Mère, idée délicate qu'aucun autre Évangéliste n'a eue (19, 26). Cet auteur se donne comme le seul intelligent, le seul qui comprend Jésus (1,14). Il se met moralement bien au-dessus des douze et appartient à une classe supérieure de la société. Le Jésus de cet auteur, c'est l'homme idéal que la Femme aime.
Dans cet ouvrage, on n'a pas introduit les miracles multiples inventés par Simon le Magicien ; on copie la philosophie abstraite de Johana, on lui prend même ses idées, qu'on ne comprend pas, comme l'affirmation du Christ universel, ce qui est en opposition avec l'idée nouvelle qui va donner à Jésus seul le titre de Christ.
Cependant, l'auteur de cet Evangile mentionne sept miracles qui, sans doute, étaient acceptés à cette époque. Deux de ceux qu'il mentionne : la marche sur les eaux, la multiplication des pains, seront copiés par ceux qui, après lui, feront d'autres Evangiles.
Aussitôt que Jean fut accepté comme étant l'auteur de ce livre, on lui fit une nouvelle légende, et c'est à partir de 150 que cette légende commence à être connue. Vers 150, Justin identifie Jean, l'auteur de l'Apocalypse, avec l'autre Jean, le disciple de Jésus.
On trouve dans le Nouveau Testament six ou sept Jean. Tous ont été créés pour représenter un des aspects de la vie de Johana, une des phases de son existence, de son apostolat, dont on va faire un récit séparé du reste. Quand elle vivait, personne ne parlait d'elle ; depuis sa mort, on multiplie ses légendes.
En 190, Polycrate fait de Jean un « presbyte » et nous dit qu'il a été martyr et docteur. (Martyria, que l'on fait signifier témoignage.)
C'est à l'auteur de l'Evangile du Logos qu'on attribue cette parole dite dans sa vieillesse : « Mes petits enfants, aimez-vous les uns les autres. »
Presque tous les premiers auteurs néo-chrétiens s'occupent de Jean et amplifient sa légende, ce qui ne doit pas nous étonner, puisque c'était dans les usages du temps de démarquer et de remanier les écrits, surtout quand l'auteur était une femme et que cet auteur était mort.
Irénée, Tertullien, Eusèbe et bien d'autres, s'indignent contre ceux qui changent les Écritures. Denys, évêque de Corinthe, vers 175, dit : « A la demande de nos frères, j'ai écrit des lettres, mais les apôtres du diable les ont remplies d'ivraie, ils en ont retranché et y ont ajouté. Le « malheur à vous » ne leur manque pas. Il n'est pas étonnant que quelques-uns aient entrepris de falsifier les Écritures du Seigneur (Kyria), puisqu'ils n'ont pas épargné les écrits qui ne les valent point. » (Cité par Eusèbe, Histoire Ecclésiastique, IV, 23.)
Quand on parle des Écritures du Seigneur, ce n'est pas de Jésus qu'il est question, puisque Jésus n'a rien écrit. Nous répétons, encore une fois, que le Seigneur est la traduction par saint Jérôme du mot « Kyria », titre donné à Johana.

LE QUATRIÈME ÉVANGILE (publié en 170)
Jean commence par rappeler la doctrine du Logos ou Verbe, cette parole primitive, cette science des anciens temps, perdue pour le monde, cachée dans les Mystères des sociétés secrètes. Il dit :
Chapitre I, 1. - Au commencement était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était Dieu.
2. - Et la parole était au commencement avec Dieu.
3. - Toutes choses ont été faites par elle et rien de ce qui a été fait n'a été fait sans elle.
4. - C'est en elle qu'était la vie, et la vie était la lumière des hommes.
5. - Et la lumière luit dans les ténèbres et les ténèbres ne l'ont point reçue.
6. - Et la parole a été faite chair et elle a habité parmi nous, pleine de grâce et de vérité ; et nous avons vu sa gloire.
Tout ceci se rapporte à la parole de Vérité de la Femme-Déesse. C'est Elle qui fut le Verbe fait chair, Elle qui fut pleine de grâce. Mais, tout de suite après, le réviseur attribue à l'homme, au Fils du Père, toute la gloire de la Déesse, et il ajoute :
18. - Personne ne vit jamais Dieu.
Ce verset semble destiné à nier la Déité féminine, la Déesse vivante.
En face de ce commencement, il est facile de comprendre que ce livre a été fait avec un écrit féministe qu'on a altéré en y introduisant la légende de Jésus. Il est certain que, dans la forme qui s'est transmise jusqu'à nous, cet Évangile est devenu quelque chose d'incompréhensible.
La légende chrétienne racontée par Jean est toute différente de celle des autres auteurs ; c'est un petit roman avec toutes sortes de détails et d'embellissements littéraires ; mais, si la forme est plus élevée, le fond est souvent aussi absurde. Cependant, certains versets qu'on aurait oublié d'altérer nous donnent des idées plus justes que celles des autres auteurs du temps. Au verset 18, on fait faire à Jésus cette déclaration :
« Vous m'êtes vous-mêmes témoin que j'ai dit que ce n'est pas moi qui suis le Christ, mais que j'ai été envoyé devant lui. »
29. - Celui qui a l'épouse est l'époux ; mais l'ami de l'époux qui est présent et qui l'écoute est ravi de joie d'entendre la voix de l'époux ; et c'est là ma joie qui est parfaite.
Donc, Jésus n'est pas le Christ, il est l'époux, et c'est pour cela qu'il parle et qu'on l'écoute avec joie.
Nous ne pousserons pas plus loin la critique de ce livre, trop connu du reste, pour qu'il soit besoin de le rappeler. Nous voulons seulement faire remarquer que sa réputation de spiritualité lui vient uniquement des six premiers versets du chapitre premier, les seuls qui soient de Johana et qui signifient quelque chose si on met le mot Dieu au féminin. Tout le reste est écrit dans des idées qui sont en contradiction avec celles de Jean (Johana).

LA MORT DE JOHANA
Une question importante s'impose ici : c'est de savoir comment les principaux personnages de la grande lutte du 1er siècle ont disparu.
Voici ce que les théologiens modernes nous disent au sujet de la mort de Johana, qui, pour eux est Jean :
(Dictionnaire des Sciences religieuses de Lichtenberger, article signé Sabatier.)
« Nous retrouvons en l'an 69, à la veille de la destruction de Jérusalem, le nom de Jean à la tête de l'Apocalypse, ou Révélation, adressée sous forme épistolaire aux sept Églises d'Asie Mineure. L'antiquité chrétienne a reconnu dans le voyant de Pathmos le fils de Zébédée. Le fait est qu'on ne voit pas de sérieuses raisons de penser autrement. Un tel livre répond assez bien au tempérament de celui que Jésus appelait l'Enfant du tonnerre. Le seul argument qu'on fait valoir contre cette opinion est que, d'après Apoc, XXI, 14, les douze semblent morts à ce moment. C'est une induction que rien ne justifie. Si l'Apocalypse a été écrite par Jean, elle établit d'une manière inébranlable sa tradition d'après laquelle Jean se serait établi en Asie Mineure et aurait dirigé avec une autorité suprême les Eglises de ce pays. A la fin du second siècle, cette opinion est unanimement acceptée et particulièrement défendue par les éveques mêmes de l'Asie Mineure. »
Justin martyr reconnaît Jean comme l'auteur de l'Apocalypse et, dès lors, confirme le séjour de Jean en Asie Mineure.
Polycarpe, s'il ne parle pas de Jean dans son épître, invoquait son exemple et sa tradition devant Anicet, évêque de Rome. Enfin, les fragments de Papias, conservés par Eusèbe, sont plutôt favorables que contraires à ce séjour. Il est vrai qu'on a fait quelque bruit d'un passage, publié en 1862, de la chronique de Georges Hamortolas (IXème siècle), où se lisent ces mots : « Après Domitien, Nerva régna pendant un an, lequel ayant rappelé Jean de l'île, lui permit de demeurer à Éphèse. Resté seul survivant entre les douze disciples, après avoir composé son Évangile, il fut jugé digne du martyre ; car Papias, évêque d'Hiérapolis, qui fut témoin du fait, raconte dans le second livre des Discours du Seigneur qu'il fut tué par les Juifs, accomplissant ainsi, aussi bien que son frère, la parole que Jésus avait prononcée sur eux. »
(Irénée confond Jean l'apôtre avec Jean le presbyte.)
La coutume spéciale aux Églises d'Asie Mineure de célébrer le 14 Nisan, toute la controverse pascale que ces Églises soutiennent avec acharnement pendant plus d'un siècle contre Rome, au nom de l'apôtre Jean, le mouvement du Montanisme qui se rattache à ce même nom, enfin le fait qu'on lui attribue l'Apocalypse, les lettres johaniques, le 4ème Évangile, sont autant d'arguments en faveur d'un séjour prolongé de Jean en Asie Mineure ; c'est là que la légende nous le montre tantôt en lutte avec Cérinthe, tantôt courant après un jeune homme égaré qu'il arrache à sa vie de brigand et qu'il ramène à l'Église, tantôt vieillard affaibli se faisant porter dans les assemblées chrétiennes et y répétant jusqu'au bout sa touchante prédication : « Mes petits enfants, aimez-vous les uns les autres » (Iren., III, 3-4 ; Clément d'Alexandrie, Quis dives, 42 ; Jérôme, Epît. aux Gal., V, 10).

LA MORT DE JEAN EST ENTOURÉE DE CROYANCE SURNATURELLES
Sabatier nous dit encore :
« Augustin rapporte que plusieurs croyaient qu'il vivrait encore, reposant paisiblement dans son tombeau d'Ephèse où l'on voyait la terre doucement agitée par son haleine.
« On a été plus loin : d'après les Actes Johanites, il aurait été enlevé au ciel sans passer par la mort.
« Les dates diverses de la mort de Jean, que l'on recueille dans les Pères de l'Église, n'ont pas plus de valeur historique que ces légendes.
« D'après Jérôme, il serait mort 68 ans après la passion du Christ, c'est-à-dire vers 100. Suidas affirme qu'il aurait vécu 120 ans, ce qui nous porterait jusqu'au règne d'Hadrien.
« Dans la tradition de l'Église chrétienne, l'image de Jean apparait imposante. Elle est à côté de celle de Pierre et de Paul et les domine même par un air de douce lumière et de sereine grandeur. Ils sont les apôtres du passé et du présent ; lui est l'apôtre de l'avenir, du millenium triomphant, de l'Église universelle, se reposant dans la paix et la joie de la victoire parfaite. Il a l'aigle pour symbole et sa parole est la fin des révélations divines sur la Terre. Mais on ne peut se dissimuler que cette séduisante figure, plus idéale que celle de Pierre et de Paul, est, par cela même, moins historique, et qu'on cherche vainement à la retrouver dans les siècles apostoliques. En l'examinant avec attention, on s'aperçoit bien vite que l'imagination chrétienne y a réuni et fondu, en les émoussant, des traits fort contradictoires et fort divers d'origine, traits pris tour à tour aux Evangiles synoptiques, aux Actes, à l'Apocalypse, au 4ème Evangile, aux Epîtres Johaniques, à la légende. Or, bien de ces données semblent s'exclure ; s'appliquent-elles à un seul personnage ou à plusieurs ? De l'enfant du tonnerre que grondait Jésus à l'apôtre de l'amour, à la figure du Jean ecclésiastique, en passant par le voyant de pathmos, il y a une telle distance que si une seule âme d'homme l'a parcourue tout entière, même pendant une vie de cent ans, nous nous trouvons en présence du plus prodigieux développement psychologique dont l'histoire humaine fasse mention
« Aussi le doute s'impose-t-il à l'esprit, et nous devons reconnaître que la vie de Jean, l'apôtre de Jésus, comme l'origine de la littérature qui porte son nom, reste encore un mystère non éclairci. »
Mystère bien facile à pénétrer quand on sait que c'est une des plus audacieuses substitutions de sexe. Toute la psychologie de la haine des usurpateurs y est en jeu.

DEUXIÈME SIÈCLE
Résumons l'état d'esprit du premier siècle.
Un grand mouvement se produisit en Judée, en faveur du rétablissement de la loi primitive des Israélites, de leur Déesse Hévah, du retour de la suprématie de la Femme exprimée par le mot Christ. Ce mouvement, qui a pour initiatrice une femme israélite, Johana, est surtout secret ; c'est la continuation de l'enseignement des Esséniens. Cependant, parmi les premiers adhérents, des défections, des trahisons se produisent ; des ambitieux ne se contentent pas d'un rôle secondaire, ils veulent devenir des chefs, et se séparent du premier groupement pour faire leur groupe à part. En même temps, ils font un nouvel Evangile.
Mais, comme le premier mouvement chrétien a eu un grand retentissement et les honneurs de la persécution qui l'ont fait connaître, ceux qui s'en séparent gardent le nom de Chrétiens, gardent aussi le fond de la doctrine, l'attente de la résurrection du Christ, et son règne à venir. Seulement, ils changent le sexe du Messie attendu : ce n'est plus la Femme, c'est l'Homme qui va venir. Anomalie étrange ; puisque l'homme règne, pourquoi lui dire : « Que ton règne arrive » ?...
Judas le Galiléen donne la première impulsion à cette réaction. Son Messie, c'est Caïn.
Sous le nom de Simon le Magicien, il se donne comme étant lui-même le Messie attendu. Le Christ, c'est lui, le Christ est en lui. On s'habitue ainsi à l'idée que le Christ est un homme. Dans les Epîtres de Paul, on attend l'arrivée du « Fils de Dieu » qui va réaliser les espérances messianiques. Mais Paul professait hautement que son Messie n'était pas celui des Hébreux, le Christ des premiers Chrétiens. L'Homme-Dieu qu'il est, ou qu'il attend, est en opposition avec les traditions israélites, quoiqu'il s'appuie sur les écrits des anciennes Prophétesses masculinisées par la version des Septante. Et comme toutes les espérances qui s'appuyaient sur la tradition antique s'appliquaient au retour à la vie sociale « de la femme qui a souffert par les péchés de l'homme », en appliquant à un homme ces revendications féminines, on fait un dogme incohérent, absurde, ridicule.
Une fois le système commencé, une multitude d'hommes vont suivre les premiers néo-chrétiens, c'est-à-dire les Paulinistes, et combattre la doctrine des féministes qui servait de base à la grande rénovation tentée. Cependant, quelques-uns, plus hypocrites que les autres, vont se dire les continuateurs des Chrétiens. Ceux-là feront un Evangile dans lequel ils introduiront des femmes en leur donnant des figures d'hommes.
Johana deviendra Jean-Baptiste et saint Jean, Jude (Judith) deviendra un apôtre. Seulement, la haine des néo-chrétiens pour la Femme s'apercevra à chaque page de leurs écrits. Non seulement ils lui donnent une place inférieure, mais quelques-uns lui attribueront leurs mœurs dépravées. Tout cela fait un mélange incohérent, fou, au milieu duquel on ne se reconnaît plus. Le public, qui ne comprend pas, est incapable de débrouiller la vérité de l'erreur, et les condamne tous sans les distinguer.
Les empereurs, qui comprennent encore moins et qui ne voient qu'une chose, le pouvoir attaqué, persécutent tous les novateurs en bloc.
Cependant, les néo-chrétiens (les Paulinistes), qui ont l'astuce et la ruse du serpent, travaillent les hommes qui sont au pouvoir, les flattent si bien que ceux-ci se mettent peu à peu de leur côté ; et ce sont seulement les premiers Chrétiens qui subissent l'oppression, la haine des hommes, le mépris de la foule ignorante et la persécution.
Les souverains pervertis et, avec eux, tous les fauteurs d'immoralité, encouragent les néo-chrétiens et attaquent l'ancienne morale, c'est-à-dire l'ancienne Religion naturelle.
Mais cette révolution religieuse, que nous résumons en quelles lignes, s'accomplit lentement, insensiblement, et il fallut plus de trois siècles pour l'achever.
Le mouvement néo-chrétien grandissait parce qu'il flattait la nature de l'homme, le délivrait d'une morale gênante, flattait ses instincts de domination en asservissant la Femme. Cependant, l'esprit étroit de ses apôtres aurait certainement fait sombrer leur cause si les maximes de l'Evangile féministe, qu'ils introduisaient dans leurs textes, ne leur avaient donné une apparence de moralité, de grandeur spirituelle, qui les fit triompher en dépit de leurs maladresses. Les quelques principes vrais sur lesquels ce nouveau dogme s'appuyait éblouissaient de leur éclat cette foule depuis longtemps privée de tout enseignement moral, et en butte à la tyrannie des empereurs. Ceux qui enseignaient « la parole de vérité », ainsi qu'ils disaient, furent pris pour des prophètes et des envoyés d'un Dieu par les masses crédules, fatiguées de l'anarchie morale qui régnait à Rome ; on se jeta dans les bras de ces novateurs, croyant qu'ils apportaient un élément nouveau de Vérité et de Justice.
Puis la révolution qui s'opérait alors, quoique ayant pour cause la religion, avait un côté social ; elle devint une arme dans les mains d'un parti qui s'en servit pour soutenir le despotisme masculin.
Les femmes, en rajeunissant la morale, voulaient revenir à la justice, à l'équité, à la fraternité ; cela renversait le principe de l'Etat androcratique.

COUP D'ŒIL SUR L'ÉTAT DES ESPRITS
Du premier au deuxième siècle, l'esprit était partagé entre les anciennes théologies (la Théosophie), les systèmes philosophiques, le polythéisme gréco-romain et la Gnose chrétienne dans sa première forme.
Il n'y avait pas, à ce moment, d'orthodoxie masculine dans le néo-christianisme. Ce n'est qu'après le concile de Nicée (en 325) qu'on formulera un dogme et qu'on cherchera à l'imposer.
A l'époque que nous étudions, on discutait, on ne se battait pas encore ; les divagations allaient leur train, chacun se déclarant en possession de la vérité ; mais les hérésies n'étaient encore que des « opinions de choix », des croyances personnelles étaient permises et écoutées, chacun ayant les siennes.
C'est de cette agitation du second siècle que sortit l'orthodoxie romaine ; elle fut faite de toutes les opinions mélangées ; on y retrouve le rituel de la Perse et de l'Egypte, la triade égyptienne, la morale bouddhiste.
Horace et Virgile avaient cru à la magie et aux philtres. Les enchanteurs avaient exorcisé l'ombre d'Agrippine. Pline, dans son « Histoire naturelle », avait raconté toutes sortes de prodiges ; on colportait les miracles d'Apollonius avec crédulité ; les superstitions populaires se multipliaient ; Clément d'Alexandrie et les autres Pères de l'Église y ajoutaient foi ; ils croyaient au Phénix, Origène accordait aux Brahmanes et aux Mages un pouvoir magique. Irénée pensait que la femme de Loth était encore à moitié en vie sur les bords de la Mer Morte. Justin croyait au pouvoir surnaturel des sorcières sur les morts.
Tel est l'état mental auquel on allait proposer un nouveau surnaturel.

OPINION DES CHRÉTIENS FÉMINISTES SUR LES FAUX CHRÉTIENS MASCULINISTES
Comment les premiers Chrétiens se comportèrent-ils vis-à-vis de la secte nouvelle qui se posait en face d'eux en rivale ?
L'archéologie moderne a fait des découvertes dans les Catacombes qui vont nous renseigner sur ce que pensaient les vrais Chrétiens de leurs imitateurs, les faux Chrétiens.
On a mis à jour une vaste région souterraine contenant des peintures, des mosaïques, et de nombreuses inscriptions.
C'est en s'inspirant de ces peintures que Bouguereau a peint un tableau représentant sainte Cécile rapportée des Catacombe, et une Vierge consolatrice.
Mais on y a trouvé aussi un dessin représentant le Dieu nouveau de la nouvelle secte avec une tête d'âne et tenant dans ses mains les extrémités de la croix (qui était alors le Tau) placé devant lui.
A droite de ce dessin est une figure d'homme, assez pauvrement vêtu, qui envoie un baiser d'adoration au Dieu-âne. Au-dessous de lui se trouve, une légende explicative en caractère grecs grossiers et mal orthographiée, dont voici le sens : Alexamenos en train d'adorer son Dieu.
Dans le vocabulaire de cette époque, nous trouvons les mots suivants :
Onocentaures : esprits malfaisants à figure monstrueuse, moitié homme et moitié âne.
Onomychites, Onochoirites ou Onochoe : monstre moitié âne et moitié porc dont les païens disaient que les néo-chrétiens avaient fait leur Dieu.
(Daremberg et Saglio, Dictionnaire des Antiquités grecques, au mot adoration.)
Donc, à cette époque de stupidité, on compare l'homme qui se fait Dieu à l'âne. (Qui fait l'ange fait la bête.)
Cette idée de comparer l'homme à l'âne remonte loin. « Aner » en grec veut dire homme, mâle. De là se sont formés tous les mots qui commencent par « an », andros, anthropologie, etc. Déjà le culte bacchique nous montre le baudet du vieux Silène.
Donc l'âne était depuis longtemps, pour les féministes, le symbole de la bêtise qui résulte, chez l'homme, de la débauche. Si les Grecs et les Latins représentent le mâle inférieur par le faune et le satyre, qui n'ont de l'homme que la moitié du corps, les Israélites l'ont représenté par l'âne qui était déjà dans la Bible.
Pour mieux faire comprendre l'origine des légendes de l'âne, rappelons qu'Apulée, écrivain latin, qui mourut en 190, écrivit un roman intitulé « l'Ane d'Or », d'après un ancien conte grec. En voici le sujet dont l'allégorie est transparente :
Un jeune curieux qui a vu par hasard une magicienne, en se frottant d'une certaine pommade, se changer en oiseau et s'envoler dans le ciel, veut l'imiter. Mais, s'étant trompé de flacon, se trouve métamorphosé en âne. (Allusion à la polarité sexuelle qui fait monter la femme, et descendre l'homme.) Heureusement, il sait qu'il pourra reprendre la forme humaine en mâchant des roses (1). Son mauvais sort veut qu'il ait beaucoup de peine à en trouver, ce qui retarde sa délivrance.
Dans ce roman, on parle des Dieux, on invoque la Déesse Isis ; on ne mentionne nullement la divinité mâle de Jésus. Et cependant ce livre est écrit un siècle et demi après sa prétendue mort. Aucune allusion n'y est faite, nul ne le connaît comme un Dieu.
Rien d'étonnant à ce que l'homme-Dieu inventé par Paul ait été comparé à l'âne, puisque c'est du nom qu'on lui donnait : Iêsous, que vient le mot âne en latin ; et voici comment : de « esu », qui vient du sanscrit « asu », on avait fait « asinus », « asne », « âne » ; en Scandinave « as » (Petit Dictionnaire, p. 417).
Mais l'homme cynique accepte la comparaison et s'en pare comme d'une gloire, et nous voyons alors l'âne jouer un rôle dans la secte nouvelle comme jadis le taureau divinisé dans le bœuf Apis.
C'est ainsi que les Jésuistes, qui prenaient tout à l'envers, avaient pris pour emblème la tête d'âne, parce que cet animal, dans le symbolisme des premiers Chrétiens, représentait la bêtise qui résultait, chez l'homme, des excès sexuels : « Leur Dieu est une tête d'âne », disait-on. Sur un tableau qui porte cette inscription : Dieu des Chrétiens, race d'âne, il est représenté avec de longues oreilles, un pied corné, dans une main un livre, et couvert d'une toge. Pour achever la parodie, on le fêtait pendant le « grand jour » ou « jour du soleil » qui était le jour consacré à Johana (la Saint-Jean, 24 juin). (Voir Tertullien, Apologétique aux Nations, I, 11, 14.)
Dans l' « Octave » de Minucius, un des interlocuteurs, Félix, reproche aux néo-chrétiens « d'adorer la tête de l'animal le plus ignoble, la tête de l'âne ».
Il est facile de voir dans ce culte une ironie de l'homme adressée à la femme, qui, la première, avait symbolisé l'homme inintelligent par l'âne.
Les Égyptiens avaient agi de même quand ils avaient renvoyé à la Femme ses insultes, en représentant Isis avec une tête de vache, parce qu'on les avait comparés au taureau.
Ainsi les faux Chrétiens, les Paulinistes, ajoutent un chapitre à la zoolâtrie, en introduisant l'ânesse dans leurs réponses aux femmes de leurs temps. C'est ainsi que Marie sera portée sur une ânesse dans sa fuite en Egypte, sans doute parce que Jésus est monté sur un âne en entrant à Jérusalem.
Nous voyons aussi que, parodiant une femme anonyme, on nous parle de l'ânesse clairvoyante de Balaam qui parlait.
Plus tard, Millin, ne comprenant plus la parodie et la prenant au sérieux, nous dira : « La prose de l'âne avait pour objet d'honorer l'humble et utile animal qui avait assisté à la naissance de Jésus, et l'avait porté sur son dos lors de son entrée à Jérusalem. »
On sait assez que les faux Chrétiens instituèrent la « fête de l'âne », qui se perpétua à travers le moyen âge, jusqu'à la Renaissance. Dans cette fête grotesque, ils parodiaient la principale cérémonie et la plus sacrée de l'ancienne religion, la communion ; et ces fous célébraient une grande messe asinique.
On amenait devant l'autel une jeune fille tenant un enfant dans ses bras, ce qui devait représenter Myriam et son livre, lors de la sortie d'Egypte.
On lui chantait un hymne :
Orientis partibus
Adventavit asinus
Pulcher et fortissimus.
Le prêtre terminait la messe par un braiement prolongé et reproduit en chœur par tous les assistants. Tous imitaient avec entrain ce clairon asinique, non seulement après chaque strophe de l'hymne, mais à l'introït de la messe, au sursum corda, jusqu'à l'ite missa est, que le prêtre remplaçait par ces trois nasillements : hi-han, hi-han, hi-han, répétés ensuite par le peuple. L'office tout entier n'était, ce jour-là, qu'une rapsodie de ce qui se chantait pendant le cours de l'année. On donnait à manger et à boire au baudet sacré, puis on le menait du chœur dans la grande nef ; là, le peuple mêlé au clergé dansait autour de lui en faisant toutes sortes de contorsions et de grimaces, avec de nouvelles explosions de hi-han. La danse finie, on reconduisait l'âne dans le chœur où le clergé terminait la fête. Il ne faut pas s'étonner, après cela, que les vrais Chrétiens aient considéré leurs imitateurs comme des fous. Le mot fou prend son origine dans follis (ballon crevé) et sert à désigner l'homme à la tête vide comme un ballon.
Les Paulinistes jésuistes, ainsi désignés, portaient la robe blanche des fous. (Le blanc était encore la couleur emblématique de la sexualité mâle. La couleur féministe était le rouge.) Tout était parodié par ces hommes. La croix sur laquelle on avait cloué une rose à l'intersection des branches (la rose-croix), se retrouve parmi eux, mais au lieu de la rose ils mettent un poisson qui représente, en la ridiculisant, la Femme. Dans les catacombes de Rome existe encore « le poisson sur la croix » qui servait de symbole aux Paulinistes. Ces hommes regardaient avec haine et jalousie tous les cultes de l'époque, ils en troublaient les cérémonies et, souvent, maltraitaient leurs ministres. C'étaient des agités regardés comme dangereux. L'opinion de la population sensée les condamnait absolument, et avec raison. Ils se faisaient un jeu de profaner la vérité, de mépriser la Femme et de parodier son culte.
En face du déchaînement de bêtise de ces hommes, on se demande ce que disaient les gens sensés, les femmes sérieuses qui se sentaient outragées par ces insensés. Ce ne sont certainement pas les histoires masculinistes qui nous le diront, puisque les Pères de l'Eglise sont venus les justifier ; et, depuis, on s'est toujours efforcé de les grandir pour imposer leur dogme de mensonge.
Le faux Christianisme institué par Paul ne fut, à l'origine, qu'une réaction brutale contre la doctrine de vérité de Johana et contre le culte de la Femme, en même temps qu'un déchaînement infernal des passions de l'homme.
Déjà partout la religion primitive était renversée, partout on avait mis le principe masculin au-dessus du principe féminin : Çiva, aux Indes, avait pris la place de Vishnou ; Osiris, en Egypte, occupait le trône d'Isis. Il y avait dans l'air un vent de révolte contre la Femme, qui soufflait aux quatre coins de l'univers.
C'est toujours par les classes inférieures de la société que commencent les réactions contre le droit et la morale. C'est par le peuple le plus ignorant que devait commencer le mouvement des nouveaux Chrétiens. C'étaient d'abord de petites associations prétendues religieuses qui parcouraient le monde et vivaient aux dépens des dupes. Lucien, qui les a connues au deuxième siècle, dit d'eux que « ce n'était pas seulement par les habits, mais aussi par les mœurs qu'ils voulaient ressembler aux femmes ». Cette phrase dit assez qu'ils voulaient renverser le culte de la Femme à leur profit, substituer au culte de l'amour féminin le culte de l'amour masculin.
Pour pousser jusqu'au bout la parodie, ils se déclaraient prophètes, imitant les prophétesses ; ils se déclaraient aussi thaumaturges, car le charlatanisme est toujours leur grand moyen. La femme avait été considérée comme la plus haute incarnation du Principe de vie ; ces prétendus prophètes, à leur tour, se déclaraient « fils de Dieu ». L'esprit de la Femme avait été sanctifié ; ils furent, eux, les « Esprits Saints ».
D'après Celse, « une foule de gens les plus obscurs prophétisaient dans les temples avec la plus grande facilité, et à la première occasion ». D'autres parcouraient les villes ou les camps, et là, rassemblant la multitude autour d'eux, ils s'agitaient en mouvement frénétiques comme des inspirés, et ne manquaient jamais de s'écrier : « Je suis Dieu, je suis Fils de Dieu, ou l'Esprit Divin. Je suis venu parce que le monde va périr »; et, parodiant les phrases des femmes, ils ajoutaient même : « Vous hommes, vous allez mourir à cause de vos iniquités ! » Et comme les femmes avaient annoncé que la puissance féminine serait rétablie un jour, les prétendus Messies disaient encore : « Je viens vous sauver, et vous me verrez revenir avec une puissance céleste. » Ils se faisaient rendre hommage comme s'ils étaient des femmes. Et Celse ajoute : « A ces magnifiques promesses ils mêlaient des choses inconnues, mystérieuses, pleines de ténèbres, dénuées de sens pour les plus instruits, tant elles étaient obscures ou plutôt chimériques, mais qui fournissaient aux insensés et aux imposteurs l'occasion d'appliquer en toute circonstance et au gré de leur fantaisie ces prétendus oracles » (2)
(1) Allusion à la renaissance mystique offerte aux affiliés des sociétés secrètes, en particulier celle des « Rose-Croix ».
(2) Origène, Contre Celse, 1, VII, 9.

JÉSUS, FILS DE L'HOMME
A cette époque où les anciennes coutumes gynécocratiques régnaient encore, ceux qui étaient restés fidèles à l'ancienne loi appelaient encore l'enfant du nom de sa Mère (1). On sent dans tout le Nouveau Testament une intention manifeste de faire porter à l'enfant le nom du Père et de glorifier celui qui suit cet usage nouveau : c'est celui-là qu'on appelle « Fils de l'homme ».
Matthieu, ayant à mentionner le fils d'une femme, met de l'affectation à lui donner le nom du père, et dit :
Chapitre XX, 20. « Alors la mère des fils de Zébédée s'approcha de lui. »
Voilà une manière de nous dire que l'enfant n'est pas le fils de la Femme, mais le fils de l'Homme.
C'est ce « Fils de l'homme » dont on attend le règne, ce qui, pris à la lettre, voudrait dire qu'on attend un changement dans les mœurs, la substitution du droit paternel au droit maternel. Mais cette substitution a été faite par le Droit romain, et c'est cela qui a amené la désolation générale ; c'est contre le droit Monstrueux que l'homme s'est donné que les femmes protestent, demandant l'avènement du règne de la Femme pour rétablir l'ordre. Les livres des premiers Chrétiens étaient écrits dans cet esprit. Quand on sait cela, on comprend facilement que les hommes grossiers et ignorants qui les combattent et défendent les droits de l'homme se contentent, pour faire cette substitution, de prendre les écrits de Johana et de ses disciples en substituant les mots « Fils de l'homme » à l'appellation que les premiers Chrétiens employaient pour désigner la Femme. Cette substitution est le phénomène psychologique que nous avons appelé la « réflexion sexuelle », mais qui avait déjà un nom dans la langue française, « rétorsion » ; c'est cette façon de rétorquer les raisons et les preuves dont l'adversaire s'est servi en tournant ses arguments contre lui. C'est là le fond de l'esprit des néo-chrétiens contre les premiers Chrétiens. C'est pour cela qu'ils disent des choses absurdes, telle l'attente du règne de l'Homme quand il règne. En lisant les Evangiles revisés, c'est-à-dire dans la forme ultime qu'on leur a donnée, nous comprenons ce qu'ils sont venus cacher, l'attente, du règne de la Femme :
Matthieu, chapitre XXIV, 27. « Car, comme un éclair sort de l'Orient et se fait voir jusqu'à l'Occident, il en sera ainsi de l'avènement du Fils de l'homme. »
30. « Alors le signe du Fils de l'homme paraîtra dans le ciel ; alors toutes les tribus de la Terre se lamenteront, en se frappant la poitrine, et elles verront le Fils de l'homme venir sur les nuées du ciel avec une grande puissance et une grande gloire. »
39. « Ils ne pensèrent au déluge que lorsqu'il vint et les emporta tous. Il en sera de même à l'avènement du Fils de l'homme. »
Chapitre XXV, 13. « Veillez, car vous ne savez ni le jour ni l'heure à laquelle le Fils de l'homme viendra. »
31. « Quand le Fils de l'homme viendra dans sa gloire avec tous les saints anges, alors il s'assiéra sur le trône de sa gloire. »
Chapitre XVI, 27. « Car le Fils de l'homme doit venir dans la gloire de son Père avec ses anges ; et alors il rendra à chacun selon ses œuvres. »
Nul doute, l'idée dominante dans cet Evangile (Matthieu), c'est l'annonce du règne de l'Homme, l'androcratie, par opposition à l'annonce du règne de la Femme que prêchaient les premiers Chrétiens. On sent que les phrases sont restées telles qu'elles étaient dans le premier Evangile.
Chapitre XVI, 28. « Je vous dis en vérité qu'il y en a quelques-uns de ceux qui sont ici présents qui ne mourront point qu'ils n'aient vu le Fils de l'homme venir en son règne. »
Quel illogisme ! L'homme ne règne donc pas ? Alors qu'est-que sont les empereurs romains et les grands-prêtres juifs ?
Chapitre XVII, 9. « Ne dites à personne ce que vous avez vu jusqu'à ce que le Fils de l'homme soit ressuscité des morts. »
Or ce sont les Femmes qui sont mortes à la vie sociale et qui demandent leur résurrection. Tout cela était le fond des Mystères qu'on célébrait encore. On pleurait la mort de Maria-Hiram dans les réunions secrètes des Esséniens, et c'est la cérémonie de sa mort et de sa résurrection, représentée dans l'initiation à la Maîtrise, qui va servir à faire la légende d'un homme (un fils de l'homme) mort et ressuscité. C'est parce qu'on copie, ou plutôt qu'on parodie, les Mystères, qu'on dit : « Ne dites à personne ».
C'est encore dans la légende d'Hiram que se trouvait l'histoire de la trahison que nous voyons résumée dans ce verset :
Chapitre XVII, 22. « Le Fils de l'homme doit être livré entre les mains des hommes, et ils le feront mourir ; mais il ressuscitera le troisième jour. »
Puisque dans ce régime nouveau le Père va prendre les droits de la Mère, il faut bien lui donner, en même temps, les qualités qui justifiaient ce droit. C'est pour cela que maintenant c'est le Père qui est « parfait », ce n'est plus la Mère (2) ; c'est lui qu'on va prier comme on avait prié la Bonne Déesse, la Bona Mater, et Matthieu dira :
Chapitre V, 48. « Soyez parfaits comme votre Père qui est dans les cieux est parfait. »
(1) Même à Rome, malgré les nouvelles lois, Mécène portait le nom de sa mère parce qu'il gardait les anciennes coutumes de l'Etrurie dont il était originaire.
(2) Voir les anciennes litanies qui avaient chanté les louanges de la Mère.

LE PATER
Johana avait rédigé une prière que l'on récitait chez les peuples sémites, depuis que, l'Éternel Féminin (Hévah ou Yahveh) ayant été chassée du Temple, le règne de la Mère avait été remplacé par le régime masculin :
« O notre Mère tant regrettée, que votre saint nom soit sanctifié !
« Que votre règne arrive.
« Que votre volonté soit faite en tous lieux. Quand reviendrez-vous donner à vos enfants le pain quotidien et le pain spirituel ? Pardonnez-nous nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui nous ont outragés.
« Ne nous abandonnez point à la tentation, mais élevez notre esprit et délivrez-nous du mal, ô Éternelle Bonté, notre Reine, notre Mère, notre Providence » (1). Amen. »
Nul doute à avoir que c'est cette prière que Matthieu copie quand il dit :
Chapitre VI, 9. « Vous donc, priez ainsi : Notre Père qui est aux cieux, ton nom soit sanctifié ; ton règne vienne ; ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel ; donne-nous aujourd'hui notre pain quotidien ; pardonne-nous nos péchés, comme aussi nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés ; et ne nous induis point dans la tentation, mais délivre-nous du malin ; car à toi appartient le règne, la puissance et la gloire à jamais. Amen. »
Cette phrase finale, que nous prenons dans la traduction d'Osterwald, se trouve dans la plupart des exemplaires les plus anciens Matthieu ainsi rédigée : « parce que c'est à vous qu'appartient la royauté, la puissance et la gloire pour tous les siècles ».
Cette finale a été supprimée, elle était un remarquable spécimen de l'orgueil de l'homme qui se confère à lui-même la puissance et la gloire.
Dans l'Evangile de Luc, nous trouvons au sujet de la prière ceci :
Chapitre XI, 1. « Seigneur, enseigne-nous à prier comme Jean l'a aussi enseigné à ses disciples. »
Puis suit la prière sans la finale orgueilleuse ajoutée par Matthieu.
(1) Source araméenne.

LE SAINT-ESPRIT FÉMININ
Ce qui blesse le plus la femme, c'est que l'homme doute de la droiture de son esprit, c'est qu'il doute des vérités absolues qu'elle trouve par sa faculté divine, l'intuition, et qu'elle révèle au monde. C'est donc la femme outragée dans son Esprit saint par l'homme qui a dû dire :
Chapitre XII, 31. - Tout péché et tout blasphème sera pardonné aux hommes ; mais le blasphème contre l'Esprit ne lui sera point pardonné.
32. - Celui qui aura parlé contre le Saint-Esprit n'en obtiendra le pardon ni dans ce siècle ni dans celui qui est à venir.

L’EGLISE JOHANNITE
Les fidèles Israélites avaient gardé dans leurs temples tout le système sacerdotal des Mystères.
Leurs Eglises étaient régies par un Conseil des Anciens (les Mères ou Matrones), appelées en grec Presbyteroï (qui voit loin), expression que nous retrouvons chez les Celtes qui appellent la Voluspa « Celle qui voit l’universalité des choses ».
Jean se qualifie de Presbyte. Ce sont les Mères qui sont appelées Vénérables.
Le mot vénération vient du génitif de Vénus, Veneris.
Près des Presbyteroï étaient des surveillants, appelés en grec Episcopoï.
L'épiscope, c'est le primus inter pares. Il peut devenir le chef d'une Communauté. Ces fonctions de vénérables et de surveillants sont restées dans les Mystères modernes (Loges de Saint Jean) qui continuent le culte antique.
Dans cette Eglise primitive, on trouve aussi des diacres et des diaconesses (1).
L'enseignement est symbolisé par l'eau vive (la Science).
Jean dit : « Si quelqu'un a soif, qu'il vienne à moi et qu'il boive. Celui qui croit en moi, des fleuves d'eau vive couleront pour lui. » (Les falsificateurs ont mis « couleront de son ventre ».)
C'est cette eau qui devint l'eau bénite des Catholiques.
Les premiers Chrétiens avaient aussi pour emblème une croix, symbole antique et varié. C'est le Tau.
Dans Ezéchiel, la mort frappe ceux qui n'ont pas la marque Tau sur le front. C'est l’« Aspa », Croix de saint André. C'est l'union de la Rose et de la Croix des Rose-Croix représentant le feu sacré, Agni, l'élément mystique et divin.
Pour eux, la croix est l'emblème de l'espérance. Les Latins en font « spes », c'est-à-dire espoir. C'est l'espoir du Juste (la femme) de renaître à la vie sociale.
On inscrivait sur les tombes : « in spem resurrectionis », la tombe symbolisant toujours la mort morale des femmes.
Dans les initiations et les cérémonies du culte des premiers Chrétiens, on avait le baiser de paix que les Francs-Maçons ont conservé dans leur initiation.
Enfin, le symbole de l'Eucharistie était le fond même du culte.
Tout cela sera imité, copié par les Néo-Chrétiens qui en feront une Eglise nouvelle, l'Eglise catholique romaine.
Les femmes jouaient un grand rôle dans l'Eglise primitive. Les fonctions sacerdotales ne pouvaient être remplies que par des femmes, dont la présence était indispensable dans les Mystères.
Qu'auraient signifié « le baiser de paix » sans elles, et les « saintes espèces », les autres secrets liturgiques, tous basés sur la loi de la vie sexuelle féminine et sur le Saint-Esprit qui y prend sa source ?
Parmi les femmes chrétiennes de la première heure, il en est qui composent des hymnes qu'on chante encore : telles Euchérie, Falconie, Elpis. Ce sont donc elles qui apportent à la Religion leur activité intellectuelle.
Les Sabéens célébraient quatre grandes fêtes par an : la première était consacrée au renouvellement de leur baptême (initiation), la seconde à la naissance de Johana, la troisième à sa mort, et la quatrième à la commémoration de sa grande intuition que les naïfs appellent son miracle.
La fête du Miracle, qui est très importante, a pour but de célébrer le souvenir de la destruction d'un monstre que Johana avait tué sur les bords du lac de Tibériade en Galilée. A cette époque, les Sabéens qui le peuvent font le pèlerinage de Tibériade et se rendent à l'endroit où, dit-on, le monstre fut tué. Ceux qui ne peuvent faire le voyage célèbrent la fête chez eux.
Ce monstre, c'est l'erreur et l'ignorance, que la lumière de l'intuition vient mettre en fuite.
Toutes les femmes qui ont été favorisées de la grande intuition en ont fait l'objet d'un Jour Sacré, ou lui ont consacré un monument comme le Sphinx d'Egypte, élevé à la mémoire de la première intuition (que les masculinistes appellent Révélation), celle de l'antique Déesse Taoth (Thot).
(1) Ce titre donné à la femme Christ ou Déesse qui enseigne les lois de la Nature ; Diaconesse, est resté dans l'Eglise jusqu'au 7ème siècle. Les Gnostiques l'ont toujours employé. Il se décompose ainsi : dia, jour, Konos ou Conus. Les auteurs modernes donnent une signification, exotérique à ce dernier mot : s''empresser à travers.

L'ÉVANGILE PRIMITIF
Nous savons par saint Jérôme que les Esséniens avaient leur Evangile. C'est « l'Evangile inconnu ». Et saint Epiphane parle d'un « Evangile d'Eve », à l'usage de certains Gnostiques qui faisaient d'Eve la Femme-Esprit connaissant les secrets de la Nature.
Les auteurs modernistes d'un livre intitulé « Que penser de la Bible ? » nous disaient :
« L'Evangile, avant d'être une vie de Jésus, a été d'abord une prédication édifiante portant sur la morale de Christ. L'histoire est née de la prédication ».
Combien ceci est révélateur !
C'est d'abord, en effet, une prédication édifiante portant sur la vraie morale, celle de la Religion naturelle, gardée dans les Mystères, et qui est celle du Christ basée sur Agni, « le feu sacré de l'amour féminin ».
Mais cela excitera une jalousie, suscitera des imitateurs masculins qui créeront un parti nouveau, celui des imitateurs qui deviendront des usurpateurs. Pour ceux-là, la morale sera au second plan, les idées régnantes anti-féministes la remplaceront ; quelques belles phrases, glanées dans les écrits des premiers Chrétiens, s'y retrouvent parce qu'il s'agit de gagner le public qui n'y croirait pas sans cette apparence ; mais la question principale pour eux sera de donner à un homme le grand rôle messianique et de le faire servir à affirmer les droits de l'homme contraires à ceux de la Femme.
Saint Jérôme voit dans l'Évangile primitif celui de Matthieu altéré, alors que c'est au contraire celui de Matthieu qui est une altération d'un écrit antérieur.
Saint Jérôme dit aussi : « Anus garrula, senex delirius, juvenis imberbis (la vieille babillarde, le vieux radoteur, le jeune imberbe) écrivent chacun des Evangiles à leur fantaisie. » Et ce saint prétend qu'il a fait sa traduction (la Vulgate) pour mettre fin à ce dévergondage et qu'il a eu bien du mal à trouver le plus vraisemblable texte à travers des manuscrits variés à l'infini.
La vieille « babillarde », c'est Johana ; le vieux « radoteur », c'est son frère Jacques ; le jeune imberbe, c'est son fils Pierre.
La sainte famille !
On donnait lecture des Evangiles dans les assemblées dominicales des premiers Chrétiens.
Saint Justin (Apol., I, 66) et saint Ignace (ad Philar.,V), tous deux écrivains du Ier et du IIème siècle, en témoignent comme d'une coutume, mais ne nous disent pas de quels Evangiles il s'agit (saint Justin est mort en 168).
A cette question : « Quelle est la véritable origine des Évangiles ? » M. Mignot répond (Critique et tradition) : « L'Eglise existait partout lorsque nos Évangiles n'étaient encore nulle part. »
C'est qu'ils sont une œuvre de réaction venue après le grand mouvement des premiers Chrétiens, et leur but principal fut de combattre les doctrines de la primitive Eglise, instituée par les initiés féministes, et d'affirmer une doctrine masculiniste qui en fut la contradiction.
Ils furent d'abord une satire contre la Femme avant de devenir une apologie de l'homme.

LES APOTRES DU PREMIER CHRISTIANISME
L'APÔTRE JACQUES
L'apôtre Jacques est un féministe israélite qui s'adresse « aux douze tribus d'Israël qui sont dispersées » et qui leur parle des afflictions qui leur arrivent ; il leur recommande de demander la sagesse « à Dieu », mais ce ne peut être qu'au Dieu des douze tribus, donc à Jhaveh, que les traducteurs modernes rendent par « Dieu ». Il invoque même le « Dieu des armées », qui est Yahveh Sebathée.
Cet apôtre recommande « la foi sans hésiter, car l'homme dont le cœur est partagé est inconstant en toutes ses voies ». Ceci est de la haute psychologie ; il faut connaître la loi des sexes, que l'on expliquait aux initiés, pour bien le comprendre.
Voici une autre leçon donnée à l'homme :
Chapitre I, 13. — Que personne ne dise lorsqu'il est tenté ; c'est « Dieu » (Jhaveh, la Femme) qui me tente, car, comme Jhaveh ne peut être tentée par aucun mal, aussi ne tente-t-elle personne.
14. — Mais chacun est tenté quand il est attiré et amorcé par sa propre convoitise.
15. — Et après que la convoitise a conçu, elle enfante le péché, et le péché, étant consommé, engendre la mort.
Ceci est évidemment une réponse aux Juifs qui ont mis dans leurs Écritures que la femme est la tentatrice de l'homme. Un homme peut-il avoir fait cette réponse ?
Chapitre II, 6. — Ne sont-ce pas les riches qui vous oppriment ?
7. — Ne sont-ce pas eux qui blasphèment le beau nom qui a été invoqué sur vous ?
8. — Si vous accomplissez la loi royale, selon. l'Écriture qui dit : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même », vous faites bien.
Or le beau nom, c'est celui de Jhaveh, que les hommes blasphèment.
19. — Tu crois qu'il y a un seul Dieu ; tu fais bien ; les démons aussi le croient et ils en tremblent.
Ce seul Dieu, c'est la Déesse. C'est Jhaveh. Il est impossible qu'un Israélite qui s'adresse aux douze tribus pense autrement.
Le chapitre III nous fait savoir que les féministes de cette époque se plaignent de la calomnie des hommes.
Chapitre III, 8. — Aucun homme ne peut dompter sa langue : c'est un mal qu'on ne peut réprimer, elle est pleine d'un venin mortel.
14. — Si vous avez un zèle amer (jalousie) et un esprit de contention dans vos cœurs, ne vous glorifiez point et ne mentez point contre la Vérité.
15. — Car ce n'est point de la sagesse qui vient d'en haut ; mais elle est terrestre, sensuelle et diabolique.
16. — Car partout où il y a ce zèle amer et cet esprit de contention, il y a du trouble et toutes sortes de mauvaises actions.
Ceci est contre la jalousie sexuelle qui pousse l'homme à Calomnier la Femme.
Chapitre IV, 1. — D'où viennent parmi vous les dissensions et les querelles ? N'est-ce pas de ceci, savoir, de vos désirs déréglés, qui combattent dans vos membres ?
(Ne dirait-on pas une femme qui reproche à l'homme des désirs déréglés ?)
2. — Vous désirez, et vous n'obtenez pas ce que vous souhaitez ; vous êtes envieux et jaloux, et vous ne pouvez rien obtenir ; vous avez des querelles, et vous faites la guerre, et vous n'avez pas ce que vous recherchez, parce que vous ne demandez pas.
3. — Vous demandez, et vous ne recevez point parce que vous demandez mal et dans la vue de fournir à vos voluptés.
(Il semble que c'est encore une femme qui dit : Vous ne savez pas demander ; la femme veut dans l'homme un idéal spirituel et non pas la bête humaine qui ne pense qu'à ses voluptés. Elle n'aime pas les orgueilleux, et veut que l'homme s'humilie devant le Seigneur (la Dame Déesse).
6. — Au contraire, il accorde plus de grâces. C'est pourquoi l l'Écriture dit : Dieu résiste aux orgueilleux, mais il fait grâce aux humbles.
7. — Soumettez-vous donc à Dieu ; résistez au diable, et il s'enfuira de vous.
8. — Approchez-vous de Dieu, et il s'approchera de vous. Pécheurs, nettoyez vos mains, et vous qui avez le cœur partagé, purifiez vos cœurs.
9. — Sentez vos misères, et soyez dans le deuil, et pleurez ; que votre ris se change en pleurs, et votre joie en tristesse.
10. — Humiliez-vous devant le Seigneur (Kyria) et il vous élèvera.
11. — Mes frères, ne médisez point les uns des autres. Celui qui médit de son frère, et qui condamne son frère, médit de la loi, et condamne la loi. Or, si tu juges la loi, tu n'es point observateur de la loi, mais tu t'en rends le juge.
19. — Mes frères, si quelqu'un d'entre vous s'écarte de la vérité et que quelqu'un le redresse.
20. — Qu'il sache que celui qui aura ramené un pécheur de son égarement sauvera une âme de la mort et couvrira une multitude de péchés.
Rappelons encore que Jacques est appelé « Frère du Seigneur », mais, comme Seigneur est la mauvaise traduction du mot Kyria il faut en conclure que cet apôtre qui parle comme une femme était le frère de Johana, la Dame, la Directrice de la petite Église chrétienne à ses débuts.
On sait que cette appellation « frère du Seigneur » a fait penser que Jésus avait eu des frères et des sœurs, donc que Marie avait eu d'autres enfants que lui. En rétablissant la signification des mots, nous changeons toutes les conditions de cette histoire.

ÉPÎTRE DE JUDE APÔTRE
Dans la Bible illustrée de Louis Second, l'apôtre Jude est représenté sous les traits d'une jeune femme.
Cet apôtre était le frère de Jacques, d'après le 1er verset de son Epître. Ce qu'il y a de certain, c'est que cette Épître est aussi féministe que celle de Jacques.
Elle se plaint d'abord de la trahison.
4. — Il s'est glissé parmi nous certaines personnes dont la condamnation est écrite depuis longtemps ; gens sans piété, qui changent la grâce de notre Dieu en dissolution et qui renoncent à Dieu, le seul dominateur.
Il est bien évident que c'est du Dieu des Israélites qu'il s'agit ; c'est cette Divinité-là que les hommes abandonnent, et qui, cependant, est la seule réelle ; ce qui le prouve, c'est le verset suivant :
5. — Or je veux vous faire ressouvenir d'une chose que vous avez déjà apprise c'est que le Seigneur, ayant délivré son peuple du pays d'Egypte, détruisit ceux qui ne crurent pas.
Voilà ce qui nous montre que le nom de Seigneur (Kyria) est donné à Myriam (Marie), car c'est bien elle qui a délivré les Israélites du joug des Egyptiens, et c'est cette tradition que les premiers Chrétiens voulaient conserver. Ils donnent à Marie un grand rôle. Le verset suivant nous montre que la personnalité de Marie-Moïse était un sujet de reproches adressé aux hommes.
9. — Michel l'archange, lorsqu'il contestait avec le diable touchant le corps de Moïse, n'osa pas prononcer contre lui une sentence de malédiction, mais il dit seulement : « Que le Seigneur le reprenne ».
I, 10. — Mais ceux-ci parlent mal de tout ce qu'ils ne connaissent pas et ils se corrompent en tout ce qu'ils savent naturellement, comme des bêtes destituées de raison.
11. — Malheur à eux parce qu'ils ont suivi la voie de Cain.
12. — Ce sont des taches dans vos repas de charité lorsqu'ils mangent avec vous, se repaissant sans retenue.
13. — Ce sont des vagues furieuses de la mer qui jettent l'écume de leurs impuretés ; ce sont des étoiles errantes (les comètes) auxquelles l'obscurité des ténèbres est réservée pour l'éternité.
14. — C'est d'eux qu'Enoch a prophétisé, disant :
15. — Le Seigneur (Kyria, la souveraine) est venu avec des milliers de ses saints pour exercer le jugement contre tous les hommes et pour convaincre tous les impies d'entre eux, de toutes les actions d'impiété qu'ils ont commises et de toutes les paroles injurieuses que les pécheurs impies ont proférées contre lui (contre Kyria, la Femme souveraine).
16. — Ce sont des gens qui ne font que murmurer, qui se plaignent toujours, qui marchent suivant leurs convoitises, qui prononcent des paroles d'orgueil et qui admirent, pour leur profit, les personnes qui ont de l'apparence.
Est-il possible de mieux juger l'homme orgueilleux ? Les Féministes de tous les temps ne parlent pas autrement, parce que l'homme n'a pas changé.
17. — Mais vous, les bien-aimés, souvenez-vous des choses qui ont été dites par les apôtres.
18. — Qui vous disaient qu'il y aurait au dernier temps des moqueurs qui marcheraient suivant leurs convoitises impies ; ce sont des hommes qui se séparent d'eux-mêmes (1), ce sont des gens sensuels, en qui il n'y a rien de spirituel.
Cette haine pour l'homme qui outrage la femme, qui corrompt, qui se moque, ne peut pas exister dans le cœur des hommes, c'est un sentiment exclusivement féminin ; donc Jude est bien une femme, la belle jeune femme représentée dans Bible illustrée de Louis Second.
Le nom de Jude semble un diminutif de Judith, féminin Judas. (La terminaison ith ou ath ou tith s'ajoute aux noms féminins comme un adjectif.)
(1) Qui se séparent d'eux-mêmes. Ce sont les anges qui n'ont pas gardé leur origine (10-11-12) et qu'il a réservés dans des liens éternels et dans les ténèbres, pour le jugement du grand jour, les anges qui n'ont pas gardé leur origine, mais qui ont quitté leur propre demeure.
1. — Et comme Sodome et Gomorrhe, aussi bien que les villes voisines qui s'étaient abandonnées aux mêmes impuretés et à d'abominables débordements, ont été mises pour servir d'exemple, en Souffrant la peine d'un feu éternel.
8. — Ceux-ci de même, étant endormis, d'un côté souillent leur chair ; et de l'autre, ils méprisent les puissances et parlent mal des dignités.

L'APÔTRE PIERRE (dit Céphas ou Kêpha)
Pierre « bar Johna » est le fils de Jean (Johana). Il semble être le chef masculin de l'Église dont Johana est la fondatrice ; de là son surnom de Céphas, qui signifie « pierre » (1) ou « rocher ». Il joue un grand rôle dans le Christianisme primitif. C'est pour cela que plus tard, les Catholiques le prendront pour chef et feront de lui le premier Pape de leur Église, quoiqu'on ait pu prouver qu'il n'a jamais été à Rome, où Paul ne l'a pas vu pendant les deux années qu'il y vécut. Il n'a donc pas pu être le premier Évêque Pape que nous donne la chronologie ecclésiastique. Il n'a pas été martyrisé ; du reste, il n'y avait pas encore d'Église chrétienne à Rome alors, mais seulement des groupes auxquels Paul adressa son Épître aux Romains.
Pierre a, toute sa vie, défendu la doctrine féministe que ses ennemis, les partisans de Jésus, voulaient renverser.
Nous avons de lui deux Épîtres. Elles sont altérées comme tout ce qu'on nous a laissé, mais, à travers les termes ajoutés, nous retrouvons l'Esprit.
Ce qu'on a changé, c'est le mot Dieu qui remplace l'antique divinité féminine d'Israël, et c'est le mot Seigneur qui remplace Kyria, la Dame, la Maîtresse.
Dans la première, il parle de l'héritage attendu (celui des Israélites théogoniques, c'est-à-dire gynécocratiques, dont on attend la résurrection) :
Chapitre I, 4. — Qui ne peut ni corrompre, ni souiller, ni flétrir, qui est prêt à être manifesté.
7. — Vous vous en réjouirez, quoique maintenant vous soyez attristés, afin que l'épreuve de votre foi vous tourne à louange, à honneur et à gloire lorsque le Christ paraîtra.
8. — Lequel vous aimez quoique vous ne l'ayez pas vu, en qui vous croyez quoique vous ne le voyiez pas encore.
Chapitre V, 4. — Lorsque le souverain pasteur paraîtra...
10. — C'est le salut (des âmes) qui a été l'objet de l'exacte recherche et de la profonde méditation des prophètes qui ont prophétisé touchant la grâce qui vous était destinée ; tâchant de découvrir pour quel temps et pour quelles conjonctures l'Esprit du Christ qui était en eux, et qui rendait témoignage à l'avance, leur faisait connaître les souffrances du Christ (la persécution des femmes) et la gloire dont elles seraient suivies.
Vous avez été rachetés par le précieux sang du Christ comme de l'Agneau sans défaut et sans tache.
La parole de Kyria demeure éternellement ; et c'est cette parole qui vous a été annoncée par l'Évangile.
3. — Puisque vous avez déjà goûté combien le Seigneur (Kyria) est doux.
4. — En vous approchant de lui, comme de la pierre vive qui a été rejetée par les hommes, mais que Dieu a choisie, et qui lui est précieuse.
5. — Vous aussi, comme des pierres vives, vous entrez dans la structure de l'édifice pour être une maison spirituelle et de saints vérificateurs, pour offrir des sacrifices spirituels et agréables à Dieu parle Christ.
6. — C'est pourquoi il est dit dans l'Écriture : Voici, je mets en Sion la principale pierre de l'angle, choisie et précieuse ; et qui croira en elle ne sera point confondu.
7. — Vous en recevrez donc de l'honneur, vous qui croyez, mais pour les incrédules, la pierre que ceux qui bâtissaient ont rejetée est devenue la principale pierre de l'angle, et une pierre d'achoppement, et une pierre de chute.
8. — Lesquels heurtent contre la parole, et sont rebelle ; à quoi aussi ils ont été destinés.
9. — Mais vous êtes la race élue, vous êtes sacrificateurs rois, la nation sainte, le peuple acquis, afin que vous annonciez les vertus de celui (Johana) qui vous a appelés des ténèbres à sa merveilleuse lumière.
10. — Vous qui autrefois n'étiez point son peuple, mais êtes maintenant le peuple de Dieu, vous qui autrefois n'aviez point obtenu miséricorde, mais qui maintenant avez obtenu miséricorde.
11. — Mes bien-aimés, je vous exhorte, comme des étrangers et des voyageurs, à vous abstenir, des convoitises charnelles qui font la guerre à l'âme.
12. — Ayant une conduite honnête parmi les Gentils, afin qu'au lieu qu'ils parlent mal de vous, comme si vous étiez des malfaiteurs, ils glorifient Dieu au jour qu'il les visitera, à cause de vos bonnes œuvres qu'ils auront vues (ceci nous montre qu'ils étaient calomniés).
13. — Soyez donc soumis à tout ordre humain, pour l'amour du Seigneur ; soit au roi, comme à celui qui est au-dessus des autres.
14. — Soit aux gouverneurs, comme à ceux qui sont envoyés de sa part pour punir ceux qui font mal, et pour honorer ceux qui font bien.
15. — Car telle est la volonté de Dieu, qu'en faisant bien vous fermiez la bouche aux hommes ignorants et dépourvus de sens.
16. — Conduisez-vous comme étant libres, non en faisant servir votre liberté de prétexte pour mal faire, mais comme des serviteurs de Dieu.
Ce dernier verset prouve qu'on asservissait les femmes sous prétexte que dans la liberté elles faisaient le mal. Il y a dans tout ceci une justification qui prouve qu'on représentait les Chrétiens comme des révolutionnaires dangereux, et, en effet, ils l'étaient puisqu'ils voulaient établir la Justice dans un monde d'injustice.
21. — C'est aussi à quoi vous êtes appelés, puisque le Christ (lui-même) a souffert pour nous, vous laissant un exemple, afin que vous suiviez ses traces.
22. — (Lui) qui n'a point commis de péché et dans la bouche duquel (de laquelle) il ne s'est trouvé aucune fraude.
23. — Qui, lorsqu'on lui disait des outrages, n'en rendait point, et qui, lorsqu'on la maltraitait, ne faisait point de menaces.
24. — Qui a porté nos péchés en son corps, sur le bois, afin qu'étant morts au péché nous vivions à la justice, et par les meurtrissures de qui vous avez été guéris (il s'agit toujours des femmes crucifiées).
25. — Car vous étiez comme des brebis errantes (les Israélites), mais vous êtres maintenant retournés au Pasteur (Hévah) et à l'Évêque de vos âmes (Johana).
Le chapitre III de cette première Épître est en contradiction avec l'esprit des premiers Chrétiens, qui, comme les Esséniens, n'admettaient pas le mariage ; donc ce chapitre a été interpolé.
Dans la fin de l'Épître :
IV, 7. — La fin de toutes les choses est proche.
V, 4. — Et, lorsque le souverain pasteur paraîtra, vous remporterez la couronne incorruptible de gloire.
5. — De même, vous qui êtes jeunes, assujettissez-vous aux anciens, de sorte que vous vous soumettiez tous les uns aux autres. Soyez ornés d'humilité, car Dieu résiste aux orgueilleux, mais il fait grâce aux humbles.
6. — Humiliez-vous donc sous la puissante main de Dieu afin qu'il vous élève quand il en sera temps.
Cette Épître se termine par ces mots :
« Marc, mon fils, vous salue. »
Est-ce celui qui va bientôt apparaître comme chef de secte et auteur d'un Évangile ?
(1) « Le poste de Pape ou le Saint-Siège est une formule de la magie divine, tout comme le poste d'Empereur, dans l'histoire de l'humanité. C'est ce que signifie le terme ésotérique de « Pierre ». La « Pierre » est le terme désignant, dans l'Ancien et le Nouveau Testament, le statut divin immuable ou formule de la magie divine. C'est pourquoi le poste de Pape fut instauré en qualité de « Pierre ». ». (Auteur anonyme, « Méditations sur les 22 arcanes majeurs du Tarot », à propos de la Lame V « Le Pape »)


Tu es Petrus, et super hanc petram aedificado Ecclesiam meam, et portae inferi non praevalebunt adversus eam.
Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église, et les portes de l'enfer ne prévaudront par contre elle.
(MATTH. XVI, 18)


Pierre signifie « celui qui instruit ». Ce nom vient de Piérus, mont de Thessalie consacré aux Muses.
Une Muse est une Piéride ou Piéris.
Comme l'instruction est la base de la civilisation, c'est-à-dire de l'ordre social, on donne le nom de Pétra (roche ou roc) à la Pédagogie, et la houlette du Berger, du Pasteur, est appelée Pedum.
La Justice ou bonté divine est la Pietas. Tout était symbolique alors.
C'est, ainsi, que, pour, rappeler qu'on ne peut enseigner que quand on connaît la Science des Sciences, l'Arbre-de Vie, la Chaire de saint Pierre était en bois d'Acacia, ce qui va donner prétexte à un jeu de mots catholique.
Nous ne savons pas où était la Chaire de saint Pierre, mais quand on la mit à Rome pour, faire croire que Pierre avait été le fondateur de l'Église romaine, on appuya l'autorité papale sur ces mots : « Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église. ».
Mais en ce temps-là on ne parlait pas français. Voyons où cela est pris dans les langues du temps : Keph en hébreu, Kêpha en Chaldéen, signifie pierre ou rocher. Le Christ, ou Johana dit à Pierre : « Tu es Kêpha et sur cette Kêpha je bâtirai mon Église. ». Ce que nous traduisons en français par : « Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église. »
Or, dans ces langues, le substantif Kêpha, qui signifie rocher, pierre, est du genre féminin, en sorte qu'en disant : « Sur cette pierre, sur ce rocher, je bâtirai mon Église », Johana ne changeait pas le genre du mot qu'elle employait. C'est comme si elle avait dit : « Je suis la science et sur cette science je bâtirai mon Église. » Cette phrase se retrouve dans les sociétés secrètes, qui la traduisent par : « La science repose à l'ombre de l'Acacia », le mots science n'étant pas un nom d'homme.
Il n'en est pas de même dans la traduction qui en a été faite, où Pierre est devenu un nom d'homme, alors que c'était peut-être primitivement un surnom.
Saint Pierre appelle le Christ la pierre angulaire fondamental de l'Église. Cette association ou assemblée qu'est l'Église ne peut, en effet, avoir d'autre base que Kyria qui lui a dit : « Je t'édifierai sur moi, et non pas moi sur toi, super me ædificabo te, non me super te..., dit saint Augustin (de Verbo Domini in Evangelium secundum Matth., Serm. 13, etc.), non petra super Petrum, sed Petrus super petram..., non enim a Petro peira, sed Petrus a petra, car celle-ci n'a pas pris son nom de-celui-là, mais celui-là de celle-ci. »

LES NAZARÉENS
Les partisans de Pierre s'intitulaient les « Nazaréens ».
Nazaréen veut dire séparé. Ils étaient, en effet, séparés de la nation juive, puisqu'ils gardaient l'antique Loi de Myriam que les Juifs avaient abandonnée et remplacée par le Deutéronome.
Les Nazaréens faisaient vœu de tempérance, il leur était défendu de boire du vin.
Ils devaient laisser croître leurs cheveux pendant leur temps de Nazaréat. Quand le temps de leur consécration était expiré, ils se coupaient les cheveux à la porte, du Tabernacle.
Les Nazaréens se distinguaient en séparant leur cheveux au sommet de la tête, comme les femmes, et quelquefois en se faisant une tonsure. C'est ainsi qu'on représentera Jésus.
Il ne faut pas les confondre avec les Naasséniens, qui prêchaient l'Anthropogonie, donnant à la Divinité les deux sexes.
La secte des Ebionites, ou des pauvres, se rapprochait des Nazaréens.

LES MYSTÈRES JOHANNITES
Dans l'ouvrage « Psychologie comparée de l'Homme et de la Femme », il est consacré un chapitre, intitulé « Les trois robes », aux fonctions que l'homme remplit en portant la robe de la Femme et qui étaient la base même du régime gynécocratique : le Sacerdoce, la Justice, l'Enseignement. Ces trois usurpations furent le sujet de violentes récriminations, puis finalement donnèrent l'occasion de fonder des Mystères.
Déjà, le sacerdoce qui avait créé un Dieu mâle avait été comparé au crocodile qui dévore l'humanité : c'était le monstre marin dont on avait fait la baleine de Jonas. Dans sa gueule monstrueuse, il engouffrait les femmes (Ionah est le nom du sexe féminin, Yoni en sanscrit).
Mais l'ange de Lumière, Iblis, la Femme, s'avançait vers le monstre, armée du bouclier qui représente la Raison et du glaive (la parole) pour le combattre. Et, en effet, elle avait recommencé la lutte.
Voici que maintenant un nouveau danger surgit. Des hommes vont encore prendre la robe de la Femme, et pourquoi faire cette fois-ci ?... Pour rendre la Justice, pour prendre la place de la Dame ; Thémis va changer de sexe.
Ce grade s'appellera la Cour.
Ce sera le 23e dans les Mystères Johannites.
Il est donné comme le second chapitre dans la série des grades philosophiques de la Maçonnerie Noire. Noire, en effet, car c'est une époque de terrible obscurité ; toute vérité est persécutée, le pouvoir de ceux qui propagent l'erreur grandit, et la raison n'est plus écoutée.
Mais comment l'homme va-t-il rendre la justice, puisqu'il ne sait pas où est le Bien, où est le Mal ?
Un ancien symbole représentait le Bien par des dalles blanches et le Mal par des dalles noires, alternées et formant la mosaïque sur laquelle on marchait ; c'est pour conserver ce symbolisme que le triangle féminin était blanc et le triangle masculin noir.
Dans le Temple se trouve une Arche d'alliance avec une gloire du Grand Architecte au-dessus. C'est l'alliance secrète de toutes les femmes pour la défense de la Justice. La lumière est à l'Occident (côté masculin) ; on y place deux chandeliers avec chacun cinq bougies. Elle s'efface à l'Orient (côté féminin), où un seul chandelier n'a plus que deux lumières. Ceci représente l'Enseignement institué par Charlemagne et confié à des hommes, alors que jusque-là il était encore dirigé par des femmes.
Dans ce grade, l'ancien culte est relégué dans une chambre obscure. On y voit trois têtes de mort et un squelette, ce qui reste de l'ancienne splendeur de la Femme.
C'est le Dieu-homme qui introduit dans le monde tout le mal. Déjà, on l'a combattu quand il s'appelait Adonaï et faisait opposition, chez les Hébreux, à levah. lci, on le voit reparaître comme un reptile monstrueux, et on fait jurer au néophyte de le combattre et de renverser l'autel nouveau du sacrifice mâle dans le symbole phallique de la messe.
On a sacrifié des hommes dans les guerres de Charlemagne, qui avaient comme prétexte la défense du Père. A cela, les initiés répondent : « Si des hommes doivent être sacrifiés, ce ne sont point les malheureux esclaves, mais les traîtres, les hypocrites et les vicieux. »
Combien c'était sage et féminin !
Car le nouveau Dieu-homme qu'on prêche va tuer la raison et vaincre toute Vérité, et, pour le soutenir, on va maintenant instituer un système de Droit masculin.
Mais à la Femme, qui protège l'espèce humaine, appartient le triomphe final.
Quand sonnera l'heure du triomphe ? Nul ne saurait le prévoir ; c'est là le secret du destin, l'énigme insondable. Plus les Fraternités enrôlent de soldats pour l'armée de la Déesse Lumière salvatrice des hommes, et plus tôt l'heure de la délivrance sonnera.
On est dans le tabernacle des Vérités révélées. On attend le fils ou la fille d'Hiram (Myriam) (1), c'est-à-dire la personne qui reprendra et continuera son œuvre.
On multiplie les folies : on va faire commencer une ère à la soi-disant naissance de Jésus. Cette idée, déjà proposée par Denys le Petit au VIème siècle, n'avait pas été adoptée, mais à cette époque toutes les erreurs triomphent.
On affirme de plus en plus le dieu des Paulinistes, le dieu-homme, qui devient terrible.
C'est le début d'une époque que nous avons appelée la terreur religieuse.
Conclusion du grade : c'est qu'il faut déraciner la superstition et conduire la campagne contre elle de façon à rendre inévitable le triomphe de la Vérité.
Au fond du sanctuaire est Iblis, l'ange de Lumière. On l'encense pour perpétuer son culte.
(1) « Hiram » doit se lire de droite à gauche comme lisent les Hébreux et non de gauche à droite suivant l'usage des Européens : Hiram alors devient Myriam ou plutôt Maria. Le heth (H) final en hébreu se prononce A.

MOSAÏQUE - LE BLANC ET LE NOIR
La jalousie sexuelle des prêtres se manifestait dans tout ce qu'ils faisaient, leur religion n'était qu'une perpétuelle réaction contre les Mystères.
C'est ainsi que, pour renverser la signification attachée aux deux triangles qui étaient, l'un blanc (féminin), l'autre noir (masculin), ils donnèrent la couleur noire à tout ce qui était féminin et la couleur blanche à l'homme, et l'on vit apparaître, dans la secte jésuiste, des Vierges dont le visage était peint en noir.
La Grèce en fabriqua beaucoup, on les a retrouvées ; chez les Gaulois, on trouve la Vierge noire qui doit enfanter. C'est celle de Notre-Dame du Puy-en-Velay (1). Les Catholiques y ont attaché une légende miraculeuse. Voici ce qu'ils ont imaginé :
Pendant l'occupation de la Gaule par les Romains, une dame gauloise se trouva malade et fut avertie qu'elle recouvrerait la santé sur la cime du mont Anicium. Là, elle s'endormit et vit en songe une femme céleste, dont les éblouissantes draperies flottaient comme une blanche vapeur et dont une couronne de pierres précieuses ceignait la tête ; cette femme, d'une ravissante beauté, était entourée d'un cortège d'esprits angéliques. « Quelle est cette Reine si gracieuse ? », demanda la fille des Gaules à un des esprits célestes. « C'est Marie, lui répondit-on, et elle te prie de prévenir son secrétaire saint Georges (dont on fait un évêque du Puy) » (2).
Or la petite statue de Marie, qui s'y trouve encore, date d'une époque antérieure au Catholicisme. Elle mesure un peu plus de 70 cm ; son attitude est celle d'une personne assise sur un siège, à la manière des Divinités égyptiennes ; elle tient un enfant sur ses genoux. Elle est enveloppée des pieds à la tête d'une toile assez fine, collée très soigneusement et très solidement sur le bois, comme cela se pratiquait chez les Égyptiens pour les momies. C'est du bois de cèdre.
Saint Georges, son champion, est chargé de la venger.
(1) On appelle puy une haute montagne, du mot italien poggio.
(2) Saint Georges, soldat cappadocien, qui lutta, dit-on, contre un dragon en Libye et souffrit le martyre sous Dioclétien, est devenu le patron de l'Angleterre. On sait que, dans le symbolisme, le dragon, c'est l'antiféminisme. 

LE CULTE DE MYRIAM DANS LE PREMIER CHRISTIANISME
La grande Myriam, dont la personnalité et le livre étaient cachés dans les Mystères, eut un grand rôle dans le premier Christianisme, puisque les femmes qui voulaient faire régner sa Loi, l'antique Thorah, voulaient en même temps remettre en lumière sa personnalité.
Cette personnalité, du reste, n'avait jamais été complètement effacée, puisque non seulement les sociétés secrètes la conservaient intacte, mais les traditions de l'Orient relataient encore sa gloire et lui rendaient un culte.
Chez les Israélites, elle n'avait jamais cessé d'être la « Dame », la « Maîtresse », la « Souveraine », l'« Etoile de la Mer », expressions traduites de l'hébreu.
C'est à elle qu'on rendait un culte sur le Mont Carmel et en bien d'autres endroits.
Plusieurs églises de Syrie existaient aussi en l'honneur de Myriam avant l'ère actuelle.
Une vieille tradition, consignée dans les « Toldoth » juives, rapporte que les fidèles Israélites qui venaient prier dans les lieux qui lui étaient consacrés subirent une persécution violente de la part des princes de la Synagogue.
C'est que ces princes de la Synagogue étaient de petits esprits qui avaient des vues étroites ; à la grande vérité du Sépher, ils avaient substitué des arguties ; aux vertus des premiers Chrétiens, ils opposaient leur égoïsme. Et c'est parce que la vérité les gênait qu'ils avaient jeté leur malédiction sur l'ancienne Loi qu'ils avaient remplacée par une nouvelle doctrine qui ne procurait, aux femmes que des souffrances à endurer, des persécutions à subir. Dans ces conditions, il était dans l'ordre des choses que les révoltées contre ces despotes fussent méprisées et même traitées comme le rebut du genre humain.
Les imposteurs de tous les temps ont employé les mêmes armes.
C'est pour cela que le culte rendu à Myriam était souvent caché. On savait qu'il serait persécuté par ceux qui s'entêtaient à dissimuler le nom de cette grande Femme Divine et cherchaient à lui substituer celui de Moïse, ce qui ne fut définitivement fait, du reste, qu'après que Philon eut écrit son De vita Mosis, ce livre dans lequel il créa une biographie miraculeuse de ce personnage imaginaire.
Pour glorifier Myriam, on faisait de petites statuettes la représentant, mais toutes petites, afin de pouvoir les cacher facilement, d'autant plus que la persécution commencée en Palestine s'étendit plus tard dans l'Empire romain.
Raoul Rochette attribue l'invention de ces petites statues aux Gnostiques, mais les Gnostiques eux-mêmes les faisaient remonter beaucoup plus haut. Les patriciennes de Rome qui les premières se convertirent au Christianisme de Johana, les adoptèrent et les substituèrent aux statuettes de la Fortune et de plusieurs autres Divinités qu'elles portaient. Et, de la même façon qu'elles avaient porté les anciennes images, elles suspendirent à leur cou, ou attachèrent à leurs vêtements, de petites images de Myriam devenue la Madona, ou bien les symboles du premier Christianisme, le Saint-Esprit continuant la colombe de Vénus, et des croix (Tau) en or ou en pierres précieuses.
On sait que c'est l’Esprit féminin qui est symbolisé par une colombe, et les Catholiques eux-mêmes l'ont affirmé, puisque saint Ambroise dit que Marie et Elisabeth prophétisaient toutes deux par l’Esprit-Saint dont elles étaient remplies.
Une tradition donne saint Jean et saint Pierre pour fondateurs de l'église de Lydda, consacrée à Marie, et qui serait antérieure aux autres.
Cependant, l'oratoire qu'Elie bâtit sur le Mont Carmel est plus ancien. Mais à qui était-il dédié ? On nous répond que son inscription le dit : Virgini parituræ, à la vierge qui devait enfanter.
Cette chapelle s'appelait Semmœum, qui veut dire « lieu consacré à une imperière » (Hist. du Mont Carmel).
Mais cette vierge qui devait enfanter, cette imperière, c'était peut-être Johana, dont la naissance, comme celle de toutes les grandes rénovatrices, fut annoncée d'avance.
Les Carmes (du Mont Carmel) attribuèrent au prophète Agadus l'érection d'une chapelle dédiée à Notre-Dame, que les Catholiques représentent comme la première dédiée à la Vierge Marie, quoique l'église de Tortosa réclame la priorité sur celle des Carmes.
Il est bien évident que ces églises très anciennes étaient bien antérieures à la légende de la Mère de Jésus, qui n'a pas pu être inventée et se faire accepter avant le Concile de Nicée.
L'Ave Maria est antérieur au Christianisme paulinien, c'est à dire à la Mère de Jésus, puisque Ave, c'est Haveh, la Déesse d'Israël, dont le nom se met devant celui des grandes femmes pour les diviniser. Haveh-Myriam, c'est Ave Maria.
Les fidèles Israélites ne durent jamais admettre l’hermaphrodisme du nom devenu Ihaveh. C'était une altération masculiniste, puisque c'était mettre devant le nom de la Femme le « iod », signe idéographique de la masculinité. Et c'est sans doute parce qu'on discutait sur ce thème que les rabbins recommandent d'accepter les Écritures telles qu'ils les ont arrangées sans y changer un iota (un iod).
Les Catholiques ont continué, plus tard, à mettre le nom de la Déesse d'Israël Ave devant le nom de Marie qu'ils ont adopté aussi ; mais ils n'en comprenaient plus le sens divin qui, du reste, avait été si déformé par les traducteurs du Sépher. Ils traduisirent l’Ave Maria par Salve Maria, « Je vous salue », ce qui est bien différent. Ils ont donc pris le culte tel qu'il existait avant eux, sans se préoccuper des contradictions qui allaient en résulter.
Donc, le culte de Marie est antérieur au second Christianisme, celui de Jésus, il a été propagé par saint Jean et les apôtres de l'Eglise primitive et il est arrivé à une destinée extraordinaire, puisqu'un prêtre catholique, l'abbé Orsini, qui a écrit l'histoire de la Vierge en 1838, a pu dire ceci (t. II, p. 203) : « C'est la plus douce création du Christianisme aussi bien que son plus inexpugnable rempart. On ne peut toucher à ce culte sans renverser toute l'économie de notre système religieux et sans mutiler une foule d'institutions antiques et sacrées. »
On croirait, en lisant cela, que les premiers Pères de l'Eglise ont institué le culte de Marie en même temps qu'ils affirmaient Jésus ; il n'en est rien, leurs préoccupations d'affirmer les droits et la suprématie de l'homme leur firent complètement oublier la femme au début, et, si nous examinons les Évangiles qu'ils ont rectifiés et acceptés, nous n'y trouverons rien qui annonce ou répare le culte de Marie, devenu si touffu par la suite dans l'Eglise.
Cent ans avant l'ère chrétienne, on tailla dans une forêt de la Beauce, par le commandement de Priseus, chef gaulois, une image qui fut placée dans une grotte avec cette inscription : Virgini pariturae, à une vierge qui doit enfanter. Les Catholiques nous disent que saint Potentien, second évêque de Sens, que l'apôtre saint Pierre avait envoyé en France, s'arrêta à Chartres et, après avoir béni cette image, changea la grotte en église. C'est cette image qui est devenue Notre-Dame de Chartres. Or, s'il y avait, dans ce fait, une prévision, une prédiction, cela ne pouvait s'appliquer qu'à Johana, femme réelle, et non à la Vierge Marie, femme irréelle.
Baronius nous apprend que Calixte 1er fit construire, en l'an 224, une petite chapelle dans le quartier le plus populeux de Rome qui porta le nom de Notre-Dame au-delà du Tibre.
Ce n'est évidemment pas de la Vierge Marie qu'il s'agit ; c'est peut-être de l'Indienne Krishna.
A Naples, une église s'appelle Notre-Dame du Commencement.
Gênes la superbe et Venise la belle s'étaient placées sous la protection d'une « Marie » depuis un temps immémorial.
Au lit de mort, les doges de Venise se faisaient peindre à genoux devant Marie pour se conformer à une ancienne loi qui datait certainement du temps où régnaient à Venise les prophétesses de Vénus (d'où Vénétia) appelées « les Vénètes » ; c'était à l'époque où Rome s'appelait Amor, mot qui fut renversé et dont on fit Roma. (Délices d'Italie, t. I, p. 60)
Les galères génoises de cette même époque reculée sculptaient une Madone sur leur poupe, et, même de nos jours, cela se fait encore.
On trouve une Notre-Dame de la Couronne à Païenne, ainsi nommée parce que c'était là que les anciens rois de Sicile recevaient la couronne royale comme la tenant de Marie et ne la voulant porter que pour Elle (Thom. Fazollus).
On faisait des pèlerinages au Mont Saint-Michel avant que le Catholicisme eût pénétré dans la Gaule. Sur le rocher, alors entouré de forêts, où s'élève aujourd'hui la forteresse, une grotte sombre etait consacrée à Bélénus. L'endroit s'appelait « le Mont Bélen » C'est là que les nochers des Armoriques venaient acheter des flèches enchantées auxquelles ils attribuaient le pouvoir de changer les vents et de dissiper les tempêtes. (Etait-ce un symbole ? S'agit-il des flèches de l'amour et des tempêtes de l'âme ?)
Les Chrétiens, après les Druides, prirent possession de ce site escarpé et le consacrèrent solennellement à l'archange Saint Michel (à figure de Femme) qui doit vaincre le mal (l'homme pervers) (1). La grotte de Bélénus devint un sanctuaire dédié à l’Étoile des mers, à « Marie » protectrice des matelots.
A Toulouse, Notre-Dame de la Dorade était autrefois dédiée à la Déesse Pallas.
Notre-Dame des Champs à Paris était dédiée à Cérès. C'est saint Denis qui la consacra à Marie.
Tous les anciens symboles de la Théogonie passèrent dans le Christianisme.
Il y a une Notre-Dame du Lys près de Melun ; or le lys symbolise la pureté féminine dans la religion naturelle.
Il y a une Notre-Dame de la Colombe près de Bologne, et la colombe, attribut de Vénus, représentait le Saint-Esprit féminin. Si Astarthé est détrônée, on crée cependant une Notre-Dame de l'Etoile Villaviciosa en Portugal.
On nous dira que cette dénomination a pour but de rappeler le souvenir de cette phrase de l’Apocalypse : « Il y aura douze étoiles sur sa tête. »
C'est possible, mais l’Apocalypse a été écrite par Johana, la Vierge Marie n'y est pour rien.
En Bretagne, où les Bardes gaulois se maintinrent plus longtemps que partout ailleurs, les cantiques à Marie furent substitués, presque sans transition, aux chants terribles et mystérieux des Druides. Des ballades dialoguées, des poèmes populaires, sur des thèmes religieux, furent le fond de la musique nationale de ce peuple ; chaque ballade bretonne renfermait une invocation à Marie (Myriam s'appelle la Marjolaine chez eux), une pensée chevaleresque ou une haute moralité. Car tout se tient, dans l'ancien système théogonique, pour moraliser le peuple et lui donner le goût d'un bonheur tranquille à sa portée, l'image de la Femme Divine qu'il allait vénérer dans sa pauvre église, le cantique qui faisait le charme de la veillée, et qui était un cours de morale.
Tout lui rappelait ses devoirs envers la Femme.
Tout, dans la vie, avait alors un but : celui de faire connaître les lois de la Nature afin de prendre cette connaissance comme base de la vie sociale.
C'est ainsi que l'origine végétale fut enseignée longtemps et propagée par des chants joyeux qu'on appelait des Noëls, qui fêtaient la Nature et son grand mystère : la naissance du genre humain.
Les Noëls, avec leur teinte arcadienne, c'était le chant des forêts, la poésie riante et champêtre qui respire l'ombre des bois, c'était le chant de la Nature même, le chant du peuple, qui en comprenait alors la signification. La nuit, aux flambeaux, on parcourait la campagne, blanche de neige, en redisant les vieux Noëls qui furent les chants favoris de toutes les provinces de France.
Puis, quand les rigueurs du temps tinrent les gens enfermés au logis, on continua à chanter autour de l'arbre de Noël, mettant ainsi un peu de la forêt chez soi.
Le premier Christianisme avait remis en honneur la science de Myriam, l'origine végétale ; il respecta donc la musique et la poésie des anciens Bardes qui propageaient encore, peut-être inconsciemment, la science antique.
Ce ne fut qu'après Constantin qu'on changea le culte en substituant la Marie, Mère de Jésus, à l'antique Marie, auteur du Sépher. Alors, l'erreur vint faire cesser les chants joyeux de la Nature, on les profana en y introduisant son absurde et mensongère légende d'un homme mort sur une croix.
Et c'est la naissance de cet homme irréel que l'on célébra le jour où l'on avait chanté la naissance végétale du genre humain.
Les images de Myriam étaient en haute vénération dans tout le Levant à l'aurore du premier Christianisme.
On croit que saint Luc fit une image de Marie, et cette croyance s'est si bien propagée plus tard que plusieurs églises, fondées à des époques diverses, prétendent posséder cette peinture de Luc.
Ainsi, Notre-Dame de Clermont, près de Cracovie, prétend posséder une image de Marie faite par Luc. Notre-Dame de Talan, près de Dijon, a la même prétention. Notre-Dame de la Garde, près de Bologne, en Italie, possède une peinture qui était à Sainte-Sophie de Constantinople (la Déesse des Gnostiques), sur laquelle on lit cette inscription : Ce tableau peint par saint Luc doit être porté sur le mont de la Garde et posé sur l'autel de l'église. Il fut porté en Italie en 433. A propos de la dédicace de Notre-Dame de Naples, dite Sainte-Marie Majeure, par le pape Jean II, l'an 533, on lit ceci : « On a conservé dans cette église une image de Marie faite par saint Luc ».
Ces renseignements nous sont donnés par le calendrier historique des fêtes et fondations dédiées à Marie. En dehors de toutes les images de Marie attribuées à Luc, on croit que les Ioniens possédèrent longtemps une Marie à Éphèse. Dans cette ville restée attachée au culte des Déesses, des églises furent dédiées à Marie dès le premier Christianisme.
Et c'est sans doute pour cela que les Pères de la seconde Eglise y tinrent un concile.
L'abbé Orsini dit : « En 403, les Pères du concile général d’Éphèse déclaraient que cette grande ville tirait son principal lustre de saint Jehan l'évangéliste et de Marie.
« , disaient-ils, Jehan le théologien et Marie étaient honorés dans des églises pour lesquelles on avait une vénération spéciale ; on croit que cette vénération était traduite par des peintures sacrées. »
Ceci était vrai, en effet, et une de ces peintures a été retrouvée après la Réforme ; voici comment :
Le Polonais Jean Sobieski, après sa victoire sur les Turcs au siège de Vienne, entra dans la ville délivrée et alla chanter un Te Deum devant l'autel de Notre-Dame. Il envoya au Pape l'étendard vert de Mahomet, mais il garda pour lui un vieux tableau qu'on avait découvert dans les ruines du village de Wishau ; on y voyait une Notre-Dame de Lorette, dont la couronne était soutenue par deux anges, portant dans leurs mains des rouleaux avec ces inscriptions :

In hac imagine Mariae, vinces, Johannes.
(Par cette image de Marie, Jean, tu vaincras.)
In hac imagine Mariae, victor ero, Johannes.
(Par cette image de Marie, moi, Jean, serai vainqueur.)

Jean Sobieski destina ce tableau à la chapelle royale de Zolkiew.
Les premières images de Marie qui décoraient les églises des Syriens et celles de l'Asie Mineure étaient peintes sur bois, avec des couleurs que rendait solides et brillantes un mélange de cire liquéfiée. Telles furent les fameuses images d'Edesse en Mésopotamie, de Seydnai dans le voisinage de Damas, de Didine en Cappadoce, de Sosopoli en Pisidie, de Philerne dans l'île de Chypre, et enfin d'Antioche. Devant ces images brûlaient des lampes perpétuellement allumées (symbole du pur Esprit féminin), et c'est là que les savants et les saints du temps venaient apporter leurs hommages.
Notre-Dame de Philerne, dans l'île de Chypre, fut emportée par les chevaliers de Rhodes lorsqu'ils durent abandonner l'archipel au croissant des Mahométans.
On ne peut nier l'existence de ces images de Marie à une époque où personne ne pensa jamais à peindre des Jésus.
(1) Faisons remarquer que Saint-Michel est aussi appelé Mikael en hébreu qui est l'anagramme du mot arabe « Al Kemi » d'où « Alchimie ».

ÉTAT POLITIQUE DE LA JUDÉE AU 1ER SIÈCLE DE NOTRE ÈRE
La Palestine fut morcelée par la mort d'Hérode et partagée entre ses fils (4 ans avant notre ère).
Archélaùs eut la Judée et la Samarie ; Antipas, la Galilée et la Pérée ; Philippe, l’Iturée.
L'an 6 après notre ère, Archélaùs fut déposé et exilé en Gaule.
La Judée, réduite en province romaine, fut gouvernée par des procurateurs résidant à Césarée, dont la série n'est interrompue que pendant les trois ans de royauté d'Agrippa 1er, petit-fils d'Hérode.
C'est le cinquième de ces procurateurs, Ponce-Pilate, qui, d'après les Catholiques, aurait fait crucifier Jésus. Rien dans l'histoire ne justifie cette affirmation d'un homme crucifié à cette époque.
Ces procurateurs étaient tous exacteurs et despotes, ce qui irritait le peuple. C'est ce mécontentement qui fit surgir les Zelotes, qui promettaient au peuple des consolations par la voix de leurs faux prophètes.
La mort d'Hérode fut suivie d'une véritable anarchie. Dans la Judée propre, que Rome avait laissée à Archélaùs sans lui accorder le titre de roi, la révolte éclata de tous côtés ; les uns demandaient l'abolition du principat des Hérodes ; les autres osèrent s'insurger contre les Romains eux-mêmes.
Au bout de dix ans, Archélaùs fut déposé par les Romains et la Judée propre fut réunie à la province romaine. Elle fut gouvernée par un procurateur de César ; des soldats romains tinrent garnison dans Jérusalem ; un recensement fut ordonné et exécuté, et cette mesure provoqua de nouveaux soulèvements. Mais l'anarchie n'eut qu'un temps et Jérusalem demeura romaine en apparence.
Cependant, le despotisme romain avait bien de la peine à la contenir. Dès qu'on touchait, ou qu'on paraissait toucher à la religion, il se produisait des émotions menaçantes.
C'est que déjà Johana et ses disciples avaient commencé leur propagande.
C'est pendant ces temps troublés que des fanatiques, des aventuriers, des ambitieux, s'élevaient de toutes parts et prenaient le titre de roi.

LES ISRAÉLITES EN OCCIDENT
Pour fuir le désordre qui régnait en Judée, les Israélites émigrèrent vers l'Occident, vers Rome, vers Alexandrie, centre intellectuel où on pouvait faire de la propagande. Il y en avait dans tout l'Empire romain du temps d'Auguste. A Rome, on en comptait 8.000 ; leur religion était à la mode, ce qui frappe et étonne Horace.
Mais il ne faut pas confondre les Juifs et les Israélites, comme sans doute le faisaient les Romains, et comme le font encore presque tous les historiens modernes. Les Sémites formaient deux partis en lutte. Les Israélites restèrent toujours séparés du monde juif, qui représentait pour eux l'usurpation du pouvoir religieux ; ils gardaient fidèlement leurs principes théogoniques et leur grande loi morale. Partout où ils allaient, en Egypte, en Perse, à Babylone, en Grèce, à Rome, ils se sentaient une supériorité morale et intellectuelle qui les rendait hautains et dédaigneux, et c'est ce qui les faisait haïr des autres peuples ; ils avaient une dignité qui résultait de leur éducation morale, de leurs principes fidèlement gardés, de leur vénération pour leurs grandes Femmes, les Prophétesses qui avaient été les « Lumières d'Israël ».
M. Réthoré dit des Juifs, qu'il confond avec les Israélites, qu' « ils semblent n'être jamais sortis des temps fabuleux » ; Quel éloge !
La confusion qui s'établit plus tard entre les Juifs et les Israélites commence au premier siècle.
Les Juifs, qui sont partout méprisés, se font appeler « fils d'Israël », croyant par cette supercherie reconquérir l'estime perdue.
Pour comprendre la persécution dirigée par les Gentils contre les Sémites, il faut savoir que ce sont les Israélites féministes qu'on persécute, et non les Juifs qui les ont renversés pour établir un régime masculiniste.
En l'an 19, il y avait déjà à Rome une propagande Israélite dont le succès irritait le Sénat et l'Empereur. « On prit des mesures, dit Tacite, pour faire disparaître les cultes de l'Egypte et de la Judée. »
Flavius Josèphe raconte qu'à la suite d'une aventure scandaleuse où se trouvaient mêlés des prêtres d'Isis, les gens compromis furent mis en croix et la statue de leur Déesse jetée dans le Tibre.
Voilà un fait qui nous donne une idée de la façon dont on traitait les partisans de l'ancienne Théogonie. Nous soulignons les mots mis en croix pour que l'on comprenne bien que c'est là le supplice infligé à ceux, mais surtout à celles, qui persistent à rendre un culte aux Déesses.
La confusion établie par les auteurs latins entre les Juifs et les Israélites, qui, pour eux, ne sont tous que les habitants de la Judée, rend difficile la distinction à faire entre les deux partis.
Ainsi, on célébrait à Rome le Sabbat et Ovide conseille aux jeunes gens d'aller ce jour-là dans les synagogues pour y trouver des maîtresses. Mais les Juifs n'admettaient pas les femmes dans leurs synagogues ; il s'agit donc des Israélites qui propageaient l'ancien culte caché dans les Mystères.
Du reste, les Chrétiens johanites étaient suspectés à cause du soin qu'ils mettaient à tenir secrètes leurs réunions, ce qui faisait supposer qu'ils y tramaient des complots contre l'Empire. Et c'était vrai, car ils ne voulaient pas seulement restaurer la loi morale, mais changer les institutions sociales.
Josèphe dit des Israélites qu'ils furent chassés de Rome (Tanche dit de l'Italie), à cause des manœuvres d'un intrigant « qui prêchait dans Rome la loi de Moïse ». Il était assisté de trois hommes de la même moralité. Ils avaient converti une dame Fulvia, femme de la plus grande distinction, à qui ils avaient escroqué des sommes considérables, sous prétexte d'offrandes au temple de Jérusalem. Son mari se plaignit à l'Empereur, qui s'en prit à tous les Juifs.
« Un sénatus-consulte, dit Tacite, décida que 4.000 hommes de sang affranchi et d'âge propre à porter les armes seraient embarqués en Sardaigne afin d'y servir contre les brigands. Le reste devait être banni, à moins d'abjurer, dans un temple donné, un culte sacrilège. »
Parmi les 4.000, beaucoup se laissèrent tuer plutôt que de se soumettre au service militaire, dit Josèphe.
Nous voyons dans ceci un prétexte pour bannir les Israélites, en leur imputant un délit commis par des Juifs.
Il est probable que c'est alors que les Israélites appelés Chrétiens se cachèrent dans les Catacombes.
On sait que ces premiers Chrétiens étaient des propagandistes ardents ; ils convertissaient assez de monde pour porter ombrage à la religion romaine et même à l'Etat. On les persécuta, et de la persécution sortirent des millions de confesseurs et de martyrs.
Tacite (né vers 50, mort sous Hadrien) désigne les Chrétiens par ces mots : « Les malheureux abhorrés pour leurs mœurs infâmes et vulgairement nommés Chrétiens, capables de tous les dérèglements et de tous les crimes » (Annales, I, XX, 44).
Puis il dit :
« Pour faire tomber les rumeurs qui l'accusaient, Néron offrit en pâture d'autres coupables et fit souffrir les tortures les plus raffinées à une classe d'hommes détestés pour leurs abominations, et que le vulgaire appelait Chrétiens. ».
Tacite ne cite pas Jésus ; il continue :
« Réprimée ainsi un instant, cette exécrable superstition débordait de nouveau, non seulement dans la Judée où elle avait sa source, mais dans Rome même où tout ce que le monde renferme d'infamies et d'horreurs afflue et trouve des partisans. On saisit d'abord ceux qui avouaient leur secte, et, sur leurs révélations, une infinité d'autres qui furent bien moins convaincus d'incendie que de haine pour le genre humain. On fit de leur supplice un divertissement ; les uns, couverts de peaux de bêtes, périssaient dévorés par des chiens ; d'autres mouraient sur des croix, ou bien ils étaient enduits de matières inflammables et, quand le jour cessait de luire, on les brûlait en guise de flambeaux.
Néron prêtait ses jardins pour ce spectacle et donnait en même temps des jeux au Cirque, où tantôt il se mêlait au peuple en habit de cocher, et tantôt conduisait un char. Aussi, quoique ces hommes fussent coupables et eussent mérité les dernières rigueurs, les cœurs s'ouvraient à la compassion en pensant que ce n'était pas au bien public, mais à la cruauté d'un seul qu'ils étaient immolés. » (Traduction Burnouf.)
« Les Chrétiens, disait Suétone (né vers 65), sont une espèce d'hommes adonnés à une superstition nouvelle et dangereuse » (Néron, 16).
Mais la persécution que l'Empire impie, comme disaient les Israélites, dirigea contre les Chrétiens, éclata sous Tibère en l'an 36 et devint terrible en l'an 44, sous le règne de Claude.
La persécution de Néron eut lieu en 64.
Cette accusation de haine pour le genre humain, dirigée contre des gens qui prêchaient l'amour du prochain, est celle que les masculinistes adressent toujours aux féministes, qui enseignent la Loi morale. Là est le motif réel de la persécution : la révolte des femmes contre la débauche des hommes. C'est la doctrine de Johana qui résume cette révolte, puisque c'est elle qui rappelle l'éternelle loi des sexes. C'est ce qui irrite les hommes ; c'est pourquoi ce sont les empereurs les plus débauchés qui persécutent les Chrétiens, parce qu'ils apparaissent comme préconisant une renaissance morale. Comme toujours en pareil cas, on les accuse des méfaits qu'ils reprochent aux hommes. On les couvre de boue.
Cette haine pour les Chrétiens, on pourrait la traduire ainsi : « Vous n'aimez pas les vices de l'homme, donc vous n'aimez pas l'homme. »
Du reste, on reprochait aussi, à ceux qui propageaient la Science cachée, de fermer aux hommes « le Royaume du Ciel », qui n'était que pour la Femme, croyait-on.
Il y avait malentendu, accusation d'exagération, parce qu'on ne comprenait pas la loi des sexes, absolument comme cela a lieu dans les temps modernes.
Il est vrai que l'on disait que ce Royaume du Ciel ne pouvait être ouvert que par le Messie-Femme de filiation divine (féminine) ; cette filiation de David faisait partie de la doctrine secrète. C'est du reste affirmé dans l’Apocalypse.
Fréret nous dit dans son ouvrage sur le Christianisme (t. II, p. 173) : « Lorsque l'empereur Claude chassa les Juifs (mis pour Israélites) de Rome, Suétone dit qu'il les chassa à cause des bruits continuels qu'ils excitaient par rapport à un certain Christus. »
Suétone, né vers 65, et qui vivait un siècle après l'époque assignée à Jésus, ne le cite pas, il ne le connaît pas, son nom n'est pas encore populaire et la persécution n'est dirigée contre les Chrétiens qu'à cause de Christus, qui ne représente alors qu'un principe vague de suprématie féminine.
La lettre de Pline à Trajan constate aussi la lutte contre les premiers Chrétiens.

PERSÉCUTION DES ISRAÉLITES CHRÉTIENS À ALEXANDRIE
Philon raconte que, à la suite d'une enquête contre les Israélites, à Alexandrie, par un préfet, sous Caius, et qui se faisait au théâtre (les spectacles commençaient à la 4ème heure après le lever du soleil), on fouettait les Israélites, on leur faisait subir l'estrapade ou le chevalet, on les condamnait à mort, on les mettait en croix à travers l'orchestre, puis venaient les danseurs, les mimes, les joueurs de flûte et tous les amusements de la scène. « Les femmes étaient enlevées comme à la guerre, sur la place ou en plein théâtre, d'après la première accusation venue ; on les exhibait sur la scène avec les plus brutales insolences. Quand elles n'étaient pas chrétiennes, on les relâchait, mais quand elles l'étaient, chaque spectateur devenait leur tyran ; on leur présentait de la viande de porc (les Esséniens étaient végétariens) ; si elles refusaient d'en manger, elles étaient livrées aux tourmenteurs qui leur faisaient subir des traitements abominables. » Les Israélites souffraient tous les supplices plutôt que de renier leur Loi. Ils étaient fermement convaincus que dire ou faire quelque chose contre « la Loi » était le plus grand mal qu'on pût faire en ce monde. Ils refusaient d'appeler César « Maître », parce que leur religion leur défendait d'avoir d'autre maître que leur Déesse « Hévah », l'Eternelle.
Les Israélites se répandaient partout. Philon énumère les pays où on en trouve, et il mentionne l'Egypte, la Phénicie, la Syrie et la Célésynie, la Pamphylie, la Cilicie, presque toute l'Asie jusqu'à la Bithynie et jusqu'au Pont ; en Europe, la Thessalie, la Béotie, la Macédoine, l'Etolie, la Crète ; au-delà de l'Euphrate, Babylone et les plus belles satrapies. Partout leur ardeur à faire des prosélytes était proverbiale.

PERSÉCUTION DES ISRAÉLITES CHRÉTIENS PAR LES JUIFS
La persécution chez les Juifs prit un autre aspect. Les Chrétiens, qui voulaient rétablir « la loi antique », attaquaient le dogme des rabbins et leur deuxième loi (Deutéronome). Etienne, le premier, nia hautement que la loi de Moïse (Myriam) fût la loi nouvelle. Il disait que la loi des rabbins était une figure et que le temps était venu où l'image devait faire place à la réalité. Il déclarait que le Christ était le Messie. Mais par Christ il entendait « le Verbe divin ».
Etienne fut tué à coups de pierres par les Juifs. Saul, dit Paul, contribua à lapider Etienne. Les Judaïsants, répandus partout comme les Israélites, lisaient les Livres saints des Docteurs et d'Esdras, ils assistaient aux réunions des prosenctères et attendaient avec les femmes qu'ils avaient converties « le règne d'Adonaï ».
Ce n'est pas Hérode seul qui craignait les rejetons de David, et combattait les glorieuses espérances des Féministes Israélites ; Eusèbe (d'après Hégésippe) rapporte qu'après la conquête de Jérusalem, Vespasien ordonna de rechercher et de détruire la postérité de David. (C'est ainsi, sans doute, qu'on désignait le parti des Féministes chrétiens.)
Sous Trajan, la persécution continuait encore.
Enfin, Domitien, qui ordonna la 2e persécution, se fit amener à Rome deux rejetons de cette race illustre qui avaient pour aïeul l'apôtre saint Jude (Judith, sœur de Johana). L'empereur, après les avoir interrogés, apprenant qu'ils ne possédaient que 39 arpents de terre qu'ils cultivaient de leurs propres mains, les renvoya dans leur patrie, tranquillisé sur leur ambition par leur pauvreté.
Sous le règne d'Hérode, il s'était constitué en Judée deux partis à la fois politiques et religieux.
L'un avait à sa tête Hillel, de Babylone, président principal du Sanhédrin (30 ans avant à 7 ans après l'ère chrétienne). Son caractère était doux, résigné, il avait une piété profonde, une vraie morale, son esprit était logique, ses connaissances étendues.
L'autre parti avait pour chef Shammaï, un Palestinien, qui était président adjoint du Sanhédrin. Son caractère était sévère, rigide, son esprit exagéré, systématiquement contradicteur ; il était en même temps patriote zélé, et se faisait de la loi (des hommes) une arme contre Hillel. C'était donc un adversaire d'Israël. C'est lui qui créa le mot zèle pour désigner l'exagération qu'il mettait dans son apostolat, et ses partisans s'appelèrent zélotes ou zélateurs (1).
Les traditions juives racontent qu'un païen déclara à Shammaï qu'il adopterait volontiers la Loi si elle pouvait se résumer en un seul précepte. Shammaï entra dans une violente colère et chassa le païen. Pour lui, la Loi contenait 613 articles, tous indispensables à sa thèse. C'est que les mauvaises causes ne s'appuient jamais sur un trop grand nombre de preuves.
Le païen s'adressa alors à Hillel, qui lui répondit, se rapportant à la vraie Loi d'Israël qu'il pratiquait : « Ne fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas qu'on te fit à toi-même. » Voilà le commandement essentiel de la Loi, le reste n'en est que le commentaire. Telle est l'origine de cette sentence dont les apologistes catholiques font gloire à Jésus.
(1) Les premiers, zélotes sont appelés pro-zélites.

LITTÉRATURE JUIVE
La dissolution religieuse et morale des Juifs engendra une littérature exubérante dans laquelle les scribes et les docteurs, pétris d'orgueil, épuisèrent leur science en de vaines et puériles subtilités. Ils étaient fanatisés par les idées nouvelles que la mauvaise traduction du Sépher avait fait naître et, sur ces traditions faussées, édifièrent une nouvelle Loi.
Ce sont eux que l'on considère comme des pharisiens hypocrites, des sépulcres blanchis qui imposent aux autres des devoirs qu'ils ne remplissent pas eux-mêmes et créent dans la société une aristocratie factice basée sur les privilèges qu'ils se donnent. Ils forment des sectes qui se détestent et se méprisent entre elles autant qu'elles détestent et qu'elles méprisent le genre humain.
Combien ils sont loin de l'antique esprit d'Israël, ces hommes avilis et prétentieux à la fois, livrés à d'incroyables superstitions et à un sordide appât du gain ! Leur esprit obscurci ne leur permet plus de comprendre la Thorah dont le sens leur échappe, la lettre seule les attache et ils la réduisent à une casuistique ridicule et frivole. Ces savants docteurs discutent sur des questions comme celle-ci : « Est-il permis de manger un œuf pondu le jour du Sabbat ? » Ou encore : « Un boiteux qui se sert de sa jambe de bois ne viole-t-il pas, par cette action mécanique, le repos du septième jour ? »
A la médiocrité, ces fanatiques ajoutent la violence. Après avoir fait eux-mêmes une « nouvelle Loi », on verra surgir des zélotes (zélateurs de la Loi) qui, armés du fer sacré, tueront pour la moindre infraction aux prescriptions dites mosaïques. Derrière eux viendront les sicaires qui feront couler des flots de sang.
Cette nouvelle Loi (la Loi de l'homme qui est destinée à remplacer celle de la Femme) est surtout exprimée dans le Talmud et le Deutéronome. Mais tous les livres publiés à ce moment sont imbus du même esprit. Ce sont : l'Esdras grec, le Prêtre et III Esdras, publiés après la chute de Jérusalem (en 70), livres écrits dans un tout autre esprit que le premier Esdras.
Sous, le règne d'Agrippa Ier, vers 40, parut la Sapience dite de Salomon, livre écrit dans le but de justifier Salomon, le fondateur de la royauté masculine et le véritable promoteur de la révolte des Juifs contre Israël. C'est à ce moment où toutes les idées sont perverties et où l'on veut justifier l'homme et le glorifier, qu'on crée la légendaire sagesse de ce roi qui fut un grand fou. Le livre qui porte son nom, tant de siècles après sa mort, est écrit avec l'onction du prêtre et prétend consoler le juste soumis au tyran.
On y trouve de belles maximes, entre autres : « L'homme est puni par où il pèche », et bien d'autres prises dans les livres des prophétesses d'Israël.
C'est après l'an 70, c'est-à-dire après la chute de Jérusalem, qu'on eut toutes les audaces ; on fit une traduction grecque du livre d'Esther et on l'enrichit d'additions en grec. Enrichir le livre d'une femme en y faisant des additions, c'est tout simplement en changer l'esprit. Entre les années 93 et 94, l'historien Josèphe, le fidèle ami des Romains et l'apologiste du nouveau régime, termina ses Antiquités judaïques. Il connaît les additions d'Esther et le livre III d'Esdras. En 97 fut composé un nouveau livre d'Esdras, le IVe, et Esdras le Prophète. C'est un livre dans lequel on s'occupe des événements du temps et où on exhorte le peuple à rester attaché à la doctrine des scribes, à la Loi qu'ils ont faite. Cette exhortation nous fait comprendre que les populations étaient peu entraînées vers l'obéissance à cette Loi nouvelle qui était en contradiction avec l'antique « Loi » et avec la vraie morale.
Les livres d'Hénoch, de Noé, IVe d'Esdras, le prophète Elie, l'Ascension et la Vision d'Isaïe le voyant, sont des livres rangés parmi les apocryphes ou livres non admis, non canoniques.
M. Volkmar s'est occupé de l'étude des Apocryphes. (Rappelons que ce mot vient de apo, « loin de », et krypto, « cacher ».)

LES PSAUMES DE SALOMON
C'est ainsi qu'est intitulé un livre grec, imitant les Psaumes de David.
Il y a dans le titre de ce livre, qui n'est pas de Salomon, un parti pris de mettre à l'avoir d'un homme un livre de Psaumes, cherchant ainsi à porter ombrage à la gloire de David que les premiers Chrétiens ont fait revivre.
Dans cet écrit, qui imite les écrits de cette reine sans les comprendre, il est dit « que le Seigneur rassemblera un jour le peuple des « saints » et qu'il régnera sur eux ». Or, régner sur un peuple, ce n'est pas le libérer ; c'est du reste ainsi que les hommes comprennent le Messie, comme un roi régnant, non comme un sauveur les libérant de la domination. On ajoute qu'il purifiera Jérusalem, que les peuples viendront de tous côtés l'y voir dans sa gloire, et que là résidera un roi juste, formé par Dieu lui-même.
« Leur roi sera le Christ du Seigneur » (XVII, 28, 36, etc.), et plus, haut (23) : « Allons, Seigneur, fais lever parmi eux le roi, fils de David, qui doit régner au temps que tu sais sur Israël, ton fils » (1).
Ce n'est pas sauver, c'est régner. Ce n'est pas libérer, c'est asservir. Combien cela est différent et laisse d'espérance à tous les ambitieux qui veulent s'emparer du pouvoir !
Ce livre a été écrit après la mort de Pompée, à l'entrée du règne de César. Il n'a pas été adopté par l'Eglise parce que, dit-on, il est trop exactement daté et se rapporte à un moment trop précis de l'histoire.
(1) Le texte de cet écrit se trouve dans le Messias Judæorwn de Hilgenfeld, Leipzig, 1869.

LE DEUTÉRONOME
Le mot Deutéronome veut dire « deuxième Loi ».
Ce livre, beaucoup plus moderne qu'on ne croit, contient une histoire de Moïse et de son œuvre racontée d'après les nouvelles idées reçues, celles que le livre de Philon, De vita Mosis, avait jetées dans la circulation.
Le Deutéronome semble être une réponse à ceux qui voulaient abolir la Loi de Moïse, comme Paul et son Ecole, plus tard dans le Christianisme. Il n'a pas été écrit seulement pour donner une seconde Loi, mais aussi pour raconter comment la première avait été donnée, et ce récit, plein de miracles et d'invraisemblances, n'est qu'une œuvre d'imagination.

FIN DU DEUXIÈME SIÈCLE ET DÉBUT DU TROISIÈME
Sur la fin du IIème siècle, l'Eglise masculiniste commença à prendre forme. Les nouveaux Chrétiens commencèrent alors à ne connaître que quatre Evangiles, qu'ils déclarèrent canoniques à l'exclusion des autres.
Les Evangiles rejetés restèrent entre les mains des fidèles furent regardés par la suite avec la même vénération qu'auparavant. Mais tout le parti masculiniste forma corps et, dans le IIIème siècle, établit le canon des Evangiles que l'on allait imposer. Ainsi, tous les ouvrages qui avaient eu pour auteurs les premiers chrétiens, si respectés de la primitive Eglise, ne furent plus regardés que comme les œuvres de l'imposture et de l'erreur. Les nouveaux Chrétiens rejetaient avec mépris les ouvrages des premiers Apôtres qu'ils avaient audacieusement plagiés. De plus, ils publiaient quantité d'historiettes plus ou moins obscènes et qu'ils attribuaient aux premiers Apôtres.
Tout le Nouveau Testament des néo-chrétiens a pour but d'affirmer que Jésus est le Christ. Ce n'est pas un Livre fait pour faire connaître une doctrine, c'est un Livre fait pour affirmer une idée dominante, celle qu'un homme est l'entité anonyme qu'on appelait Christ et qu'on attendait avec anxiété pour mettre fin au désordre qui régnait depuis l'invasion des Dieux mâles dans la religion (1).
Le Nouveau Testament n'a d'autre but que celui de créer un Dieu nouveau ; l'homme-Dieu, l'homme-Verbe, qui résume tout le néo-christianisme, c'est une manifestation de l'orgueil mâle.
Ceux qui soutenaient un pareil système étaient des perturbateurs redoutables, ils avaient la violence des inintelligents et faisaient déclarer à leur Messie qu'il n'apportait pas la paix, mais la guerre, qu'il venait séparer le fils d'avec le père, la mère d'avec la fille, et semer l'anarchie au sein du foyer domestique. C'est ce que firent en effet ces hommes qui s'intitulaient « Enfants du tonnerre » (Marc, ch. III, 17).
Quant aux disciples qui propagent une pareille idée révolutionnaire, ils nous disent eux-mêmes quelle est leur valeur morale, leur place dans un monde de vagabonds, de pêcheurs, de mendiants. La légende même qu'ils font porte l'empreinte de leurs vues étroites et basses, elle est mesquine et ridicule, a pour cadre la plus basse classe de la société, elle ne s'élève pas jusqu'au faste extravagant du Bouddhisme, qui, lui, crée une légende princière pour éblouir le peuple par l'éclat des richesses.
La secte nouvelle devait du reste être bien méprisée, quand nous la voyons constamment occupée à se défendre. Paul dit dans Romains (1,16) : « Je n'ai point honte de l'Evangile du Christ. »
On l'accusait donc de propager une chose honteuse ? Marc dit de la famille de Jésus (VI, 3) : « Ils se scandalisaient à son sujet. »
L'histoire racontée dans les nouveaux Evangiles n'est qu'un tissu de rêveries, d'insanités, d'impostures qu'on nous donne comme des miracles. Ce qu'on nous montre comme émané d'un Dieu, c'est la violation des lois de la Nature. Or, si un Dieu a fait la Nature suivant les lois qu'il a voulu lui assigner, ce n'est pas prouver sa puissance que de le montrer occupé à déroger à ces lois qu'il aurait faites lui-même. Ce qui aurait pu prouver sa Divinité, c'eût été d'expliquer aux hommes ignorants ces loi qu'ils ne comprennent pas. Pour sauver l'humanité, il faut lui donner la science, non le spectacle des choses surnaturelles, irréelles, ce qui n'a jamais été, du reste, que le fait des fous qui sont en même temps des imposteurs.
Le peu de valeur historique de la légende dite chrétienne se démontre par le merveilleux dont elle est entourée, les miracles dont elle est émaillée. Jamais un fait réellement historique ne se présente dans de telles conditions ; l'extrême fantaisie est le système de ceux qui inventent. L'imagination étant leur seule base, il n'y a pas concordance entre les récits des divers auteurs.
Si les quatre Évangiles canoniques relataient un fait historique, il n'y aurait pas entre eux des divergences, des contradictions ; le fait serait le même dans tous les récits. Ainsi, l'inscription sur la croix, si elle avait réellement existé, serait relatée par tous de la même façon, tous l'auraient copiée textuellement ; or, dans Matthieu (27, 37), il y a : « Celui-ci est Jésus, le Roi des Juifs. »
Dans Marc (15, 26), il y a : « Le Roi des Juifs. »
Dans Luc (23, 38) : « Celui-ci est le Roi des Juifs » (Luc ne dit pas Jésus).
Dans Jean (19,19) : « Jésus le Nazaréen, le Roi des Juifs. »
« Ces erreurs, dit Blaise Pascal, prouvent que les Evangélistes ne se sont pas entendus pour nous tromper. »
Les premiers écrivains qui parlent des Evangiles sont Irénée, Clément d'Alexandrie et Tertullien, qui Arrivaient à la fin du IIème siècle. Clément d'Alexandrie (vers 200) parle de plusieurs « Testaments » antérieurs au néo-christianisme : celui des Grecs, celui des Israélites.
Eusèbe, dans son Histoire Ecclésiastique (III, 139), cite l'extrait suivant, pris dans un écrit de Papias, évêque d'Héliopolis :
« Jean l'ancien (presbyter) disait que Marc avait écrit ce qu'il avait ouï dire à Pierre, mais qu'il n'avait pas rapporté les choses dans l'ordre où elles avaient été dites ou faites par le Sauveur, parce qu'il ne l'avait jamais vu et qu'il avait été seulement disciple de Pierre, qui prêchait l'Evangile, selon la méthode la plus utile à ceux qui l'écoutaient, sans observer exactement les règles de l'histoire. En quoi Marc n'a point fait de faute, puisqu'il écrivait les choses selon que sa mémoire lui représentait qu'il les avait entendues et qu'il n'a jamais rien avancé de contraire à la Vérité. » (D'après la traduction du Président Cousin, Paris, 1688, p. 175.)
Papias écrivait cela vers 160.
Eusèbe considère ce Papias comme « un esprit fort médiocre » ; tout ce qu'il dit est empreint d'inexactitude ; ainsi, il attribue
à Jésus l'Apocalypse de Baruch.
(1) Justin dit : « Il en est certains de votre espèce, ô mes amis, qui professent que Jésus est le Christ bien qu'ils le représentent comme un homme engendré par des hommes ; mais je ne partage point leur opinion, quand même la majorité de mes coreligionnaires la professeraient » (Dialogue avec Tryphon, 48).

LES LIVRES CANONIQUES
On sait qu'on déclara « canoniques », c'est-à-dire regardés comme inspirés par Dieu, certains écrits qu'on a, à ce titre, inscrits dans le catalogue officiel. Or ce sont les hommes qui ont fait ces « canons », et ils les ont faits avec l'intention d'en faire des lois à la gloire et à l'avantage de leur cause.
Les décrets des conciles sont des décisions masculines, « humaines », aurait-on dit dans le vieux langage théologique. Ce sont des hommes qui s'assemblent pour juger les choses divines, c'est-à-dire féminines ! Des choses relevant d'une psychologie qui leur est inconnue, qui les dépasse !
Alors, quelle autorité peuvent avoir ces décrets profanes ?
Nous allons voir qu'au lieu d'y mettre l'amour de la Vérité et de la Justice Divine, ces hommes n'y mettaient que leur jalousie de sexe, puisque dans leurs « canons » ils avaient soin de supprimer les livres des femmes ou ceux qui pouvaient être favorables à la cause féministe.
Le premier qui ait donné le catalogue des livres reçus comme canoniques par les Juifs, c'est Méliton, évêque de Sardes vers l'an 180 de notre ère (il est cité par Eusèbe, IV, 26). Il ne nomme pas Judith, ni Tobie, ni la Sagesse, ni Esther, ni l'Ecclésiastique, ni les Macchabées.
Le canon apostolique du Ier siècle (canon de 84) n'attribue que trois livres à Salomon (Proverbes, Ecclésiastique, Cantique), et ne donne pas la valeur canonique à la Sagesse. Ce canon omet Tobie, Judith, la Sagesse, mais fait entrer dans l'Ecriture sainte des livres rejetés plus tard (3e des Macchabées, deux lettres et un livre d'ordination de saint Clément).
Origène, en 203, rejetait aussi Judith, Tobie, la Sagesse, l'Ecclésiastique, à en croire Eusèbe (VI, 25).
Ceci nous fait supposer qu'alors ces livres avaient une portée qu'ils n'ont plus. On les a remis plus tard dans le canon quand ils ont été remaniés suivant l'esprit du temps.
Saint Jérôme, au IVème siècle, approuve encore le canon de 84 (voir conclusions Prologue Galates).
Mais il y joint Daniel (Préface sur ce livre).
Saint Grégoire de Nazianze, en 384 (dans Poèmes sur les Livres saints), laisse en dehors du catalogue Samuel, Tobie, Judith, Esther (toutes les femmes), la Sagesse, l'Ecclésiastique.
Le concile de Laodicée, en 365, s'en tint à ce répertoire.
Saint Augustin donne sa sanction aux livres qui lui plaisent le plus et qui sont les plus lus, et ce sont ceux-là qui vont devenir « divins ». Les livres saints ont Dieu pour auteur quand ils ont du succès.
C'est ainsi que le concile de Carthage, en 397, fixa son « canon ».
Alors, à quoi bon discuter pour savoir si les livres de Judith sont « divins » ?
Remarquons que ce sont des livres de femmes (les vrais livres divins, ceux-là) qui sont rejetés des premiers canons ; cependant, la Femme seule sait ce qui est divin, c'est-à-dire féminin ! Aucun homme, aucun théologien n'est compétent en cette matière. Bien plus, il est l'ennemi né de toute vérité sur ce chapitre, puisqu'il est le concurrent de Dieu, l'usurpateur de la Divinité.
Depuis ces temps éloignés, on a simplifié les choses, on a déclaré que l'Eglise, étant infaillible, a le droit de fixer les dogmes (Bergier, Dict. de Théol., art. Canon) ; elle rompt avec la Tradition qui apportait des preuves de la vérité primitive. C'est sur cette base que le Concile de Trente, en 1500, fixa le canon qui, cependant, n'a jamais été définitif, car, actuellement même, on ne connaît pas sûrement le nombre des livres divins, sacrés, canonique.

CONSTITUTION PRIMITIVE DE L'ÉGLISE
Jusqu'au IIème siècle, le néo-christianisme ne fut pas une religion établie ; il n'avait ni temples, ni rites, ni liturgie ; il n'avait encore que des repas en commun qui avaient lieu dans des maisons particulières, quelquefois aussi dans des synagogues.
Du temps de Paul, on appelait « Eglise » un groupe de personnes qui se réunissaient dans la maison de l'une d'elles pour prendre des repas ensemble et, ensuite, se livrer à toutes sortes de divertissements qui avaient pour but de protester contre l'ancienne Loi morale et contre l'ancien régime religieux que l'on voulait renverser (1).
Au deuxième siècle, il n'y avait pas encore de prêtres, de moines, d'évêques, de cardinaux ni de papes. Tout cela a été créé et organisé quand, les communautés étant devenues plus nombreuses, on assigna des fonctions à chacun. Alors on introduisit dans la nouvelle secte les fonctions qui existaient depuis longtemps dans les Mystères, qui avaient un Ancien (vénérable), le Presbyte, des surveillants, Episcopes (ceux qui regardent), des Diacons (secrétaires ou orateurs), et des serviteurs ou ministres qui gardent les portes des parvis.
Paul, qui copie cette organisation, sans bien la connaître, n'emploie qu'un des termes que nous venons de citer, celui de Diacon ; il dit : « Qu'est donc Apollos et qu'est Paul ? des Diacons par le moyen desquels vous avez cru ». (I Cor., 3, 5 ; comparer II Cor., 11, 23). Ce titre est même donné au Christ : « Le Christ a été Diacon pour montrer la vérité de Dieu » (Rom., 15, 8).
Le mot Diaconie est employé pour « ministère », dit-on. « Il y a diversité de Diaconie, mais il n'y a qu'un même Seigneur » (I Cor., 12, 5).
En parlant de la famille de Stéphanos, Paul dit « qu'ils se sont voués à la Diaconie des Saints ».
Dans le livre des Actes, on attribue aux Apôtres l'idée de faire choisir pour la communauté de Jérusalem sept hommes (les 7 lumières des Mystères) chargés spécialement de la Diaconie des tables, « parce que les veuves étaient négligées » (Actes, VI, 1), tandis qu'eux (Paul et ses amis) pourraient vaquer à la Diaconie de la parole. Dans l'Epître de Clément, nous trouvons ces phrases bizarres : « Les Apôtres sont partis pour annoncer la bonne nouvelle de l'approche du royaume de Dieu. Ils instituèrent les prémices des convertis, après les avoir examinés dans le Saint-Esprit comme Episcopes et Diacons de ceux qui croiraient. Toutefois, ce n'était point là une idée nouvelle, car depuis des siècles déjà il était écrit, eu égard aux Episcopes et aux Diacons : « J'établirai leurs Episcopes pour la Justice et leurs Diacons pour la fidélité » (ch. 42). Ceci est une citation inexacte d'Isaïe (60,17) d'après les Septante, où il est dit : « Je te donnerai les clefs pour la paix et les surveillants pour la justice. »
Le texte hébreu porte : « Je te donnerai pour autorité la paix et pour gouverneur la justice », ce qui était dit contre l'autorité de l'homme.
Dans la même Epître de Clément (ch. XXXXIV), il est fait un éloge pompeux des épiscopes, diacons et presbytes, « ceux qui ont été institués par les Apôtres ou plus tard par d'autres hommes considérés et qui ont servi le troupeau du Christ sans reproches, en toute humilité, avec calme et désintéressement, il nous semble qu'il n'est pas juste qu'on les expulse de leurs fonctions... »
On contestait donc le droit de remplir ces fonctions et de porter ces titres à ceux qui avaient été institués, non par les Apôtres, mais plus tard par d'autres hommes ! Ceci nous éclaire.
(1) Paul substitue les repas en commun aux cérémonies prescrites par la Loi d'Israël, ce qui était une hérésie manifeste. Appelé à Jérusalem, il est dénoncé comme profanant le saint lieu en dogmatisant contre la Loi.

CONSTITUTION DE L'ÉGLISE ROMAINE
La légende jésuiste qui avait pris corps depuis un siècle était déjà si bien enracinée dans les esprits crédules que chacun y apportait son adhésion pour la fortifier.
Il y avait des fanatiques de la nouvelle croyance qui accordaient une foi entière à la récente histoire du Dieu-homme et qui affectaient de croire que les Apôtres du premier Christianisme avaient transmis l'histoire de Jésus à d'autres hommes qui avaient pris le titre d'évêques et qui avaient fondé des Eglises.
Ce titre d'« episcopoï » existait en effet dans l'Eglise johanite, on allait l'introduire dans l'Eglise jésuiste.
Pour se donner le prestige de l'ancienneté, ces néo-chrétiens se mirent à dresser des listes d'évêques commençant au temps assigné aux Apôtres, et déclarèrent que l'organisation de leur Eglise avait été décidée dans un premier concile tenu par les Apôtres en l'an 51. Mais, à cette époque-là, les néo-chrétiens n'existaient pas encore. Paul, qui fut leur chef d'école, n'avait même pas encore écrit ses Epître.
C'est dans cet esprit de mensonge qu'Irénée donne la liste des « Evêques de Rome », dont plus tard on fera les premiers Papes. Chaque Eglise voulait avoir eu comme fondateur un des douze, si bien que chacune se dressait une liste d'évêques remontant aux Apôtres (1).
Eusèbe a mentionné ces listes, qui n'ont d'exactitude que pour les temps récents (la deuxième moitié du second siècle), mais qui sont fictives avant cette époque. Les noms qu'elles donnent représentent en grande partie des personnages imaginaires que l'on fait venir de la Grèce ou d'Asie, à la suite des premiers Apôtres, pour conquérir la ville impériale.
Les quatre premiers évêques (appelés plus tard des papes) sont si peu connus qu'on les prend les uns pour les autres. Ce sont Lin, Clet, Anaclet et Clément ; on les fait régner de 65 à 100, et on fait d'eux des disciples de l'Apôtre Pierre. Ils auraient été les présidents du Comité révolutionnaire de Rome, et auraient été tous les quatre mis à mort. Si cette version était vraie, ces hommes auraient été des Johanites et non pas des Jésuistes ; du reste, cela se serait passé à l'époque où Néron faisait « rafler » pour le « cirque » tous ceux qu'on appelait « les mauvaises têtes de la Suburre », les Chrétiens que Tacite accuse de haïr le genre humain parce qu'ils n'aimaient pas les vices des Romains.
Les évêques-papes qui viennent après sont Evariste et Alexandre, dont on fait des Syriens, Sixte, un Romain, le Grec Télesphore, puis Hygin le rhéteur ; tous sont des agitateurs qui lancent des manifestes sous forme d'Epîtres. C'est au deuxième siècle que l'Eglise commence à se constituer sous une forme monarchique.
Les petites Eglises se groupent autour d'une autorité supérieure : l'Evêque. La société néo-chrétienne est organisée désormais. Elle sera indestructible et prendra dès le début le caractère autoritaire et despotique des monarchies les plus absolues. Avec Pius (en 142) commence une nouvelle période, une lutte entre les premiers Chrétiens et les Gnostiques.
Le Gnostique Valentin fut sur le point de se faire élire évêque de Rome, c'est-à-dire pape, mais il fut violemment combattu, et la lutte entre les deux partis dura deux siècles. L'élection de Pius, un Romain, inaugure la résistance du monde néo-chrétien contre la philosophie représentée alors par les Gnostiques. Désormais le Pape sera le chef de l'orthodoxie.
Pius lutte en désespéré contre les Valentiniens. Après Anicet et le martyr Soter, Eleuthère résiste à la fois aux Gnostiques qui envahissent la Gaule et aux Montanistes qui se disent inspirés du Saint-Esprit. Victor, un Africain, combat contre le Byzantin Théodoste. C'est une guerre de tous les instants, et, quand le déchaînement de folie se ralentit, c'est que les persécutions impériales terrorisent les combattants dans les deux partis.
Quel spectacle que ces luttes, ces ambitions, ces intrigues dans lesquelles se jettent éperdument des ambitieux vulgaires, des intrigants de bas étage, des hommes de mœurs déplorables se disputant le pouvoir, prétendant dominer les Eglises et déshonorant la religion nouvelle par la violence de leurs passions !
Après un court répit, sous Zéphyrin et le politicien Calixte, bon administrateur et perceur de cimetière dans les Catacombes (202-223), la persécution impériale balaie coup sur coup Urbain, Pontien, Anthère, Fabien, et le siège de Rome reste vacant pendant un an (250-251).
Viennent ensuite Cornélius et Lucius, qui sont exilés. C'est alors que le Montanisme fait naître un fanatisme nouveau dirigé par l'antipape Novatien.
Après cela, coup sur coup, deux évêques néo-chrétiens sont martyrisés : Etienne et Sixte II ; mais les fureurs impériales se calment, ce qui, du reste, ne rend pas la tranquillité aux évêques de Rome, car un nouveau danger surgit : ce sont les précurseurs d'Arius, Sabellius et Paul de Samosate, deux Orientaux, qui entrent en scène et vont inquiéter le pape Denys qui passe sa vie à les combattre (de 250 à 259).
Enfin, toutes les querelles cessent devant l'horrible tourmente de Dioclétien, 1' « ère des martyrs ». La papauté semble disparaître dans l'orage. Après le martyre de Félix (275), Eutychien (275-283), Caius (283-296), ne sont que des noms pour la postérité ; Marcellin est livré aux bêtes, il n'y a plus de pape du tout pendant quatre ans (304-308).
C'est ainsi que la Papauté fut consacrée par le martyre, c'est dans les exécutions qu'elle trouva du prestige, en vertu de cet esprit de réaction qui est dans l'âme humaine et lui fait prendre les choses à l'envers.
C'est vers 160 que l'on trouve en Italie des « Episcopes », imitant ceux qui existaient dans les Eglises johanites, c'est-à-dire étant les chefs d'une communauté. C'est à partir de cette époque que l'Eglise romaine se constitue solidement, sentant la nécessité de l'union pour résister aux incessantes attaques de ses nombreux adversaires ; et c'est alors que, pour se donner l'illusion de la puissance, elle se déclare universelle (catholique). C'est alors aussi que, pour faire cesser les discussions qui régnaient entre ses membres, elle adopte une tradition qu'elle déclare authentique : celle de la fondation de l'Eglise de Rome par Pierre et Paul, unis dans cette œuvre, alors qu'en réalité ils furent toujours ennemis, que Pierre ne vint jamais à Rome et que Paul n'y fonda pas d'Eglise (2).
Irénée dit (Contre les Hérésies, III, 3-2) : « L'Eglise la plus grande, la plus ancienne et celle qui est connue de tous, a été fondée par les deux très glorieux apôtres Pierre et Paul à Rome... Et c'est à cette Eglise, à cause de sa prééminence distinguée, que l'Eglise tout entière, c'est-à-dire tous les fidèles du monde, doivent s'adresser, parce qu'elle a toujours conservé la tradition des apôtres. »
L'autorité de la tradition ecclésiastique a toujours été niée. Déjà, les plus anciens Pères de l'Eglise s'emploient avec ardeur à la défendre contre les incrédules de leur temps.
« Ceux qui veulent connaître la vérité, dit saint Irénée, peuvent consulter la tradition apostolique conservée par chaque Eglise et répandue dans tout le monde. Nous pouvons nommer ceux que les apôtres ont établis évêques dans les Eglises, et leurs successeurs jusqu'à nos jours... Mais parce qu'il serait trop long de rapporter l'ordre de la succession dans toutes les Eglises, nous ne parlerons que de la plus grande, la plus célèbre, la plus ancienne : l'Eglise de Rome, fondée par les glorieux apôtres Pierre et Paul, avec laquelle tous les autres doivent se réunir à cause de la prérogative de sa primauté. » Puis il met à la suite les prétendus évêques de Rome depuis les successeurs des apôtres jusqu'à Eleuthère, son contemporain.
« C'est dans cet ordre et par par cette succession, continue-t-il, que la tradition de la doctrine apostolique et la prédication de la vérité sont venues jusqu'à nous. »
Il cite à l'appui de sa thèse Polycarpe, « lequel, dit-il, nous avons connu dans notre jeunesse, et qui a toujours enseigné ce qu'il avait appris des Apôtres, et il a laissé cette doctrine après lui comme le témoignent toutes les Eglises d'Asie et ceux qui lui ont succédé dans l'Eglise de Smyrne ». De là, saint Irénée conclut « qu'il faut éviter avec soin les novateurs et s'attacher inviolablement à la vérité de la tradition ecclésiastique ; et, en effet, continue-t-il, s'il vient à s'élever quelque dispute sur la foi, ne doit-on pas recourir aux Eglises les plus anciennes qui ont été gouvernées par les Apôtres, et prendre d'elles ce qu'il y a de certain sur le point contesté ? Et si les Apôtres ne nous avaient rien laissé par écrit, ne faudrait-il pas suivre la tradition qu'ils ont transmise à ceux qui leur ont succédé dans le gouvernement des Eglises ? » Saint Irénée était évêque de Lyon et vivait vers la fin du IIème siècle.
Nous allons voir bientôt la papauté devenir la haute judicature de l'Eglise d'Occident et commencer un cycle nouveau, la période politique.
L'exploitation néo-chrétienne va commencer et se partager les dépouilles de l'empire à Rome.
C'est avec raison que l'on a dit : « Le Catholicisme a rempli les cadres de l'Empire romain. »
(1) A propos de ces mensonges, le pasteur Leblois dit ceci : « Ce nouvel ordre de choses avait été exalté et recommandé par des écrits apocryphes ; c'est la première fois qu'apparaît ce fait qui, malheureusement, se renouvellera plus tard, fait aussi douloureux pour le sens moral que fécond en conséquences déplorables. Toutes les fois que l'Eglise s'écarte de l'ordre antérieurement établi, cet écart est favorisé par des pièces supposées, rédigées sous le couvert d'un nom vénéré, tranchons le mot, par des faux ». (Les Bibles, t. I, p. 22).
L'esprit de l'Eglise, dès son origine, c'est le mensonge ; ce sont les interpolations, les pièces douteuses, qui sont devenues la loi générale de ses défenseurs.
(2) Calvin croyait à la venue à Rome de Pierre, et Leibnitz dit : « Comme les anciens attestent d'un commun accord que l'apôtre Pierre a gouverné l'Eglise dans la ville de Rome, capitale de l'univers, qu'il a souffert le martyre et qu'il a désigné son successeur, et comme jamais aucun autre évêque n'y est venu pour en occuper le siège, c'est avec raison que nous reconnaissons l'Evêque de Rome comme le premier de tous. »

ÉVOLUTION DES IDÉES AU TROISIÈME SIÈCLE
De 200 à 300, un grand mouvement philosophique se produisit.
Il était dirigé par les néo-platoniciens, les philonistes et les Gnostiques.
Ce mouvement envahit le monde et arriva à se fusionner avec le néo-christianisme qui, n'ayant pas de philosophie, s'en forma une avec les idées régnantes.
Les doctrines de l'Orient s'étaient infiltrées dans le monde romain et y faisaient un contrepoids aux doctrines philosophiques de la Grèce. Au IIIème siècle, Tertullien parle des Bouddhistes et des ascètes, et saint Clément, chef de la fameuse Ecole d'Alexandrie, était un zélé partisan de la Gnose. C'est par cette voie que tout ce qui venait de l'Orient passa dans le Catholicisme, le costume des prêtres, leur tonsure, leurs règles monastiques et leurs légendes.
Saint Théophile prétend que les premières hérésies sont calquées sur les systèmes brahmaniques. Partout les hommes tombent dans les mêmes erreurs et manifestent leur nature par une même mentalité, une même interprétation faussée de l'antique vérité. C'est ainsi que le néo-christianisme adopta et propagea la fausse morale qui devait régner depuis, ce système qui consiste à séparer l'homme de la femme sous prétexte de pureté, alors que le vrai motif de cette séparation est une crainte inavouée du Prêtre d'être jugé par la Femme. C'est donc pour cacher des vices qu'il la fuit, et non parce qu'elle a le pouvoir de l'avilir ; le commerce de la femme sanctifie l'homme, au contraire, et c'est sa meilleure sauvegarde contre le mal. Dans l'ancienne Théogonie c'était l'Union avec la Divinité qui élevait l'homme, parce que l'amour de la femme réagit sur l'esprit.
Nous allons voir surgir, en ce siècle, des défenseurs de la religion nouvelle, les Apologètes, en même temps que des adversaires, ce qui va forcer les philosophes à discuter toutes les questions de religion, de morale, et même d'organisation sociale.

LE COMMUNISME DES PREMIERS CHRÉTIENS
Le règne du christianisme primitif fut une des plus belles époques de l'humanité, une rénovation qui apportait aux hommes une source nouvelle de vérités philosophiques, et de justice sociale.
Le premier Christianisme enseignait le plus pur rationalisme et aurait dû imprimer un progrès dans toutes les directions de l'Esprit et dans toutes les réalisations sociales si une réaction violente n'était venue stériliser ses effets en faisant prendre à la religion une direction opposée à celle qu'il avait indiquée.
La société chrétienne, à son berceau, fut une communauté.
Celle qu'on appelait la communauté de Jérusalem fut très florissante. Elle fut dispersée lors de la première persécution qui eut lieu en l'an 36.
Mais, loin de détruire l'idée d'un communisme, cela ne fit que l'aviver, en donnant un développement inattendu et rapide à d'autres communautés.
Le sang des martyrs versé pour la grande cause de la Vérité et de la Justice sociale a toujours ce résultat.
Le Christianisme de la primitive Eglise, alors que les Chrétiens ne formaient qu'un peuple de frères, fut fertile en faits héroïques et en conceptions gigantesques de rénovation sociale universelle.
C'est à la secte des Esséniens que remonte le germe d'où ils sortirent.
Quelques mots sont donc nécessaires pour en rappeler l'origine.

L’ORDRE DES ESSÉNIENS
Les Esséniens, philosophes pythagoriciens, avaient une grande réputation de sainteté et de savoir ; ils gardaient les traditions de la Science antique, étaient d'une vertu et d'une droiture exemplaires et ne prononçaient jamais de paroles profanes ; ils avaient un langage d'une grande correction.
Ils avaient aussi le mépris des richesses et vivaient en commun suivant les lois du régime maternel ; il n'y avait parmi eux ni riches ni pauvres.
Pour faire partie de leur religion, il fallait commencer par verser tous ses biens à la caisse de la communauté, ainsi qu'on le faisait chez les Pythagoriciens.
C'est cet usage qui s'est perpétué dans le symbolisme maçonnique et en vertu duquel le nouvel initié doit, avant d'entrer dans le temple, déposer son or, son argent et ses bijoux.
Leurs vêtements étaient blancs ; ils ne les renouvelaient pas continuellement, comme les profanes, mais les portaient jusqu'à leur usure complète.
Leur journée était réglée. La Mère-directrice dirigeait le travail de chacun, lui donnant la tâche à faire dans la journée, et ils travaillaient avec assiduité pendant cinq heures. Après le travail, ils faisaient leurs ablutions avec de l'eau froide, le corps entouré de ceintures de lin que le tablier maçonnique rappelle symboliquement.
Les repas (agapes) se faisaient dans une salle commune ; ils se mettaient à table avec ordre et discipline, jamais la salle de réfectoire n'était profanée par le tumulte ou le désordre ; on parlait avec discrétion, les uns après les autres, sans se contredire, sans crier.
Les communautés religieuses ont gardé ces coutumes, mais en ont diminué la dignité depuis qu'elles ont perdu la parole de vérité.
Un orateur disait une sorte d'oraison avant et après le repas, usage qui s'est conservé dans les agapes maçonniques. La nourriture était végétarienne.
Après le repas, ils déposaient les vêtements de cérémonie qu'ils avaient pris pour se présenter à la table commune, usage qui est aussi resté chez les gens dits bien élevés, qui dans les classes supérieures de la Société s'habillent pour assister aux repas. Ils reprenaient ensuite leurs travaux jusqu'au crépuscule.
Le soir, le souper les réunissait de nouveau, eux et leurs invités de la même secte, car les profanes étaient exclus de leurs agapes.
Le travail était distribué suivant les facultés de chacun.
Les esprits supérieurs s'occupaient de philosophie et de médecine, ce sont ceux-là qu'on appelait les Thérapeutes ; ils étudiaient la Nature, cherchaient les propriétés des végétaux et des minéraux et posaient les bases des vraies sciences médicales.
Ils voyageaient souvent. Leur secte était établie sur les côtes occidentales du lac Asphaltite, mais elle avait des ramifications dans nombre de régions.
Quand les Esséniens voyageaient, ils n'emportaient rien avec eux (mais étaient armés d'épées, comme les chevaliers). Dans chaque ville, un membre de la secte, portant le nom d'hospitalier, fournissait à ceux qui arrivaient les objets de première nécessité.
C'est cet usage qui a laissé dans la Franc-Maçonnerie le titre d'hospitalier à un des sept dirigeants d'une Loge, alors que, dans la Société moderne, cette fonction ne s'accomplit d'aucune façon, si bien que l'on ne comprend pas ce que fait l'hospitalier dans les Loges modernes.
Les Esséniens n'achetaient et ne vendaient rien entre eux.
Celui qui avait besoin de quelque chose le demandait à celui qui pouvait le lui donner.
Il régnait parmi eux une véritable fraternité, comme cela existe entre frères et sœurs, dans une famille unie.
L'historien Josèphe prétend qu'ils étaient comme des enfants placés sous la surveillance d'un Maître ; c'est d'une Mère qu'il faut dire, ce qui est bien différent.
Les masculinistes qui ont parlé des Esséniens ont appelé cette Mère leur curateur ou chef, pour ne pas avouer qu'il s'agit d'une direction féminine.

TRAHISON
Il faut bien connaître la nature humaine pour comprendre l'histoire.
Les instincts masculins, poussant l'homme dans une autre voie que celle qui est suivie par les femmes, amènent infailliblement des défections, des réactions, des trahisons. C'est ce qui se produisit parmi les premiers Chrétiens.
Dans la première Épître de Jean, nous lisons ceci :
18. — Mes enfants, le dernier temps est venu, et comme vous avez entendu dire que l'Antéchrist doit venir, aussi y a-t-il déjà plusieurs Antéchrists, par où nous connaissons que le dernier temps est venu.
19. — Ils sont sortis d'entre nous, mais ils n'étaient pas des nôtres, car s'ils eussent été des nôtres, ils seraient demeurés avec nous ; mais cela est arrivé afin qu'il parût que tous ne sont pas des nôtres.
Pour bien comprendre ceci, il faut savoir que l’Antéchrist est le nom général donné à l'homme qui se met devant la Femme (ante, devant, christ, suprématie féminine).
Une réaction masculiniste se produisait donc, qui allait tout renverser, c'est-à-dire transporter dans le sexe masculin tous les faits qui convergeaient autour du sexe féminin.
On allait garder l'idée d'un Messie, mais on allait en faire un homme, et c'est par réaction masculiniste qu'on annonce l'arrivée d'un fils de l'homme.
C'est parce que la Déité va changer de sexe que l'on va dire « Dieu s'est fait homme », c'est-à-dire a pris la forme masculine, l'Anthropomorphisme. Jusque-là, la Divinité des Israélites, « Hévah », n'a pas eu de masculin.

LES NAASSÉNIENS
Cependant, on ne passa pas directement du féminin au masculin, il y eut des étapes de transition.
Une secte nouvelle se forma, celle des Naasséniens, qui fondèrent l'Anthropogonie.
Cette secte annonçait aussi la résurrection du Christ, mais on en faisait un être hermaphrodite ; de là leur titre : Anthropogonie (homme-femme).
Mais remarquons que, dans ce mot composé, ils mettent déjà le masculin avant le féminin. Ceci indique que ce sont des hommes qui fondèrent cette secte sur l'égalité des sexes, telle qu'ils l'entendent, c'est-à-dire en mettant l'homme le premier.
En effet, les Naasséniens avaient créé une science basée sur l'égalité des sexes, qui glorifiait l'homme-femme, passage dangereux qui conduisit l'homme à la place supérieure dont il expulsa la femme dès qu'il se vit son égal.
Dès que Christ fut devenue neutre, on vit une foule de charlatans se déclarer « Christos », ce qui causa un grand scandale.
On les appelait les « faux Messies ».

JUDAS LE GALILÉEN
Et le verset suivant des Actes (V,37) dit : « Après lui s'éleva Judas le Galiléen, du temps du dénombrement, et il attira à lui un grand peuple, mais il périt aussi, et tous ceux qui le crurent furent dispersés. »
Josèphe signale ce Judas et nous raconte que non seulement il prétendait être roi, mais il était l'auteur d'une nouvelle secte dont les disciples ne reconnaissaient que leur Dieu pour chef et pour maître (Ant., XVIII, 1-6). Ce fut un de ceux qui inquiétèrent le plus les Romains (1). C'est sa secte, celle des Caïnites qui prenait tout à rebours, y compris la Divinité qui pour eux fut représentée par le principe du Mal : l'homme méchant, c'est-à-dire Caïn divinisé.
On raconte que ces idées nouvelles étaient mises à profit par les voleurs. Un Anachorète d'Egypte, du nom de Héron, vit apparaître « Christos » sous la figure d'un ange de lumière, qui lui fit croire que, s'il voulait se laisser asseoir sur ses ailes, il le ravirait au Ciel avec Elie. Le malheureux crédule prit place sur le dos du vaurien, qui le précipita d'une hauteur énorme dans un puit profond, d'où on le tira à demi-mort.
Tout ceci nous explique ce qu'était devenue l'idée messianique à cette époque.
Josèphe, dans sa Guerre des Juifs (L. XVIII, ch. I), nous donne des renseignements sur ce personnage qui allait entrer dans l'histoire et y faire entrer avec lui une secte nouvelle. Il nous explique d'abord comment Cyrénius, sénateur romain, fut chargé par Auguste de faire le dénombrement en Judée, puis, il dit : « Les Juifs ne pouvaient souffrir d'abord ce dénombrement, Un nommé Judas, qui était Gaulonite et de la ville de Gamala, assisté d'un Pharisien nommé Zadoc, sollicita le peuple à se soulever, disant que ce dénombrement n'était autre chose qu’une manifeste déclaration qu'on les voulait réduire en servitude, et, pour les exhorter à maintenir leur liberté, il leur représenta que si le succès de leur entreprise était heureux, ils ne jouiraient pas avec moins de gloire que de repos de tout leur bien, mais qu'ils ne devaient point espérer que Dieu leur fût favorable s'ils ne faisaient de leur côté tout ce qui serait en leur pouvoir.
« Le peuple fut si touché de ce discours qu'il se porta aussitôt à la révolte. Il est incroyable quel fut le trouble que ces deux hommes excitaient de tous côtés. Ce n'était que meurtre et que brigandage : on pillait indifféremment amis et ennemis sous prétexte de défendre la liberté publique ; on tuait, par le désir de s'enrichir, les personnes de la plus grande condition ; la rage de ces séditieux passa jusqu'à cet excès de fureur qu'une grande famine qui survint ne put les empêcher de forcer les villes ni de répandre le sang de ceux de leur propre nation ; et on vit même le feu de cette cruelle guerre civile porter ses Flammes jusque dans le Temple de Dieu, tant c'est une chose périlleuse que de vouloir renverser les lois et les coutumes de son pays.
« La vanité qu'eurent Judas et Zadoc d'établir une quatrième secte et d'attirer après eux tous ceux qui avaient de l'amour pour la nouveauté fut la cause d'un si grand mal. Il ne troubla pas seulement alors toute la Judée, mais il jeta les semences de tant de maux dont elle fut encore affligée depuis. Sur quoi j'ai cru à propos de dire quelque chose des maximes de cette secte. »
Et, dans le chapitre II, il va nous parler des quatre sectes qui étaient parmi les Juifs : « Ceux qui faisaient, parmi les Juifs, une profession particulière de sagesse étaient divisés depuis plusieurs siècles en trois sectes, des Esséniens, des Sadducéens et des Pharisiens.
« Judas dont nous venons de parler fut l'auteur d'une quatrième secte. Elle convient en toutes choses avec celle des Pharisiens, excepté que ceux qui en font profession soutiennent qu'il n'y a que Dieu seul que l'on doive reconnaître pour seigneur et pour roi, et ils ont un si ardent amour pour la liberté qu'il n'y a point de tourments qu'ils ne souffrissent et ne laissassent souffrir aux personnes qui leur sont les plus chères, plutôt que de donner à quelque homme que ce soit le nom de Seigneur et de Maître.
« Sur quoi je ne m'étendrai pas davantage, parce que c'est une chose connue de tant de personnes qu'au lieu d'appréhender que l'on n'ajoutât pas foi à ce que j'en dis, j'ai seulement sujet de craindre de ne pouvoir exprimer jusqu'à quel point va leur incroyable patience et leur mépris des douleurs. Mais cette invincible fermeté de courage s'est encore accentuée par la manière si outrageuse dont Geffius Florus, gouverneur de Judée, a traité notre nation et l'a enfin portée à se révolter contre les Romains. »
Tout cela était en opposition absolue avec les principes des premiers Chrétiens.
« Ils se proposaient pour modèle la vie des hommes les plus méchants, tels que les Sodomites, Coré, Judas, etc. »
Leur réaction était dirigée surtout contre le commandement de la loi qui condamnait l'adultère de l'homme. (L'abbé Guyot Dictionnaire des Hérésies p. 94)
Fréret dit de Judas :
« Il y eut des évangiles qui comptaient Judas au nombre des apôtres. Il parut un évangile sous son nom. On appelait ses disciples Caïnites parce qu'ils regardaient Caïn comme grand personnage, ainsi qu'Esaû, Coré et les Sodomites. Ils se servaient de l'évangile de Judas qui était, selon eux, le premier des apôtres. » (Fréret, t. II, p. 124)
Dans les Ecritures, nous voyons que le nom de Judas restera désormais uni à l'idée de trahison. Déjà un Judas avait trahi Israël, un second Judas devait encore trahir une femme, Johana, la nouvelle Déesse des Israélites.
La haine qu'il inspirait devait être violente, puisque son champ, appelé Haceldama (le champ du sang), devient un endroit signalé à la réprobation et qu'on lui applique ce qui est dit dans le livre des Psaumes : « Que sa demeure devienne déserte, qu'il n'y ait personne qui l'habite. » (Actes, chap. Ier, 19-20.)
(1) Le premier Livre des Macchabées n'annonce pas un roi, mais un prophète. C'était l'expression de la croyance populaire. Or un prophète, c'est un penseur qui élève les esprits, telles les anciennes inspirées qui avaient parlé, qui avaient enseigné les lois de la nature et la loi morale. Tout le monde ne pouvait pas se dire prophète ; il fallait, pour avoir cette audace, au moins une certaine instruction. La royauté était plus facile à prendre. Un roi, ce n'est pas un homme qui pense, c'est un homme qui commande, et c'est ce rôle qui flatte l'homme, aussi c'est celui-là surtout que les imposteurs ambitionnaient. C'est ce qui explique pourquoi du « Messie » on fait un roi, quand l'idée messianique se masculinise.

LES SICAIRES
C'est sous Antonius Félix qu'on commença à parler des Sicaires (en latin « Sicarii », les hommes à couteaux).
Aux jours de fête où Jérusalem se remplissait tout à coup d'une multitude extraordinaire, venue du dehors, ces gens se mêlaient à la foule, avec des couteaux sous leurs habits, et tuaient impunément ceux que leur fanatisme tenait pour ennemi ou pour suspects. On nous dit, ailleurs, que dès qu'ils avaient entendu un incirconcis parler du Seigneur (Kyria, donc Johana) ou de la Loi, le tenant, dès lors, pour Israélite, ils s'arrangeaient pour le surprendre et le menaçaient de le tuer s'il ne se faisait pas circoncire.
« Des bandes armées nombreuses et déprédatrices, dit Flavius Josèphe, souvent fortes de deux ou trois mille hommes, donnèrent beaucoup d'occupation à Hérode et aux Romains.
« Quelques-uns avaient un but politique et faisaient une espèce de guerre de partisans ; d'autres n'étaient, tout bonnement, qu'un ramas d'assassins qui portaient de longs poignards sous leurs robes et tuaient ceux dont ils voulaient se défaire, jusque dans les rues de Jérusalem. » (Josèphe, de Bello, 1. II.)

LE NOM DU MESSIE MASCULIN
Nous venons de voir que Judas le Galiléen avait entrepris de représenter la Divinité sous la forme masculine de Caïn. Mais ce nom était mal vu ; il en existait un autre qui avait eu une destinée plus heureuse ; c'était celui d'Esaü, le mâle premier-né, qui s'écrivait souvent J-eseus. L'iod qui précède est le signe de la masculinité. Il était devenu Æsus chez les Celtes, puis Hésus ou Hiésous (Æsus contient les mêmes lettres qu'Esaù) (1).
Hésus (terrible en celtique) représentait le principe mâle ; on en avait fait le Dieu de la guerre chez les Gaulois ; il régnait à Lutèce. C'est surtout par des sacrifices humains qu'on l'honorait.
On le représente à demi-nu, une hache à la main.
Ce Dieu avait été introduit chez les Romains, qui l'avaient associé à Jupiter et à Vulcain. C'était une maxime des Romains qu'il y a en tout Dieu quelque chose de divin. En acceptant Hésus, ils le mirent dans leur Panthéon à côté de Mithra et de Sérapis.
Le nom de Jésus n'est que la forme ultime du Jeseus des Juifs ou du Hésus des Gaulois, nom modifié suivant les langues parlées dans les divers pays, mais qui garde partout sa signification symbolisant le sexe masculin.
Ce nom qui va entrer dans l'histoire d'un cycle nouveau a pu être pris dans sa forme juive, « Jeseus », il a pu être pris dans sa forme celtique, « Hésus ». Dans cette dernière conjecture, il est facile de comprendre comment ce nom est descendu de la Gaule en Orient.
Quelques siècles avant l'ère actuelle, les Gaulois s'étaient répandus partout : dans le Nord jusqu'en Irlande, dans la haute Italie, sur la rive droite du Danube où ils avaient fondé la Galicie ; de là ils étaient descendus en Macédoine, en Thrace et en Thessalie. Ils avaient fondé en Asie Mineure la « Nouvelle Gaule », et ce sont eux qu'on appelait les Galates. Ils étaient certainement, à cette époque, « ceux qu'on imite ». Or Judas, qui cherche un nom pour le Dieu mâle, est Gaulonite, c'est-à-dire partisans des dieux gaulois (2). A Lutèce, les masculinistes juraient par Hésus, tandis que les féministes juraient par Isis. La lutte de sexes était partout. Et l'on sait que c'est de là qu'est venu le mot Parisis (d'où Paris) (3).
« Le nom de Jésus, dit Burnouf, était un symbole obscur. » (Se. des R., p. 94.)
Pour accentuer le caractère mâle de ce Dieu, on mettait souvent le J (lettre idéographique comme l'iod des Hébreux), qui indique le sexe mâle, devant l'H, et on écrivait Jhésus. Ou bien on faisait de la première branche de l'H, un J. C'est ainsi, avec une croix au-dessus de l'H, qu'on écrit le monogramme de Jésus dans tout le moyen âge.
Remarquons que bien des noms qui commencent par un H finissent par s'écrire avec un J, tel Hiéronymos, Jérôme. On annexait le I, signe mâle, aux noms auxquels on voulait donner un caractère hermaphrodite. C'est ainsi que de Hévah on fit Jehévah ou Jéhovah.
Ceux qui ont voulu donner à la légende chrétienne une origine hébraïque ont dit que Jésus était la forme grecque de l'hébreu Jeshua, contraction de Jehoshua, « celui dont Hévah est le secours ». Ce nom peut être lui-même une forme de l'ancien Eseus.
On a aussi rapproché Jésus de Jehoshua (sauveur), nom porté par le fils de Josedech, qui fut le premier Grand-Prêtre des Juifs après la captivité et qui releva le temple de Jérusalem avec Zorobabel (535-516), et on le rapproche aussi du nom du fils de Sirach sous le pontificat de Simon 1er (303-284). Mais ces rapprochements n'ont été faits qu'après le Christianime. Ce n'est ni hébreu ni en syriaque que ce nom a d'abord été trouvé, c'est en grec dans les Epîtres de Paul où il est écrit :

 Ἰησοῦς (Iesoûs).

D'autre part, l'historien Josèphe nous dit (Anl., 12-51) que Jason signifie Jésus.
Or Jason est le nom d'un chef de la Synagogue de Thessalonique qui hébergea l'apôtre Paul et ses compagnons lors de leur passage dans cette ville où Jason est présenté comme le parent de Paul. Ce personnage aurait causé une grande sédition parmi les Juifs qui le traînèrent devant les magistrats. Il ne serait pas étonnant que certains épisodes de sa vie et de sa révolte aient servi à faire la légende de Jésus.
Si le mot Jason se confond avec Jésus (Iêsous), c'est parce qu'il vient aussi de Esaû, nom qui est souvent rendu par Edom ou Adon (qui en hébreu veut dire roux). En y annexant le iod masculinisant, on fait Jadon, que les Grecs prononcent Jason comme de Theos ils font Sios, et de Jadon on fait Jodom, Jod, d'où God.
Quoi qu'il en soit, ce nom représentait collectivement le sexe mâle comme le nom de Christ représentait collectivement le sexe féminin.
La substitution du principe masculin à la Divinité féminine, Hévah, la Mère des vivants, n'avait pas encore été osée chez les Juifs qui gardaient toujours un secret respect pour leur grande Déesse, quoiqu'ils ne la nommassent plus ; leur révolte n'avait pas été jusque-là, si ce n'est, cependant, quand ils avaient essayé d'introduire le culte d'Adonaï, dont le nom vient aussi de Edom ou Adon (4).
A côté de l'audace de Judas le Galiléen, qui fonda une secte nouvelle en face de celle des premiers Chrétiens et osa lui donner comme Dieu le traître Caïn, à côté de l'audace de Paul, qui, reprenant ce système, va donner le nom de « Iêsous » à celui dont il va faire un sauveur, les premiers Chrétiens tant persécutés n'apparaissent plus que comme des gens qui font des choses sans importance, et l'on parle de leur doctrine avec mépris, on dit : « C'est de la Saint-Jean », ce qui veut dire : « C'est un mouvement empreint de la naïveté et de la timidité féminine ». Les nouveaux apôtres qui s'élevaient à ce moment allaient leur montrer jusqu'où on pouvait aller dans l'audace. Leur état d'esprit nous est révélé par le rôle qu'ils vont donner à Johana qu'on ne pouvait pas supprimer de l'histoire. Quand on fera d'elle Jean-Baptiste, le précurseur, on lui fera dire que celui qui LE suivrait serait plus puissant que LUI et qu'il ne serait pas digne de dénouer les cordons de ses souliers. L'orgueil de ceux qui parlèrent ainsi nous dénonce leur état mental.
La campagne entreprise par les nouveaux sectaires, qui voulaient faire admettre que Iêsous était Christos, exaspérait tout le monde. Jusque-là, on avait attendu et annoncé la résurrection de la Déesse, mais cette nouvelle manière de résoudre la question la détournait de son but primitif et la présentait sous une forme différente de celle qu'elle avait à cette époque, où elle n'était que le symbole d'une espérance de restauration théogonique. La lutte s'engageait ainsi entre les deux principes masculin et féminin, représentés par Iêsous et par Christos.
Le Christianisme primitif avait été une doctrine sur le Christ, son nom est resté pour l'indiquer, ses partisans s'appelaient Christiens ; ce ne fut pas une doctrine sur Jésus, qui n'y fut introduit que plus tard par des esprits vulgaires qui vinrent rapetisser l'idée de Rédemption. Le Jésuisme allait tuer le Christianisme.
Cependant, la doctrine qui a triomphé a gardé le nom de Christ, parce que les noms féminins donnent toujours une idée de grandeur et de sainteté dont les usurpateurs profitent.
C'est pour cette même raison que les Juifs masculinistes, quand ils se virent méprisés, se firent appeler Israélites.
La vraie Christologie a duré peu de temps, et ses documents ont été fondus dans ceux que le Catholicisme a pris plus tard pour base.
La nouvelle secte s'appliqua à imiter les Chrétiens, leur prenant leur nom, leurs principes, leurs livres, cherchant à attirer à elle la renommée qui les avait illustrés.
Christ, nom collectif, représentant l'esprit féminin dans sa splendeur et dans sa souffrance, va être remplacé par le nom masculin de Jeseus, dont on va faire un homme auquel on attribuera l'esprit féminin dans sa splendeur et dans sa souffrance, jusqu'au moment où on déclarera, au grand scandale de tous, que Jésus est Christos. Tout cela ne sera qu'une parodie des événements survenus dans le passé, et dont on va faire l'histoire particulière d'un homme. On s'appliquera à transporter la psychologie féminine, les souffrances de la femme, ses humiliations, dans un homme, que l'on fera divin, puisque le Divin, c'est le féminin, mais on lui laissera certains caractères de la femme, sa chasteté, sa mansuétude, et, comme Apollon Citharide, Jésus sera vêtu comme les femmes d'une robe flottante. Malgré tout cela, le personnage de Jésus, de l'enfant à l'homme, n'eut jamais rien de commun avec l'être de raison appelé Christ.
Burnouf, dans La Science des Religions (pp. 229-230), dit ceci :
« Nous ne connaissons presque rien de la vie de Jésus ; son nom même nous est inconnu, puisque Jésus ou Sauveur est un surnom qui se donnait depuis 200 ans et que Christ est une, qualification qu'il reçut plus tard. La partie légendaire des Evangiles étant ôtée, il ne reste pas de matériaux suffisants pour composer une histoire réelle. Celles qu'on a publiées sont des œuvres d'imagination et des romans.
« Il faut songer combien était nécessaire, dans le monde gréco-romain, une réforme des idées et des mœurs ; il faut envisager aussi la nature universelle d'Agni, qui est la plus grande manifestation de la nature divine dans le monde physique et moral. On fit donc à Jésus l'application de la théorie et de la légende, telles qu'elles existaient auparavant ; par lui, ces dogmes reçus de Babylone comme une tradition non interrompue, dogmes dont la forme primitive se trouve dans le Véda, entrèrent de plain-pied en Occident. »
Burnouf nous fait très justement remarquer que les discussions fondamentales que cette nouvelle secte fit naître portaient sur la nature de Jésus dans ses rapports avec la théorie du Christ.
Chez les Juifs eux-mêmes, le futur règne du Christ était compris de deux façons : les uns (les Israélites) attendaient un souverain de la souche (c'est-à-dire du sexe) de David, destiné à étendre sur la Terre la puissance de la loi et à placer le peuple israélite à la tête d'un vaste empire dont ce souverain serait le chef ; les autres, et parmi eux les Pharisiens, entendaient le règne du Christ dans son sens idéal, le retour du règne de la Vérité et de la Justice.
Cette question avait été fort agitée dans le dernier siècle entre les docteurs juifs Shammaï et Hillel. Elle allait prendre maintenant un autre aspect.
(1) Voyez Pictet qui, dans son Dictionnaire des racines indo-européennes (p. 417) dit à propos de la religion des Gaulois : « Esus, Dieu de la guerre (Dieu mâle qui a la force, Esunertus), vient du sanscrit Asu dont on fait en Scandinave as. »
(2) Judas, qui était Grec, n'avait pas de raison pour donner à son Dieu nouveau un nom hébraïque, il ne parlait pas hébreu ; il était au contraire très plausible qu'il choisît un nom nouveau à la mode dans son milieu, le nom de Hésus, apporté chez les Galates par les Gaulois, et qui était très répandu depuis deux siècles, puisqu'on voyait des familles donner ce nom nouveau à leurs enfants.
Si c'était un nom hébreu, il serait ancien chez les Israélites. C'est au contraire un nom nouveau qu'on ne trouve que chez les Juifs masculinistes.
(3) Marcelle Senard, dans son ouvrage Le Zodiaque clef de l'ontologie appliqué à la psychologie, dit : « Le mot Paris signifie Bar-Isis, ou vaisseau d'Isis, le mot égyptien Bar ayant le sens d'enceinte, réceptacle, de tout objet capable de contenir en son sein, vaisseau, etc. ». Et selon W. von Bûlow, la rune BAR signifie la montagne qui cache et protège, mais en même temps engendre et manifeste la naissance, le Fils.
(4) M. Henri LIZERAY (dans Christianisme Scientifique, p. 6) nous fait remarquer l'analogie qu'il y a entre Jésus et Adonaï. Il dit : « On peut, dès à présent, remarquer de nombreuses ressemblances entre le culte d'Adonis et celui de Jésus. Les pleurs à l'occasion d'une mort suivie de résurrection, l'époque et le cérémonial de la fête qui rappelle la semaine des Rameaux, le caractère féminin des deux personnages, les noms de Seigneur (en syriaque Adonaï, d'où Adonis, en grec Kyrios) et de Sauveur, communs à l'un et à l'autre, aussi l'invocation sur les sarcophages, sont des analogies qui s'imposent d'abord à l'esprit. Les païens semblent s'y être trompés, puisque Plutarque constate que « le Dieu adoré en Judée était Adonaï ». Or, Plutarque vécut de 50 à 120 après J.-C. »

LA LÉGENDE DE JÉSUS
A quelle époque commença-t-on à parler de la légende de Jésus ?
C'est dans les Épîtres de Paul que son nom se trouve pour la première fois, et ces Épîtres sont écrites vers l'année 50 : celle aux Galates Vers 55 ; première et deuxième aux Corinthiens vers 58 et 59 ; celle aux Romains vers 60.
On croit que Paul est mort en 64.
Les Épîtres de Paul ont été déclarées fausses par le professeur Loofs (voir article « Paul » dans l’Encyclopedia Biblica).
Nous savions déjà que Marcion et Apelles les avaient appropriées à leurs besoins.
Ces altérations successives prouvent que la légende que l'on va édifier a subi des phases multiples dans lesquelles elle était chaque fois modifiée. Il ne faudrait donc pas chercher, dans les Épîtres, une histoire définitive, mais des indications qui, quoique très incomplètes, nous font apercevoir un esprit de révolte contre la Femme, qui va germer et grandir. Les Épîtres de Paul en furent le premier germe. Et comme c'est cela qu'on nous a laissé, nous sommes bien obligés de nous en servir.
Paul prêcha « un autre évangile », qui cependant « n'était pas un autre », et dans lequel il prétendait dévoiler une doctrine « demeurée secrète depuis le commencement du monde ».
C'est dans l’Épître aux Galates qu'il annonce qu'à la suite d'une révélation il va exposer aux fidèles un Evangile, et cependant il commence par dire :
6. — Je m'étonne qu'en abandonnant celui (pour celle) qui vous avait appelés à la gloire du Christ vous ayez passé si promptement à un autre Évangile.
7_— Non qu'il y ait un autre Évangile, mais il y a des gens qui vous troublent et qui veulent renverser l’évangile du Christ.
Ces deux versets ne sont certainement pas de Paul.
Il se met encore sous l'égide des Chrétiens, parle sans cesse du Christ, comme eux, des anciennes Écritures, répétant ce qu'il a entendu dire, mais mêlant à tout cela des vues personnelles qui sont le renversement de la cause féministe. On se demande du reste s'il l'a jamais comprise ; ses vues sont étroites, embrouillées, on y sent l'intention de se justifier de passer si facilement d'une doctrine à l'autre, car, dans le chapitre premier de l’Épître aux Galates, il nous explique lui-même ses conversions du Judaïsme au Christianisme, puis du Christianisme à son évangile nouveau, qu'il présente comme étant en harmonie avec celui des Chrétiens de Jérusalem, alors qu'il le contredit.
II faut se rappeler que la secte de Judas le Galiléen, qui masculinisait la Divinité des Juifs, était fondée depuis une dizaine d'années, et que Paul apparaît comme ayant été un de ses partisans. C'est évidemment sous cette influence qu'il crée un nouvel évangile, annonçant la prochaine arrivée d'un fils de Dieu.
Mais, dans tous les écrits de Paul, on annonce l'arrivée d'un Messie « sur les nuées », on ne lui crée pas encore une vie terrestre. Quand on parle de son passé, c'est le passé du Christ qu'on rappelle et qu'on lui applique, du Christ, symbole de la Femme qui a souffert pour les péchés de l'homme, qui a été persécutée à cause des Bacchanales masculines et crucifiées dans la forêt de Dodone. Ce fait, déjà ancien, n'était plus dans les esprits qu'une légende terrible, un crime qui avait été commis et qui criait vengeance (1).
Paul dit : « Pour nous, nous prêchons le Christ qui est un scandale aux Juifs et une folie aux Grecs » (I Corinthiens).
Comme réparation de ce crime, on attendait le retour de la femme à la vie sociale, sa réintégration dans son autorité morale, sa résurrection, puisqu'elle avait été ensevelie dans l'oubli après avoir été crucifiée.
Quand on parlait au nom du Christ, on parlait au nom de quelque chose de sacré, mais on définissait mal le sentiment que ce nom éveillait. Pour les anciens féministes, c'était un sentiment de respect mêlé de pitié ; pour les masculinistes, c'était une ironie et une jalousie, « un scandale ou une folie ». Or l'annonce de la résurrection du Christ était interprétée d'une façon toute différente par les femmes et par les hommes. Pour ces derniers, déjà plongés dans le surnaturel, et qui croyaient aux esprits séparés du corps, aux apparitions et aux communications des morts avec les vivants, ils faisaient de la « parousie du Christ » une apparition surnaturelle, qui devait se voir sur les nuages du ciel.
Les partisans du surnaturel se servaient des anciennes idées féminines, mais leur donnaient une interprétation nouvelle.
L'esprit féminin « divin », qu'ils ne voulaient plus voir dans la femme vivante parce qu'il n'est pas dans l'homme, devenait une entité libre dans l'espace, hors du monde, mais pouvant apparaître et parler aux hommes. Du mot apparition, qui avait désigné la venue des femmes de génie (les anciennes Déesses), ils avaient fait une apparition surnaturelle. De l'ancienne prière adressée par les hommes aux femmes, ils avaient fait une oraison adressée à des dieux invisibles et, de là, étaient arrivés à croire à des conversations avec la Divinité.
Tous ceux qui voulaient se mettre en évidence prenaient un rôle dans ces luttes. Paul fut de ceux-là. D'abord ardent adversaire des sectes nouvelles, il les avait violemment persécutées, jusqu'au jour où, trouvant sans doute plus avantageux de se faire chef d'école que d'être un obscur défenseur de l'ancien système, il changea brusquement de parti, appuyant ce changement d'opinion sur une apparition surnaturelle qu'il raconte de différentes manières, ce qui prouve bien qu'elle n'a aucune réalité.
A partir de ce moment, il annonce la Résurrection du Christ.
Mais le Christ laisse dans l'esprit une idée féminine ; pour effacer cette idée, Paul va y joindre le nom masculin qui symbolise « le mâle ».
Ce fut la persécution dont il fut l'objet qui l'affermit dans son système. Il avait commencé timidement par annoncer que le Christ était ressuscité « selon les Écritures » ; il finit par une affirmation hardie, annonçant que cette résurrection s'était faite sous la figure d'un homme. Les Épîtres de l'apôtre nous montrent Paul comme un antiféministe acharné. Il semble même être un chef de parti dans la lutte contre la Divinité féminine et contre le droit maternel. Tous les écrits du temps sont remplis d'allusions à la lutte de sexes qui durait depuis dix siècles et que l'on sentait arrivée à une crise aiguë qui allait trancher la question.
Si ce point important de l'histoire est peu connu, c'est parce que l'Eglise qui a triomphé, et fait prévaloir les droits de l'homme sur les droits de la femme, la Divinité de l'homme sur la Divinité de la femme, a supprimé les documents qui pouvaient servir la cause de ses adversaires ; aussi nous n'avons, pour connaître leur défense, que ce que les Prêtres ont bien voulu nous laisser (2). Cela nous suffit, du reste ; leur ignorance, leurs maladresses, nous permettent d'étudier la cause qu'ils combattaient dans les documents qu'ils ont gardés et sur lesquels ils appuient leur orthodoxie. Les meilleurs arguments contre l'Eglise sont ceux qu'elle nous fournit elle-même.
(1) Nous avons vu dans le passage que Tacite consacre aux supplices infligés aux premiers Chrétiens, que beaucoup mouraient sur la croix. Ce sont ces crimes qui sont le fond même de la légende du Crucifié. Cet agneau crucifié, qui a souffert pour les péchés de l'homme, c'est la Femme, et tout cela s'est posé avant l'introduction de Jésus dans l'histoire.
(2) Pour soutenir sa thèse de l'arrivée d'un fils de Dieu, Paul invoque le témoignage des femmes ; il dit : « Lisez les Sibylles et vous y trouverez clairement le fils de Dieu. » Ces mots n'existent plus dans les livres modernes, mais ils sont rapportés par Clément d'Alexandrie (Str., VI).
Donc, ceux qui ont révisé plus tard les Écritures n'ont pas fait que des interpolations, ils ont aussi fait des suppressions, et cela toujours avec l'intention de faire disparaître ce qui était dit des femmes.

L'APÔTRE PAUL
Ce personnage, qui joua un rôle si important dans la réaction qui allait devenir le Catholicisme, a une étrange histoire.
Dans un ouvrage nazaréen du IIème siècle, intitulé les Clémentines, Paul, sans être nommé, est dépeint clairement sous la figure de Simon le Magicien. Nul doute ne reste, après cela, sur l'identité des deux personnages.
Dans un autre ouvrage, aujourd'hui perdu, mais dont nous avons des extraits dans les Actes, Paul est ravalé au rang d'un démon. Dans cet ouvrage, on l'appelle aussi Simon, comme dans les Clémentines, mais en faisant dériver ce nom de celui, d'une divinité samaritaine, le chef des dieux mâles, ou démons de la Samarie. « Simon le Magicien » paraît être une caricature de Paul, tant l'apôtre a été ennobli depuis. C'est de ce nom Simon que vient le mot Simonie, cette espèce de convention illicite par laquelle on reçoit une rétribution pécuniaire pour quelque chose de saint ou de spirituel, tel que les sacrements les prières, etc. Les Simoniens, disciples de Simon le Magicien au nom du Christ vendaient des sacrements, des prières, des miracles, des prophéties. Paul, en effet, parle souvent lui-même des collectes qu'il faisait, ce qui est interprété d'une façon défavorable. Quand on parle de lui, en l'appelant Simon, on lui reproche de vouloir acheter les dons du Saint-Esprit et la qualité d'apôtre.
C'est l'auteur des Actes qui, plus tard, lui refit une nouvelle biographie dans laquelle il est présenté sous un tout autre jour. Cet auteur, qui voyageait avec lui, devait être une femme, nous verrons plus loin sur quoi nous fondons cette idée, et de plus une femme hypnotisée par lui, qui paraît très occupée de le justifier des attaques dirigées contre lui, et de lui donner un rôle qui le place à la hauteur de Pierre, son rival. (L'Eglise a mis Simon le Magicien parmi les hérétiques, mais elle s'appuie sur saint Paul.)
Quoi qu'il en soit, le personnage qui nous reste, même après ces efforts de conciliation et de réhabilitation, n'est pas beau.
Paul de Tarse, ancien tisserand, était un ambitieux que nous voyons s'agiter dans différentes sectes. Sous le nom de Simon le Magicien, il apparaît comme un spirite vivant en compagnie d'une Hélène qu'il disait être la même que celle de Ménélas revenue sur terre pour expier avec lui ses adultères avec le beau Pâris.
Nous le voyons ensuite s'appeler Saul, peut-être pour imiter Saul. Sous ce nom, il est pharisien et combat avec violence les premières sectes chrétiennes, il entre de force dans les maisons pour en arracher les hommes et les femmes et les traîner en prison, il court de ville en ville pour les faire fouetter et emprisonner, il prend une part active à la lapidation d'Etienne.
Puis le voilà qui, lui-même, se convertit après une apparition surnaturelle et devient Christien, mais cela va être pour bouleverser cette secte par les idées nouvelles qu'il va y introduire. Il est thaumaturge, et les miracles qu'on attribuera plus tard à Jésus c'est lui, d'abord, qui prétend les faire. Il assure que ses mouchoirs appliqués sur les malades les guérissent ; il chasse les démons du corps des « possédés ». Il se vante d'être resté au fond de la mer un jour et une nuit et d'avoir été transporté au troisième Ciel, dans le Paradis où il entendit des choses ineffables « qu'il n'est pas permis à un homme de répéter ».
C'est donc un déséquilibré ignorant la nature et l'histoire. Cependant, il veut se donner les allures d'un savant et, pour cela, prétend avoir comme disciple le fameux Gamaliel, souvent cité dans le Talmud, et qui eut une grande autorité (Actes, XXII, 3).
La science de Paul est si peu réelle que, tout en se disant élevé à Jérusalem à l'école d'un savant hébreu, il ne sait pas lire le Sépher en hébreu et ne le connaît que par la version grecque. On a remarqué qu'il ne corrige même pas les inexactitudes des 3 traducteurs, donc il ne les aperçoit pas.
Paul était un névropathe, épuisé par toutes les débauches, atteint, croit-on, d'épilepsie du reste, il passait pour un « courtier de prostitution » et vivait parmi les prostituées.
« Jésus voulut que saint Paul voyageât parmi des filles perdues et qu'elles fussent ses protectrices et ses hôtesses. »
« Saint Paul fut sans cesse secondé par des femmes, dit M. Havet, tantôt Thécla, tantôt Lyda, tantôt Chloé la pâle et tantôt Phoebé la brillante ; à peine nommées dans les écrits qui nous restent, on les sent cependant, ouvrières infatigables, exécutant docilement, avec la docilité de l'amour, les volontés du maître, et plus d'une tient le calame pendant que l'inspiration débordait des lèvres de Paul. »
« Son nom, dit E. Renan, était la terreur des fidèles, on craignait de sa part les violences les plus atroces, les perfidies les plus sanglantes.
« Ce furieux, muni d'une permission des prêtres, entrait dans les maisons soupçonnées de renfermer des Chrétiens, s'emparait violemment des hommes et des femmes et les traînait en prison ou au tribunal. »
Ce ne fut que lorsqu'on fabriqua le Nouveau Testament que des compilateurs ornèrent, amplifièrent l'incident du chemin de Damas.
Oui, c'est à Paul que le Christianisme doit cette théologie néfaste qui a empêché la pensée chrétienne de Johana de gouverner le monde. C'est le quia absurdum auquel nous devons tant de folies, tant de crimes... « Il écrasait toujours ses disciples, dit Renan, ils ne jouèrent auprès de lui que le rôle de secrétaires, de courriers, leur respect pour le maître était tel qu'ils n'osèrent jamais enseigner librement. Quand Paul était avec sa troupe, il existait seul, tous les autres étaient anéantis ou ne voyaient que par lui. »

LES LIVRES DES CHRÉTIENS SELON L'ÉGLISE
Nous ne connaissons l'histoire de Jésus que par les écrits qui forment le « Nouveau Testament ». Avant de savoir ce que ce livre en dit, demandons-nous d'abord qui a écrit ce recueil, à quelle époque, et quelle valeur il a.
Les Écritures Saintes des Chrétiens sont désignées sous le nom de « Nouveau Testament » (ou Nouvelle Alliance), du mot diathékè qui veut dire Testament ou Alliance ; de là ces deux significations si différentes.
Le « Nouveau Testament » contient 27 livres, qui sont divisés en deux groupes : « l’Évangile » et « l'Apôtre ».
L’Évangile est composé des livres dits selon Matthieu, Marc, Luc et Jean.
L'Apôtre (c'est-à-dire Paul) comprend 23 écrits, qui sont : Les Actes des Apôtres et des Épîtres.
Quatorze Épîtres sont attribuées à Paul. Ce sont I et II aux Romains, I et II aux Corinthiens, celle aux Galates, celle aux Éphésiens, celle aux Philippiens, celle aux Colossiens, I et II aux Thessaloniciens, I et II à Timothée, celle à Tite, celle à Philémon celle aux Hébreux. (C'est à tort, du reste qu'on les attribue à paul ; celle aux Hébreux n'est certainement pas de lui.)
Viennent après les « Épîtres catholiques », c'est-à-dire universelles, adressées à tous les membres de l'Église, qui sont : celle de Jacques apôtre ; deux épîtres de Pierre apôtre ; trois épîtres de Jean apôtre ; une de saint Jude apôtre.
Enfin, cela se termine par l'Apocalypse. Tous ces livres sont rédigés en grec.

LES AUTEURS DU NOUVEAU TESTAMENT
Quoique personne ne sache rien au sujet des écrivains qui ont redigé les écrits apostoliques, l'Église a donné à ces écrits des auteurs qu'on aurait copiés ou dont on se serait inspiré ; elle a même fixé les dates de leur rédaction.
Il nous est donc permis de croire que les premiers auteurs des Evangiles étaient les disciples de Johana, et qu'ils écrivaient dans l'esprit du premier Christianisme, mais que les reviseurs anonymes qui, plus tard, reprirent leurs écrits et les altérèrent, tout en disant qu'ils sont faits selon Matthieu, Marc, Luc et Jean, n'ont eu pour but que d'y introduire la doctrine de Paul et la légende de Jésus.
Voici, d'après ces données intéressées, les dates que l'Église avait admises (dates que les savants ont trouvées fausses) :
1er Evangile, selon Matthieu, qui aurait été écrit en 36 (d'autres disent en 42) ; il aurait été composé en hébreu ou en syriaque et traduit en grec.
2ème Evangile, selon Marc, qui aurait été écrit à Rome vers 44 ou 45 (sous les yeux et les instructions de Pierre, dit Bergier, mais il est prouvé que Pierre n'a jamais été à Rome).
3ème Evangile, selon Luc, né à Antioche, qui aurait été écrit vers l'an 53 ou 55.
4ème Evangile, selon Jean. L'Eglise pense que Jean composa son Evangile après son retour de l'île de Pathmos, vers 96 ou 98, la première année de Trajan, étant alors âgé d'environ 95 ans. C'est l'abbé Bergier qui donne ces renseignements dans son Dictionnaire de Théologie (3, 166-167).
La tradition fait de Matthieu et de Jean des apôtres de Jésus, tandis que Marc et Luc n'auraient été que des compagnons d'apôtres, puisqu'ils vivaient, Marc à Rome, Luc à Antioche et que ni l'un ni l'autre n'auraient été en Judée.
La tradition chrétienne nous dit aussi que Luc est l'auteur des Actes des Apôtres et qu'il les a rédigés à Rome en 63 (Bergier : Dict. de Théol., I, p. 36) ; que Paul a écrit ses 14 Épîtres à Éphèse à Corinthe, à Rome, entre 55 et 56 ; que Jacques a écrit son Épître en 59 ; que Pierre, Jean et Jude, ont écrit les leurs dans un temps qu'on ne détermine pas ; enfin que l'Apocalypse a eu pour auteur Jean, qui l'écrivit en 95 ou 98, dans l'île de Pathmos où il avait été relégué (Bergier, Dict. de Théol., I, p. 167).
D'après l'Église, Matthieu est le plus ancien (an 36), Marc le second (an 44), Luc le troisième (an 53), Paul le quatrième (de 50 à 60), Jean le dernier (an 96).
Tous auraient écrit pendant le premier siècle.
C'est à Irénée que remonte cette tradition. C'est lui qui, vers 180, écrivit : « Il ne saurait y avoir plus de quatre Évangiles, comme il ne peut y en avoir moins, car, comme il y a quatre régions du monde où nous vivons et quatre vents principaux, et comme l'Église est répandue sur la terre entière et que le pilier et le soutien de l'Église, c'est l'Évangile et l'esprit de vie, il s'ensuit qu'elle a quatre piliers, qui, de tous côtés, respirent l'immortalité et animent les hommes » (Contre les Hérésies, L. III, section II, ch. VIII).
Ce paragraphe prouve qu'il y avait une multitude de gens, auteurs d'une multitude d'écrits qui se prétendaient inspirés et voulaient faire accepter leur évangile.
Les savants modernes ont trouvé que la chronologie des Écritures du Nouveau Testament, telle que nous venons de la rappeler, est fausse. C'est Frédéric Bauer, chef de l'Ecole de Tubingue, qui a renversé les préjugés admis jusque-là sur les origines des écrits apostoliques, dans un ouvrage intitulé Paulus der Apostol Jesu Christi, dont la première édition a paru à Stuttgart en 1845. Bauer a fixé une nouvelle chronologie. D'après lui, pour comprendre l'évolution du mouvement chrétien pendant les deux premiers siècles, il faut commencer par les Épîtres de Paul et, de là, passer aux Évangiles qui sont postérieurs. En effet, en lisant ainsi les Livres, nous trouvons que Paul expose avec certaines hésitations, certaines réticences, cette idée : que le Christ est ressuscité ou va ressusciter, et que c'est Jésus qui est le Christ. Voilà le fond de sa doctrine.
Ceux qui viennent après n'hésitent plus, ils affirment. Donc, l'idée a marché, elle s'est imposée aux esprits crédules. Enfin, Paul n'a fait qu'une indication vague, il n'a parlé que d'un esprit depuis longtemps disparu ; ses successeurs font de cet esprit un homme qui a vécu sur la terre, et, bien plus, ils lui créent une biographie.
Dès lors, comment comprendre cette histoire si on commence par les Evangélistes qui affirment et finit par Paul qui tâtonne ? C'est parce que la légende a été faite sur une idée sans précision et qui n'avait aucune réalité historique que ceux qui l'ont racontée d'abord ne se sont pas trouvés d'accord entre eux.
Depuis les écrits de Paul jusqu'au temps de Constantin, il n'existe pas de documents ou de témoignages authentiques (1), et il est facile de voir que c'est pendant ce temps qu'on a imaginé la légende de Jésus et travaillé à imposer la croyance à un Dieu nouveau, qui va représenter la paternité, la question brûlante de cette époque. On invente le Dieu père, en même temps qu'on invente le Dieu fils.
S'il est difficile de suivre l'évolution de l'idée pendant ces trois siècles, il est facile de voir sur quoi portaient surtout les altérations que l'on faisait aux Écritures de siècle en siècle. En comparant les plus anciens Codex que nous avons, nous voyons qu'on y introduit le mot « Dieu » par des grattages. Les livres sont donc écrits avant que le Dieu des Paulinistes fût affirmé et accepté. On ignore quand et par qui les premières traditions touchant la vie de Jésus furent mises par écrit. L'auteur de l'Evangile selon Marc, le premier qui fait une histoire, raconte, n'invente pas ; cela a donc été dit avant lui. Nous ne possédons pas les Evangiles sous leur forme primitive, nous ne possédons que des copies faites quand l'idée jésuiste était déjà très répandue.
(1) Leblois dit (Les Bibles, livre IV, p. 18) : « Comme, depuis les écrits de Paul jusqu'aux temps de Constantin, il ne s'est pas conservé un seul livre original, et que nos plus anciens manuscrits ne sont que les copies des dernières éditions de ces livres, il est difficile aujourd'hui de constater, par la comparaison des textes, à quel degré les altérations ont eu lieu. Il nous manque toute possibilité de reconstruire par élimination les éditions primitives. »

DOMINATION
C'est dans le IVème siècle que l'homme fut proclamé « Dieu » et la Femme définitivement renversée de son autel. C'est pour cela que ce siècle est véritablement le premier des temps modernes, le premier du règne du Dieu anthropomorphique, et non parce qu'il vit la fin de l'Empire romain.
C'est ce siècle qui voit l'antique Théogonie vaincue, la nature condamnée et le surnaturel triomphant grâce aux intrigues de quelques hommes audacieux et rusés.
Le nouveau Christianisme, devenu le Catholicisme, fut la grande synthèse de la réaction de l'homme contre la Femme ; une révolte triomphante, mais non acceptée, car, à peine née, les hérésies surgissent.
Le quatrième siècle débute par la dernière persécution sanglante des empereurs romains, celle de Dioclétien contre les Chrétiens, et se termine par la première persécution sanglante ordonnée par les Catholiques contre les anciens Chrétiens, appelés dès lors « des hérétiques ».

LES HÉRÉSIES
Le Jésuisme ne s'est établi que parmi des convulsions et des crises innombrables, au milieu d'une multitude d'hérésies qui refusaient d'admettre l'absurdité du dogme de la divinité d'un homme. C'est avec raison qu'on a dit : « L'Eglise peut compter chaque article de son symbole par les révoltes de ses apostats. »
Les apostats, en effet, ce sont ceux dont l'intelligence est assez éclairée pour apercevoir l'absurdité du Jésuisme. Aussi, dès que l'Eglise se constitua, l'hérésie surgit naturellement dans l'esprit même de ceux qui se croyaient ses prêtres.

DESTRUCTION DES LIVRES CHRÉTIENS
En 303, l'empereur Dioclétien ordonna la destruction des livres des Chrétiens. Eusèbe raconte ainsi le fait : « La dix-neuvième année du règne de Dioclétien, au mois de Dystros, que les Romains appellent Mars, on afficha partout les édits de l'empereur, par lesquels il était ordonné d'abattre les églises de fond en comble et de détruire les livres saints par le feu. »
Dioclétien fit brûler les livres d'alchimie, parce que l'invention des sciences était attribuée par Zozime et par Tertullien « aux anges maudits », c'est-à-dire aux anciennes Déesses.
C'est ainsi que tous les originaux apostoliques disparurent. Cependant, tous ne périrent pas, car, vingt ans après, Constantin chargea Eusèbe de copier 50 exemplaires de l'Ecriture Sainte sur bon parchemin, et il mit à sa disposition deux voitures publiques pour se les faire apporter.
Ces copies n'ont pas été conservées (Socrate, Histoire de l'Eglise, I, 9 ; traduction Cousin, p. 63 ; voir aussi Histoire Ecclésiastique, L. VIII, 2).
Constantin favorisa donc la restauration des livres, mais de quels livres ?
Arnobe, témoin de la même persécution, en parle dans sa « Controverse contre les païens » (IV, 36).
Fleury, dans son Histoire Ecclésiastique (L. VIII, 40), cite un exemple de la recherche des livres dans l'Eglise de Cirtha en Afrique.
On croit que beaucoup d'écrits échappèrent à la destruction, mais nous ne savons pas lesquels, et nous ne savons pas s'ils ont été conservés depuis.
Tous les manuscrits reconnus par l'Eglise sont postérieurs à la persécution de Dioclétien. Ce ne sont pas des originaux, ce sont des copies arrangées suivant les intérêts des Prêtres triomphants.
On n'a pas retrouvé un seul manuscrit antérieur au IVème siècle des 27 ouvrages qui constituent actuellement le Nouveau Testament.
Constantin, qui devint chef de l'Empire vingt ans après Dioclétien, favorisa la falsification des Ecritures et leur reconstitution sous une forme masculinisée.

EUSÈBE (268-338)
Eusèbe, qui fut évêque de Cesarée en Palestine, était l'auteur d'une chronique des peuples anciens et d'une histoire ecclésiastique. C'est lui qui supprima la Femme de l'histoire ancienne, et qui contribua le plus puissamment à masculiniser le Christianisme. Son œuvre fut une manifestation démoniaque ; aussi Gallien l'appelait « le misérable Eusèbe ». Il était Juif et faisait une guerre acharnée aux Israélites.
Burnouf dit : « Quand l'Eglise nouvelle voulut fixer ses principes essentiels dans une profession de foi, ce fut l'œuvre d'Eusèbe et du concile de Nicée, sous l'impulsion et presque sur l'ordre de Constantin. »

L'ÉDIT DE TOLÉRANCE DE CONSTANTIN
En 312, Constantin promulga un édit de tolérance, qui rendait aux néo-chrétiens la liberté de leur propagande. C'est de cette année que date réellement l'avènement du nouveau Christianisme.
Cet édit, qui s'étendait à tous, parut ouvrir au Judaïsme une ère de prospérité, mais cette espérance fut vaine ; ce sont les Néo-chrétiens seuls que l'empereur voulait protéger, et, après sa conversion, il rendit de nouveaux édits hostiles aux Juifs. Ce fut la fin des écoles juives de la Palestine.
Constantin permit, par l'édit de Milan, en 313, l'exercice du nouveau Christianisme.
Les Catholiques appellent cela la « liberté des cultes », quand c'est, au contraire, le commencement de l'intolérance et la fin de la liberté religieuse qui régnait à Rome.
Une célèbre entrevue eut lieu, en février 313, entre Constantin et Licinius à Milan pour poser les bases de cet édit.

LA FRAUDE PIEUSE
C'est à partir de ce moment que l'on confectionna des écrit destinés à faire croire à l'existence de Jésus. Cela s'appela « la théorie de la fraude pieuse ».
En ce temps-là, le faux était en honneur, et c'est par des faux que le Jésuisme triompha.
Parmi ces documents, on trouve :
- Une lettre d'Abgar, roi d'Edesse, à Jésus, pour l'inviter à passer quelque temps dans sa maison de campagne.
- Une lettre de Pilate à Tibère, rapportant la mort et la résurrection de Jésus.
(Cette lettre est regardée comme authentique par Tertullien et les premiers apologistes. Or, si l'événement était vrai, ce n'est pas par une lettre que Tibère l'aurait su, mais par des documents officiels.)
- Une lettre de Tibère au Sénat pour l'engager à reconnaître la divinité de Jésus.
(Est-ce assez grotesque comme idée ?)
- Une lettre de Lentulus, où se trouve le portrait de Jésus.
- La dotation de Constantin.
- Les fausses Décrétales.
L'habitude étant prise, on continua la falsification des documents et on nous donna plus tard :
- Une lettre de saint Pierre à Pépin le Bref, datée du Ciel.
- La fausse donation de Pépin à Etienne II.
- Celle de Charlemagne à Léon III.
- La charte de Louis le Débonnaire et celle d'Othon Ier.
- Le testament de Henri VI, trouvé juste à point par Innocent III dans les bagages d'un des généraux de l'Empire.
- Le portrait Acheiropite (fait par Dieu) de Jésus par sainte Véronique, composé vers 1175 par le prêtre Wernher dans un poème allemand, qui raconte comment la face de Jésus fut empreinte sur le linge que lui présenta sainte Véronique.
Les Jésuistes, dans les premiers temps, n'avaient pas pensé à fabriquer les actes de Pilate, non plus que les lettres à Tibère ; ils ne s'étaient pas encore avisés de faire lier un commerce de lettres entre saint Paul et Sénèque ; ils n'avaient pas encore supposé les prophéties des Sibylles ; ils s'étaient contentés d'affirmer, sans aucun genre de preuves, que Jésus est le Christ, qu'il est fils de Dieu, qu'il est notre Sauveur, notre Messie, notre Roi, que nous savons qu'il est mort et ressuscité. Et ils ajoutaient : « Heureux ceux qui ont vu, plus heureux encore ceux qui croient en lui sans l'avoir vu. 0 Rome, renonce à ton incrédulité ! Superbe Babylone, fais pénitence de tes désordres, le temps est court, ta chute est prochaine, ton empire touche à sa fin... Que dis-je ? l'Univers va changer de forme ! »
C'est ce qui allait arriver, hélas ! pour le plus grand malheur l'humanité.

L'HÉRÉSIE D'ARIUS
Arius (ou plutôt Arios) nie la divinité de Jésus et la consubstantialité avec son Père. Pour comprendre ceci, il faut savoir que, à cette époque, les féministes ne cessaient d'invoquer les deux natures, féminine et masculine, pour montrer que le Divin ne peut être que féminin. Les masculinistes, pour faire admettre qu'un homme est Dieu, le déclarent de la même nature que Dieu le Père qui est au Ciel.
Consubstantiel veut dire de la même nature masculine.
Arius niait que Jésus fût de nature divine, il ne voyait en lui qu'un homme doué de la nature masculine, comme tous les hommes. Un grand nombre de prêtres et d'évêques adoptèrent la croyance d'Arius, ce qui souleva la colère des fanatiques du Jésuisme, qui ne manquèrent pas de déclarer que, si Arius professait de telles idées, c'était parce qu'il aimait les femmes, accusation qui se produira toujours contre ceux qui reviendront à la raison.
L'Eglise masculiniste se cramponnait à la divinité de Jésus avec l'acharnement de ceux qui savent que les Dieux mâles ne sont que des prétextes pour justifier l'existence du Prêtre. C'est en réalité l'homme qui est Dieu sous les noms de ses divinités diverses.
Cette hérésie raviva les premiers dogmes chrétiens et fit naître une mêlée générale ; on s'invectivait, on se battait, on se proscrivait. Toujours le problème sexuel occupait les esprits et provoquait les discussions. Arius, en 318, en précisant sa doctrine, ne faisait que raviver l'éternelle controverse qui existait depuis les débuts du premier Christianisme.
Au milieu d'une de ces discussions tumultueuses, une femme se présenta, tenant d'une main un seau d'eau et de l'autre des tisons enflammés. Comme on lui demandait ce que signifiait cela, elle répondit : « Je vais brûler le Ciel et noyer l'Enfer. »
D'autres hérésies se produisaient partout. Deux évêques d'Afrique, appelés Donat, fondent la secte des Donatistes, qui soutiennent que l'efficacité des sacrements dépend de la foi de ceux qui les administrent. Cette secte disparut au VIIème siècle.
- Macédonius conteste la divinité du Saint-Esprit, qui jusque-là a été féminin.
- Les Lucifériens s'élèvent en Sardaigne et en Espagne au IVème siècle.
- Les Pélagiens nient la nécessité de la grâce ; c'est tout le dogme ancien qui est discuté.
- Enfin apparaît Apollinaire, qui veut que Jésus-Christ ne soit qu'un Dieu et non un homme.
Tout cela sans compter les Johanites qui continuent, sous le nom de Priscilliens, à enseigner les lois cosmiques et la science de la vie.

LE CONCILE DE NICÉE (en 325)
Par sa constitution de l'an 312, Constantin avait introduit ans les lois l'esprit jésuique ; par le concile œcuménique qui fut réuni sous ses auspices le 19 juin 325 à Nicée, il donna à Eglise son organisation et l'associa au pouvoir politique. Ces événements firent du IVème siècle une époque de la plus haute importance pour l'avenir de la société. C'est après le triomphe politique du Jésuisme que l'importance des évêques de Rome devint évidente. Le pape Silvestre 1er convoqua lui-même le fameux concile de Nicée et le fit présider par son légat Oscius. Constantin y assista, revêtu de la pourpre et tout couvert d'or et de pierreries. Ce concile fut réuni dans le but de juger et de condamner Arius et l'Arianisme.
Arius niait la divinité de Jésus, et sa consubstantialité avec son Père. Il soutenait que Jésus était fils de Dieu seulement par adoption et que le Père était seul véritablement Dieu.
Pour comprendre ceci, il faut savoir que, à cette époque, les féministes ne cessaient d'invoquer les deux natures, féminine et masculine, pour montrer que le Divin ne peut être que féminin. Les masculinistes, pour faire admettre qu'un homme est Dieu, le déclarent de la même nature que Dieu le Père qui est au Ciel.
Consubstantiel veut dire de la même nature masculine.
Arius niant que Jésus fût de nature divine, ne voyait en lui qu'un homme doué de la nature masculine, comme tous les hommes.
Les évêques assemblés à Nicée décidèrent que Jésus, fils de Dieu, est vrai Dieu engendré et non fait, « consubstantiel au Père ».
Cette formule : « Fils unique de Dieu, engendré du Père, Dieu de Dieu, etc. », était prise aux théologiens chrétiens d'Égypte, qui eux-mêmes l'avaient prise dans la mythologie égyptienne qu'ils avaient mal comprise et interprétée dans le sens masculin.
Ce dogme fut considéré comme le fondement même du Jésuisme catholique.
Jusque-là, la divinité n'avait pas encore été publiquement et officiellement adjugée à un homme. On employait couramment le mot Dieu pour désigner ceux qui semblaient plus grands que les autres, mais cette forme de langage était loin d'être un dogme et laissait encore à la Femme une grande place dans la suprématie morale. Quand un homme dépassait les autres, on le comparait à un Dieu, l'élevant ainsi inconsciemment jusqu'à la hauteur morale de la Déesse. C'est ainsi que, pendant qu'Hérode haranguait la foule à Césarée, pour vanter son éloquence on disait : « Voix d'un Dieu et non d'un homme. » Lorsque Paul et Barnabas arrivèrent à Lystre, le peuple dit : « Les Dieux ayant pris forme humaine, sont descendus vers nous. » Mais il ne faut pas oublier que « forme humaine » veut dire masculine. La Divinité, étant restée féminine dans l'esprit des masses n'est jamais confondue avec ce qui est « humain » (masculin). Les empereurs romains déjà s'étaient fait diviniser ; on disait divus Julius, divus Augustus, etc. C'est ainsi que les hommes s'étaient peu à peu habitués à l'usurpation du titre divin. Ils avaient pris en même temps les fonctions sacerdotales, et Constantin, déclaré Pontifex maximus, se faisait rendre les honneurs dus aux anciennes Déesses et à leurs Prêtresses. Il n'est pas étonnant que, faisant un pas de plus dans la voie de l'orgueil, il cherchât à légitimer son rang sacerdotal par une usurpation supérieure encore à la sienne : l'usurpation divine. Il fallait un tel homme pour oser prendre l'initiative d'une décision qu devait amener la déchéance de la Femme, frustrée de ses droits divins et des honneurs dus à son sexe. Cette résolution effraya les autres hommes, inquiéta leur conscience. Toute la Chrétienté d'alors comptait 1500 évêques. On choisit parmi eux les plus connus pour leur dévouement à la cause du Dieu mâle, c'est-à-dire pour leurs sentiments misogynes. On en convoqua 255, bien choisis, et, cependant, il y eut des refus, des consciences encore vibrantes qui ne voulurent pas être mêlées à ce sacrilège. A force d'insistance, on décida les irrésolus, mais 17 refusèrent de souscrire au symbole qui leur fut présenté (1). Un historien catholique rapporte que, finalement, cinq seulement refusèrent leur adhésion ; ce furent : Eusèbe de Nicomédie, Théognis de Nicée, Maris de Chalcédoine, Théonas et Second de Lybie. Des cinq, trois cédèrent à la crainte d'être déposés et bannis, car l'empereur avait menacé d'exil ceux qui ne voudraient pas souscrire.
Théonas et Second demeurèrent opiniâtrement attachés à Arius, et le Concile les condamna avec lui. Eusèbe lutta, essaya d'adoucir l'empereur, mais sa sœur Constantia le décida à se rallier aux ennemis de son sexe, et il céda non sans faire des amendements.
L'évêque de Rome n'y assista pas, vu son grand âge ; donc Rome ne fut pas représentée à ce Concile, qui cependant lui donna la puissance suprême.
Les décisions du concile de Nicée amenèrent la division de l'Eglise, dite universelle. Ceux qui adoptèrent la divinité de Jésus prirent le nom d'Eglise orthodoxe ; les autres, les Ariens, ne furent plus qu'un troupeau d'hérétiques.
Tout le monde, à partir de ce moment, perdit le bon sens ; ce n'étaient pas seulement les Pères de l'Eglise qui discutaient ces choses, c'était toute la population. Dans les maisons, dans les rues, dans les marchés, dans les boutiques, chacun, reprenant les arguments des évêques, parlait de ce qui est engendré et de ce qui ne l'est pas, du Fils créé du non-être, du Père qui est plus grand que lui, etc., etc.
Et les pauvres femmes assistaient à ce déchaînement de folie sans penser que c'étaient elles qui allaient en être les véritables victimes.
Constantin, à cette occasion, écrivit la lettre suivante à Arius et à Alexandre, patriarche trinitaire d'Alexandrie :
« Toi, Arius, tu ne devais pas soulever cette vaine question. Toi, Alexandre, tu ne devais point y répondre. De telles controverses sont inutiles et dangereuses ; elles ne sont bonnes qu'à occuper les esprits oisifs ; mais il ne faut pas les porter aux oreilles du public, qui ne pourra rien y comprendre. Vous ne vous disputez que pour des niaiseries. Réprimez donc votre démangeaison de parler, de peur que le peuple ne tombe dans le blasphème... J'avais résolu d'aller en Orient, mais vos querelles m'en ont fermé le chemin. Je ne veux pas voir ce que je ne croyais pas même entendre » (Eusèbe, Vita Const.).
L'alliance masculine du trône et de l'autel date du concile de Nicée. Jusque-là, l'autel était encore, en partie, laissé à la Femme. L'affirmation d'un Dieu unique ayant le sexe mâle, deux fois représenté dans un Père et dans un Fils, donnait la suprématie religieuse à l'homme, qui fit de ce Dieu mâle l'universelle Divinité.
La condamnation d'Arius fut le premier acte d'autorité de l'Eglise, le premier pas fait dans la voie fatale qui allait étouffer la raison, faire couler le sang et les larmes et jeter un voile de deuil sur tout le moyen âge. Il fallut des siècles pour que la raison mutilée, meurtrie, osât secouer le joug du despotisme de Rome et rompre enfin ses chaînes.
(1) C'est au concile de Nicée que fut agitée la question du nouveau symbole à formuler. On avait adopté d'abord une formule qui ne subsista pas, et qui fut modifiée plusieurs fois. Au concile de Nicée, on arrêta celle-ci :
« Nous croyons en un seul Dieu, Père tout-puissant, créateur de toutes les choses visibles et invisibles. »
Cette affirmation de la foi en un seul Dieu qui est Père, est faite pour supprimer la Déesse-Mère (Démèter, Hévah, Isis). On ne fit, du reste, que renverser les principes de la Loi primitive qui avait prescrit à l'homme de n'adorer qu'un seul principe Divin : Hévah (l'Éternel).
Cette formule renversée fut la vengeance de l'homme. En faisant du Dieu-Père le créateur de toutes les choses visibles et invisibles, on retournait au profit de l'homme l'affirmation, si souvent faite par les femmes, que toutes les choses utiles à la vie, que toute l'organisation sociale étaient dues au sexe féminin, que c'était la Femme aussi, sous la forme des Fées, des Génies, des Esprits, des Dêvas, qui avait fait les choses invisibles, c'est-à-dire les sciences abstraites.

C'est au concile de Nicée que les quatre Évangiles dit canoniques furent adoptés. Tous ceux qui avaient écrit des Évangiles s'étaient mis sur les rangs pour obtenir le prix de ce singulier concours qui allait déclarer parole divine la prose d'un auteur quelconque.
On en présenta 54. Au milieu du désordre qui régnait à ce concile, personne ne prit la peine de les examiner sérieusement, et les quatre Évangiles devenus canoniques furent choisis presque au hasard.
Irénée déclarait qu'on ne voulait que quatre Évangiles parce qu'il y avait quatre Védas, donc quatre Vérités.
Chaque Eglise avait son Évangile, c'est-à-dire un récit plus ou moins décousu de la légende de Jésus. Une cinquantaine de ces Évangiles sont connus par fragments. C'est parmi eux qu'on en prit quatre.
Du reste, on racontait que, au Concile, on avait placé sur l'autel tous les Évangiles, les vrais et les faux, puis on avait invoqué le Saint-Esprit qui avait fait tomber à terre les apocryphes, les canoniques étant restés à leur place.
Une autre version prétend que, tous les textes des Évangiles connus ayant été placés sur l'autel, et le Saint-Esprit étant dûment invoqué, le feu du ciel consuma ceux qui devaient être considérés comme apocryphes, ne laissant subsister que les quatre qui ont été adoptés comme écrits sous l'inspiration divine.
Ainsi furent écartés, avec beaucoup d'autres, l'Évangile de la Vierge et celui de la Sainte Enfance dont il est resté des fragments dans les écrits des Pères. Voltaire cite certains de ces fragments dans son Dictionnaire Philosophique.
Les apocryphes sont les plus intéressants à connaître, d'abord parce qu'ils inspiraient de la crainte à l'Eglise ; ils contenaient donc des choses que l'on voulait écarter et qui nous renseignent sur l'état réel des croyances à cette époque.
Les livres adoptés, c'est-à-dire reconnus parole de Dieu par l'autorité de l'Eglise, furent appelés deutéro-canoniques, parce qu'ils n'étaient point dans le canon des Juifs.
Ces livres devaient avoir bien peu de crédit alors, car saint Augustin disait « qu'il ne croirait pas à l'Evangile si l'autorité de l'Eglise ne l'y forçait ».
Ce sont les 70 évêques réunis au concile de Rome de 494 qui fixèrent le canon des livres saints et déclarèrent authentiques (après tous ces remaniements) les quatre Évangiles selon Matthieu, Marc, Luc et Jean, des livres dits inspirés, c'est-à-dire éjaculés par le Saint-Esprit. Étrange audace de ces hommes qui se croient infaillibles et qui, en même temps, proclament par la voix de l'Ecriture que tout homme est menteur : Omnis homo mendax.
Et on lit dans les Paralipomènes, livre non moins saint : « Il n'est pas un seul homme qui ne soit sujet à pécher. »
C'est ainsi que les hommes substituèrent à l'ancienne doctrine cette littérature aride et désolante qui devait fausser les esprits et abaisser les cœurs.

CONSTANTIN
Constantin, dans la lutte qu'il soutenait contre Maxence, s'appuya sur les Jésuistes, déjà assez nombreux pour être une force.
Ce misérable empereur, que l'Eglise a béatifié, était une nature grossière, ennemie de toute idée élevée, et ne cherchant qu'à affermir sa domination.
Il fut un exécrable assassin qui fit périr tous les siens : son beau-père Maximin à Marseille, son beau-frère Licinius à Thessalonique, son fils Crispus qu'il fit égorger, sa femme Fausta étouffée.
Il tua tous les siens dans sa fureur sanguinaire. Zozime rapporte que, ne pouvant obtenir des prêtres païens le pardon de ses forfaits, il se vengea d'eux en les persécutant et en protégeant les Jésuistes. C'est donc à un acte de vengeance d'un criminel que le Jésuisme dut son succès. Un tel empereur devait, en effet, s'allier aux anciens Paulinistes et les soutenir, car leur morale était la même. Il embrassa ouvertement leur religion et promulgua des décrets contre son ancienne croyance. En 341, il prononça la peine de mort et la confiscation des biens contre ceux qui pratiquaient les cérémonies du paganisme. Dans la constitution qu'il édicta alors, il disait :
« Que la superstition cesse ; que la folie du culte païen soit abolie. Quiconque aura osé contrevenir à cet ordre et célébrer des sacrifices sera puni des peines portées par la loi. Nous voulons que tous renoncent au culte païen ; si quelqu'un désobéit, qu'il soit terrassé par le glaive vengeur. Peine de mort contre quiconque visite les temples, allume des feux sur un autel, brûle de l'encens, fait des libations, orne de fleurs le gond des portes. Ceux qui reviennent à l'ancienne religion, frappés de mort civile ; leurs biens dévolus sans testament à leurs plus proches parents. Ordre de fermer, détruire, raser les temples, car, en extirpant les édifices, on extirpe la matière même de la superstition. Destruction des écoles païennes, les bâtiments rasés. »
Constantin, devenu par ses crimes un objet d'horreur pour les « gens sensés », fut obligé de transférer le siège de l'Empire à Byzance.
Tel est le monstre que les livres catholiques ont entouré d'une légende miraculeuse et qu'on apprend à nos enfants à vénérer.
Pour lui donner plus de prestige, on entoura sa conversion de faits merveilleux, surnaturels ; on mettait le miracle partout ; on raconta qu'allant combattre Maxence, Constantin vit dans le ciel une croix et entendit une voix qui lui disait : « Par ce signe tu seras vainqueur. » Les inventeurs de cette légende n'ont oublié, ou ignoré, qu'une chose, c'est que la croix n'est devenue le signe du Christianisme qu'au VIème siècle ; jusque-là, la religion nouvelle avait pour insigne trois phallus enlacés.
Camille de Renesse écrit ceci dans une brochure de propagande intitulée Jésus-Christ (p. 33) :
« Constantin le Grand, cruel, perfide, despote, sanguinaire, qui se souilla par d'affreuses et inutiles cruautés dans ses expéditions contre les Francs et les Goths, qui fit dévorer ses prisonniers par des bêtes fauves, qui fit étrangler son beau-frère Licinius, qui fit assassiner son propre fils Crispus et sa femme Fausta, fut l'homme choisi par Jésus-Christ, selon les théologiens, pour proclamer sa divinité à la face du monde chrétien, encore dans le doute et l'incertitude.
« Constantin avait besoin d'une religion d'Etat pour affermir son autorité, il lui fallait une nouvelle idolâtrie à substituer aux cultes grotesques qui s'écroulaient de toutes parts.
« Sur deux mille évêques assemblés à Nicée, il en trouva trois cents qui souscrivirent à ses volontés. Il força les autres à déguerpir, et avec cette faible minorité il décréta que Jésus était l'égal de Dieu, était Dieu lui-même !
« La démonstration de la divinité de Jésus-Christ, qui devrait être éclatante, évidente, claire, indiscutable, irréfutable, ne reposa au concile de Nicée que sur l'interprétation d'un mot grec, sur un iota : le Christ était-il homoiousios ou homoousios ?
« On essaya bien d'un miracle supposé, fait par Dieu en faveur d'un tyran non chrétien, non baptisé, cruel, assassin, qu'on fit grand parce qu'on ne put le faire saint, mais la croix qu'on prétendit s'être montrée en plein ciel pour protéger ses armées, qu'on broda sur le Labarum (1) avec la devise : « In hoc signo vinces », ne fut aperçue malheureusement que par un seul historien visionnaire et lunatique. L'Eglise orthodoxe, qui inventa ce miracle et le propagea, n'en ose soutenir elle-même l'authenticité. La croix de Constantin est donc tombée, avec beaucoup d'autres apparitions de ce genre, telles que le « Quo vadis » de saint Pierre, au nombre des légendes. »
(1) Le prétendu miracle de la croix vue dans le ciel par Constantin nous ramène à l'histoire de cet emblème, qu'il est utile d'étudier ici.
La forme de la croix, prise comme symbole par les premiers Chrétiens, a varié. Ils ont eu la croix grecque +, le chi X ou le tau T.
On s'est demandé laquelle de ces croix avait été mise par Constantin sur son étendard, et l'on a trouvé que ce n'était pas une croix ; mais les deux lettres qui commencent le nom du Christ et dont on faisait alors un monogramme Ch X et Ro P (le ro grec ρ).
Le Chi-Ro, adopté par Constantin, était déjà ancien alors (Le monogramme chi-ro vient des anciens Celtes). Ce n'est donc pas une croix, mais deux lettres que Constantin mit sur son labarum (Étendard romain couleur pourpre, vient de laub, mot breton qui signifie construire, relever), sur ses bannières et sur celles de ses soldats.

Niebuhr, dans son Histoire romaine (t. III, p. 303), consacre à Constantin les lignes suivantes :
« Ses motifs pour établir la religion chrétienne sont quelque peu étranges en vérité. La religion qu'il avait en tête n'était qu'un mélange confus. Sur ses médailles était représenté le Soleil invincible. Il adorait les divinités païennes, consultait les augures, conservait les superstitions païennes. Il est vrai qu'il ferma des temples et construisit des églises.
« Comme président du concile de Nicée, nous ne pouvons le voir sans dégoût. Il n'était pas du tout chrétien lui-même, et il ne voulut recevoir le baptême qu'au moment de mourir. Il traite la foi chrétienne comme une superstition qu'il voulut mélanger avec toutes ses autres superstitions. Lui donner le titre de saint, c'est profaner ce mot. »

Lichtenberger dit de lui : « En ce qui concerne le paganisme, Constantin prit soin de n'en point troubler les derniers jours. Il est certain qu'il n'interdit jamais le culte des idoles. Il éleva le temple païen de la Concorde, et permit aux devins de consulter les entrailles des victimes. Ajoutons qu'il souilla sa vie privée par un grand nombre de crimes. Il étrangla Licinius après lui avoir pardonné. Le jeune fils de son rival, âgé de douze ans, reçut la mort par son ordre. Il décapita son propre fils Crispus, et fit étouffer sa femme Fausta dans une étuve.
« Quant au miracle de l'année 312 (la croix), il est en contradiction formelle avec ce qui précède. Le penchant de Constantin pour le Christianisme ne s'explique que par ses intérêts politiques et apparaît pour la première fois en 313. Au reste, il est temps de le dire, le récit du miracle ne repose sur aucun fondement historique sérieux » (Encycl., vol. II, p. 390).
Pour comprendre la mentalité de Constantin, il suffit de se rappeler ce fait : il condamna à mort le philosophe Sopatrus pour avoir « déchaîné les vents » et avoir ainsi empêché des vaisseaux chargés de blé d'arriver à temps pour mettre fin à la famine. Il découvre que Virgile était chrétien. Les intrigants lui persuadent qu'il est un grand docteur ès-doctrine chrétienne ; on lui demande des discours, des homélies.

L'EMPEREUR JULIEN (331-363)
L'Eglise avait eu grand tort de tant se hâter d'affirmer sa puissance, car il s'en fallut de peu qu'elle ne perdît en un jour ce qu'elle avait gagné en deux siècles.
L'avènement au trône de Julien, qui rétablit le culte païen et tenta de raviver la philosophie mourante à Alexandrie, aurait pu amener une violente réaction, si ce prince n'était mort trop jeune pour accomplir ce qu'il méditait.
Julien appelé l'Apostat disait : « Jésus et Paul n'ont pu prévoir les chimères que formeraient un jour les Galiléens ; ils ne pouvaient deviner le degré de puissance où ceux-ci parviendraient un jour. Tromper quelques servantes, quelques esclaves ignorants, Paul et Jésus n'avaient pas d'autre prétention. Peut-on citer, sous le règne de Tibère ou de Claude, des Chrétiens distingués par leur naissance ou leur mérite ?...
« Ni Paul, ni Matthieu, ni Luc, ni Marc n'ont osé dire que Jésus fut un Dieu ; mais quand, dans la Grèce et dans l'Italie, un grand nombre de personnes l'eurent reconnu pour tel, qu'elles eurent commencé à honorer les tombeaux de Pierre et de Paul, alors Jean déclara que le Verbe s'était fait chair, et qu'il avait habité parmi nous. »
Cela prouve que Julien croyait à l'existence de Jésus. Cela prouve aussi qu'il confond les Jésuistes avec les premiers Chrétiens, dont il ne semble pas avoir connu l'existence. Il écrit :
« J'apprends qu'Athanase, avec son audace ordinaire, s'est mis en possession de ce qu'on appelle le trône épiscopal !. Lui, un petit homme de rien, il se fait gloire de braver la mort. »
Julien avait accepté le baptême pour échapper aux fureurs de Constantin son oncle, mais il le répudia ; de là son nom d'apostat, surnom glorieux, puisqu'il indique un retour à la raison.
Julien fut un grand homme, au milieu de ce triste siècle ; ses actes, sa vie, ses livres le prouvent ; il avait une âme énergique, passionnée pour le bien, un esprit vaste fécondé par la méditation, un beau caractère auquel ses adversaires même rendent hommage.
Voici le portrait qu'en trace le très catholique Chateaubriand : « Julien avait des vertus, de l'esprit ; on a rarement écrit et porté une couronne comme lui ; il détestait les jeux, il était sobre, laborieux, intrépide, éclairé, juste, grand administrateur, ennemi de la calomnie et des délateurs. Il aimait l'égalité et la liberté, il dédaignait le titre de Seigneur et de Maître. Il pardonna à un eunuque chargé de l'assassiner !
« Ce n'est point pour se rejeter dans les mollesses du paganisme qu'il rompit avec la foi chrétienne, que son oncle Constantin lui avait imposée ; ce fut au contraire pour revenir à toutes les rigueurs de la vie stoïcienne et pour y renchérir, avec un fanatisme de philosophe, sur les duretés que s'imposaient les anachorètes chrétiens. »
« Non, dit Montesquieu, il n'y a point eu, après lui, de prince plus digne de gouverner les hommes. »
Écœuré des sauvageries de la secte qui venait, grâce à la tyrannie des empereurs, de faire reculer le paganisme, cette religion poétique et charmante où le ciel sur la terre marchait et respirait dans un peuple de Dieux qui
Dans l'éther lumineux et dans la mer profonde,
Dans les antres sacrés, dans les champs, dans les bois,
Étaient et l'harmonie et la beauté du monde,
Ses principes vivants, ses immuables lois,
Julien voulait le ressusciter en le rajeunissant.
Mais il échoua, hélas ! car il était mal secondé et ne régna que quelques années, et, lui mort, les sectes chrétiennes purent reprendre le cours de leurs disputes et de leurs persécutions.
Julien avait été nommé César et gouverneur des Gaules par son cousin Constance en 355. Il passa trois hivers à Paris, dans le palais des Thermes où il vivait simplement et sobrement.
Les hivers de Paris, qui auraient dû lui sembler terribles, à lui fils de la Grèce et de la Syrie aux doux et tièdes climats, le trouvaient insensible ; il ne,voulut jamais qu'on mît dans sa chambre un de ces fourneaux en usage dans toutes les maisons du pays. Il toléra, l'hiver devenant de plus en plus rigoureux, un brasero qui faillit l'étouffer.
Il avait rassemblé dans son palais des Thermes des philosophes, des savants, le docte médecin Oribaze.
C'est là que ses soldats et le peuple, de qui il faisait sa première école de révolution, le proclamèrent empereur malgré son énergique résistance et le portèrent en triomphe sur un bouclier, la tête ceinte d'un collier d'or de centurion, en simulacre de diadème.
On le conduisit ainsi revêtu de la pourpre impériale aux Arènes de Lutèce (1) (en 361).
C'est dans son Misopogon (c'est le premier écrit sur Paris) qu'il décrit l'humble capitale si magnifique aujourd'hui, dont il fait sa résidence préférée, où il est déclaré empereur, et qui depuis n'a cessé d'être une ville souveraine, une capitale.
Il était à Sens et avait failli être emporté par les Allemands ; il se retira à Lutèce, mieux à l'abri d'un coup de main. Son récit est curieux :
« Lutèce, dit-il, occupe une île au milieu de la rivière ; rarement celle-ci croit ou diminue, telle elle est en été, telle elle demeure en hiver ; on en boit volontiers l'eau très pure et très riante à la vue ; la température de l'hiver est peu rigoureuse à cause de la chaleur de l'Océan. Le sol porte de bonnes vignes ; les Parisiens ont même l'art d'élever des figuiers en les enveloppant de paille de blé comme d'un vêtement. »
Pendant son séjour à Paris, Julien favorisa le culte de la Grande Déesse Isis, qui avait des temples dans la ville qui devait prendre son nom quand, sous l'impulsion de Julien, on jurait par Isis (d'où Parisis, Paris) au lieu de jurer par le Dieu des masculinistes, Hésus.
C'est lui, croit-on, qui fit placer la statue de la Déesse dans les niches de la Scena des Arènes de Lutèce, où l'on voit encore des fragments de revêtements polychromes.
Le culte d'Isis prit un grand développement à Parisis et dura plusieurs siècles.
C'est sans doute cela qui détermina la désignation que la Rome chrétienne a donnée au Paris païen : Refugium peccatorum, le refuge des déclassés, des forbans, l'asile ouvert aux miséreux, aux chevaliers de la Belle Étoile.
Mais ce grand empereur devait mourir jeune. Il fut amené à entreprendre une expédition contre les Perses. Après avoir donné à son armée les preuves d'un courage héroïque, il fut tué d'un javelot en combattant sans cuirasse.
Il montra devant la mort la sérénité stoïque de Thraséas, consolant ceux qui pleuraient, regardant la mort comme une récompense. Il avait 32 ans.
Les néo-chrétiens saluèrent avec une joie sauvage la mort de celui qui venait de tomber en combattant les ennemis de la patrie. Les saints évêques éclatèrent en hymnes de joie féroce : « Le sanglier, qui ravageait la vigne du Seigneur, est étendu mort. » Grégoire de Nazianze, le doux pasteur, s'écrie dans un accès de lyrisme odieux : « Je convoque à ces réjouissances tous ceux qui invoquent un seul Dieu, celui qui a percé la tête de l'impie. »
Après la mort de Julien, l'Eglise reconquit toute l'influence qu'elle avait perdue pendant son règne, et l'esprit tyrannique des empereurs se perpétua chez les papes, leurs continuateurs, qui de ce moment se constituèrent définitivement (2).
Les Césars chrétiens conservèrent jusqu'à Gratien (375-383) le titre de Pontifex maximus de l'ancienne religion païenne.
Il existe une statue de Julien au Musée de Cluny. Cette statue fut trouvée au 19ème siècle chez un marbrier par M. de Lariboisière ; c'est lui qui la donna au Musée. L'empereur est coiffé de la mitre impériale, drapé dans la chlamyde aux mille plis, tenant en main le bâton de commandement. Il a sa « barbe de bouc » qui faisait rire ses compatriotes d'Antioche.
(1) Jusqu'à récemment, on avait pensé que l'élection de Julien à la dignité d'empereur était due uniquement à des soldats mutinés qui, la coupe à la main, avaient assiégé le palais parisien où se tenait leur commandant et lui avaient imposé le diadème sous peine de mort immédiate. D'après un texte d'Ammien Marcellin, traduit et commenté par M. Luc de Vos, l'acclamation des soldats fut confirmée d'abord par un décret de la république des Parisiens, et ensuite par une assemblée générale des légats de toute la Gaule réunis à Paris. Cette donnée nouvelle modifie la thèse généralement adoptée, d'après laquelle les assemblées provinciales au IVème siècle ne s'étaient pas occupées de politique. Elle jette de plus un lustre inattendu sur le passé du conseil municipal de Paris, qui apparaît désormais comme ayant, par sa sagesse politique et son énergique initiative, assuré à cette cité le rang de capitale, que lui conservèrent Valentinien 1er, Gratien et plus tard Clovis
(2) Symmaque, préfet de Rome en 384, puis consul en 391, fut le dernier avocat du paganisme en Occident. Son petit-fils, beau-père de Boèce, fut mis à mort après l'exécution de son gendre par l'ordre du roi ostrogoth Théodoric (525).

LES SUCCESSEURS DE CONSTANTIN : THÉODOSE LE GRAND
Après Constantin, le grand colosse romain devenu faible et impuissant s'occupait d'arguties ridicules pour soutenir l'erreur contre la Raison. Mais il subit vite le châtiment de ses fautes. Les barbares démembrèrent le grand Empire que le monde catholique ne sut pas défendre.
Le Jésuisme, ce legs de l'Empire romain à l'humanité, amena l'abaissement de la dignité humaine, l'habitude de la lâcheté devenue triomphante, l'amollissement des caractères par suite de la débauche, et tout cela arriva promptement à anéantir l'ancienne civilisation, et à détruire l'Empire.
Alors, sur les ruines de ce peuple fort par excellence, dont la capitale avait compté six millions d'habitants, commença le règne de la férocité stupide, de la superstition grossière et de la terreur.
L'exemple de Constantin pervertit tous ses successeurs, excepté Julien. On sait combien l'entraînement dans le mal est puissant sur les mauvaises natures.
Théodose se distingua particulièrement par sa cruauté et sa perfidie. Il faisait mourir les hommes pour des peccadilles, comme le refus d'un impôt trop lourd. A la suite d'un carnage de ce genre à Antioche, l'Oronte charria pendant plusieurs jours des cadavres à la mer ; après quoi... il pardonna... et doubla l'impôt.
A Thessalonique, cela se reproduisit. Il invita les assistants à venir à des jeux publics et, pendant la fête, les fit égorger ; ils étaient quinze mille, hommes, femmes et enfants.
L'Eglise en fit un saint et lui donna le surnom de Grand.
Saint Ambroise fit comprendre à Théodose qu'il était de son devoir de prêter, à la Foi, l'appui du bras séculier.
Voici ce qu'on lit dans le Code Théodosien :
« Il faut croire à la Sainte Trinité du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Cette doctrine prendra le nom de catholique. Tous ceux qui ne pensent pas comme nous sont des insensés et nous les flétrissons du nom d'hérétiques.
« Désormais, leurs assemblées sacrilèges ne s'appelleront plus Eglises. Au surplus, notre autorité, inspirée par la Sagesse divine, décrétera contre eux telles pénalités que nous jugerons convenables. »
Dans un rescrit adressé à Florus, préfet d'Orient, en 381, Théodose confondit avec les Manichéens et les poursuivit comme eux ceux qu'on appelait Eucratites (continents, qui condamnaient le mariage considéré comme une incontinence), les Apotactiques (abrenunciantes ou renonçants, qui professaient la continence absolue et le renoncement à tout), les Saccophores (porte-sac, qui portaient des habits de pénitents), les Hydroparastates (ou aquariens, qui ne buvaient que de l'eau).
L'empereur ordonna qu'il fût établi des inquisiteurs pour les rechercher. C'est la première fois que l'on trouve dans les lois le nom d'« inquisiteur », et c'est pour punir la vertu, qui voulait réagir contre le mal régnant, qu'ils furent institués.
Avec Théodose, le triomphe du despotisme fut assuré.
L'Eglise nouvelle, cette institution plus politique que religieuse, recueillit l'héritage de l'ancienne Rome qui croulait, et de ces ruines, mélange de corruption et de bassesse, naquit le moyen âge.
Cette ère nouvelle inaugure le règne du despotisme aveugle, de la tyrannie stupide, de toutes les douleurs et de toutes les souffrances.
En 395, à la mort de Théodose, l'Empire fut divisé. Arcadius régna en Orient et fonda le Bas-Empire, qui finit à Constantin Paléologue en 1453.
Honorius régna en Occident. Son Empire dura de 395 à 476.

LES APOLOGISTES : LACTANCE ET ARNOBE
La nouvelle doctrine trouva des apologistes.
Lactance, rhéteur du temps de Dioclétien et de Constantin, fut un apologiste néo-chrétien. Il naquit en 323 en Afrique. Il écrivit un livre intitulé Institutions divines.
C'est lui qui employa le mot religare (religion) pour désigner le lien qui unit l'homme au Dieu nouveau (red, préfixe marquant répétition, et ligio, ligare, lier).
Les premiers Chrétiens n'appliquaient pas le mot « religion » au Christianisme, ce mot ne désignait que le paganisme. Minucius Félix, au IIIème siècle, l'adopta le premier pour désigner le Christianisme en y ajoutant l'adjectif vraie. La Vulgate traduit par religio des termes hébreux qui seraient plus justement rendus par pratique, usage, règle, ordonnance ou statuts.
Le Nouveau Testament traduit par religion le mot thrèskaia (qui vient, d'après les uns, de thressa ou throssa, « femme de Thrace », d'après les autres de threo, « réciter des prières »).
Le premier auteur qui se sert de l'expression « religion chrétienne » est Arnobe, au commencement du IVème siècle, dans un discours contre les Gentils. Arnobe était rhéteur à Ficca en Afrique ; il écrivit sa Controverse contre les païens vers 310.
Voilà donc le mot religare employé pour indiquer un lien qui relie l'homme à une chimère, le Dieu auquel on prétend nous relier étant inconnu, incompréhensible, insaisissable et inutile. Comment alors nous relier à lui ? Par la prière ? Mais où va-t-elle ? A quoi aboutit-elle, puisque jamais personne n'y répond ? On ne peut se relier qu'à un être connu, saisissable, aimé, utile. Et cet être, qui est la Déesse, non le Dieu, venait d'être supprimé de la Nature. Il n'y avait donc plus de religion, puisqu'il n'y avait plus de Divinité réelle à qui demander des faveurs et des bonheurs. Le mot religare n'a un sens réel que quand il sert à exprimer le lien qui unit deux choses réelles. Dans l'acception que lui donna Lactance, il devint un vocable vide de sens, et c'est pour cela qu'on lui donna depuis tant de significations qui n'ont aucun rapport avec la vraie religion.
C'est le régime de l'ignorance. Du reste, on aura une idée des connaissances de Lactance par cette citation :
Lactance, dans son traité de la « Fausse Sagesse », gourmande ainsi les insensés qui osent prétendre que la terre pourrait bien être ronde : « Que dirons-nous de ceux qui croient aux antipodes et qui mettent des êtres contre nos pieds ? Peut-on être assez inepte pour croire qu'il y ait des hommes dont les pieds sont plus hauts que la tête, des pays où tout soit renversé, où les fruits pendent en haut, où les cimes des arbres tendent en bas, où les pluies, les neiges et la grêle tombent de bas en haut ? »

L'AGONIE DU GÉNIE FÉMININ ET DES DERNIÈRES GRANDES FEMMES DU PAGANISME
HYPATHIE (375-415)
Vers 375 naquit Hypathie, fille de Théon, mathématicien et naturaliste qui, imbu des idées de son temps, avait écrit un livre sur les présages par le vol et la voix des corbeaux. Mais la fille devait grandement surpasser son père. On croit qu'elle fit dans sa jeunesse un voyage à Athènes, où elle suivit les cours d'une autre femme, Asclépigénie, qui, avec son père Plutarque le jeune, dirigeait une Ecole de philosophie.
Donc, les femmes enseignaient encore, malgré l'opposition des néo-chrétiens qui, par la voix de saint Paul, avaient dit : « Je ne permets pas à la femme d'enseigner. »
A son retour d'Athènes, Hypathie succéda à son père dans sa chaire à l'École d'Alexandrie ; elle faisait un cours public dans la célèbre École de philosophie de cette ville, le Muséum (Mouseîon) fondé par Ptolémée Soter et Ptolémée Philadelphe, dans le but de conserver les connaissances acquises et de faire de nouvelles recherches.
Hypathie enseigna d'abord les mathématiques, la géométrie et l'astronomie, puis la philosophie. Elle était en opposition d'idées avec son père qui professait la doctrine d'Aristote, tandis qu'elle enseignait la doctrine néo-platonicienne. Du reste, on lui reconnaît des idées très larges, un éclectisme produit du mélange des opinions qui régnaient dans une ville où l'on pratiquait trois religions : le Judaïsme, le Paganisme et le Christianisme.
Hypathie, avec la raison droite d'une femme, combattait la théurgie qui régnait dans le monde des hommes ; elle ne croyait pas, comme son père, aux enchantements, aux esprits, aux miracles.
Cette savante écrivit trois ouvrages :
1° un commentaire du Traité des Coniques d'Apollonius ;
2° un commentaire des Arithmétiques de Diophante, qui sont les premiers ouvrages connus d'algèbre ;
3° un Canon astronomique, c'est-à-dire des Tables des mouvements des astres.
Le second de ces ouvrages, qui avait été perdu, a été retrouvé à la fin du XVème siècle. Le troisième a dû être confondu avec celui qu'on a attribué à son père, Théon, sur le même sujet. Elle fit aussi des inventions : L’aréomètre ou pèse-liqueurs, un planisphère et un astrolabe.
D'après les lettres de Synésius, on sait que, pour son planisphère, elle projetait la région équatoriale de la terre sur le cylindre circonscrit ; quant au dernier instrument, c'était un cercle gradué pour mesurer les distances angulaires des astres. On lui attribue aussi l'invention d'un niveau d'eau et d'un appareil à distiller.
Hypathie était aussi belle qu'elle était savante. De toutes les parties du monde, on venait à Alexandrie pour entendre ses leçons ; sa voix avait une douceur divine, et elle était si connue qu'on lui écrivait en adressant les lettres « à la Philosophe » ou « à la Muse d'Alexandrie ». Elle était entourée d'admiration et de respect. On voyait en elle la femme-Déesse, telle que l'antiquité l'avait connue.
Un poète lui adressa ces vers : « Quand je te vois et j'entends ton discours, j'adore : c'est l’éthérée constellation de la Vierge que je contemple, car au ciel est vouée ta vie tout entière, auguste Hypathie, idéal d'éloquence, astre immaculé de la sagesse. » (Traduit de l'Anthologie par M. Weil.)
On croit qu'elle fut unie d'amitié ou d'amour au philosophe Isidore. (D'après sa vie par Damascius.)
Hypathie eut des disciples célèbres, parmi lesquels Synésius, qui devint chrétien et évêque de Ptolémaïs, C'est dans les lettres qu'on a de lui qu'on trouve le plus de renseignements sur Hypathie : sept de ces lettres lui sont adressées ; dans quatre autres, il est parlé d'elle. Synésius dit d'elle : « Nous avons vu, nous avons entendu celle qui préside aux mystères sacrés de la philosophie. » S'adressant à elle, il dit : « Ma bienfaitrice, mon Maître, ma sœur, ma Mère. » Cet homme n'eut pas le chagrin de voir sa mort tragique, il mourut avant elle.
Les évêques avaient obtenu de Constantin et de Théodose la destruction des temples grecs et la fermeture des Écoles de philosophie. Or Hypathie continuait à enseigner. Une telle femme devait être pour les masculinistes un objet de haine et de terreur. L'évêque de la ville, Cyrille, successeur et neveu de Théophile, souffrait avec impatience cet enseignement donné par une femme aussi remarquable qui lui inspirait une implacable haine et une violente jalousie. Il résolut de la perdre.
Cet homme fougueux et terrible disputait le pouvoir au préfet Oreste ; cela amenait des conflits. Le préfet ne voulait pas s'incliner devant l'évêque, quoiqu'il fût lui-même chrétien catholique.
Une émeute survint à l'occasion de ces disputes. Un maître d'école, Hiérax, s'étant mal comporté devant le gouverneur pendant qu'il promulguait ses décisions au théâtre, fut frappé de verges. Les Catholiques s'en vengèrent, des moines attaquèrent Oreste et sa suite à coups de bâton ; l'un de ces moines, Ammonius, fut mis à mort. Ces détails nous donnent une idée des mœurs du temps. On profita de cette effervescence pour se débarrasser d'Hypathie. Une foule furieuse, menée par le lecteur de l'église de Cyrille, Pierre, agissant sous l'inspiration de l'évêque, suivit une bande de fanatiques, qui alla attendre la philosophe à la sortie de son école, se jeta violemment sur elle, l'arracha de son char, et la traîna dans l'église de Césarée.
Là, cette bande de néo-chrétiens, parmi lesquels étaient un grand nombre de moines excités contre elle par Cyrille, la dépouilla de ses vêtements et la tua à coups de pierres ; son corps fut coupé en morceaux et la chair arrachée des os par ces moines sauvages, puis ils portèrent ses membres sanglants au Cinéron, lieu des supplices, où ils furent brûlés.
Tel est le martyre de cette femme, qui représentait le génie féminin. Cet acte caractérise l'esprit des disciples de Paul.
Cyrille ne fut pas appelé à rendre compte de ce crime. Tuer une femme savante n'était pas un délit pour ces gens dont le but était d'anéantir l'Esprit féminin.

LA PAPAUTÉ - LÉON LE GRAND (440-462)
C'est ici que les Catholiques s'écartent des institutions primitives.
Dans les anciennes religions théogoniques, il n'y avait pas « un chef », mais un conseil, ce qu'on appela chez les Israélites le « conseil des anciens ».
Les Juifs imitèrent d'abord ce système, que nous retrouvons dans le Sanhédrin, mais la nature de l'homme n'est pas faite pour lui conseiller de s'effacer dans les rangs, il veut dominer, c'est donc le plus ambitieux et le plus audacieux qui arrive au sommet. Il en résulte, dans les institutions masculines, une lutte incessante pour le pouvoir. C'est ce qui arriva dans l'Église. Habitués à escalader les degrés de la hiérarchie sociale, les plus ambitieux voulurent une suprématie ; de là un chef unique, non une assemblée consultative (ce qui suppose de la raison, et rien n'est gênant comme la raison des autres).
Cependant, avant d'en arriver à se donner un chef suprême, l'Église de Rome fut longtemps gouvernée par un « conseil des anciens ». Dans une lettre d'Irénée, il désigne les prédécesseurs de Soter, mort en 175, sous le nom d'anciens (presbyteroï, de presbus, ancien, qui voit loin, nom donné à la femme âgée ; c'est de ce mot qu'on fait presbytère).
Mais un homme ambitieux apparut, Léon le Grand, qui visait la place de chef suprême et fut très probablement l'auteur de la légende de saint Pierre dont on fit le chef de la papauté, pour créer un précédent. Ce qui le fait supposer, c'est que c'est lui qui prononça cette parole hypocrite : « Le privilège de saint Pierre subsistera tant que subsistera sa justice. » Or saint Pierre ne vint jamais à Rome. Quant à sa justice, nous ne l'apercevons pas dans la religion catholique. En réalité, il n'exista pas de pape avant Léon le Grand, et c'est lui qui fonda la papauté. C'est ce même pape qui combattit Attila.

LE POUVOIR DES ÉVÊQUES SUBSTITUÉ À L'ANCIENNE ÉGLISE
Les anciennes Églises du premier Christianisme étaient dirigées par des Prêtresses (diaconesses), qui portaient différents noms. La Vénérable (mot qui vient de Vénus) était appelée presbyte (ancienne).
De presbyte, on a fait prêtre.
Les liturgies étaient appelées offices diaconaux ; qui soupçonnerait que ces mots désignaient primitivement des femmes ?
Les seconds, dans les ordres sacrés, étaient les surveillants. On les appela d'abord époptes, puis épiscopes. Ce sont des hommes chargés de faire le service, c'est-à-dire la surveillance du temple. L'épiscope est devenu l'évêque.
Nous lisons dans les Actes (XXI,3) que « Philippe l'Évangéliste » était un des sept diacres de son Église (rappelons qu'il avait quatre filles vierges, qui prophétisaient).
Rappelons aussi qu'épopte (devenu pape) est l'origine du mot époux, esposo, qui s'altéra en passant par le latin (sponsus, participe passé de spondere, promettre).
Les épiscopes promettaient la fidélité et faisaient des serments solennels.
Mais ces anciens usages se perdirent. Les évêques trahirent la sainte cause de la Vérité et arrivèrent à prendre une autorité souveraine, alors que, dans la vraie Religion chrétienne, ils n'étaient que des surveillants, des épiscopes.
Donc, ils sont les transfuges du premier Christianisme. L'histoire écrite par l'Église nous parle d'eux comme s'ils étaient investis d'un pouvoir légitime. C'est pour légitimer ce pouvoir qu'ils font alliance avec les Rois Saliens, masculinistes comme eux. (Voir l'article sur le Moyen Âge)
Ainsi, en 615, une ordonnance dite Constitution perpétuelle fut signée par 70 évêques réunis en Concile pour confirmer la victoire des grands et des clercs (les grands, ce sont les masculinistes qui ont fait assassiner Brunehaut ; les clercs, ce sont ceux qui les ont poussés à accomplir ce crime).
Voici quelques articles de cette Constitution :
2° Tous les biens ou bénéfices enlevés aux Leudes et aux Églises leur sont restitués ; toutes les concessions qui leur ont été faites leur sont irrévocablement confirmées.
3° L'élection des évêques est réservée au Concile provincial, au clergé et au peuple des cités, le Roi n'ayant que le droit de confirmation.
4° Les clercs sont soustraits à la domination des officiers royaux, et la connaissance d'une foule de crimes publics et privés est attribuée aux tribunaux ecclésiastiques.
Voilà donc le pouvoir ecclésiastique établi par les évêques. Au rapport des païens Lucain (Phars.,V,3), Stace (Théo., VIII, 196), Juvénal (Sat. VI, 554), Strabon (VII de Espir.), les oracles des Prêtresses cessèrent subitement au temps des premiers jours du Catholicisme masculin.
Les Pères le constatent comme un triomphe de Jésus.

ORIGINE DE LA PAPAUTÉ
A cette époque, l'autorité suprême appartient aux Conciles. Ceux que l'Église moderne appelle des papes n'étaient alors que les évêques de Rome.
Nous avons vu, par la Constitution que nous venons de citer, que les Conciles prévalent sur leur autorité.
Les évêques des autres régions n'acceptent pas pour chefs les évêques de Rome.
Ce fut en 607 que, sous Boniface III, l'évêque de Rome fut reconnu comme suzerain spirituel de toute la Chrétienté.
Les Catholiques ont complètement pris l'appellation de Chrétiens, ce qui est traduit par leurs ennemis par le mot Crétins.
De 680 à 684 eut lieu le Concile de Constantinople contre les Monothélites. C'est à ce moment qu'il fut ordonné par le 6e Synode de Constantinople que désormais le Christianisme aurait pour symbole un homme attaché à une croix, ce qui fut confirmé par le pape Adrien Ier.
On sait que jusque-là le Catholicisme avait été symbolisé par une croix formée de trois phallus (représentant la Trinité). Le latin avait cessé d'être la langue parlée en Italie au VIème siècle.
Au VIIème siècle, l'Église établit le culte en langue latine.

ÉTAT DE L'ESPRIT HUMAIN
Pendant cette période, l'esprit humain subit une éclipse profonde. Les belles écoles que les Druidesses avaient fondées disparurent et l'ignorance s'étendit. L'Église Johannite elle-même, seul foyer de lumière qui ne s'éteignit pas absolument, ne jeta plus aucun éclat.
« Au VIème siècle, Grégoire de Tours et les autres évêques furent encore des lettrés dont les œuvres ont un vrai mérite. Au VIIème siècle, on ne distingue plus que Frédégaire, bien inférieur à Grégoire de Tours. Puis ce fut la nuit complète, et cette nuit alla grandissant et dura plusieurs siècles. Il ne resta rien de ce qui constitue une civilisation ; poésie, arts, science, philosophie, tout fut anéanti par le monde barbare. » (Vincent, Hist. de France)

GRÉGOIRE LE GRAND (560)
C'est de lui qu'il faut dater la suprématie papale. Toutes les luttes éparses, toutes les petites révoltes, toutes les tentatives d'insoumission se condensèrent sous sa puissante volonté.
Il résumait en lui l'état mental de son époque : caractère énergique et concentré, comme tous ceux qui ont peur de leurs propres actes, peur de l'immensité du mal qu'ils font ; imagination violente comme tous les candidats à la folie, sombre comme tous les hommes tourmentés et tourmentants, sans instruction aucune, ennemi déclaré de tout ce qui est intellectuel, de toute recherche, de toute science, il chassa de Rome les savants, ces gêneurs, il brûla les bibliothèques et fit détruire les derniers vestiges de l'art antique.
Ses traits étaient durs et noirs, comme ceux des hommes méchants. Déjà fou, il conversait avec des anges, la nuit, disait-il ; il se prosternait devant des châsses de saints pour glorifier la sainteté de son sexe en ces hommes, il avait toutes les superstitions, attachait à la moindre relique des vertus miraculeuses, s'agenouillait devant les grossières images qui remplaçaient les belles statues qu'il avait fait détruire.
Il devint maître de Rome (la pourrie) qui tremblait sous son autorité farouche ; riche du reste, comme tous ceux qui savent prendre ce qu'on ne leur donne pas. Il défendait d'étudier quelque livre que ce fût, disant que le démon est dans tous les livres ; il voulut anéantir toute manifestation de l'Esprit.
Tel est l'homme qui posa les lignes fondamentales du nouveau culte. On lui fait gloire de l'invention du chant grégorien, à tort, il ne fit que lui donner son nom. Ce sont les Bénédictins qui le trouvèrent. Il régla la liturgie romaine, les processions, les vêtements sacerdotaux ; c'est lui qui donna une forme à une religion qui n'avait pas de fond ; il traça le cercle dans lequel le Catholicisme, désormais, devait rester enfermé ; il fit de cette religion niaise un culte grandiose dans la forme, culte dans lequel on supprime toutes les réalités religieuses, pour ne laisser à leur place que le rêve... ou la terreur.
C'est ainsi qu'il fonda la puissance du prêtre.
Désormais il n'y avait plus à s'adresser à la raison, ou à la conscience ; les prêtres, les hommes fanatiques, ignorants ou rebelles, ne connaissaient plus cela ; ils étaient livrés au vertige moral que donne l'autorité factice, et ils allaient chanceler dans leur puissance comme l'ivrogne, qui, lui aussi, a toutes les audaces. Ils avaient la puissance que donne la force, et qui est le contraire de la puissance que donne l'ascendant (ce qui est au-dessus).
Plus d'idées, plus de concepts, la logique est morte, la science abstraite de la femme honnie, bannie, punie ! On remplace tout cela par des homélies qui prétendent être des instructions religieuses sur l'Évangile, mais qui ne sont que des discours ennuyeux, pleins d'une morale affectée. Et c'est avec cela que l'on va instruire le troupeau bêlant des Chrétiens, dont on va faire en réalité des abrutis ou des ahuris.
Quelques hommes essayèrent bien de reconstituer la primitive science divine, mais quels piètres résultats ! Des phénomènes isolés, sans liens entre eux, le rapport des choses ignoré, la série des enchaînements de faits embrouillée, rompue, renversée. Plus de ces grandes synthèses qu'avait faites l'antiquité féminine. Le miracle partout, la folie triomphante, le charlatanisme officiel remplaçant la raison vaincue ; un gâchis divin, l'anarchie dans le Ciel comme sur la Terre.
La relativité des faits moraux échappait à ces hommes qui ne pouvaient plus comprendre les différences sexuelles et dotaient la Femme de leurs péchés et de toutes leurs folies, la punissaient de ce qu'ils faisaient ! Incohérence des consciences, récompenses et châtiments disproportionnés avec les actes, appliqués à  rebours, le bien était devenu le mal et le mal le bien.
Puis l'exagération, les outrances, la surenchère du mensonge ; dépasser le but, pour mieux terroriser, est le système employé ; mettre partout l'absolu, et s'en faire maître ; disposer de la vie des autres, envoyer les gens dans un ciel fictif ou dans un enfer imaginaire, pour un mot, une intention, exagérant chaque détail de la vie, mettant des miracles partout, pour que le prêtre-sorcier pût les produire et les utiliser. Tout ce que l'homme répudiait, considéré comme la perdition même, dans la Femme surtout ; c'était lui qui jugeait, décrétait, condamnait, lui le pur ; Elle, l'impure, était jugée, et comment !... Elle ne trouvait de rémission que dans le renoncement d'elle-même, dans l'anéantissement de toutes ses supériorités et même de sa beauté ! Rien ne lui était permis sans l'intervention de l'homme ! Elle n'était plus dans ce monde que pour lui. Et c'est contre Elle qu'on utilise la colère divine (Dies iræ) si elle veut secouer ses chaînes, se révolter !

L'ÈRE CHRÉTIENNE
L'ère chrétienne n'a pas été imaginée il y a vingt siècles et ne date pas pratiquement de la naissance de Jésus et encore moins de sa conception, malgré l'ancienne formule ab incarnatione Christi. Cette ère fut proposée pour la première fois, au VIème siècle, par un moine du nom de Denys, surnommé le Petit, qui vivait à Rome, vers l'an 580. Ce moine, d'origine scythe, avait fait des calculs qui l'avaient conduit à admettre pour l'incarnation de Jésus l'an de Rome 753, et cette base est le fondement de l'ère chrétienne.
Mais le calcul de Denys le Petit est en erreur de quatre ans, attendu que, d'après la tradition même, Jésus est né sous le règne d'Hérode, lequel est mort l'an de Rome 750. Des calculs indiquent pour la naissance de Jésus la fin de l'année 749 de la fondation de Rome, et pour sa mort la 36e année après cette date.
L'ère chrétienne adoptée, qui fait mourir Jésus à trente-trois ans, est trop courte de quatre ans.
Le 1er janvier de l'an 1 est le 1er janvier de l'an 750 et non de l'an 754.
Ce moine mourut sans avoir vu son ère adoptée. Elle ne l'a été qu'un demi-siècle plus tard.
L'exemple fut donné par l'Église anglo-saxonne, et le premier document connu où apparaît « l'ère chrétienne » est daté de l'an 605.
Au VIIIème siècle seulement, cet usage fut partout introduit par ordre de Charlemagne après son couronnement.

LA LÉGENDE DU DIABLE
N'est-ce pas Voltaire qui a dit que le Christianisme, c'est l'histoire du Diable ?
« Dieu et le Diable, dit Nicole, c'est toute la religion. »
Or Dieu et le Diable ne sont que les symboles des deux sexes, la Déesse et le Dieu.
« Satan, c'est l'homme à ses dernières limites de défaillance », a très bien dit M. Jules Bois, qui, dans Le Satanisme et la Magie (p. 37), le définit ainsi : « Satan, racine de l'anarchiste et du sophiste, du malheureux prolétaire et du dominateur ; il est le mal universel, le grondement de ce moi néfaste dont tous, à de certaines heures, même les meilleurs, même les plus purs, nous grimaçons, nous hurlons. Ce Satan, c'est la volupté mère des désastres, le ferment de paresse et de violence, et la colère, la bêtise vorace et sans yeux. »
Comme on fait du Diable le type de la ruse, on lui attribue des déguisements, des métamorphoses. Et ce sont les plus rusés, les plus réellement sataniques qui poursuivent le Diable partout, qui le voient sans cesse autour d'eux, reflet de leur imagination. Ils le mettent dans leurs ennemis, lui donnent le nez juif, le font résider dans les synagogues, mais ils le mettent surtout dans la Femme. N'a-t-on pas vu sortir d'un frêle corps de jeune fille des légions de démons ? Leur Évangile en est plein.
L'exagération de l'esprit de l'homme n'a pas de limites. Quand il met ce qui est en lui hors de lui, il l'amplifie jusqu'à l'infini.
C'est Satan qui commet toutes les infamies que ces hommes vont faire subir aux femmes, tous les actes abjects qu'ils exigent d'elles, et auxquels elles se soumettent craintives, terrorisées. Ils inventent des démons incubes et succubes, moyen commode de se soustraire à la responsabilité de leurs actes. Ces saints hommes ne violaient jamais une fille, c'était toujours un incube qui avait fait le coup (1).
La femme, du reste, était diablesse, quand ils la craignaient. Saint Antoine, pris en flagrant délit de débauche, jette des cris d'horreur ; lui, le saint homme, il résistait aux tentations d'une effrontée courtisane !... C'est une des formes de l'inversion psychique des sexes, déjà mise en usage dans la légende du vertueux Joseph résistant à la femme de Putiphar.
Satan est souvent appelé en grec διάβολος, le détracteur ou l'accusateur, d'où on fait le « Diable ». C'est le détracteur de la femme, son éternel calomniateur, parce que perpétuellement il lui attribue sa nature, ses vices, ses fautes. Il se blanchit en l'accusant.
Satan apparaît dans la Sapience (II, 23-24) comme introduisant « par envie » la mort, dans le monde où Dieu venait de créer l'homme à son image.
Dans l' Apocalypse, il s'appelle aussi le « Dragon », le « Serpent », ce qui est encore emprunté aux mythologies orientales. Le verset XII - 9 l'identifie avec le serpent de la Genèse. C'est Ahriman entouré de tout un peuple d'esprits malfaisants.
Les Israélites de Palestine nomment les démons Shedim, mot qui signifie : les puissants, les maîtres. Ce mot se trouve deux fois dans la Bible, où il désigne les dieux mâles des Gentils, que les Juifs plus tard identifient avec les démons. Nous trouvons Asmodée mentionné dans Tobie (III, 8). C'est un nom qui vient de la Perse.
Béelzébuth est une altération de Baalzéboub, c'est-à-dire « le Baal des mouches » (malfaisantes).
Les princes du satanisme sont Asmodée, Bélial, Béelzébuth, Moloch, Baal-Phégor.
Le Diable est le singe de Dieu, dit-on ; c'est l'homme qui imite la femme et prend sa place. On le représente sous des formes hideuses, symbolisant tous les aspects du mal : la laideur accompagne toujours la méchanceté. Cependant, la perversion est quelquefois logée dans de beaux hommes, mais l'expression, de la haine, de la jalousie et de l'orgueil les rendra laids.
Saul était un de ces hommes possédés du mauvais esprit. On lit dans Samuel (XVI, 15), à propos de son état mental, qu'« une influence malfaisante troubla Saul et lui causa un délire dont la musique de David le soulageait ».
Mais les rédacteurs qui changèrent l'esprit de la Bible ont mis dans le texte « une influence malfaisante venant de Ievah » (Hevah). Voilà donc un passage (le seul de ce genre, du reste) où l'homme attribue à l'influence de la femme l'état mental des dégénérés. Ce passage a dû être ainsi rédigé à l'époque où se manifestait chez les hommes la haine de la Déesse Ievah, par réaction contre les femmes qui lui prodiguaient leurs louanges.
L'action du Diable peut s'exercer de trois manières, correspondant aux formes de l'action divine, dont elle suit tous les mouvements (puisque le Diable imite la Divinité, l'homme imite la Femme). Ces trois manières sont : la tentation (2), l'obsession et la possession. La femme tentée, la femme obsédée, la femme possédée, c'est la Divinité vaincue.
C'est par le bruit, le vacarme, les apparitions effroyables, les vexations de toutes natures, la persécution sous toutes ses formes sensibles, que le Diable agit et opère.
On lui attribue des ricanements, des cris d'animaux, des éclats de rire, des sifflements de serpent, des miaulements de chat, des coassements de crapaud, des coups frappés sur un rythme quelconque, des vociférations, bruit et tumulte.
Le ricanement, c'est le triomphe du Diable.
Le démon, c'est celui qui dit : non serviam, je ne servirai pas. C'est le révolté qui veut se soustraire à la loi du travail. Le premier type démoniaque fut Caïn.
Il s'est perpétué à travers les générations. Et on néglige d'apprendre à la jeunesse moderne que les manifestations auxquelles elle se livre en face de la Femme qui veut faire briller la Vérité ou rétablir la Justice, sont celles qui ont toujours été considérées comme les manifestations de l'Esprit du Mal.
Le rire de Satan exprime le plaisir du mal, la joie du mensonge qui triomphe, de la ruse qui a réussi.
La Diablerie ne fut, au fond, qu'une forme de la lutte des sexes, forme grotesque autant qu'odieuse (3).
« Le Mal, dit l'Église, est l'œuvre du Diable, qui se sert des passions naturelles de l'homme pour le produire, comme le Bien résulte d'une coopération de la grâce efficace avec ces mêmes appétences. » Il en résulte que l'histoire de l'humanité n'est qu'une guerre de tous les jours, de toutes les heures, de toutes les minutes, entre la passion de l'homme et la nature privilégiée de la Femme en qui opère la grâce efficace.
Les Pères de l'Église prirent le diable aux derniers Zoroastriens, qui voyaient dans les Dew des Perses des diables, ou le Mal. Et le mot evil (Mal) a pris place dans toutes les langues, c'est devil, diabolos, diable, diavolo, Teufel.
Aux premiers siècles de l'ère chrétienne, les Diables avaient changé de nature, comme les Dieux ; ce n'étaient plus des êtres réels, c'étaient des démons surnaturels.
Le « Saint » Père va inventer la légende du Diable, le mauvais esprit, dont il fera son ennemi, mais qui, en réalité, est son frère, ou plutôt son image, qu'il désavoue et met hors du monde. Toute son imagination fantasque va s'exercer sur ce thème et créer la Diablerie du Moyen Age.
Quand l'identité réelle des diables était surprise, ils devenaient des esprits invisibles, cause de tous nos maux. On disait des malades qu'ils avaient un démon, et on recourait pour le chasser à des opérations mystérieuses. C'est en cela que consistait la médecine des mages. Josèphe raconte (Antiq., VIII, 2, 5) que de son temps un Juif nommé Éléazar chassa un démon du corps d'un malade en présence de Vespasien, de ses fils et de ses officiers, en lui mettant sous le nez un anneau dans le chaton duquel était une racine d'une vertu miraculeuse ; dès que le malade l'eut respirée, le démon lui sortit par les narines. Éléazar ajoutait à cette cure des conjurations ou exorcismes pour que le démon ne rentrât plus dans le corps qu'il avait quitté. Josèphe prétend que ce secret merveilleux avait été trouvé par Salomon, qui en avait laissé par écrit les formules ; mais la Bible ne contient rien de semblable. Le livre de M. F. Lenormand, La Magie chez les Chaldéens (1874), contient là-dessus des développements très curieux.
Parmi les livres qui faisaient autorité à cette époque, on cite Dialogus miraculorum de Cæsarius d'Heisterbach ; c'était un ouvrage plein de divagations, montrant le diable partout et auteur de tout.
Ammonius le Péripatéticien, qui professait la philosophie à Alexandrie vers la fin du Vème siècle, vit le diable assister à son cours sous la forme d'un âne.
Quelle philosophie pouvait bien enseigner un homme qui voyait de pareilles choses ? N'eût-il pas mieux valu laisser Hypathie continuer son enseignement ?...
Cicéron se glorifie d'avoir reçu à sa table un Druide des Gaules et d'avoir parlé science avec lui, alors que ces docteurs n'étaient que des diseurs de bonne aventure.
Et c'est pour laisser aux hommes le pouvoir d'enseigner de pareilles aberrations, qu'on créa des Écoles masculines.
Nous voulons dire par là des Écoles où l'enseignement était donné par des hommes, car les femmes étaient admises partout comme élèves. Ce n'est que vers le IXème siècle que la coéducation cessera.
(1) Voici une des ruses du diable : pour discréditer saint Sylvain, évêque de Nazareth, il prit les traits, la voix, le maintien de ce saint homme, et pénétra la nuit dans la chambre d'une noble dame à qui il osa faire des propositions déshonnêtes. Aux cris que poussa la dame, on accourut et on trouva le diable, qui n'avait pas quitté la forme de l'évêque, blotti derrière le lit. Tout le monde dans la ville crut que c'était bien l'évêque qui avait été pris et chassé ignominieusement, mais Sylvain en référa au jugement de saint Jérôme et força le diable, sur le tombeau de ce saint, à avouer la ruse infâme.
(2) Dans les Évangiles, c'est le Diable qui tente Jésus, parce qu'on donne à Jésus les caractères divins de la Femme, ceux du Christ (Kyria).
(3) La signification antique des mots est restée dans le langage vulgaire. D'un homme on dira, s'il est malheureux : « c'est un pauvre diable » ; s'il n'est pas trop mauvais : « c'est un bon diable », etc.

LE SABBAT RIDICULISÉ PAR LES MASCULINISTES
Le sabbat, qui était le samedi saint, était le jour sacré, attendu, où le désir de l'homme, contenu pendant les six jours de la semaine, allait enfin trouver une satisfaction légitime, approuvée, sanctifiée, attendue par la femme elle-même, heureuse de se donner à qui a su la mériter par une chaste attente.
C'est la loi morale réalisée, l'accord entre la loi de nature qui veut et la loi morale qui retient. Aussi, comme l'idée qu'elle contient est ancrée dans les esprits ! Comme il sait bien, l'homme simple, qu'il faut un frein à ses tumultueux instincts, et comme il accepte volontiers cette loi quand il en comprend la raison ! Mais la horde immonde des Judaïtes-Pauliniens vint renverser la loi et faire de la luxure sa religion ; celle-là n'a que faire des sabbats, il lui faut toute la semaine pour donner cours à ses folies érotiques.
Alors, renversant la loi, il dit : « six jours de plaisir, un jour d'abstinence ». Et le dimanche vient remplacer le jour saint, le jour donné à la Déesse ; et ce jour-là devient sanctifié pour le prêtre parce que c'est le jour d'abstinence : l'idée est renversée, c'est la sanctification à rebours, en même temps que c'est la profanation de la Loi.
Mais les bons hommes ne veulent pas de ces licences, ils se révoltent et gardent leurs antiques usages.
Les femmes surtout récriminent contre cette débauche permise qui les outrage. Alors la bête immonde s'irrite de cette indocilité à suivre ses exemples maudits et se venge, comme toujours, en bavant, en calomniant, en déshonorant ceux qui montrent du doigt ses impostures. Et le sabbat devient l'objet d'une infâme légende, d'une parodie grotesque ; ils en font une description qui n'est, au fond, que le tableau de leurs propres débauches.
Le sabbat des Judaïtes était célébré la nuit au clair de la lune ou à la lueur des torches résineuses, au milieu des bois, dans des landes, dans des cavernes ou dans des forêts, quelquefois dans un endroit qu'on appelait « les champs du bouc ». La foule des gens impurs s'y rendait, des bohémiens, des paysans, des bateleurs, de mauvais clercs. Hommes et femmes, garçons et filles, s'y réunissaient pour célébrer leurs Mystères qu'ils appelaient Eucharistie, du grec ευχαριστία (ce qui existe de plus gracieux, de plus doux), le plaisir. C'est là qu'on entendait la messe noire célébrée par « le Diable ayant à son côté la royne du sabbat ». Celle qui était ainsi chargée de présider à ces orgies parodiait la glorieuse Reine des sabbats saints ; c'était une vieille fille ignoble imitant la Vestale. Quelquefois ils installaient leur foire en face des Temples, sur la place même où le peuple dansait suivant les anciens rites. On communiait, avec une hostie noire, puis on dansait autour de l'autel, en rond, dos à dos, ignoble chahut d'une foule débraillée ou déguenillée, se livrant à des danses grotesques qui Adulaient parodier les gracieux mouvements cadencés des danses sacrées. Puis suivaient toutes sortes de jeux, des sauts, des cris sauvages (en Gascogne on sautait, en Bretagne on dansait), tout cela, au son d'une musique de circonstance faite de tambours qui battaient, de flûtes qui sifflaient, de violons qui grinçaient. Et, dans le lieu solitaire choisi pour l'orgie, toute cette canaille grouillante et grimaçante (il y en eut quelquefois douze à quinze mille) s'installait sous des tentes qu'ils avaient apportées et déballait des victuailles, de la vaisselle, des bouteilles, pour le festin qui était éclairé par des cierges noirs faits de graisse humaine, et, dans la folie qui suivait les ivresses, toute cette plèbe faite d'assassins et de voleurs se livrait à des amours ordurières, là se commettaient d'épouvantables débauches, des fureurs, lubriques sans pareilles, c'est ce qu'ils appelaient « la communion ».
Souvent incestueux, souvent anthropophages, on les a vus quelquefois choisir un cimetière pour leurs ébats, afin d'avoir une profanation de plus, celle de la mort, à consommer.
Ou bien, ils se cachent dans des ruines, dans des cavernes, quelquefois, par ironie, dans l'Hôtel des Juges. On amenait à ces cérémonies abjectes un coq, incarnation du Diable, emblème mâle, que le Catholicisme gardera et mettra sur la flèche de ses églises (1).
C'est là que s'accomplit l'inceste, que le vieux père ignoble mène sa jeune fille et la prend, et ce père disait qu'il offrait à Dieu les prémices de ses créatures.
On mêlait à l'orgie toutes les haines accumulées, on maudissait les rois , les épiscopes des premiers Chrétiens, les diacres, et surtout Johanna, qu'on appelait « Jean Nicot » (celui à qui on fait la nique) ; C'est ainsi qu'un instinct de révolte poussait ces gens à maudire ce que les autres avaient sanctifié. On narguait les dieux et les Déesses, pêle-mêle, les dames et les seigneurs.
La parodie du sabbat remonte loin, car elle est chantée dans les hymnes orphiques composés dans les premiers temps de l'orgie judaïte. C'est à tort qu'on assigne à ces hymnes une date de beaucoup antérieure.
Ce renversement de l'antique loi morale fut d'abord une révolte, un acte délictueux ; plus tard, en se propageant, il devint un usage, il se modifia, s'amenda, s'organisa, et finalement cette parodie des anciens Mystères se résuma dans une cérémonie qui va devenir la messe des Catholiques.
(1 ) La messe de minuit des Catholiques restera la misa del gallo, la messe du coq. On célébrait ce sacrifice pour le souverain des Gaules, disait-on, parce qu'on faisait un jeu de mots, confondant les Galles (Gaulois) avec Gallus (coq).
Le coq gaulois est resté dans les langues latines : « el gallo ».

LE VANDALISME DES JÉSUISTES
Lorsque Constantin fit du Jésuisme la religion de l'Etat, il promulgua, et après lui ses successeurs, des édits et décrets dont ceux-ci :
1° Défense de sacrifier aux anciens Dieux de la Patrie, soit dans les villes, soit dans les campagnes ;
2° Exclusion de tout païen des fonctions civiles et militaires ;
3° Démolition de tous les temples, confiscation des biens et des revenus au profit des églises (qu'on multipliait partout) ;
4° Démolition ou vente à l'enchère des églises hérétiques, destruction de leurs livres ;
5° Destruction de toutes les statues en marbre des Dieux provenant des temples et des maisons particulières (on faisait des perquisitions domiciliaires pour s'emparer des statues et des vases de bronze, qui étaient fondus ; avec les objets d'or et d'argent, on faisait des lingots que se partageaient les évêques et le fisc).
Enfin, on détruisit le temple de Sérapis à Alexandrie et la magnifique bibliothèque qu'il contenait.
La Bibliothèque du Bruchium, fondée par Ptolémée Philadelphe, contenait 700.000 volumes de science, de philosophie, de morale, d'histoire, etc., que le roi avait fait venir de toutes les parties du monde. Cette Bibliothèque s'appelait « la Mère », tandis que celle de Sérapis qui était moins riche s'appelait « la Fille ».
La Bibliothèque du Bruchium avait été brûlée à la suite d'un combat entre Jules César et les Alexandrins. Pour réparer ce désastre, Antoine avait fait cadeau de 200.000 volumes à la Bibliothèque du Sérapéum. Ces volumes provenaient d'Eumène, roi de Pergame.
Par la suite, les empereurs, à l'exemple de Ptolémée, firent acheter des livres dans tous les pays pour enrichir la Bibliothèque, qui devint plus riche que celle qui avait été brûlée. Mais elle devait avoir le même sort que son aînée, elle devait être détruite par le vandalisme des Jésuistes. Elle fut anéantie par les évêques et les moines du patriarche Théophile, surnommé « le Diable » par saint Jean Chrysostôme. Les statues, les tableaux, les œuvres d'art, furent également détruits.
Et, comme ceux qui ont des torts les justifient toujours en les attribuant aux autres, les Jésuistes firent retomber sur les Vandales, ensuite sur les Arabes, cette œuvre de destruction, qu'ils avaient eux-mêmes accomplie dans leur stupide fureur contre tout ce qui rappelait le régime qu'ils étaient venus renverser. Mais tout était déjà détruit quand parurent Alaric et Genséric, moins barbares que les Jésuistes, puisqu'ils respectèrent le Panthéon à Rome et le temple de Vénus Céleste à Carthage. Les Goths avaient épargné la Minerve de Phidias au Parthénon, les Jésuistes la brisèrent et s'en partagèrent l'or et l'ivoire (1).
Ainsi finissait le culte de la Déesse qui avait inspiré tant de grands artistes, stimulé le génie, élevé l'âme des nations grecques et latines, et qui représentait toujours dans la conscience des hommes la Sagesse Divine !
Les Jésuistes, pour se justifier, ont enseigné depuis que c'était le calife Omar qui avait donné l'ordre à son général Amrou de brûler la Bibliothèque d'Alexandrie. Mais, comme elle n'existait plus depuis deux siècles, il eût été difficile qu'il la brûlât. C'est ainsi que leur ignorance les fait prendre en flagrant délit de mensonge !...
Les Arabes, loin d'avoir détruit les œuvres de l'esprit, ont, au contraire, provoqué une renaissance des sciences et des lettres.
(1) La ville de Byblos avait été consacrée au culte de Tammouz, à l'embouchure du fleuve Adonis, tandis qu'à sa source, au fond du Liban, on célébrait le culte de Vénus Astarthé, avec les anciens rites sacrés.
Constantin ordonna de détruire le temple pour effacer cette souillure de la terre, dit Mourant Brock, et il ajoute : là, le Tau servait aux rites obscènes. (Voir Handbook for Syria, Byblos)

CONSIDÉRATION DES MODERNES SUR JÉSUS
La légende de Jésus a toujours soulevé de vives discussions. Dans les premiers siècles du Christianisme, cette légende fut le fond de toutes les hérésies, ce qui prouve que les contemporains ne l'admettaient pas, puisqu'ils la discutaient.
Les auteurs du temps, Tacite, Pline, Suétone, disent à peu près ceci : « Il y a parmi les Juifs des sectaires qu'on appelle Chrétiens, du nom d'un certain Christ, leur maître. » Mais ces auteurs ne nomment pas Jésus. Sous Claude (de 41 à 59) se répandit le bruit qu'il s'était élevé en Galilée une secte qui admettait l'incirconcis comme le circoncis, qui laissait l'usage des viandes et admettait les pratiques des Hellènes.
Mais, pas plus chez les historiens romains que chez les historiens juifs, nous ne trouvons le récit de la vie et de la condamnation de Jésus.
Les deux historiens qui ont parlé de Jésus sont Eusèbe et Macrobe.
Eusèbe, évêque de Césarée, qui vivait au IVème siècle, dit dans son 8e Livre, chap. 2, qu'il a narré tout ce qui pouvait glorifier l'Eglise et supprimé tout ce qui pouvait la déshonorer.
Macrobe, qui vivait au Vème siècle, n'a fait que répéter la légende qu'il avait entendu raconter.
Les Gnostiques ne croyaient pas à l'existence de Jésus. Ils pratiquaient l'hérésie appelée Docétisme, qui consistait à dire que Jésus n'avait que l'apparence de la chair humaine et, par conséquent, n'était pas né d'une vierge et n'avait pas souffert sur le Calvaire. Comment les Gnostiques contemporains de Jésus, ou très rapprochés de son époque, auraient-ils eu des doutes sur son existence s'il avait réellement vécu ?
Actuellement, l'existence de Jésus est envisagée de différentes manières :
1° Les uns croient naïvement la légende chrétienne avec ses absurdités et ses miracles. Ils ne demandent pas de preuves, on ne pourrait pas leur en donner, ils veulent que cela ait été ainsi parce que c'est cela qu'ils ont appris dans leur enfance, et ils aiment le doux Jésus qu'on leur a inventé.
2° D'autres admettent que Jésus a existé, mais n'admettent pas la légende chrétienne et cherchent à reconstituer le personnage par le raisonnement ; ils le jugent par les écrits des auteurs les plus anciens ou par les Evangiles ; et ceux-là arrivent à présenter Jésus comme un fou, un criminel, justement châtié de tous ses crimes. C'était l'opinion des libres-penseurs du moyen âge.
D'autres, comme Renan, nourris de l'admiration conventionnelle suggérée au séminaire, se contentent de modifier la légende, nous donnant, à la place d'un Dieu, un sage d'une haute valeur morale.
Cette appréciation est presque aussi absurde que la légende, étant donnée l'œuvre jésuiste qui est un démenti formel de la sagesse prêtée à l'homme et à son œuvre. Renan a été admiré parce qu'il a fait un beau roman. La Vie de Jésus est un chef-d'œuvre de littérature et d'imagination. Il y a gagné une grande renommée, tandis que les savants qui restent sur le terrain de la réalité ne sont pas lus.
3° Les troisièmes nient l'existence de Jésus et démontrent qu'aucun document historique du temps ne mentionne ce personnage, sage ou fou. Personne à Rome n'a eu connaissance des faits qui se seraient passés en Judée, province romaine ; le prétendu massacre des innocents, ordonné soi-disant par Hérode, n'a jamais eu lieu ; la condamnation à mort de Jésus et de Jean-Baptiste n'a laissé aucune trace dans les archives ou dans les livres du temps ; le tremblement de terre et les phénomènes cosmiques, d'ordre miraculeux, du reste, qui accompagnèrent sa mort, n'ont été constatés par aucun savant de l'époque (1).
Il en est parmi eux qui soutiennent encore l'existence de Jésus, qui avouent qu'on ne connaît, de sa vie, que cinq faits :
1° son séjour au désert comme disciple de Hanon de Béthulie ;
2° son apparition aux Galiléens ;
3° son entrée triomphale à Jérusalem ;
4° son jugement par le Sanhédrin ;
5° son exécution par le gouverneur romain.
Or les Actes des Apôtres et les Épîtres nous démontrent que Paul a ignoré ces faits, et, cependant, quels arguments pour lui s'il les avait connus !
Ces Actes et ces Épîtres nous prouvent que ces faits étaient ignorés en Judée quand Paul fut arrêté et jugé.
L'opinion aujourd'hui est entraînée vers ce courant nouveau. Le Dr Wahn, qui déprécie ce Jésus « qui n'a rien inventé », dit que ce n'est peut-être qu'un mythe établi d'après le Krishna des Indes.
Un autre genre de preuve de la non-existence de Jésus, c'est le soin apporté par les Catholiques à interpoler, dans les éditions les plus modernes des auteurs anciens, des paragraphes mentionnant vaguement Jésus, ou bien, ce qui est plus maladroit encore, à faire annoncer de temps en temps dans les journaux qu'on vient de découvrir soit des documents, soit des portraits qui affirment Jésus.
La ruse est trop grossière, elle vient trop tard. Si les documents qu'on prétend trouver aujourd'hui, parce que les savants s'en occupent, étaient authentiques, l'Eglise n'aurait pas attendu 1.800 ou 1.900 ans pour les connaître et toujours elle les aurait mentionnés ; elle en aurait même fait de précieuses reliques.
Remarquons encore que, si Jésus avait existé dans les conditions où sa légende l'affirme, il aurait parlé l'araméen et même l'hébreu ; les belles paroles qu'on lui attribue auraient été dites dans les langues qu'on parlait en Judée ; cependant, nous ne les connaissons que par des écrits grecs, aucune tradition hébraïque ne les a recueillies, aucun écrit le mentionnant de son temps ou postérieur à son temps n'existe dans la langue de la Judée.
M. Ernest Havet, dans ses Origines du Christianisme (t. III, p. 493), dit : « Une grande surprise est réservée à la critique, c'est celle de reconnaître à quel point la personne de Jésus reste ignorée, combien sa trace dans l'histoire est, pour ainsi dire, imperceptible, et combien il paraît avoir été pour peu de chose dans la révolution qu'on désigne par ce nom du Christ, devenue inséparable de son nom. »
En effet, nous ne trouvons dans l'histoire aucune trace du passage sur la terre d'un Juif appelé Jésus. Ce nom représente une fiction dont l'imagination des ignorants a fait un être réel, et ce sont ces ignorants, qui étaient des fanatiques, qui se sont occupés de lui créer une existence terrestre.
(1) Quand on parle des ténèbres qui se répandirent sur toute la terre à la mort de Christos, on entend par là l'ignorance qui allait régner, non un cataclysme physique. On en fit une éclipse.

LE JOHANNISME AUX INDES
« La lumière du premier Évangile fut portée aux Indes par saint Thomas, suivant la tradition des Hindous, confirmée par celle des Syriens dont ils ont adopté les rites johannites et la liturgie.
« Cosmas Indicopleustes, qui écrivait au commencement du VIIème siècle, fait mention de plusieurs églises de ce pays, d'où la foi fut alors portée à la Chine, comme le montre le monument de Singanfou, dont M. de Guignes a prouvé l'authenticité.
« Enfin, nous sommes assurés par un monument authentique que dans le VIIIème siècle les Chrétiens jouissaient de grands privilèges à la côte de Malabar où ils subsistent encore. » ( Védam, Observations préliminaires, p. 93.).

LE SAINT SUAIRE DE JÉSUS
Le succès obtenu par la légende de Véronique et de l'image de Jésus, qui, depuis plus d'un siècle, était devenue populaire et avait passé par la crédulité publique pour Une vérité acquise, eut un résultat qui était à prévoir ; il suscita des imitateurs, et, comme toujours, les derniers venus allèrent plus loin que leurs devanciers. Ce ne fut plus seulement la face de Jésus qu'on prétendit avoir dans une empreinte ; on imagina de représenter son corps tout entier, imprimé sur un linceul, et on créa le Saint Suaire du Sauveur.
On se préoccupait peu à ce moment de la vérité historique ; on n'avait même pas l'idée de consulter les Évangiles, et l'idée qu'on pouvait se mettre en opposition avec les textes ne pénétrait même pas dans les esprits.
En effet, l'Évangile de saint Jean dit ceci :
« Simon Pierre entra dans le sépulcre et vit les linceuls posés à terre et le suaire qui avait couvert la tête, séparé des linceuls et plié à part. »
Si le suaire couvrait seulement la tête, comment porterait-il l'image du corps ?
Mais les faussaires ne pensent pas à tout. Voici l'histoire de cette relique :
Le 20 juin 1353, Geoffroy 1er de Charny, chevalier, seigneur de Savoisy et de Lirey, fonde et dote la collégiale de Lirey (Aube) et offre à l'église des présents où, parmi des vases précieux et autres reliques, se trouve une image ou représentation du suaire de Notre-Seigneur Jésus-Christ, dont l'ostension attire bientôt de tous côtés les pèlerins et les aumônes.
Quelque temps après, nous voyons l'évêque de Troyes s'émouvoir de l'état de choses, qui commence à donner lieu à la légende. Et ici nous assistons à une lutte fort curieuse des chanoines de Lirey, en guerre contre leurs évêques, qui successivement interdisent l'exhibition pompeuse destinée à tromper la population sur la nature de l'image. Les théologiens réunis en conseil reconnaissent une peinture habile et font en outre cette observation : si le Sauveur avait réellement imprimé sa face et son corps sur le linge qui l'enveloppait, comment les évangélistes auraient-ils omis de mentionner un tel événement ?
Cependant, le chapitre de Lirey ne se tient pas pour battu ; un messager envoyé à la cour d'Avignon rapporte l'autorisation donnée par Clément VII d'exposer publiquement le Saint Suaire malgré la défense de l'évêque.
Pierre d'Arcis écrit alors au roi de France. Et bientôt le bailli de Troyes, au nom du Parlement de Paris, commande au doyen et à ses chanoines de livrer le drap. Ils refusent et font appel au pape. L'évêque en fait autant dans un mémoire très curieux où il établit la vérité. Tout ceci se passe en l'an 1389.
Le pape répond par quatre bulles, dont la première est décisive, puisqu'elle ordonne à quiconque exposera le Suaire de proclamer à haute et intelligible voix que cette image ou représentation n'est pas le vrai suaire de N.-S. J.-C, mais seulement une peinture, un tableau qui le figure ou représente. Si la conviction de Clément VII n'était pas faite avant, il est certain que le mémoire de l'évêque suffit à l'éclairer. Ce mémoire atteste un fait très important : l'aveu du peintre lui-même. Dans la minute originale qui existe dans les manuscrits de la Bibliothèque Nationale (collection de Champagne), se trouve cette phrase :
« Et enfin, à la suite d'un examen attentif et d'une enquête diligente, il a découvert la fraude et reconnu par quel procédé l'étoffe avait été peinte. L'aveu même de l'artiste, auteur de la peinture, confirma qu'elle avait été exécutée de main d'homme et non par l'effet d'un miracle. (1) »
Ce qui est certain, du reste, c'est que les chanoines de Lirey n'ont jamais, en aucune occasion, invoqué l'authenticité du suaire et de l'image. Ce qu'ils veulent, c'est le droit de la représentation solennelle ; et, pour le reste, ils se contentent de laisser croire le peuple.
Après la bulle de Clément VII, l'éclat de la relique pâlit et s'éteint. Vingt-huit années se passent. Des bandes de pillards désolent alors le pays. Effrayés, les chanoines confient au comte Humbert, petit-fils du donateur, le trésor de leur église. Ils le réclament vingt-cinq ans plus tard par la voie légale, parce que, le comte étant mort dans l'intervalle, sa veuve Marguerite allègue que le reçu de son mari ne la concerne pas et refuse de le leur rendre. Elle est assignée devant le Parlement de Dôle. Pour éviter les frais, on transige : Marguerite rend les objets, sauf le suaire qu'on lui permet de garder trois ans en échange d'une rente annuelle de douze francs. Après trois ans, nouveau refus. Nouveau procès. Ils se multiplièrent du reste dans la vie de cette singulière et audacieuse Marguerite de Charny. Les procès se suivent. Chaque fois, C'est une demande nouvelle de sursis avec des promesses qu'elle ne tient pas. Avant l'expiration du dernier délai, nous la voyons promener sa relique en Hainaut et en tirer de belles sommes d'argent. C'est même à ce moment que deux professeurs en théologie envoyés par Jean de Heinsberg, évêque de Liège, ému du bruit causé par le linceul, obligent Marguerite de Charny à leur montrer les trois bulles de Clément VII qu'elle porte sur elle avec un induit de Pierre de Luna, témoignant que le suaire n'est qu'une représentation. Le terme d'octobre 1449 est écoulé. Marguerite ne revient pas, naturellement. L'affaire vient devant le prévôt de Troyes, et, cette fois, la dame de Lirey trouve le moyen d'obtenir un dernier sursis en faisant verser une somme annuelle aux chanoines par son frère. Puis nous la retrouvons en Savoie, où elle cède au duc Louis 1er et à sa femme Anne de Lusignan le suaire des chanoines. Disons tout de suite que, menacée et condamnée enfin par l'official de Besançon, Marguerite de Charny meurt sans se soumettre.
Cent trente années s'écoulent. En 1578, saint Charles Borromée quitte Milan pour se rendre à pied jusqu'à Chambéry, devant l'image qui se trouve dans la Sainte Chapelle. Mais le duc et la duchesse (Emmanuel-Philibert et Marguerite de France), pour lui éviter la moitié du voyage, obtiennent de l'évêque de Maurienne, doyen de la Chapelle, d'envoyer à Turin, pour peu de temps, la relique ; ce qui a lieu. C'est en vain que le doyen la réclama ensuite ; jamais le duc ne voulut la faire reprendre, assurant qu'elle « ne serait pas en sûreté à Chambéry ». Et c'est ainsi que le suaire demeura à Turin jusqu'à nos jours.
Le suaire apparaît pour la première fois en 1353. Et ceci déjà est significatif. Personne, jusqu'à présent, n'a pu en trouver trace avant cette date, pour le motif plausible qu'il fut fabriqué à cette époque. Il est difficile, en effet, à notre raison de comprendre comment, au moyen âge, un objet sacré d'une telle valeur pouvait avoir passé inaperçu, quand, au IVème siècle, nous trouvons un si grand nombre de « vraies » croix, et que sainte Hélène n'élève pas moins de trois chapelles pour célébrer celle qu'on découvrit pour elle à son arrivée à Jérusalem.
Grâce aux intéressants travaux de deux savants chanoines, l'abbé Lanore et l'abbé Ulysse Chevalier, ce dernier, correspondant de l'Institut, ne consacra pas moins de trois ouvrages, lumineusement précis et documentés, à l'étude des dossiers du suaire de Turin, nous pouvons suivre les aventures de la relique depuis son apparition jusqu'à ce jour, et cela, chose rare, sans arrêt ni lacune.
(1) Et tandem, solerti diligentia procedente et informatione super hoc facta, finaliter reperit fraudem et quomodo pannus ille artificialiter depictus fuerat, et probatum fuit etiam per artificem qui illum depinxerat, ipsum humano ope factum, non miraculose confectum vel concessum.

LES ORDRES RELIGIEUX
Les inférieurs copient toujours ceux qu'ils croient supérieurs à eux en intelligence. C'est ainsi que nous allons voir les Catholiques créer des Ordres dits religieux, qui seront la copie de celui des Chevaliers du Temple. Ils ont cru que la pauvreté est la source de grandes richesses, et ils vont reprendre les trois vœux des Templiers : vœux de pauvreté, de chasteté, et d'obéissance.
Mais ce qui différera éminemment entre eux, c'est le but de l'action à laquelle ils vont se consacrer.
Les Chevaliers du Temple travaillaient pour le triomphe de la Vérité qu'ils avaient rapportée d'Orient ; les Ordres religieux vont travailler à la propagande de la doctrine de mensonge de l'Église.

LES FRANCISCAINS
François d'Assise fonda en Europe une société sans propriété ni capital, qui devait arriver à la puissance par la pauvreté. C'est du moins l'étiquette de l'Ordre qu'il fonda. En réalité, ces mendiants franciscains ne manquaient de rien.
Né en 1182 en Ombrie, il fonda l'Ordre dit des Frères mineurs, ou Franciscains.
Il mourut en 1226.
Dans la société féodale, l'autorité procédait de la propriété. François d'Assise lui donna une autre base : elle devait être basée sur les services rendus. La société nouvelle aurait pour fondement la dignité humaine. C'était la copie de la Chevalerie. Dans une société ainsi constituée, la Femme devait être remise à sa place, et cependant c'est le contraire qui se produisit.
François d'Assise, grand diplomate, se fit tout-puissant en créant la règle des Mendiants. Cette pauvreté collective voulait imiter le communisme des premiers Chrétiens de saint Jean.
Quant au nomadisme individuel d'une armée d'ermites voyageurs, c'était l'imitation de l'Ordre des anciens Esséniens, qui avaient des hospitaliers pour recevoir les voyageurs.
On idéalisait la souffrance du peuple, tout en lui prenant son obole. On prétendait hypocritement réaliser toutes les réformes sociales demandées par les esprits éclairés : l'égalité demandée par les Pastoureaux ; la fraternité prônée par les Vaudois. Les Catholiques étaient des imitateurs qui venaient après les autres s'emparer de leurs idées et les dénaturer à leur profit.
François d'Assise vint mettre au service de l'Église les idées de fraternité qui sont dans les sociétés secrètes, d'égalité et de travail. Il créa des Fraternités de Tertiaires laïques pour imiter le triangle des initiés.
Ces Tertiaires franciscains devinrent légion. Tous les Catholiques militants s'y enrôlèrent, les classes s'y mêlèrent, unies dans une idée commune : le triomphe du masculinisme de l'Église.
Tous déclarèrent qu'ils n'avaient qu'un Père : Dieu, et une Mère : l'Église.
Et la vraie femme, où la mettaient-ils ? Nous allons le voir bientôt.
Leur Ordre était international comme les Fraternités féministes que l'on imitait. Dans cet Ordre, on devait vivre secrètement parmi les peuples et se prêter un appui matériel et moral, le cas échéant. On devait aussi combattre les ennemis de Jésus, du prêtre, de l'Église. Cet Ordre visait évidemment, comme ennemis à combattre, les Albigeois, les Templiers, les Ordres secrets.
Comme dans la Franc-Maçonnerie, ils avaient des signes pour se reconnaître et portaient des insignes. Ils prenaient aussi des mots d'ordre comme leurs adversaires, tel celui-ci : « Aimer pour croire et croire pour agir ».
Nous avons dit que nous allions bientôt parler du rôle qu'ils donnaient aux femmes. Le voici : ils les associaient à leurs intrigues et se servaient de leur puissance qu'ils dirigeaient pour arriver à leurs fins.

LES DOMINICAINS
Les Dominicains ont été fondés par un Espagnol, saint Dominique, né à Calahorra en 1170.
Quoiqu'il fût plus âgé que saint François, son Ordre fut fondé après celui des Franciscains.
Il fut témoin en France des progrès réalisés par les Albigeois, et s'unit aux légats envoyés par le pape Innocent III pour les combattre.
Il ouvrit son premier établissement à Toulouse en 1216.
Il fonda en Italie un couvent dédié à sainte Sabine et lui consacra l'oranger, pendant qu'à la Portioncule, près d'Assise, fleurissaient toujours les roses de saint François. Ils mettent les fleurs de leur côté.
C'est l'Ordre dominicain qui entretint la dévotion du Rosaire, qu'ils consacrèrent à Marie depuis 1270.
La légende rapporte que la Vierge apparut à Dominique et lui remit le premier chapelet dit Rosaire, parce que les gros grains, au nombre de quinze, sont appelés « roses ».
Mais, ils furent dépassés en chevalerie catholique par les Franciscains, qui maintinrent contre eux la conception immaculée de Marie.
Dominique fonda aussi un Ordre de femmes à Toulouse. Les couvents de Dominicaines furent d'abord des asiles de jeunes filles nobles, mais sainte Catherine de Sienne réforma la discipline au XIVème siècle.
Les religieuses dominicaines furent peu nombreuses en France.
Saint François d'Assise et saint Dominique ordonnèrent à leurs disciples de se répandre au milieu des peuples pour prêcher, les uns sous le nom de Frères Mineurs, les autres sous le nom de Frères prêcheurs.
On remarquera ce nom de Frères, substitué à celui de Pères par ces nouveaux religieux.
C'est que le nom de Frère, usité dans les sociétés secrètes, avait pris un grand empire dans le monde. Tout en les combattant, on les copiait.
Daanson, dans son livre sur Lucifer, nous dit (p. 146) (1) :
« Dominique créa en l'année 1216 l'Ordre des Dominicains, chez lesquels le rosaire se porte à la ceinture ; il leur ordonna de le propager parmi le peuple comme un moyen indiqué par la Vierge elle-même pour triompher de l'hérésie des Albigeois.
« Et l'année suivante, 1217, le cardinal légat d'Honorius III, Bertrand de Saint-Jean, dépêcha Montfort sur Toulouse, avec ordre d'y massacrer sans pitié hommes, femmes, vieillards, enfants. Et c'est pourquoi Louis Cœur-de-Lion, accompagné du cardinal légat Bertrand, essaya une nouvelle tentative sur Toulouse avec une armée de « pèlerins », et, n'ayant pu s'en rendre maître, passa cinq mille habitants de Marmande au fil de l'épée.
« Et c'est pourquoi ces vaillants soldats du Christ pillèrent ce qu'ils purent, massacrant les hommes et violant les femmes sur leur passage.
« Et c'est pourquoi le pape Grégoire IX chargea, en l'année 1225, les Dominicains du soin de réprimer les hérésies par les tortures.
« Et c'est pourquoi le pape Innocent III publia la bulle Ad extir pandum, autorisant quiconque découvrait un hérétique à s'emparer de sa personne et de ses biens, et exigeant du pouvoir séculier qu'il fit, sur simple demande, infliger la torture à ceux qui refuseraient de dénoncer les hérétiques de leur connaissance. »
(1) Pris dans l'Histoire de l'Inquisition au Moyen Age, de Henry-Charles Lea, traduction de Salomon Reinach.

L'INQUISITION
Nous allons voir apparaître les monstruosités juridiques de l'Inquisition, qui met les honnêtes gens à la merci des coquins, qui, après avoir supprimé l'accusation « légitime », inscriptio et in crimen subscriptio, proscrivait la défense et excommuniait la réponse, comme attentatoire à l'infaillibilité de l'Église, donc hérétique. Se défendre, c'est discuter l'autorité qui vous attaque. L'Église se fait juge sans appel. Cependant, elle a horreur du sang, dit-elle, et c'est pour cela qu'elle confie au bras séculier l'exécution des hérétiques qu'elle condamne. C'est elle qui signe la sentence, mais ce n'est pas elle qui l'exécute ; et, si le pouvoir séculier refuse de se faire bourreau à sa place, c'est lui qu'elle accuse d'hérésie. Un soupçon, une dénonciation anonyme, suffisent pour vous jeter dans la torture. C'est la délation occulte érigée en principe, le huis-clos des séances, la sécurité assurée aux témoignages à charge, le refus d'entendre les témoins à décharge ; c'est l'infamie érigée en justice, faisant au Chrétien un devoir de la trahison, un mérite de la délation, autorisant la déposition des parents contre leurs enfants, des enfants contre leurs parents, du mari contre sa femme (quant à celle de la femme contre le mari, elle devait être plus difficilement admise).
Enfin, la torture va jusqu'à introduire dans cette étrange procédure le faux témoignage de l'accusé contre lui-même. Du reste, tout accusé était d'avance perdu.
Quelle lugubre époque ! Que de supplices, d'angoisses, de désolations ! Que de mal jeté dans le monde par l'aveugle fanatisme, par l'instinct de domination, par l'affolement des criminels qui rejettent la responsabilité de leurs actes et torturent ceux qui en furent témoins !
L'Église a horreur du sang. Elle professe l'hématophobie, mais elle fait tuer par les autres.
Et l'Église se justifie en disant que l'Inquisition n'a été que le fruit des passions de quelques hommes et qu'elle ne peut en porter le poids. Étrange justification ! Car ces hommes n'étaient que la résultante de son système, le fruit de ses doctrines.
Le premier germe de l'institution du Saint-Office se trouve dans un décret du Concile de Vérone, en 1184, qui enjoint aux évêques de Lombardie de rechercher les hérétiques et de livrer au bras séculier, pour être punis, ceux qui persisteraient dans leurs erreurs. « Il n'est pas douteux, dit Lacordaire, que les premiers linéaments de l'Inquisition ne se trouvent là tout entiers, quoique informes : recherche des hérétiques par commissaires, application de peines spirituelles graduées, abandon au bras séculier en cas d'impénitence manifeste, concours des laïques et des évêques. Il n'y manque qu'une forme définitive, c'est-à-dire l'élection d'un tribunal particulier qui exerce ce nouveau mode de justice ; mais on n'en vint là que beaucoup plus tard. »
En effet, les premiers inquisiteurs dont on ait conservé le nom ne parurent qu'en 1198. C'étaient deux moines de l'Ordre de Citeaux, frère Guy et frère Rainier, que le pape Innocent III avait envoyés dans nos provinces méridionales pour y rechercher et poursuivre les Albigeois, avec ordre aux évêques et aux seigneurs temporels de leur prêter toute assistance possible.
L'idée de l'Inquisition fut donc conçue par le pape Innocent III. Elle n'est devenue réelle que sous l'un de ses successeurs, Grégoire IX (qui fut pape de 1227 à 1241).
Proposée d'abord comme institution temporaire, l'Inquisition fut transformée en établissement régulier et permanent par le Concile de Latran en 1215 et par celui de Toulouse en 1229.
C'est à Toulouse que fut établi le premier tribunal inquisitorial ; c'est l'évêque de cette ville qui le présida ; et c'est grâce à Louis IX que cette institution se créa.
En 1233, Grégoire IX confia là direction exclusive de l'Inquisition aux Dominicains pour la soustraire à la juridiction des évêques. En même temps, il donna aux inquisiteurs une autorité sans limite et sans contrôle réel de la part du pouvoir temporel. La même année, l'institution reçut une sanction solennelle du roi Louis IX dans les conférences de Melun. A la fin du XIIIème siècle, l'Inquisition était établie non seulement en Provence, en Languedoc et dans les pays voisins, mais encore dans la plupart des provinces du Nord de la France, ainsi qu'en Lombardie (en 1224), en Catalogne (en 1232), en Aragon (en 1233), dans la Romagne (en 1252), en Toscane (en 1258), à Venise (en 1289), etc. Partout elle fut placée entre les mains des Dominicains, sauf toutefois en Italie, où ces religieux partagèrent les fonctions d'inquisiteurs avec les moines de saint François.
Nous venons de voir que, dans le Midi de la France, l'Inquisition avait eu pour prétexte l'hérésie des Albigeois ; cette hérésie ayant disparu vers la fin du XIIIème siècle, les fonctions de l'Inquisition se trouvèrent sans emploi. Du reste, l'influence croissante des Justices royales diminuait la tâche des inquisiteurs en France. Mais, en Espagne, l'Inquisition fut favorisée par les circonstances politiques. La Catalogne et l'Aragon l'avaient acceptée dès 1233 ; mais les royaumes de Castille et de Léon la repoussèrent et ne voulurent reconnaître qu'aux évêques le droit de rechercher l'hérésie.
Dès 1274, l'Inquisition avait envoyé une femme au bûcher, à Carcassonne, condamnée pour sortilège. En 1275, plusieurs sorciers et sorcières furent accusés d'avoir assisté au sabbat et brûlés. Parmi eux se trouvait une dame de Labarèthe, âgée de 56 ans, qui, aux termes de sa condamnation, aurait « paillardé avec le Diable et eu de lui un monstre à tête de loup ».
Ce sont les premiers jugements rendus par les tribunaux inquisitoriaux. On voit tout de suite par là ce qu'ils valent ; accuser de maternité une femme de 56 ans et lui faire produire un monstre que la nature humaine ne peut engendrer, c'est mettre le surnaturel même dans l'accusation. Tel était le système, qui, en réalité, n'était qu'une horrible vengeance sexuelle de l'homme accusant la femme de ses débauches et les compliquant de circonstances folles.
C'est la première fois que mention était faite du sabbat d'une manière juridique. Jusque-là, on en parlait, mais on n'y croyait pas.

L'INQUISITION EN ITALIE
L'Inquisition devint, au XVIème siècle, une institution exclusivement politique à Venise. En 1554, trois membres du pouvoir, choisis les deux premiers dans le conseil des Dix et le troisième parmi les conseillers du doge, furent chargés, sous le nom d'inquisiteurs d'État, de veiller au maintien de la constitution. Ces magistrats avaient droit de vie et de mort sur tous les citoyens sans exception, et c'est à la terreur qu'ils inspiraient et à la cruauté inexorable avec laquelle ils traitaient la moindre attaque contre le gouvernement que l'oligarchie vénitienne dut de pouvoir conserver sa prédominance. Ils ne disparurent qu'en 1797, lorsque l'armée française détruisit la prétendue République de Venise.
A Rome, l'Inquisition était tombée en désuétude, quand, au XVIème siècle, le pape Paul III la releva pour opposer une digue à la propagation des doctrines de Luther. Ce même pape institua une congrégation dite du Dogme, ou du Saint-Office, chargée de nommer et de diriger les inquisiteurs et de juger souverainement toutes les affaires relatives à l'hérésie ou considérées comme telles. Cette congrégation subsiste encore aujourd'hui et se compose du pape, qui en est le chef et le président, de 12 cardinaux qui remplissent les fonctions de juges, d'un certain nombre de théologiens appelés consulteurs, et d'avocats qui sont chargés d'examiner les livres ainsi que les actes et les paroles des personnes suspectes (Encyclopédie).

L'INQUISITION EN FRANCE
Le caractère français était si hostile à l'Inquisition qu'au XVIème siècle les Guises firent de vains efforts pour la remettre en vigueur. L'édit de Romorantin, œuvre de l'illustre chancelier Michel de l'Hôpital (1560), empêcha le rétablissement de l'Inquisition, en attribuant exclusivement aux évêques le soin de constater l'hérésie et aux Parlements celui de la punir. Néanmoins, il y eut toujours à Toulouse, jusqu'à la Révolution de 1789, un frère de l'Ordre de Saint-Dominique qualifié du titre d'inquisiteur ; mais ce titre n'impliquait en réalité aucune fonction.

L'INQUISITION EN ESPAGNE
C'est pendant ce XVème siècle que l'influence de l'Église amena l'expulsion des Maures, qui avaient jeté sur l'Espagne un si vif éclat.
Une fois débarrassé de ces ennemis gênants, le gouvernement entreprit de rendre l'autorité royale absolue, et l'Inquisition lui parut un moyen éminemment propre à détruire toutes les résistances. Le Saint-Office continua donc de connaître des matières religieuses, mais il servit aussi à abattre, sous prétexte de religion, l'aristocratie féodale, et les défenseurs des libertés municipales. C'est à cette circonstance, ainsi qu'au caractère propre d'une nation qui pousse tout à l'extrême, que l'Inquisition espagnole a dû sa détestable renommée.
La Nouvelle Inquisition, comme les historiens nationaux appellent le Saint-Office ainsi modifié, fut d'abord établie à Séville, en 1477, par le cardinal Mendoza, archevêque de cette ville. Elle fut ensuite peu à peu étendue à toutes les provinces de la monarchie, malgré l'opposition, plus d'une fois sanglante, des comtes, de la noblesse et de la population. Elle s'intitula la General Inquisition Suprema, et par abréviation « la Suprema ». A sa tête se trouvait un inquisiteur général nommé par le roi. Le grand inquisiteur appartenait toujours à l'ordre des Dominicains. Le premier grand inquisiteur général, Thomas de Torquemada, fit un tel abus de ses immenses pouvoirs qu'il est impossible de calculer exactement le nombre de ses victimes. Quelques historiens affirment qu'il fit brûler ou condamner à des peines infamantes plus de deux cent mille personnes. On évalue à cent quatorze mille quatre cents le nombre des familles plongées dans l'opprobre et la désolation pendant les 18 années que dura le ministère inquisitorial de Torquemada.
Son successeur, le cardinal Diego Deza, dont le règne fut plus court, n'eut le temps d'en faire brûler que 2.592. Il en condamna 829 à être brûlées en effigie et 32.952 à l'emprisonnement et aux galères avec confiscation de leurs biens.
Au XVIème siècle, c'est l'inquisiteur Ximénès Cisneros qui inaugure le règne de Charles-Quint. Durant les onze années qu'il exerça son ministère, il fit brûler 3.564 individus et 1.232 en effigie, en condamna à la prison ou aux galères 48,059, toujours avec confiscation des biens.
Vint ensuite Adrien de Florencio qui établit un second tribunal du Saint-Office en Amérique et étendit sa juridiction sur les Indes et sur l'Océan. Cet inquisiteur fit brûler 24.025 individus. Tant de zèle lui valut l'honneur d'être élu pape après la mort de Léon X. En quittant l'Espagne, il confia le ministère inquisitorial à Alphonse Manrique, qui fut plus doux que ses prédécesseurs. Mais il arriva au pouvoir dans un moment où l'Inquisition se crut obligée de redoubler de vigilance. Luther, Calvin, Zwingle, Melanchton, Muncer remplissaient l'Europe de leurs doctrines, et l'Inquisition générale, voulant à toute force empêcher la voix de la Réforme de pénétrer en Espagne, ou du moins d'y faire de nouveaux progrès, ajouta quelques articles aux anciens règlements de l'Inquisition qui ordonnaient à tout Chrétien catholique de déclarer, sous peine de péché mortel et d'excommunication majeure, s'il connaissait quelqu'un qui ait dit, soutenu ou pensé que la secte de Luther est dans la bonne voie ; s'il approuvait quelques-unes de ses propositions condamnées, comme par exemple « qu'il suffit de se confesser devant Dieu, sans l'intervention d'un prêtre, parce que ni le pape ni le prêtre n'ont le pouvoir de remettre les péchés » ; « que le corps de Jésus-Christ ne peut être présent dans l'hostie consacrée » ; « qu'il n'y a point de purgatoire » ; « qu'il est inutile de prier pour les morts » ; « que le pape n'a pas le pouvoir réel d'accorder des indulgences ni des pardons » ; « que les prêtres peuvent licitement se marier » ; « que les religieux, les religieuses et les monastères sont inutiles » ; « qu'il ne doit y avoir d'autre fête que le dimanche » ; « que ce n'est pas péché que de manger de la viande le vendredi et les autres jours d'abstinence », etc.
L'histoire de l'Espagne nous offre plusieurs victimes illustres tombées sous les coups de l'Inquisition à cette époque, sur le simple soupçon d'avoir embrassé la doctrine de Luther. L'un d'eux fut le vénérable Jean d'Avila, surnommé l'apôtre de l'Andalousie à cause de sa vie exemplaire et de ses grandes œuvres de charité. Comme il prêchait l'Évangile avec simplicité et ne faisait entrer dans ses discours aucune de ces questions qui agitaient alors si honteusement les théologiens des écoles, les moines envieux se réunirent pour tramer sa perte et le livrèrent à l'Inquisition. Cette année fut fatale aussi à deux hommes célèbres dans l'histoire de l'Espagne : Jean de Vergara et Bernardin de Tabar, son frère, qui avaient embrassé le luthérianisme. Tous leurs malheurs leur vinrent de ce que Jean de Vergara, qui avait une connaissance profonde des langues hébraïque et grecque, fit remarquer des fautes de traduction dans la Vulgate et, par là, s'attira la haine des moines ignorants et envieux.
Alphonse Manrique exerça son ministère pendant 15 ans, et, comparativement à ses prédécesseurs, on peut le considérer comme tolérant, puisque, malgré l'invasion de la doctrine de Luther, il ne fit brûler vives que 20.250 personnes, 11.025 en effigie, et n'en condamna aux galères à perpétuité que 11.252.
Jusque-là, les inquisiteurs d'Espagne avaient eu la suprématie ; mais le successeur de Manrique, Juan Pardo de Tabera, vit la congrégation du Saint-Office s'établir à Rome. Cette concurrence aurait pu leur porter ombrage s'ils n'avaient pas été forts, comme ils l'étaient, de l'appui de Charles-Quint. Aussi les inquisiteurs espagnols refusaient sans scrupules d'exécuter les brefs apostoliques, ce qui fut cause des démêlés continuels qui divisaient la cour de Rome et celle de Madrid. On voit combien la Religion était étrangère à ces luttes politiques dont les peuples étaient toujours victimes.
Le nombre des personnes condamnées à cette époque par les divers inquisiteurs, tant en Espagne que dans l'île de Sicile, qui était sous sa juridiction, en Amérique et aux Indes, fut si considérable que Charles-Quint, pour empêcher ce nombre effrayant d'augmenter encore, fut obligé de défendre la mise en jugement des Indiens, qui y auraient tous passé.
Le huitième grand inquisiteur que le Ciel dans sa colère déchaîna sur l'Espagne, Ferdinand Valdès, vieillard rempli d'orgueil et de fiel, voulut rivaliser de cruauté avec le trop fameux Torquemada. Il fit couler des torrents de sang et porta la terreur dans tout le royaume. C'est lui surtout qui fit triompher le système d'ignorance que soutenait depuis longtemps l'Inquisition. Plusieurs des savants théologiens qui avaient assisté au Concile de Trente furent poursuivis parce qu'ils savaient les langues orientales. Valdès, secondé par Charles-Quint, s'occupa avec beaucoup d'activité de la prohibition des livres. Plusieurs index, établis par l'Université de Louvain et par une commission espagnole, furent publiés par ordre de l'empereur, et les perquisitions les plus minutieuses eurent lieu dans tout l'empire pour découvrir tous les livres suspects de répandre la doctrine de Luther et de ses commentateurs protestants.
Parmi les savants qui furent persécutés par Valdès, on remarque Barthélémy Corranza, archevêque de Tolède ; saint Jean de Dieu, fondateur d'un Ordre hospitalier consacré aux soins et à l'assistance des pauvres malades, accusé de magie et de nécromancie ; un prédicateur aragonais, Egidius, arrêté à cause de ses grandes connaissances en tout genre. L'empereur lui fit cependant obtenir son pardon à cause de la grande pureté de sa conduite et de ses mœurs. Rodriguez de Valero, qui consacrait ses jours et ses nuits à la lecture et à la méditation des Écritures Saintes et reprochait à tout prêtre qu'il rencontrait de s'être éloigné de la pure doctrine de l'Évangile. Marie de Bourgogne, âgée de 85 ans, qui fut dénoncée par un valet qui prétendait lui avoir entendu dire : « Les Chrétiens n'ont ni foi ni loi ». On l'arrêta aussitôt comme suspecte de judaïsme et on la garda en prison pendant cinq ans, après quoi elle fut soumise à la question à l'âge de 90 ans. Elle supporta avec un admirable courage les plus cruelles épreuves, mais finit par en mourir. L'Inquisition, voyant qu'elle lui échappait, voua ses enfants et ses descendants à l'infamie. Jeanne Bohorques, qui avait été arrêtée par le Saint-Office pour n'avoir pas combattu les sentiments luthériens de sa sœur, ce qui la fit soupçonner de les partager. Les inquisiteurs poussèrent la férocité à un excès inouï ; sans attendre que cette malheureuse femme, qui était enceinte, fût délivrée, ils l'enfermèrent dans leurs cachots infects. Dès qu'elle fut accouchée, on lui enleva son enfant, et, avant qu'elle fût rétablie, les inquisiteurs lui appliquèrent la question, et cela d'une façon si violente que ses membres, encore faibles, furent coupés jusqu'aux os par les cordes, et que, plusieurs vaisseaux s'étant rompus pendant qu'on lui faisait souffrir la question de l'eau, elle vomit des flots de sang. On la reporta dans son cachot où elle mourut quelques jours après. Comme elle avait toujours nié, même au milieu de ses souffrances, les monstres qui l'avaient assassinée crurent faire assez pour réparer leur crime en déclarant innocente cette victime de leur barbarie. Elle fut réhabilitée dans une cérémonie qui précéda le fameux Auto-da-fé de Valladolid, en 1559, sous les yeux de Don Carlos et de la princesse Jeanne.
Parmi les autres victimes de l'inquisiteur Valdès, il faut encore citer le fils de l'empereur du Maroc ; le vertueux Barthélémy de Las Casas, évêque de Chiapas en Amérique ; et les trois premiers généraux de la Compagnie de Jésus, Ignace de Loyola, Lainez et François Borgia ; Ignace fut mis en prison et ses deux successeurs furent persécutés comme fanatiques illuminés. On pourrait encore citer un grand nombre de savants qui ne voulaient pas se soumettre aux opinions erronées de la scolastique. Enfin, le nombre total de ses victimes est de 19.600.
Charles-Quint, pendant les 40 années de son règne, ne cessa de soutenir et d'exciter l'Inquisition. Il ne voulut admettre aucun plan de réforme et mourut en recommandant à son fils d'imiter sa conduite et de travailler avec zèle à l'extirpation et au châtiment des hérésies. Tant de zèle pour le Saint-Office et une si opiniâtre persévérance lui ont valu le surnom de Don Quichotte de la foi. Il porta si loin sa sollicitude pour le salut de ses sujets qu'il ne resta, dans les deux hémisphères, aucune province soumise à la monarchie espagnole où on n'eût établi ou tenté d'établir le Saint-Office avec ses codes barbares.
Le tribunal de Louvain célébra à lui seul plusieurs auto-da-fé en l'année 1527.
Philippe II, qu'on peut regarder comme le fléau de l'humanité, beaucoup plus intolérant et plus superstitieux que son père, au lieu de protéger son peuple contre l'Inquisition et de profiter des dissensions avec Rome pour secouer le joug des papes, voulut, au contraire, étendre l'autorité du Saint-Office et en faire supporter le joug même à ceux de ses sujets qui avaient fui hors de son royaume. Il rendit plusieurs ordonnances pour encourager la délation, et condamna les vendeurs, acheteurs ou lecteurs des livres défendus, dont le catalogue était considérable.
On se figure aisément quels durent être les résultats de ses funestes ordonnances chez un peuple corrompu qui regardait les auto-da-fé comme un divertissement et croyait faire acte méritoire devant Dieu en dénonçant les hommes qui cherchaient à s'éclairer. On ne doit pas s'étonner non plus de l'ignorance profonde qui enveloppa si longtemps la péninsule et a eu tant de peine à se dissiper.
Philippe II s'occupa beaucoup aussi de soutenir l'Inquisition d'Amérique. Il fixa à trois le nombre des tribunaux de cette partie de la monarchie espagnole et en gratifia les villes de Lima, Mexico et Carthagène.
Le premier auto-da-fé célébré à Mexico eut lieu l'année même où mourut Fernand Cortès, le conquérant de ce vaste empire. On y brûla, entre autres victimes, un Français et un Anglais. L'acharnement de Philippe II à faire le salut de son peuple lui suggéra l'idée d'établir un tribunal ambulant chargé de découvrir et de poursuivre les hérétiques sur les navires. Ce tribunal fut organisé sous le nom d'Inquisition des galères d'abord, et ensuite sous celui d'Inquisition des flottes et des armées. Il y eut aussi l'Inquisition des douanes, chargée d'empêcher l'introduction des livres défendus.
Ainsi la religion servait de prétexte à toutes sortes d'intrigues et ne faisait que servir les passions des ambitieux et des despotes. Un fait curieux de cette époque fut le procès intenté au pape Sixte-Quint comme fauteur d'hérésie. Ce pontife avait fait publier une traduction de la Bible en italien et en avait recommandé la lecture comme devant produire le plus grand avantage pour les fidèles. L'Inquisition d'Espagne fit inutilement tout ce qu'elle put pour empêcher la publication de cette traduction et, après la mort de ce pontife, condamna la Bible Sixtine et, par conséquent, le pape, oracle infaillible de la foi.
Le règne de Philippe II fut l'époque la plus terrible de l'Inquisition en Espagne. Elle y commit les plus grandes cruautés. Il est vrai qu'en France Charles IX les surpassait toutes en une seule journée en ordonnant la Saint-Barthélemy.
Le tribunal de la foi n'était qu'un instrument entre les mains de ceux qui conduisaient les intrigues de la cour. Les inquisiteurs n'avaient aucun scrupule de falsifier et de changer les pièces authentiques, lorsque cette mesure convenait à leurs vues.
Le peuple, imbu d'erreurs dès l'enfance, habitué aux idées fausses, n'avait ni assez de courage pour combattre, ni assez d'autorité pour contester ; il craignait, du reste, trop les persécutions qui en auraient résulté ; si bien que cette abominable institution, tout impolitique qu'elle était, n'en continua pas moins l'exercice de ses forfaits avec la plus grande impunité. Les rois, s'ils n'étaient ses partisans, étaient trop faibles pour oser entreprendre aucune réforme. Ils n'osaient pas même soumettre ses jugements aux formes ordinaires de la procédure, afin de détruire le grand abus du secret.
Point de recours pour l'homme ou la femme soupçonnés d'une pensée un peu hostile à l'Église, ou d'une dévotion un peu tiède.
Malheur à celui qui ne se courbait pas avec respect devant toutes les superstitions, toutes les absurdités inventées par ces infâmes qui faisaient métier de violenter la conscience.

SAINT THOMAS D'AQUIN (1225-1274)
C'est à saint Thomas d'Aquin, l'auteur du livre fameux intitulé la Somme Théologique, celui qu'on appelait le Docteur angélique, l'Ange de l'École, c'est à lui et à son enseignement que l'on doit en majeure partie la procédure inquisitoriale et la jurisprudence pratiquée, par les cours et tribunaux, à l'égard des sorcières.
La magie était détestée et redoutée des populations ; l'Église, exploitant cette haine, fit de la magie une hérésie caractérisée en la mêlant aux vraies hérésies. Elle se donna ainsi un semblant de légitimité.
Les mages, au fond, n'étaient que des empiriques dangereux, ne valant pas mieux que les prêtres, mais ils n'avaient cependant pas mérité le bûcher. Du reste, nous les verrons souvent faire alliance avec le prêtre, quoique leurs ambitions réciproques dussent en faire des ennemis irréconciliables, se disputant le pouvoir ; lutte gigantesque qui dure encore.
Quant aux vrais sages, ils furent étouffés entre ces deux puissances : le faux savant et le prêtre...
La Somme de saint Thomas d'Aquin concilie la philosophie d'Aristote avec la dogmatique catholique.
C'est la France, c'est Louis IX, qui sauva l'Église chancelante au XIIIème siècle.
Le magnifique élan des Cathares avait ouvert un horizon nouveau à l'humanité, un retour à la raison ; grâce à eux, la société remontait la pente que le Catholicisme lui avait fait descendre, toute la bourgeoisie dans le Midi était entraînée et se détachait de l'Église, la féodalité française était en lutte avec le clergé, la pensée renaissait partout, et tout le monde, à peu près, était révolté contre l'avarice de la cour de Rome. A l'étranger, c'était pire encore : l'Allemagne avait un empereur hostile à l'Église, elle était profondément divisée ; l'Angleterre était dégoûtée des exactions des papes, leur pouvoir chancelait ; ce fut Louis IX qui sauva l'Église en favorisant l'institution de l'Inquisition et le développement de nouveaux Ordres religieux. Il fut aidé dans cette œuvre impie par sa pieuse mère, la reine Blanche.
A eux deux, ils enrayèrent le progrès social pour plusieurs siècles, et furent cause des torrents de sang versé.

IGNACE DE LOYOLA
C'était au plus beau temps de la chevalerie espagnole. Le jeune Ignace, cherchant l'idéal féminin, crut le trouver dans la Vierge Marie, la seule Déesse permise.
Il cherchait la Femme, il crut la voir. Il disait qu'elle lui était apparue et qu'elle avait accepté ses services. A partir de ce jour, il se déclara Chevalier de la Vierge.
Ce retour à la Femme, par un chemin détourné, est un symptôme ; l'homme revient à des sentiments naturels, mais il les masque encore en leur donnant un prétexte surnaturel. Quoi qu'il en soit, mieux vaut le culte de la Femme que le culte de l'homme. Aussi on se demande pourquoi Ignace fonda une Société de Jésus et non une Société de Marie.
Soldat espagnol sorti des corps de garde, sa vie fut accidentée à ce point que sa famille voulut le faire enfermer, mais il s'enfuit.
Entré au Collège de Barcelone, sachant à peine lire, il s'en fit chasser. Il courut le pays avec des pèlerins de saint Jacques, prêchant de ville en ville. A Alcala, on l'enferma dans la prison de l'Inquisition ; il s'en échappa, alla à Salamanque où on l'enferma encore. Alors il quitta l'Espagne et vint à Paris à pied. Il entra au Collège Sainte-Barbe pour étudier la philosophie, à l'âge de 33 ans, il se soumit d'abord comme un enfant, fit ses classes, prit ses grades, mais il dut le quitter parce qu'on voulut le fouetter en grande cérémonie. Cependant, il fut enfin reçu maître ès-arts à l'Université de Paris, en 1533.
Enfin, le jour de l'Assomption, en 1534, après avoir entendu la messe dans l'église de Montmartre, il fit avec François-Xavier et cinq autres compagnons, étudiants comme lui, le serment à haute voix de se vouer à Dieu et d'aller à Rome offrir leur dévouement au pape.
Paul III, d'abord, se méfia d'eux, et c'est avec peine qu'il approuva la constitution de la Société de Jésus.
Cependant, on dit qu'il en fut frappé et, posant la main dessus, s'écria : Spiritus Domini est hic (ici est l'esprit de Dieu).
Ce n'est qu'en 1540 qu'il promulgua la bulle de leur institution, avec la condition expresse qu'ils feraient vœu d'obéissance au pape. Ignace ajouta donc un 4ème vœu à ceux qui étaient déjà en usage, celui d'obéissance au pape ; il renonça, par la règle qu'il établit, à toutes les dignités ecclésiastiques.
Paul III, se méfiant de l'influence qu'ils pouvaient prendre, mit aussi pour condition que leur nombre ne s'élèverait jamais au-dessus de soixante, ce qui n'empêche qu'Ignace, avant sa mort, avait plus de mille Jésuites sous sa direction.
Ignace de Loyola était de bonne foi, et son grand succès vint surtout de son féminisme mystique à une époque où la jeunesse était avide d'idéal. Il ne se doutait pas que son Ordre deviendrait politique et serait l'arme des ambitieux. Ce sont ses successeurs qui corrompirent son œuvre ; Lainez et d'Aquaviva y introduisirent tous les mauvais sentiments, tous les principes d'orgueil et d'ambition qui devaient en faire une société funeste. Ce sont eux qui en firent une société d'hypocrisie et de duplicité.
L'Ordre des Jésuites eut le temps de prendre des forces avant que la Réforme se fût affirmée. Les Protestants et les Jésuites se contrebalançaient, donnant chacun leur élan dans une direction opposée, comme deux câbles tirant en sens inverse.
Les Jésuites devinrent bientôt aussi puissants que les papes, plus puissants même, et ceux-ci tremblaient, à bon droit, car, lorsqu'ils voulurent restreindre la puissance des Jésuites, ils moururent empoisonnés ; tel fut le sort de Sixte V, d'Urbain VII, d'Innocent XIII, de Clément XII et de Clément XIV. Le général des Jésuites fut le vrai pape.
Leur morale est celle des restrictions mentales, c'est-à-dire du mensonge, et leur nom restera attaché au système, quoiqu'il soit pratiqué par bien des hommes qui ne sont pas Jésuites.
Leurs Instructions secrètes furent trouvées dans les papiers du Père Brothier (Monita secreta). Un exemplaire manuscrit de ce curieux ouvrage existe dans les archives du Palais de Justice de Bruxelles. Les Jésuites cherchaient deux choses : s'enrichir, s'emparer de l'éducation.

LES JÉSUITES AUX XVIIème SIÈCLE
Les Jésuites étaient devenus puissants.
En 1679, on imprima à Rome le catalogue de leur Ordre. On y trouve 35 provinces, deux vice-provinces, 33 maisons professes, 579 collèges, 48 maisons de probation, 88 séminaires, 160 résidences et 106 missions, le tout contenant 17.655 Jésuites.
Si nous voulons savoir comment en un siècle ils sont arrivés à une si grande fortune, consultons leurs Instructions secrètes, et nous y trouverons le secret de la méthode employée : c'est l'exploitation des femmes, tout comme les Chrétiens primitifs ; l'esprit chrétien n'a pas changé.
Ces Instructions secrètes, Monita Secreta furent longtemps manuscrites dans la Société. C'est en 1661 qu'elles furent imprimées pour la première fois à Paris.
Le manuscrit le plus célèbre est celui du P. Brothier, dernier bibliothécaire des Jésuites avant la Révolution.
Diverses éditions en ont été données, notamment en 1824 et en 1845.
On lit dans l'édition de 1824 :
« Dans les guerres religieuses dont l'Allemagne fut le théâtre, plusieurs collèges de Jésuites furent pris et pillés par les Réformés. On trouva dans leurs archives des exemplaires manuscrits des Monita secreta, et deux éditions presque contemporaines de celle de Paris eurent lieu à la fois : la première, sous la rubrique de Prague, la seconde, sous celle de Padoue. Cette dernière est imprimée sur parchemin et fait suite aux Constitutions de la Société de Jésus. »
En voici quelques extraits :
I. Comment les Pères de la Société pourront acquérir et conserver la familiarité des princes, des grands et des personnes les plus considérables.
1° Pour s'emparer de l'esprit des princes, les nôtres feront bien de s'insinuer adroitement, par tierces personnes faisant pour eux des ambassades d'honneur favorables, chez les autres princes et rois, mais surtout auprès du pape et des plus grands monarques. De la sorte, ils pourront se recommander, eux-mêmes et la Société. C'est pourquoi l'on ne doit destiner à cela que des personnes fort zélées et très au courant de ce qui se tient à nôtre Institut.
2° On gagnera facilement les princesses par leurs femmes de chambre. Or, dans ce but, il faut entretenir leur amitié, car, avec elles, on aura partout l'entrée, et jusque dans les choses les plus secrètes des familles.
II. Sur les biens.
Que les nôtres, au début, se gardent bien d'acheter des fonds ; mais, s'ils en ont acheté quelques-uns bien situés, que ce soit sous les noms empruntés d'amis fidèles gardant le secret, pour que notre pauvreté paraisse davantage, et que les biens-fonds, voisins des lieux où nous avons des collèges, soient assignés à des collèges éloignés. De cette façon, les princes et les magistrats ne pourront jamais savoir au juste à quoi se montent les revenus de la Société.
III. De la façon de gagner les veuves riches.
1° Que l'on choisisse, à cet effet, des Pères avancés en âge, d'une complexion vive et d'agréable conversation. Qu'ils visitent ces veuves, et, dès qu'ils leur verront de l'affection pour la Société, qu'on leur en offre alors les œuvres et les mérites. Si ces veuves les acceptent et commencent à visiter nos églises, qu'on leur donne un confesseur par lequel elles soient bien dirigées, de manière à ce qu'elles persévèrent dans l'état de viduité, dont il louera les avantages et le bonheur, leur promettant et les assurant que, de la sorte, elles auront un mérite éternel, outre un moyen certain d'éviter le purgatoire.
2° Que le même confesseur les amène à vouloir embellir un oratoire ou chapelle en leur maison, pour y vaquer à la méditation, à des exercices spirituels, afin d'éviter la conversation et les visites de ceux qui pourraient les rechercher. Bien qu'elles aient un chapelain, que les nôtres ne laissent pas d'y aller célébrer la messe, et leur faire à propos des exhortations ; puis, qu'ils tâchent de tenir le chapelain sous eux.
3° Il faut, avec prudence, et, pour ainsi dire, insensiblement, changer ce qui touche à la direction de la maison, de façon que l'on ait égard à la personne, à ses affections, à sa dévotion, puis au lieu même,
4° Il faut surtout éloigner les domestiques (mais peu à peu) qui n'ont point de commerce avec la Société. S'il en faut substituer d'autres, l'on doit recommander alors des gens qui dépendent ou veulent dépendre à l'avenir des nôtres ; car, de la sorte, on nous fera volontiers part de tout ce qui se passe au sein de la famille.
5° Que le but du confesseur soit d'amener tout doucement la veuve à dépendre absolument en tout de ses conseils, à n'en jamais chercher d'autres, et, à l'occasion, qu'il lui fasse bien comprendre et sentir vivement qu'en cela gît l'unique ou seul vrai fondement de son progrès spirituel.
6° On lui fera des remontrances relatives aux avantages de l'état de veuve, aux incommodités du mariage, alors surtout qu'on le réitère, ainsi que les dangers auxquels l'on s'expose, et ce qui la concerne en particulier.
7° Il faut aussi provoquer avec adresse, et de temps en temps, des partis pour lesquels on sait bien que la veuve a de la répugnance ; et, si l'on croit que certains lui plaisent, qu'on lui représente leurs mauvaises mœurs, afin de lui susciter du dégoût, en général, pour les secondes noces.
8° Il faut, sous prétexte de l'unir plus étroitement à Dieu, l'empêcher de fréquenter les hommes, et de se divertir même avec ses parents et alliés. Quant aux ecclésiastiques par lesquels la veuve sera visitée, ou qu'elle ira voir, si l'on ne peut les exclure, au moins qu'ils soient de ceux recommandés par les nôtres ou dépendent d'eux.
9° Quand on en sera venu là, l'on devra porter insensiblement la veuve à des bonnes œuvres, surtout aux aumônes, qu'elle ne fera néanmoins que sous la direction de son père spirituel ; car il est important de mettre à profit, avec discrétion, le talent spirituel, montrant que les aumônes mal employées sont souvent la cause ou l'entretien de divers péchés.
Qu'on ne s'étonne pas qu'avec de pareils principes la jeunesse élevée par les Jésuites soit tombée dans une si grande dépravation.
Un des leurs, le cardinal Robert Bellarmin, savant théologien de l'Ordre des Jésuites, neveu du pape Marcel II, et bibliothécaire du Vatican en 1605, a dit : « Il n'y eut plus ni sévérité dans les tribunaux ecclésiastiques, ni discipline dans les mœurs du clergé, ni connaissance des choses sacrées, ni respect des choses divines ; il ne resta enfin presque plus de religion. »

LES JANSÉNISTES
Jansénius, théologien hollandais (1585-1638), évêque d'Ypres, émit une doctrine sur la grâce qui prit son nom.
L'impuissance de la raison masculine à concilier dans une formule intelligible le libre arbitre de l'homme et la toute-puissance divine tourmentait les philosophes, comme toutes les questions devenues surnaturelles par suite du changement de sexe de la Divinité.
Un double courant d'opinion s'était manifesté comme en toutes les discussions de ce genre, l'un en faveur de l'omnipotence divine, l'autre en faveur de la liberté de l'homme. La question de la grâce est le point de contact et de rencontre des deux théories, en apparence inconciliables.
Cette question a été, à toutes les époques, le champ clos des plus ardentes disputes théologiques.
Comment comprendre la grâce divine conférée à l'homme, si la Divinité n'est plus la Déesse, si cette grâce, qui élève et sanctifie l'homme, n'est plus octroyée par la Femme aimée, divine ?
Les théologiens, qui avaient supprimé la Femme de la religion, discutaient gravement sur un de ses attributs sans rien comprendre eux-mêmes de ce qu'ils disaient, la question devenant incompréhensible.
Le Jansénisme ajoutait à sa doctrine un régime de vie, une discipline morale et, ajoutons à sa louange, une protestation contre les mœurs de la cour et de certains membres du haut clergé, et non des moins influents.
Cette discipline émanait d'une femme, la Mère Angélique, qui, comme tant d'autres de ses devancières, apporta sa contribution à la moralisation du Christianisme. Elle imposa une règle laborieuse et sévère qui était en opposition avec la licence scandaleuse de beaucoup de couvents d'alors. Autour d'elle se groupa à Port-Royal des Champs une phalange d'élite, parmi laquelle se trouvaient Pascal, Arnauld, Lemaistre, Nicole, Mme de Longueville. C'est là que fut élevé Racine.
Le Jansénisme, condamné en 1659 par Innocent X, n'a survécu aux persécutions que parce qu'il avait des racines profondes dans l'âme humaine. En effet, dans ces deux mots : la grâce et la prédestination, on retrouve tout le dogme antique.
L'homme reçoit la grâce féminine (divine), mais tous les hommes n'en sont pas favorisés ; il y en a parmi eux qui y sont prédestinés, c'est-à-dire qui possèdent en eux les qualités morales et intellectuelles qui les font aimer.
Cette doctrine se rapprochait trop des sentiments de la Nature pour ne pas être empreinte d'une extrême prudence, d'une défiante réserve, car ce que l'homme craint le plus, c'est la Vérité absolue, la Nature dévoilée.
Cependant, les familles qui adoptèrent la doctrine janséniste comme un lambeau de la vérité antique, la transmirent des pères aux enfants, tel un patrimoine inaliénable et sacré, d'autant plus sacré même que les ancêtres avaient souffert pour elle ; elle créait des habitudes de vie, une éducation supérieure qui procédaient de scrupules de conscience et de règles de conduite que la Vérité fait renaître, et qui, une fois acquises, ne s'altèrent pas facilement, se fortifient plutôt dans les âmes repliées sur elles-mêmes dans les temps de persécution.
Pour comprendre la façon dont les Jansénistes étaient considérés, il suffit de comprendre ce mot dit en 1752 par les Jésuites de Trévoux : « Janséniste, se dit de ceux qui affectent une grande sévérité dans leur manière de vivre et une grande austérité dans leurs mœurs et dans leur doctrine. » Et les Pères de Trévoux ajoutaient : « Se dit encore d'un homme opposé aux Jésuites. Dans ces deux sens, le mot de Janséniste n'est point un terme propre ni sérieux. »
C'est parce qu'ils étaient ainsi considérés que Messieurs de Port-Royal imposaient « le silence respectueux » à leurs religieuses. Toujours la Vérité se tait en face du mensonge qui tonne, et c'est ainsi que triomphe le Mal.
Cependant, l'illustre pléiade de Port-Royal fit naître un courant de sympathie intellectuelle et morale, qui dura longtemps, qui dure encore parmi leurs descendants et leurs continuateurs, qui cependant ont fait dévier l'idée primitive de la doctrine au point de ne plus même la connaître.

ÉPILOGUE : LE VRAI ET LE FAUX CHRISTIANISME
Le néo christianisme fondé par Paul ne fut qu'une imitation du premier Christianisme, fondé par Johana. Les nouveaux Évangiles, masculinisites ne furent qu'une œuvre de démarquage de l'Évangile primitif, auquel ils ont ajouté la légende de Jésus et les miracles qu'ils lui attribuent.
Pour le reste, ils se sont contentés de mettre au masculin ce qui était au féminin, de revendiquer pour l'homme ce que les premiers Chrétiens avaient revendiqué pour la femme. Et, de tout cela, il est résulté une confusion grotesque de la psychologie des sexes, qui a fait du Nouveau Testament un livre ridicule.
C'est parce qu'il s'agit d'une lutte de sexes que cette histoire du premier Christianisme, est restée si obscure, aucun homme ne pouvant sûrement démêler ce qui est féminin de ce qui est masculin, et, quand l'un d'eux s'en aperçoit, par solidarité masculine, il se tait.
« Il faut avouer, dit Fréret, que le premier siècle de l'Eglise a enveloppé cela d'un nuage épais qui sera toujours impénétrable aux critiques ; et malheureusement l'épaisseur de ce nuage, en cachant le point fondamental de la foi chrétienne, c'est-à-dire la qualité des auteurs évangéliques (leur sexe, devrait-on dire) et le temps où ils ont écrit, servira éternellement d'asile à l'incrédulité » (t. II, p. 134).
Et il ajoute :
« A travers cette obscurité qui couvre le berceau de l'Eglise, les fidèles, éclairés d'une lumière céleste, ont su discerner les vrais Évangiles d'avec les faux ; mais ceux que le flambeau de la foi ne guide pas dans ces épaisses ténèbres ne démêleront jamais le vrai d'avec le faux, ou plutôt n'apercevront dans cette confusion d'écrits évangéliques d'autres conformités que celle d'un merveilleux outré qui révolte la raison ; ils traiteront également de fable les livres apocryphes et les ouvrages des Apôtres. »
En résumé, le Nouveau Testament n'est que le rappel de l'histoire de David (Reine DAUD, co-fondatrice de Jérusalem), l'enseignement des Mystères dénaturé, l'histoire de Johana attribuée en partie à Jésus et le démarquage de son Évangile rappelant l'antique règne de l'Esprit féminin et annonçant sa résurrection afin de remettre le monde tel qu'il était autrefois, sous la loi morale de Myriam.
L'esprit féminin, c'est la parole de Vérité. Jean dit :
(16, 13) : « L'Esprit de Vérité vous conduira dans toute la Vérité. »
(18, 37) : « Je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la Vérité. »
La parole de Vérité, c'est le Verbe co-éternel à la Déité féminine. On en fera la parole du Dieu masculin.
C'est dans les Évangiles de Johana qu'on prend l'idée de faire de Dieu et de Jésus des personnes spirituelles. Le Saint-Esprit de la Déesse a été jusque-là féminin, et, comme il est co-éternel à la Déesse, les personnes de la Trinité masculine seront aussi co-éternelles.
C'est à ce dogme que répond Arius.
Pour les masculinistes, c'est le fils de l'homme qui devient le Verbe de Dieu. C'est lui qui hérite des attributs de la Déesse, en ne se reconnaissant que le fils de son père. C'est en lui, cependant, que va se faire l'incarnation du Verbe (la parole de Vérité de l'Esprit féminin qu'il nie).
Quel blasphème !
La religion dont Jésus a été, non pas le fondateur, mais le prétexte, n'est qu'une parodie des Mystères. On y trouve :
La Foi demandée à l'homme parce que la Femme est Déesse, donc il faut croire ce qu'elle dit.
Les masculinistes répondent : Jésus-Christ est Dieu, donc il faut croire à sa parole.

L'Espérance :
La Déesse a perdu sa puissance, elle est morte à la vie sociale, mais elle ressuscitera et on attend sa nouvelle apparition.
La légende populaire avait depuis longtemps fait de ce mystère une histoire grotesque :
La Femme, Yona, devenue Jonas, avait été avalée par le monstre marin Léviathan, le Prêtre, dont les Lévites qui ne veulent pas se reconnaître font une baleine. Mais Jonas revient à la vie après trois jours et trois nuits passés dans le corps de la baleine, et c'est pour cela que Jésus devait rester trois jours et trois nuits dans le sein de la terre.
Cette résurrection de Jésus était discutée et niée par les Juifs qui disaient : « Les disciples ont volé le corps nuitamment. » Ceci est encore pris dans l'histoire de David dont le corps avait été volé dans sa sépulture par un roi de Juda. C'est pour répondre à cette objection qu'on fait garder le tombeau.
D'autre part, l'espérance d'une résurrection n'a de raison d'être qu'avant la venue d'un sauveur. Du moment où il est arrivé, il n'y a plus de raison pour l'espérer, puisqu'on le possède.
On n'espère que ce qu'on n'a pas.

La Charité :
Ce mot désigne l'amour, fonction du cerveau féminin que jamais l'homme n'a bien comprise.
C'est sur ce dogme de l'amour cérébral que sera basée l'idée d'une religion d'amour qui a pour base le rachat de l'humanité par la loi du sexe féminin, qu'on exprimera en disant : par le sang de la Femme.
Les Catholiques diront aussi que leur religion a pour base le rachat par le sang de Jésus.
Mais, mise dans le sexe mâle, cette loi du sexe féminin devient une incohérence.
Et, simultanément, on fera du cœur de Jésus (symbolisant le phallus) le facteur de l'amour. On embrouille encore la loi des sexes en donnant à l'homme le nom de Christ (oint ou plutôt ointe). Puis on donnera à l'homme la transfiguration de la Femme, son embellissement dans l'amour, et l'Ascension qui est la montée du Principe de vie vers le pôle cérébral où s'accumule la réserve nerveuse de la Femme. Cela deviendra la montée de l'homme au Ciel. L'omniscience de la Déesse, l'intuition, qui est le résultat de cette réserve nerveuse en elle, sera imitée par le miracle, science concrète, qu'on oppose à sa science abstraite, qui fut la Magie blanche des anciens temps et dont les Prêtres ont fait la Magie noire.
Puis, dans cette expression : conception immaculée, on rappellera, mais sans le dire, qu'elle est sans tache et que le péché ne l'atteint pas, et cela servira à faire la conception miraculeuse de Jésus. Ne pouvant pas mettre dans son sexe la conception féminine, on la met à sa naissance.
Comment peut-on comprendre l'histoire des religions, à travers les raisonnements faux qu'ont fait naître les luttes de sexes, si l'on n'a pas étudié préalablement la physiologie et la psychologie comparée de l'homme et de la Femme, puisque c'est cette science qui éclaire tout ?
Si on fait des Apôtres des humbles, des pêcheurs et des simples, c'est encore par imitation, parce qu'on désignait les femmes et les féministes du temps par ces mots : « les petits et les humbles » (les anavim).
Cela voulait dire : celles qui n'ont pas de place dans la société des hommes, celles qui ne sont rien dans le monde masculinisé.
Cependant, pour accomplir les Écritures annonçant la revanche des femmes retranchées, on croit devoir prêcher devant les petits et les humbles.
Et ceci nous explique le mélange d'humilité et d'orgueil mâle qui se trouve dans les Évangiles.
Ce que les Jésuistes ont fait de Jean-Johana nous montre à quel degré de perversion et de fausseté ils étaient arrivés.
Ce n'est pas assez, pour eux, d'avoir changé son sexe ; sous la forme masculine qu'on lui donne, on va lui faire jouer le rôle humiliant d'un disciple de ses ennemis.
Ainsi, Jean « surnommé Marc » est cité dans les Actes, comme un disciple de Paul qui, plus tard, s'est séparé de son Maître (Actes, 12,15 ; 13, 37-39), alors que c'est Paul qui fut le disciple révolté qui trahit sa Maîtresse. Ce qui prouve bien que c'est à Jean (Johana) que se rapporte le premier Christianisme, c'est ce verset de saint Matthieu (ch. XI, 12) : « Depuis les jours de saint Jean-Baptiste, il y a foule pour entrer dans le royaume des Cieux. »
Est-ce pour cela aussi que les Théosophes enseignent que Jésus fut la réincarnation de Jean-Baptiste ?
C'est bien Jean-Johana qui a fourni l'idée mère des Évangiles, elle qui en a écrit le fond ; les belles phrases, les belles maximes sont les siennes ; les hautes vérités viennent d'elle. Mais de tout cela les hommes se sont emparés et ils y ont ajouté tout ce qui leur a convenu.
Si, dans l'Évangile actuel, le style de Jean paraît obscur et énigmatique, c'est parce qu'on ne comprend pas le féminisme qui y est resté, et aussi parce qu'on en a supprimé ce qui pouvait le rendre clair. L'obscurité du style est l'œuvre des réviseurs, elle est le résultat des altérations maladroites de ceux qui ont voulu cacher la lumière.
« Tout ressent le mystère dans son Évangile », dit Fréret (t. II, p. 47).
On suppose que l'Évangile de Jean a été écrit par un réviseur, quarante ans après celui de Luc. Pour faire croire que c'est Jean qui l'a écrit, on le fait vivre 70 ans après la mort de Jésus, dont elle devient le disciple bien-aimé. Elle était morte évidemment quand on a écrit ce mensonge, qu'elle aurait démenti.
L'Évangile primitif de Johana fut une résurrection des idées féministes cachées pendant la persécution juive, et cachées sans doute aussi pendant la grande persécution romaine. Son Evangile révisé, dit selon Jean, celui que firent les Jésuistes, en fut la parodie.
Et, malgré cela, il a plus de valeur que les trois autres.
Il est probable qu'au début on lutta contre cette grande femme sans avoir lu ses quatre livres qu'on ne cite jamais. On devait faire autour d'elle la conspiration du silence, qu'on appelait alors l'hermétisme.
Il fallut alors que ses ennemis, pour se donner du prestige, se servissent d'un de ses livres pour rédiger les leurs. C'est parce qu'un de ses écrits a été volé et plagié que l'Évangile selon Jean a été mis en évidence et qu'il nous en est resté quelque chose.
C'est ainsi qu'il est arrivé à la postérité sous une forme dénaturée et pour servir au triomphe de la cause de ses adversaires. Et cependant la publication de ce livre provoqua une rénovation littéraire à la fin du IIème siècle et au commencement du IIIème.
Combien plus brillante eût été cette rénovation si elle avait eu lieu du vivant de son auteur et pour servir la juste cause qu'elle défendait ! Son style devint à la mode, sa doctrine fut prise, mais incomprise, et servit de base au nouveau dogme jésuiste et à de nouvelles discussions philosophiques.
C'est dans l'Évangile révisé selon Jean qu'on osa mettre les choses les plus risquées concernant Jésus, telle sa divinité qui n'est pas affirmée jusque-là. Et cela parce qu'on savait que ce qui venait de Jean avait de l'autorité.
Dans Que penser de la Bible ? on nous dit : « On ne connaît pas sûrement le sens, l'origine et le but de plusieurs Épîtres attribuées aux Apôtres et de l'Apocalypse attribuée à saint Jean. »
En effet, on ne peut pas comprendre l'esprit du vrai Christianisme si l'on ne sait pas qu'il s'agit d'une lutte de sexes.
On ne peut pas non plus comprendre dans quelles circonstances on a créé la légende de Jésus et forgé son histoire, si l'on n'a comme source que le Nouveau Testament.
La question doit être posée sur un autre terrain, celui de la psychologie qui nous montre à quelles impulsions obéissaient les hommes de cette époque, alors que le droit romain venait d'affirmer la puissance masculine, ce qui révoltait la Femme. Et c'est pour répondre à cette révolte qu'on créa le Dieu Père et le Dieu fils de l'homme, déclarant que le Père, du haut du Ciel, ne reconnaît sur la Terre que les êtres mâles avec lesquels seulement il se met en relation par l'intermédiaire de son fils. Mais tout cela même serait difficile à comprendre si on en faisait un fait isolé. Il faut le rattacher à l'époque antérieure pour en comprendre la signification réelle.
Il faut savoir, d'abord, que l'Ancien Testament, sur lequel le Nouveau s'appuie, était déjà un livre altéré, un livre destiné à cacher quelque chose. Si on ne sait pas qu'il y a déjà dans les anciennes Écritures quelque chose que l'on cache, on ne peut pas comprendre les nouveaux Évangiles, puisque c'est le même mensonge qui continue (1).
(1) « Le philosophe juif Flavius Josèphe, en 37, résume la conception traditionnelle qui s'imposait aux époux dans la législation rabbinique qui remonte à l'Antiquité : La femme, dit la Loi, est inférieure à l'homme en toute chose. Aussi doit-elle obéir, non pour s'humilier, mais pour être dirigée, car c'est à l'homme que Dieu a donné la puissance. Le Talmud va jusqu'à esquisser une théorie de la présence universelle du masculin et du féminin en toutes choses, ce qui tend à les ériger en puissances cosmogoniques. Cette différence perdure dans la sexualisation hiérarchique du ciel et la terre. L'identité sexuelle détermine également une série de comportements, d'inclinations, d'attitudes physiques ou mentales et d'aptitudes rigoureusement répertoriées et distribuées différentiellement entre les sexes. Le destin des femmes appartient au père, puis au mari auprès duquel elle est juridiquement traitée comme sa fille, selon l’expression juridique « loco filiae ». C'est un schéma que l'on retrouve presque partout depuis la plus haute Antiquité jusqu'à nos jours. Le fait d'être une femme suppose un état d'infériorité, de dépendance, de soumission, qui revêt même parfois une signification infâmante. Dans les fragments retrouvés du Satyricon de Pétrone, on y lit : « les femmes sont des vautours ou des pots de chambre. L'amour qui dure est considéré comme un chancre » (cancer en latin). Bien avant les quatre évangiles qui reprennent sa doctrine et ses enseignements, Paul, le véritable forgeron de l'église catholique, écrivait dans son épître aux Corinthiens : « Que les femmes se taisent dans les assemblées, il ne leur est pas permis de prendre la parole. » Pas étonnant parce qu'à cette époque, pour les romains, tout ce qui est actif, tout ce qui fait lever le « fascinus », est hautement noble.  Le mot « phallus » n'est jamais employé en latin. Les Romains appelaient « fascinus » ce que les Grecs nommaient « phallos ». Du sexe masculin dressé, c'est-à-dire du fascinus, dérive le mot de « fascination », c'est-à-dire la pétrification qui s'empare des animaux et des hommes devant une angoisse insoutenable. Les « fascia » désignent le bandeau qui entourait les seins des femmes. Les « fascies » sont les faisceaux de soldats qui précédaient les Triomphes des imperator. De là découle également le mot « fascisme », qui traduit cette esthétique de la fascination. » (S. Sudarskis, La solitude du nombre Un)











Il faut nous tenir prêts pour un événement immense dans l’ordre divin, vers lequel nous marchons avec une vitesse accélérée qui doit frapper tous les observateurs. Des oracles redoutables annoncent déjà que les temps sont arrivés.
(Joseph de Maistre, 1821)




À suivre : LA VIERGE MARIE ET LE MYSTÈRE DE L'IMMACULÉE CONCEPTION