LES CATHARES



« Otto Rahn : Mais votre pays possédait également le culte cathare ennemi du catholicisme romain. Il protégeait aussi les Juifs. Quand le pape Innocent III lui demanda d’abandonner l’hérésie et de chasser les Juifs, on lui répondit par des chansons !
« Je reste stupéfait en constatant que de jeunes Français, nés en Languedoc, montrent aussi peu d’intérêt pour leur propre histoire ! Au XIIe siècle, votre pays possédait la civilisation la plus avancée de l’Occident, et le niveau culturel le plus élevé. Vos seigneurs et leurs châtelaines planaient très au-dessus de la chevalerie chrétienne et militaire du Nord. Ils cherchaient d’autres voies pour manifester leur supériorité aristocratique. Ils la trouvèrent dans les « Cours d’amour » où les troubadours imposaient un certain culte des femmes qui le justifiaient par leur intelligence et leur beauté. »
(Saint-Loup, Nouveaux cathares pour Montségur)



Dame Esclarmonde, votre nom signifie
Que vous donnez clarté au monde, en vérité,
Et que vous êtes pure, et ne fîtes rien contre le devoir :
Vous êtes bien telle qu’il convient à ce nom précieux.
(Guilhem de Montanhagol)




« Montségur était la montagne du Graal et Esclarmonde en était la reine. Mais après sa mort, après la destruction de la forteresse et des cathares, le château du Graal et le Graal lui-même furent abandonnés. L’Église romaine, qui savait très bien qu’il ne s’agissait pas seulement pour elle de diriger la croisade contre les albigeois, mais aussi et surtout de gagner la guerre de la Croix contre le Graal, ne laissa passer aucune occasion de s’annexer ce symbole nouveau, absolument étranger à sa doctrine, et de l’utiliser au mieux de ses intérêts. », précisait la Comtesse de Pujol-Murat.
(Otto Rahn, La cour de Lucifer)



INTRODUCTION
LES PAULICIENS ET LA DOCTRINE DE MANÈS (240-270)
En 269, l'évêque d'Ancône, Paul de Samosate, se basant sur les premiers Evangiles, nia la divinité de Jésus et fut condamné par le Concile d'Antioche.
Vers cette époque, de 240 à 270, un événement important se produisit en Orient. Manès, un esclave né en Perse en 240, et dont le vrai nom est Curbicus, ressuscitait les Principes de l'ancienne religion naturelle tels qu'ils avaient été formulés dans l'Avesta (Livre sacré des anciens Iraniens).
Il en fit, du reste, un ordre fermé que nous retrouverons plus tard sous le nom de Rose-Croix lorsque les modernes le restaureront (voir l'article intitulé Conséquences de l'invasion romaine).
Cette nouvelle doctrine, qui se propagera sous le nom de Manichéisme, va surtout protester contre la prétention de ceux qui veulent donner à l'homme les facultés divines de la Déesse.
Le Manichéisme a pour base le dualisme de la Divinité ; Manès veut un Dieu double, homme et femme. Il veut donc rendre à la femme une moitié de sa Divinité, laissant l'autre moitié à l'homme, et cette moitié qu'il lui rend, c'est Sophia, mère de la vie, âme de la matière.
L'homme, représenté par Bythos, est un demi-dieu parce qu'il se dédouble en deux principes qui se combattent de toute éternité, et dont le règne sur la terre est alternatif ; les Manichéens enseignaient que, dans l'homme, l'esprit représente le Bon Principe, et le corps le Mauvais Principe. Ils enseignaient qu'on devait honorer l'esprit et haïr le corps.
Mais, si l'homme est un demi-dieu, il n'y a pas de demi-Déesse ; la divinité féminine est totale, intégrale.
Le Manichéisme dura longtemps. Il fut persécuté par Constantin, mais favorisé par Julien. Il fut dans sa toute-puissance vers la fin du IVème siècle, et l'on put croire un instant qu'il deviendrait la religion officielle du monde romain. La doctrine secrète des Manichéens a servi à faire la légende masculiniste de ceux qui renversèrent le premier Christianisme. Ils l'ont copiée en mettant au masculin ce qui était au féminin.
Le manichéisme se répandit en Gaule, en Espagne ou il avait pour Grand-Maître le célèbre Priscillien.
Le nombre des Manichéens de Rome fut considérablement augmenté, en 439, lors de la destruction de Carthage, parce que beaucoup de Carthaginois, convertis au Manichéisme, émigrèrent en Italie.
Au IXème siècle, l'empereur Nicéphore 1er, peu rigoureux contre les Manichéens, les laissa se multiplier dans toute l'Asie Mineure, notamment en Cappadoce et en Arménie.
En 841, le Manichéisme était si puissant en Orient que Justinien résolut de le combattre à outrance. Beaucoup de sectaires se réfugièrent en Bulgarie, et enfin furent dispersés. En Cappadoce, ils se nommaient Pauliciens, du nom d'un de leurs chefs, Paul ; ils avaient fondé sur le mont Argée un phalanstère nommé Téphrique, c'est-à-dire Distinction, qui devint la cité de l'élite intellectuelle du temps.
Les successeurs de Nicéphore 1er reprirent contre eux le système des rigueurs.
Les empereurs Michel 1er Rhangabé (curopalate), Léon V dit « l'Arménien » et Michel III dit « l'Ivrogne » (un fort mauvais drôle) en firent brûler, noyer ou décapiter des centaines de mille
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LES CATHARES (Les Purs)
La doctrine professée par les Cathares, dans les anciennes provinces de Macédoine et de Thrace, avait été importée par les Pauliciens, Manichéens venus de l’Asie Mineure.
Ces sectaires firent leur apparition en France au commencement du deuxième millénaire et bientôt se répandirent dans toutes les directions. On les trouve en Aquitaine dès l’an 1010 ; en 1023, on en brûlait 11 à Orléans ; vers 1035, on en trouva une petite communauté à Montfort ; on les brûla. Cent ans plus tard, on en trouvait partout.
On leur donnait différents noms. Un de leurs principaux centre était Albi ; on les appela Albigeois. Ils furent impitoyablement poursuivis de 1210 à 1228.
Le Catharisme était une révolte de la conscience et de la raison contre le désordre catholique. S’il ressemble au Manichéisme, c’est qu’il a la même origine : un soulèvement des bons instincts contre l’excès du mal, une réaction contre le désordre social généré par le pouvoir du prêtre.
L’oppression continue de la meilleure partie de la société sous la tyrannie des grands soulevait (déjà et toujours) l’exaspération des gens intelligents et bons. L’iniquité des lois appuyées par la force aveugle entretenait la pire des souffrances, celle des plus nobles instincts. Les femmes révoltées et outragées refusaient d’être mères pour ne pas donner de nouvelles victimes à la tyrannie.
En 1025, on trouva des Cathares à Arras. Interrogés par l’évêque sur leur doctrine, ils répondirent « qu’elle consistait à se détacher du monde, à réprimer les désirs de la chair, à vivre du travail de ses mains, à ne faire de tort à personne et à exercer la charité. Nous croyons, ajoutèrent-ils, que, en gardant ainsi la justice, on n’a pas besoin de baptême, et que, si on la viole, le baptême ne sert de rien pour le salut. Ils ajoutèrent que leur religion excluait tout culte extérieur, les bonnes œuvres étant le seul hommage que Dieu agrée ; qu’ils se mettaient fort peu en peine qu’on les enterrât n’importe où et n’importe de quelle manière, les cérémonies des funérailles n’étant, du reste, qu’une invention de l’avarice des prêtres. Quant au mariage, ils ne l’admettaient pas comme sacrement, se passant, pour les unions, de la bénédiction du prêtre. »
On le voit, à toutes les époques il y a eu des gens sensés. Malheureusement, ce ne sont pas eux qui ont écrit l’histoire ; ils étaient les humbles, les petits, ils étaient même les ignorants, car ils ne savaient pas le latin, ils ne savaient même pas lire, ni écrire, talents rares alors. La science de l’époque, c’était la théologie ; tout le monde appelé savant était perverti par les idées dites chrétiennes, la raison et le courage s’étaient réfugiés chez les ignorants de cette science vaine.
On prit ces êtres courageux pour des monstres humains. A Orléans, dix chanoines furent convaincus de Manichéisme.
« Orléans était devenu le séminaire de la secte », dit le moine Glaber.
Partout ils renaissaient sous différents noms : c’étaient les Bogomiles en Bulgarie.
Les Cathares dans la Flandre.
Les Vaudois à Lyon.
Les Coteaux et les Ruptariens à Bourges.
Les Publicains dans les Pyrénées.
Les Bonshommes dans le Bourbonnais.
Les Agenais à Toulouse.
Les Brabançons, Navarrois, Basques, Aragonais, etc., et surtout les Albigeois, qui avaient la ville d’Albi pour métropole.
A Orléans se trouvait un clerc, Herbert, et deux autres clercs étudiants, Etienne et Lisoye, honorés à la cour de Robert le Pieux ; Etienne était même le confesseur de la reine. Ces trois jeunes gens étaient des hommes sensés, ils causaient entre eux de choses sérieuses et n’admettaient pas les absurdités catholiques. On les fit espionner par un traître normand, Aréfaste.
Convaincus d’hérésie, ils furent emprisonnés. On les accusa, comme cela se faisait toujours, d’abominations semblables à celles des premiers Catholiques. Cette vengeance resta toujours dans l’esprit du prêtre.
Cependant, dans la procédure dirigée contre eux, il n’en était pas question. On se contenta de les chicaner sur leurs idées, fort au-dessus de celles des prêtres.
Guérin, leur accusateur, leur ayant fait passer sous les yeux toute la légende catholique, ils répondirent avec beaucoup de dignité : « Vous pouvez conter ces sornettes à ceux qui croient aux inventions des hommes charnels, écrites sur des peaux d’animaux ; pour nous, qui portons la loi de l’Esprit Saint écrite dans l’homme intérieur, nous méprisons vos discours. Finissez et faites de nous ce que vous voudrez. »
On en brûla onze sur treize, onze esprits droits !… Deux se rétractèrent.
Détail complémentaire : la reine Constance, à leur sortie de l’église, où elle les attendait, creva un œil à Etienne, son ancien confesseur, avec une baguette qu’elle avait apportée pour cela.
C’est ainsi qu’il se trouve toujours des femmes faibles pour renchérir sur les cruautés des hommes et les soutenir dans leurs erreurs.
Pierre, un moine qui écrivit l’histoire des Albigeois, rapporte ainsi l’acte de renonciation qu’on exigeait pour faire partie de la secte des Cathares :
« Quand quelqu’un se livre aux hérétiques, celui qui le reçoit s’écrie : « Ami, si tu veux être des nôtres, il faut que tu renonces à ta foi entière qu’occupe l’Église romaine. » Lui répond : « J’y renonce. » — « Donc, reçois l’esprit saint des Bons hommes. »
Ainsi, le néophyte accepte le baptême des hérétiques et renonce au baptême de l’Église. A partir de ce moment, il devient membre de la secte.
Les Cathares furent condamnés par les Conciles de Toulouse en 1119, de Latran en 1139, de Tours en 1163.
Les Cathares attendent un Messie femme qui va rapporter la vérité. Ils ont un culte, et des symboles. Les femmes officient en même temps que les hommes.
Le prêtre s’appelle le Barbe (d’où les Catholiques ont fait sainte Barbe), parce que, chez les anciens Celtes féministes, l’homme était appelé Ber ou Bar.

LES CATHARES AU XIIIème SIÈCLE
Les Albigeois, par la haine et le mépris qu’ils ressentaient et qu’ils savaient inspirer pour le despotisme catholique, portèrent un coup fatal à l’autorité du pape.
Une circonstance inattendue donna plus de force encore à l’hérésie des Cathares. Les écrits d’Aristote, récemment retrouvés, commençaient à jeter un jour nouveau dans les esprits et un grand trouble dans les consciences. Cela donna naissance à des idées nouvelles, fort peu conformes à l’esprit de l’Église, et très favorables à la belle doctrine des hérétiques qui envahissaient le Midi de la France.
Les Cathares auraient certainement triomphé si les armées du Nord n’étaient venues soutenir l’Église et l’aider à noyer dans le sang les doctrines qui avaient si énergiquement résisté jusque-là aux plus affreuses tortures.
Innocent III, nom ironique, porté par le monstre qui devait faire assassiner tout un peuple d’Albigeois et organiser l’Inquisition ! Il occupa le trône pontifical de 1198 à 1216.
Dans la croisade contre les Albigeois, il commandait le pillage et le vol, le viol et les orgies des soudards ; cela valut des sommes énormes à la trésorerie romaine.
C’est pour cette belle entreprise qu’il appela Philippe-Auguste et les armées du Nord à son secours, excitant par la promesse de riche butin le zèle de ces Français du Nord contre leurs frères du Midi.
Le siège et la prise de la ville de Béziers en 1204, où furent égorgées 60.000 personnes, hommes, femmes et enfants, est une des pages les plus lugubres de l’histoire de l’Église. On égorgeait tout le monde pour être sûr d’atteindre les hérétiques.
C’est là que fut prononcée par Arnauld Amauri (ou Amalric), abbé de Cîteaux, cette horrible parole : « Tuez, tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens. »
C’est un moine de l’époque, Césaire d’Heisterbach, qui rapporte cette phrase, restée célèbre.
Simon de Montfort, dans cette terrible guerre, prenait les premiers venus ; il lui fallait des victimes pour assouvir sa rage sanguinaire, et il les exterminait « pour les préserver de l’infection de l’hérésie ». En 10 ans, plus de 400.000 périrent.
Au fond de ceci se retrouve encore une guerre de sexes. « Béatrice révèle le ciel », disait-on. Simon de Montfort, une brute, trouve que la femme révèle l’enfer. Il meurt d’une pierre lancée par une femme.
Après Béziers vint Carcassonne. Et c’est ainsi que la Provence, où commençait à se développer une civilisation naissante, où la poésie florissait déjà et promettait tant, se trouva violemment rejetée en arrière.
Mais, pendant que les prêtres faisaient rage ainsi dans le Midi, l’hérésie remontait vers le Nord. La même année (1204), l’Église condamna, dans le diocèse de Chartres, Amaury de Bène, professeur à la Faculté de Théologie, comme convaincu d’enseigner les idées nouvelles. Mais, s’il succomba, la doctrine qu’il avait répandue ne périt point, et son école alla grandissant.
Cinq ans plus tard, de nouvelles persécutions furent dirigées contre les Cathares du Nord, et de nouvelles sentences furent prononcées contre eux par le Concile de Paris.
Ce fut le premier grand drame sanglant dont l’Église donna le spectacle au monde épouvanté.
C’était du reste la première révolte sérieuse contre les absurdités de la doctrine dite chrétienne et contre le joug de Rome ; ce fut aussi la première tentative d’un retour à la Vérité antique et à la vie simple, suivant les lois de la Nature et de la vraie morale. Si les Cathares avaient triomphé, l’humanité serait entrée alors dans une ère nouvelle, et les huit siècles de souffrances et d’ignorance qui se sont écoulés depuis auraient été un temps de paix et de rénovation.
Au lieu de cela, l’Église entra dans la période la plus sombre et fonda l’Inquisition.


Il fallait, dans le sang et la cendre des bûchers, détruire à jamais les bienfaits d'une civilisation douce et affinée qui assurait aux hommes, avec la liberté et la prospérité, la tranquillité d'esprit et le bonheur de vivre.

L'INQUISITION
Nous allons voir apparaître les monstruosités juridiques de l'Inquisition, qui met les honnêtes gens à la merci des coquins, qui, après avoir supprimé l'accusation « légitime », inscriptio et in crimen subscriptio, proscrivait la défense et excommuniait la réponse, comme attentatoire à l'infaillibilité de l'Église, donc hérétique. Se défendre, c'est discuter l'autorité qui vous attaque. L'Église se fait juge sans appel. Cependant, elle a horreur du sang, dit-elle, et c'est pour cela qu'elle confie au bras séculier l'exécution des hérétiques qu'elle condamne. C'est elle qui signe la sentence, mais ce n'est pas elle qui l'exécute ; et, si le pouvoir séculier refuse de se faire bourreau à sa place, c'est lui qu'elle accuse d'hérésie. Un soupçon, une dénonciation anonyme, suffisent pour vous jeter dans la torture. C'est la délation occulte érigée en principe, le huis-clos des séances, la sécurité assurée aux témoignages à charge, le refus d'entendre les témoins à décharge ; c'est l'infamie érigée en justice, faisant au Chrétien un devoir de la trahison, un mérite de la délation, autorisant la déposition des parents contre leurs enfants, des enfants contre leurs parents, du mari contre sa femme (quant à celle de la femme contre le mari, elle devait être plus difficilement admise).
Enfin, la torture va jusqu'à introduire dans cette étrange procédure le faux témoignage de l'accusé contre lui-même. Du reste, tout accusé était d'avance perdu.
Quelle lugubre époque ! Que de supplices, d'angoisses, de désolations ! Que de mal jeté dans le monde par l'aveugle fanatisme, par l'instinct de domination, par l'affolement des criminels qui rejettent la responsabilité de leurs actes et torturent ceux qui en furent témoins !
L'Église a horreur du sang. Elle professe l'hématophobie, mais elle fait tuer par les autres.

Et l'Église se justifie en disant que l'Inquisition n'a été que le fruit des passions de quelques hommes et qu'elle ne peut en porter le poids. Étrange justification ! Car ces hommes n'étaient que la résultante de son système, le fruit de ses doctrines.
Le premier germe de l'institution du Saint-Office se trouve dans un décret du Concile de Vérone, en 1184, qui enjoint aux évêques de Lombardie de rechercher les hérétiques et de livrer au bras séculier, pour être punis, ceux qui persisteraient dans leurs erreurs. « Il n'est pas douteux, dit Lacordaire, que les premiers linéaments de l'Inquisition ne se trouvent là tout entiers, quoique informes : recherche des hérétiques par commissaires, application de peines spirituelles graduées, abandon au bras séculier en cas d'impénitence manifeste, concours des laïques et des évêques. Il n'y manque qu'une forme définitive, c'est-à-dire l'élection d'un tribunal particulier qui exerce ce nouveau mode de justice ; mais on n'en vint là que beaucoup plus tard. »
En effet, les premiers inquisiteurs dont on ait conservé le nom ne parurent qu'en 1198. C'étaient deux moines de l'Ordre de Citeaux, frère Guy et frère Rainier, que le pape Innocent III avait envoyés dans nos provinces méridionales pour y rechercher et poursuivre les Albigeois, avec ordre aux évêques et aux seigneurs temporels de leur prêter toute assistance possible.
L'idée de l'Inquisition fut donc conçue par le pape Innocent III. Elle n'est devenue réelle que sous l'un de ses successeurs, Grégoire IX (qui fut pape de 1227 à 1241).
Proposée d'abord comme institution temporaire, l'Inquisition fut transformée en établissement régulier et permanent par le Concile de Latran en 1215 et par celui de Toulouse en 1229.
C'est à Toulouse que fut établi le premier tribunal inquisitorial ; c'est l'évêque de cette ville qui le présida ; et c'est grâce à Louis IX, « Saint Louis » dit « le Prudhomme »,  que cette institution se créa.
En 1233, Grégoire IX confia là direction exclusive de l'Inquisition aux Dominicains pour la soustraire à la juridiction des évêques. En même temps, il donna aux inquisiteurs une autorité sans limite et sans contrôle réel de la part du pouvoir temporel. La même année, l'institution reçut une sanction solennelle du roi Louis IX dans les conférences de Melun. A la fin du XIIIème siècle, l'Inquisition était établie non seulement en Provence, en Languedoc et dans les pays voisins, mais encore dans la plupart des provinces du Nord de la France, ainsi qu'en Lombardie (en 1224), en Catalogne (en 1232), en Aragon (en 1233), dans la Romagne (en 1252), en Toscane (en 1258), à Venise (en 1289), etc. Partout elle fut placée entre les mains des Dominicains, sauf toutefois en Italie, où ces religieux partagèrent les fonctions d'inquisiteurs avec les moines de saint François.
Nous venons de voir que, dans le Midi de la France, l'Inquisition avait eu pour prétexte l'hérésie des Albigeois ; cette hérésie ayant disparu vers la fin du XIIIème siècle, les fonctions de l'Inquisition se trouvèrent sans emploi. Du reste, l'influence croissante des Justices royales diminuait la tache des inquisiteurs en France. Mais, en Espagne, l'Inquisition fut favorisée par les circonstances politiques. La Catalogne et l'Aragon l'avaient acceptée dès 1233 ; mais les royaumes de Castille et de Léon la repoussèrent et ne voulurent reconnaître qu'aux évêques le droit de rechercher l'hérésie.
Dès 1274, l'Inquisition avait envoyé une femme au bûcher, à Carcassonne, condamnée pour sortilège. En 1275, plusieurs sorciers et sorcières furent accusés d'avoir assisté au sabbat et brûlés. Parmi eux se trouvait une dame de Labarèthe, âgée de 56 ans, qui, aux termes de sa condamnation, aurait « paillardé avec le Diable et eu de lui un monstre à tête de loup ».
Ce sont les premiers jugements rendus par les tribunaux inquisitoriaux. On voit tout de suite par là ce qu'ils valent ; accuser de maternité une femme de 56 ans et lui faire produire un monstre que la nature humaine ne peut engendrer, c'est mettre le surnaturel même dans l'accusation. Tel était le système, qui, en réalité, n'était qu'une horrible vengeance sexuelle de l'homme accusant la femme de ses débauches et les compliquant de circonstances folles.
C'est la première fois que mention était faite du sabbat d'une manière juridique. Jusque-là, on en parlait, mais on n'y croyait pas.


SAINT THOMAS D'AQUIN (1225-1274)
C'est à saint Thomas d'Aquin, l'auteur du livre fameux intitulé la Somme Théologique, celui qu'on appelait le Docteur angélique, l'Ange de l'École, c'est à lui et à son enseignement que l'on doit en majeure partie la procédure inquisitoriale et la jurisprudence pratiquée, par les cours et tribunaux, à l'égard des sorcières.
La magie était détestée et redoutée des populations ; l'Église, exploitant cette haine, fit de la magie une hérésie caractérisée en la mêlant aux vraies hérésies. Elle se donna ainsi un semblant de légitimité.
Les mages, au fond, n'étaient que des empiriques dangereux, ne valant pas mieux que les prêtres, mais ils n'avaient cependant pas mérité le bûcher. Du reste, nous les verrons souvent faire alliance avec le prêtre, quoique leurs ambitions réciproques dussent en faire des ennemis irréconciliables, se disputant le pouvoir ; lutte gigantesque qui dure encore.
Quant aux vrais sages, ils furent étouffés entre ces deux puissances : le faux savant et le prêtre...
La Somme de saint Thomas d'Aquin concilie la philosophie d'Aristote avec la dogmatique catholique.
C'est la France, c'est Louis IX, qui sauva l'Église chancelante au XIIIème siècle.
Le magnifique élan des Cathares avait ouvert un horizon nouveau à l'humanité, un retour à la raison ; grâce à eux, la société remontait la pente que le Catholicisme lui avait fait descendre, toute la bourgeoisie dans le Midi était entraînée et se détachait de l'Église, la féodalité française était en lutte avec le clergé, la pensée renaissait partout, et tout le monde, à peu près, était révolté contre l'avarice de la cour de Rome. A l'étranger, c'était pire encore : l'Allemagne avait un empereur hostile à l'Église, elle était profondément divisée ; l'Angleterre était dégoûtée des exactions des papes, leur pouvoir chancelait ; ce fut Louis IX qui sauva l'Église en favorisant l'institution de l'Inquisition et le développement de nouveaux Ordres religieux. Il fut aidé dans cette œuvre impie par sa pieuse mère, la reine Blanche.
A eux deux, ils enrayèrent le progrès social pour plusieurs siècles, et furent cause des torrents de sang versé.


LES ORDRES RELIGIEUX
Les inférieurs copient toujours ceux qu'ils croient supérieurs à eux en intelligence. C'est ainsi que nous allons voir les Catholiques créer des Ordres dits religieux, qui seront la copie de celui des Chevaliers du Temple. Ils ont cru que la pauvreté est la source de grandes richesses, et ils vont reprendre les trois vœux des Templiers : vœux de pauvreté, de chasteté, et d'obéissance.
Mais ce qui différera éminemment entre eux, c'est le but de l'action à laquelle ils vont se consacrer.
Les Chevaliers du Temple travaillaient pour le triomphe de la Vérité qu'ils avaient rapportée d'Orient ; les Ordres religieux vont travailler à la propagande de la doctrine de mensonge de l'Église.


LES FRANCISCAINS
François d'Assise fonda en Europe une société sans propriété ni capital, qui devait arriver à la puissance par la pauvreté. C'est du moins l'étiquette de l'Ordre qu'il fonda. En réalité, ces mendiants franciscains ne manquaient de rien.
Né en 1182 en Ombrie, il fonda l'Ordre dit des Frères mineurs, ou Franciscains.
Il mourut en 1226.
Dans la société féodale, l'autorité procédait de la propriété. François d'Assise lui donna une autre base : elle devait être basée sur les services rendus. La société nouvelle aurait pour fondement la dignité humaine. C'était la copie de la Chevalerie. Dans une société ainsi constituée, la Femme devait être remise à sa place, et cependant c'est le contraire qui se produisit.
François d'Assise, grand diplomate, se fit tout-puissant en créant la règle des Mendiants. Cette pauvreté collective voulait imiter le communisme des premiers Chrétiens de saint Jean.
Quant au nomadisme individuel d'une armée d'ermites voyageurs, c'était l'imitation de l'Ordre des anciens Esséniens, qui avaient des hospitaliers pour recevoir les voyageurs.
On idéalisait la souffrance du peuple, tout en lui prenant son obole. On prétendait hypocritement réaliser toutes les réformes sociales demandées par les esprits éclairés : l'égalité demandée par les Pastoureaux ; la fraternité prônée par les Vaudois. Les Catholiques étaient des imitateurs qui venaient après les autres s'emparer de leurs idées et les dénaturer à leur profit.
François d'Assise vint mettre au service de l'Église les idées de fraternité qui sont dans les sociétés secrètes, d'égalité et de travail. Il créa des Fraternités de Tertiaires laïques pour imiter le triangle des initiés.
Ces Tertiaires franciscains devinrent légion. Tous les Catholiques militants s'y enrôlèrent, les classes s'y mêlèrent, unies dans une idée commune : le triomphe du masculinisme de l'Église.
Tous déclarèrent qu'ils n'avaient qu'un Père : Dieu, et une Mère : l'Église.
Et la vraie femme, où la mettaient-ils ? Nous allons le voir bientôt.
Leur Ordre était international comme les Fraternités féministes que l'on imitait. Dans cet Ordre, on devait vivre secrètement parmi les peuples et se prêter un appui matériel et moral, le cas échéant. On devait aussi combattre les ennemis de Jésus, du prêtre, de l'Église. Cet Ordre visait évidemment, comme ennemis à combattre, les Albigeois, les Templiers, les Ordres secrets.
Comme dans la Franc-Maçonnerie, ils avaient des signes pour se reconnaître et portaient des insignes. Ils prenaient aussi des mots d'ordre comme leurs adversaires, tel celui-ci : « Aimer pour croire et croire pour agir ».
Nous avons dit que nous allions bientôt parler du rôle qu'ils donnaient aux femmes. Le voici : ils les associaient à leurs intrigues et se servaient de leur puissance qu'ils dirigeaient pour arriver à leurs fins.


LES DOMINICAINS
Les Dominicains ont été fondés par un Espagnol, saint Dominique, né à Calahorra en 1170.
Quoiqu'il fût plus âgé que saint François, son Ordre fut fondé après celui des Franciscains.
Il fut témoin en France des progrès réalisés par les Albigeois, et s'unit aux légats envoyés par le pape Innocent III pour les combattre.
Il ouvrit son premier établissement à Toulouse en 1216.
Il fonda en Italie un couvent dédié à sainte Sabine et lui consacra l'oranger, pendant qu'à la Portioncule, près d'Assise, fleurissaient toujours les roses de saint François. Ils mettent les fleurs de leur côté.
C'est l'Ordre dominicain qui entretint la dévotion du Rosaire, qu'ils consacrèrent à Marie depuis 1270 (1).
La légende rapporte que la Vierge apparut à Dominique et lui remit le premier chapelet dit Rosaire, parce que les gros grains, au nombre de quinze, sont appelés « roses ».
Mais, ils furent dépassés en chevalerie catholique par les Franciscains, qui maintinrent contre eux la conception immaculée de Marie.
Dominique fonda aussi un Ordre de femmes à Toulouse. Les couvents de Dominicaines furent d'abord des asiles de jeunes filles nobles, mais sainte Catherine de Sienne réforma la discipline au XIVème siècle.
Les religieuses dominicaines furent peu nombreuses en France.
Saint François d'Assise et saint Dominique ordonnèrent à leurs disciples de se répandre au milieu des peuples pour prêcher, les uns sous le nom de Frères Mineurs, les autres sous le nom de Frères prêcheurs.
On remarquera ce nom de Frères, substitué à celui de Pères par ces nouveaux religieux.
C'est que le nom de Frère, usité dans les sociétés secrètes, avait pris un grand empire dans le monde. Tout en les combattant, on les copiait.
Daanson, dans son livre sur Lucifer, nous dit (p. 146) (2) :
« Dominique créa en l'année 1216 l'Ordre des Dominicains, chez lesquels le rosaire se porte à la ceinture ; il leur ordonna de le propager parmi le peuple comme un moyen indiqué par la Vierge elle-même pour triompher de l'hérésie des Albigeois.
« Et l'année suivante, 1217, le cardinal légat d'Honorius III, Bertrand de Saint-Jean, dépêcha Montfort sur Toulouse, avec ordre d'y massacrer sans pitié hommes, femmes, vieillards, enfants. Et c'est pourquoi Louis Cœur-de-Lion, accompagné du cardinal légat Bertrand, essaya une nouvelle tentative sur Toulouse avec une armée de « pèlerins », et, n'ayant pu s'en rendre maître, passa cinq mille habitants de Marmande au fil de l'épée.
« Et c'est pourquoi ces vaillants soldats du Christ pillèrent ce qu'ils purent, massacrant les hommes et violant les femmes sur leur passage.
« Et c'est pourquoi le pape Grégoire IX chargea, en l'année 1225, les Dominicains du soin de réprimer les hérésies par les tortures.

« Et c'est pourquoi le pape Innocent III publia la bulle Ad extir pandum, autorisant quiconque découvrait un hérétique à s'emparer de sa personne et de ses biens, et exigeant du pouvoir séculier qu'il fit, sur simple demande, infliger la torture à ceux qui refuseraient de dénoncer les hérétiques de leur connaissance. »
(1) Le chapelet, qui tire son nom des couronnes de fleurs qu'on appelait au moyen âge chapas ou chapeaux, était la couronne spirituelle de Marie, sorte de réparation et d'expiation pour les grandes douleurs représentées par la couronne d'épines de la Déesse.
Le chapelet des Catholiques dut son origine à un jeune religieux de l'Ordre de saint François. Avant de prendre l'habit des Frères mineurs, ce jeune homme avait l'habitude de faire tous les jours une guirlande de fleurs dont il couronnait une image de Notre-Dame. C'est lui qui eut l'idée de substituer à la couronne de fleurs la couronne spirituelle du chapelet. Une légende poétique rapporte que, auprès de chaque homme qui récitait consciencieusement le chapelet, se plaçait un ange qui enfilait dans un fil d'or une rose par « ave », un lis d'or par dizaine, et, après avoir posé cette guirlande sur le front du dévot serviteur de Marie, disparaissait laissant après lui une douce senteur de rose.
Tout cela, c'était l'imitation de ce que les Johannites avaient fait dans leurs Mystères, du culte que Manès avait institué dans la Rose-Croix. Saint Dominique, fondateur des Dominicains, voulut les imiter. En 1208, il créa le saint Rosaire en l'honneur de la dévotion à la très sainte Vierge Marie, qu'il substituait à la doctrine des Albigeois. Singulière mentalité : substituer une femme surnaturelle aux femmes naturelles !
(2) Pris dans l'Histoire de l'Inquisition au Moyen Age, de Henry-Charles Lea, traduction de Salomon Reinach.

LA DOCTRINE DES CATHARES
Les Cathares soutenaient l'existence des deux Principes bon et mauvais, qui avaient été au fond de toutes les Théogonies. La Divinité (ou l'humanité) était donc mâle et femelle, lumière et ténèbres. Les Cathares étaient les Féministes du moyen âge. Mais, dans un temps où la Déesse-lumière était vaincue et où les ténèbres régnaient, il était défendu d'enseigner cela. Ils disaient aussi que le souffle ou rayon divin, est engagé dans la matière, qu'on peut l'en dégager par une lente épuration et par la pratique du bien. Ils condamnaient le mariage, qu'ils refusaient de reconnaître comme un sacrement. Ils conseillaient la continence comme moyen de perfectionnement moral. Ils avaient, dans leurs cérémonies d'initiation appelées consolamentum, l'usage de demander à genoux la bénédiction, qui se terminait par le baiser fraternel.
Or, comme les Catholiques avaient avili le baiser par l'usage impur qu'ils en avaient fait dans leurs orgies, ils accusaient les Cathares de leurs impuretés. L'osculum sanctum, le saint baiser des religions antiques, était devenu chez les Catholiques un crapuleux usage de baiser le derrière du diable, puis, symboliquement, du prêtre.
On sait, que les premiers Catholiques adoraient et baisaient les genitalia de leurs prêtres. Ce baiser infâme, imposé à la Femme, passa dans les mœurs féodales et devint l'insigne de l'hommage rendu par le vassal, au suzerain.
Dans les premières parodies religieuses, on disait que en donnant ce baiser au diable, la Femme le reconnaissait pour Dominus.
Toutes les turpitudes reprochées par les païens féministes aux premiers Catholiques furent ensuite reprochées par les Catholiques aux Manichéens. On avait si bien fait l'opinion contre eux qu'un auteur du temps dit que « le monde en fut amoindri, le paradis sur terre détruit et dispersé, la Chrétienté abaissée et honnie, qu'il en résultait un affaissement général des esprits, que cela arrêta l'évolution sociale, entrava l'élan de la personnalité humaine, changea la direction de l'activité de l'âme et accabla la Femme », c'est-à-dire tout le contraire de la vérité. On leur reprocha tout ce que le Catholicisme avait produit.
Le pape Innocent III leur envoya en 1206 une députation composée des plus grands personnages du temps. Ils refusèrent les ouvertures qui leur furent faites. Alors la persécution, se déchaîna contre eux, ils furent noyés dans un flot de sang. Le XIIème siècle vit griller des milliers d'Albigeois.
La moderne loi de Lynch était appliquée aux hérétiques par le peuple, excité par le prêtre. Après cela, qu'on nous parle de la vox populi, vox Dei, à moins que ce ne soit du bien et du mal qu'il s'agisse ! En 1167, des Manichéens furent arrêtés à Vézelay. Le représentant du ministère public, l'abbé Guillaume, se tournant vers le peuple, lui demanda ce qu'on devait faire d'eux : « Qu'on les brûle ! », répondit en chœur cette foule stupide.
Le Catharisme a pu avoir un lien avec l'Ordre des Templiers. Dans un article paru dans la revue « Archéologia », M. le Duc de Lévis-Mirepoix fait référence à une déposition d'un Templier obtenue sans violence, en Italie, à Florence, et dans lequel sont relatées « les initiations mystérieuses que le Temple aurait caché. » Il est dit qu'« Elles ont plus ou moins de rapport avec le Catharisme, du fait que nombre de cathares, après la catastrophe de leur secte, avait été introduits parmi les Templiers. Il y avait donc à Florence une Commanderie de Templiers, et ces Templiers étaient réputés hérétiques, puisque Albigeois. »

LES VAUDOIS AU XIIème SIÈCLE
Après la défaite des Albigeois en France s'élèvent les Vaudois dans les vallées. Ils ont, dit-on, conservé la doctrine qui leur a été apportée par un missionnaire du temps du premier Christianisme.
Leur nom de Vaudois (de Vaud ou Vaux) indique la vallée et ne provient pas du nom d’un marchand lyonnais appelé Valdès ou Valdo ; on dit encore « par monts et par Vaux ». Vers 1100, leur mouvement coïncide avec la renaissance de la Chevalerie.
Les Vaudois et les Pastoureaux donnèrent une grande inquiétude aux moines catholiques, qui connaissaient leurs sentiments généreux. Les Johannites étaient des audacieux qui rêvaient une société idéale, débarrassée des lois de l'homme et basée sur les lois de la Nature. Ils rejetaient la morale masculine et la fausse hiérarchie sociale ; C'était la réalisation de l'Évangile de Jean.

JEAN WICLEFF (WICKLEFF ou WYCLIF)  ET JEAN HUSS
Un siècle et demi après le massacre des Albigeois, nous voyons se produire le second grand soulèvement de la pensée contre le joug de l'Église.
Les papes, qui se considéraient bien plus comme les rois de la terre que comme les représentants du royaume du Ciel, voulurent envahir tout à fait le domaine temporel.
Mais une réaction terrible éclata lorsque Philippe le Bel, personnification de l'émancipation du pouvoir civil, triompha de Boniface VIII, le plus fier et le plus hautain des pontifes, et transporta à Avignon le siège papal.
Nous voyons alors la résistance du peuple devenir de plus en plus violente, la clarté se faire et la foi se diviser.
C'est alors que la voix de Jean Wicleff se fait entendre, jette l'hésitation dans les consciences en Angleterre et convertit toute la Bohême. La crise que l'Église eut à traverser à ce moment fut violente ; attaquée à la fois en Angleterre et en Allemagne, elle se trouva dans une situation des plus périlleuses. C'est alors que parut Jean Huss, cet autre libre-penseur, disciple de Wicleff, qui répandit sa doctrine dans toute l'Allemagne.
Cette doctrine peut se résumer en trois grands principes :
1°) Séparation du pouvoir civil et du pouvoir religieux ;
2°) liberté absolue de la conscience ;
3°) indépendance complète de la raison.
Le Concile de Constance le condamna au feu. Et c'est là qu'on vit le fanatisme des foules, porté à son comble, inspirer à cette légendaire vieille femme l'idée diabolique d'apporter son fagot au bûcher du martyr.
Les os de Jean Wicleff, mort depuis 28 ans, furent déterrés et jetés à la voirie.
L'Allemagne vit alors les bûchers s'élever de toutes parts et éclater la guerre des Hussites qui lui coûta tant de sang et laissa tant de ruines, sans pour cela étouffer la pensée qui l'avait fait naître.
Une femme de haute vertu et de grande éloquence, Jeanne Daubenton, fut brûlée en 1372. Elle s'était faite prédicante d'une secte nouvelle qui apparut sous le règne de Charles V et qu'on nommait les Turlupins. Ces sectaires, qui reprenaient quelques-unes des doctrines des Vaudois, se répandirent en France, surtout en Dauphiné. Le pape Grégoire IX écrivit au roi de France : « Nous vous enjoignons de marcher à la tête de vos armées pour exciter le zèle de vos soldats et ranimer le courage des inquisiteurs. » Les prisons de l'Inquisition se remplirent partout de 20.000 de ces malheureux. Enfin, on les jeta en masse aux bûchers.
Et ce ne fut pas assez du supplice, on les voua au ridicule. Quand une femme osait parler de revenir à la vraie morale, on l'appelait une Turlupine.




« Comment expliquer, demandai-je alors à M. Rives, que le mot allemand Minne (amour) n’ait jamais été employé par les cathares ni par les troubadours provençaux ? » «  Vous vous trompez ! Ils l’ont employé ! » me répondit-il. Le sacrement du consolamentum s’appelait aussi, dans la langue des albigeois, la manisola, la fête de la Mani consolatrice. Mani correspond à la Minne allemande et au terme gothique très voisin de Munne. Il désigne ce que nous appelons aujourd’hui un souvenir. Jamais Minne n’a signifié amour au sens banal, mais plutôt : pensée d’amour.
« Je posai enfin une dernière question à mon hôte : « La chanson d’amour provençale a-t-elle fait partie également du trésor spirituel des Germains ? » Il me répondit affirmativement. La manisola et le consolament d’amour sont identiques à la coutume germanique de « boire à l’amour » (Minnetrinken), laquelle, puisqu’elle était pratiquée au début du printemps, procédait des fêtes et des danses de mai qui célébraient l’amour. Depuis l’époque des Wisigoths cette coutume s’est maintenue dans la Gothie (Languedoc). »
(Otto Rahn, La cour de Lucifer)


LES LUCIFÉRIENS À COLOGNE
Une secte s'était formée à Cologne pour rétablir le culte de Lucifer (Divinité porte-Lumière). On sait que c'est l'ancienne Déesse qui était ainsi désignée (1). Leurs réunions étaient secrètes. Ils avaient des temples cachés, où, sur un autel, se dressait l'image de l'ange de Lumière, « Lucifer », chassé du Ciel contre toute justice, disaient-ils, mais qui reprendra un jour son rang et expulsera à son tour le Dieu des Chrétiens.
Les Lucifériens existaient encore en 1450.
Les Catholiques répandaient toutes sortes d'accusations contre eux. Ils prétendaient qu'ils transperçaient à coups de poignard une hostie, qu'ils lavaient la tête de ceux de leurs adhérents qui avaient reçu le baptême, afin de leur ôter le caractère du Christianisme.
C'est peut-être vrai, car il n'y aurait là qu'une protestation très justifiée contre l'obscénité du symbole contenu dans l'hostie, et contre le baptême par l'eau, qui ne fut au début qu'une ironie.

(1) Les Templiers avaient une Divinité féminine représentant l'ancienne Déesse porte lumière, la Vénus-Lucifer. Ils enseignaient que c'est Lucifer, « l'Esprit », qui est l'organisateur de l'Univers, le Grand Architecte qui met toutes choses à leur place et crée l'ordre. Les ennemis des Templiers ont ridiculisé la Femme-Esprit, qu'ils ont appelée le Baphomet.
Vénus-Lucifer (la Femme) est l'Être par excellence, c'est Elle que l'homme doit adorer ; toute adoration du principe mâle conduit l'homme à la sodomie morale et physique, considérée comme le plus honteux des crimes. Le retour à la Femme est toujours un retour à la Sagesse, mais il excite toujours la rage envieuse des hommes pervertis, qui veulent faire régner le mal. L'éternelle Sagesse, la Raison universelle, la lumière de l'Esprit est en même temps la loi du cœur ; elle rend l'amour sacré, elle en fait un culte en l'épurant. C'est dans ce culte seulement que l'homme trouve la Vérité absolue, qui est le souffle divin de l'Esprit féminin, qui le purifie quand il en reçoit l'effluve.

LES FRATICELLES EN ITALIE
Otto Rahn, à propos des Cathares et l'Italie écrit (La cour de Lucifer) : « Ils ont dû avoir une grande influence en Lombardie. Wernher, le poète moraliste qui vivait vers 1180 et qui était prêtre à Augsbourg, a écrit quelque part : « La Lombardie est livrée aux flammes de l’hérésie ! » ».
En Italie, les Lucifériens prirent le nom de Fraticelles ou « Frérots ». Ils étaient pauvres. Le pape Jean XXII les excommunia, puis les fit emprisonner, massacrer, brûler par les princes, qui donnaient ces exécutions en spectacle à la foule.

On les accusait de vol, de mendicité, de pillage, de sodomie et de viols. Ils envoyèrent de nombreux missionnaires en Allemagne, principalement en Bohême. Ce sont les descendants de ces sectaires qui se groupèrent sous la conduite de Jean Ziska, qui poursuivit l'idée de la réforme religieuse et sociale, et créa des sociétés secrètes dans lesquelles on osait proclamer l'antique Vérité et remettre l'Esprit (Lucifer) au-dessus du Dieu des Chrétiens. On commençait les réunions par cette salutation : « Que celui à qui on a fait tort vous salue ! »



Lucifer était le surnom donné aux antiques Déesses porte-lumière. Vénus était appelée Lucifer le matin, ou l'Etoile du Berger, et Vesper le soir.
Les Templiers avaient une Divinité féminine représentant l'ancienne Déesse porte lumière, la Vénus-Lucifer. Leurs ennemis l'ont ridiculisé dans une caricature qui la représentait sous la forme d'une femme à tête de bouc et qu'ils ont appelée le Baphomet.

Du nom de Bélisama (Vénus) on a fait Basilique. C'est que cette Déesse va réorganiser l'ancien culte, jadis institué par les Mazdéens.
Le nom grec du feu est Pyr, d'où Pyramis, en égyptien Pyramide. Aussi les Pyramides étaient des Temples sacrés dans lesquels on se cachait et qui étaient construits de façon à en rendre l'accès impossible à ceux qui n'étaient pas initiés.
Le mot Pyr est phrygien.
Dans l'Edda suédoise, le feu est nommé fyr ou fur ; les Grecs, dit-on, prononçaient pyr comme nous prononçons pur.
Il existait en Orient des Temples du feu qu'on appelait Pyres. Il s'agissait du feu symbolique représentant l'Esprit.
C'est parce qu'il y avait des Temples du feu sur les montagnes qui séparent l'Espagne de la France qu'on les a appelées Pyrénées, et non parce qu'elles furent embrasées. Ces montagnes servirent de refuge aux femmes persécutées ; partout où elles étaient, celles-ci établissaient ce que, symboliquement, on a appelé le culte du feu, du Feu sacré.
Pyrénée fut le surnom de la Vénus adorée dans les Gaules, et, du reste, la mythologie nous dira que Pyrène, fille du roi Babrycinus, donna son nom aux montagnes de l'Ibérie.

Port-Vendres : Ce port, installé au pied des Pyrénées orientales, a succédé à un établissement fort ancien. Déjà les Phéniciens, qui exploitaient des mines d’or dans la montagne, y avaient fondé un comptoir important. Les Grecs mirent fin à leur domination et les chassèrent de la contrée... La ville s’appelait autrefois Portus Veneris : le port de Vénus.
Les Phéniciens sont originaires de la côte septentrionale de la Gaule. Au temps de César, ils avaient encore une grande supériorité maritime sur les peuples voisins, et possédaient à peu près tous les ports de la Gaule, situés sur cette côte, ainsi que les petites îles de l'Océan connues sous le nom de Veneticæ insulæ. Strabon nous donne les premières idées de cette origine en disant que les Vénitiens de l'Adriatique étaient une colonie de Vénètes gaulois. Vénitien et Phénicien sont des termes équivalents, le ph grec remplace notre lettre V. Il y a plus : on sait que le mot Phénicie vient du mot Phénix. Or, si nous écrivons ce mot avec un V au lieu du ph, nous avons Venix, dont les Latins ont fait Vénus. Et les Vénètes sont les disciples de Vénus.
En Gaule, ils avaient une importante colonie sur le territoire où l'on fondera la ville de Vannes. Ce nom, corruption de Veneta, restera dans certaines régions du Nord où la particule Van se mettra devant les noms pour les ennoblir. Cela indique serviteur de Vénus. Van est devenu Von chez les Saxons.






À suivre : LA RÉVOLUTION FRANÇAISE C'EST LA RÉSURRECTION DE LA FEMME