CELTES ET LATINS



« Le retour de l'occident à la civilisation passe par l'abandon de l'actuelle « Société de l'avoir » pour rendre à la « Société de l'être », parfaitement incarnée par la tradition culturelle française aujourd'hui malheureusement abandonnée, la prééminence qu'elle n'aurait jamais dû perdre. »
(Valérie Bugault)


En l'an 52, César vit la Gaule tout entière soumise à sa puissance.
C'est ainsi que, affaiblie par ses discordes intestines, elle ne put pas échapper à la domination étrangère qui se partagea ses dépouilles, ne trouvant plus en elle qu'un cadavre sans force.
C'est alors qu'on dut se souvenir, mais trop tard, des paroles de Valérie Velléda, prêtresse et prophétesse gauloise, qui disait aux Gaulois :
Est-ce là le reste de cette nation qui donnait des Lois au monde ? Où sont les États florissants de la Gaule, ce Conseil des Femmes auquel se soumit le grand Annibal ? Où sont ses Druides et ses Druidesses qui élevaient dans leurs collèges sacrés une nombreuse jeunesse ? Proscrits par les tyrans, à peine quelques-uns d'entre eux vivent inconnus dans des antres sauvages. Velléda, une simple Druidesse, voilà donc tout ce qui vous reste aujourd'hui.



« Est-il besoin de vous dire... que je suis sensible...
aux services qu'elle pourrait rendre à une prise de conscience de la culture française ? »
(Extrait d'une lettre d'André Malraux adressée à Henri Dontenville après la publication de La mythologie française, 1948)
Le peuple de ce pays-ci continuera t-il à s'ignorer ?


« Personne ne pourrait douter, en contemplant cette œuvre de la Providence,
qu’Elle n'ait disposé ainsi ce Pays avec intention et non au hasard ».
(Strabon, historien et géographe Grec, à propos de la Gaule)


« aujourd'hui plus que jamais, parce que, aujourd'hui, ce que l'on veut, ce que l'on compte déjà obtenir, c'est purement et simplement la disparition même de la France, le démantèlement sans retour de sa propre réalité historique et nationale, l'abrogation définitive de sa prédestination suprahistorique, de la mission occulte à l'avant-garde du combat de maintenance de l'Église dans l'histoire et, derrière celle-ci, du combat, dans l'invisible, du Royaume de Dieu, du Sanctum Regnum dont la France restera jusqu'à la fin la figure héroïque, mystique et sacrificielle, la figure de l'amoureuse élection divine qui s'est confidentiellement arrêtée sur elle à ses origines et qui la portera jusqu'à la fin du Saeculum. »
(J. Parvulesco, Le Retour des Grands Temps)


Il est des endroits, en effet, qui semblent avoir une destinée pressentie d'avance. C'est ainsi que le sol sur lequel la grande Vérité a été trouvée et enseignée jadis, l'ancienne Celtide, a gardé à travers les âges le germe d'une flamme intérieure que le temps ne devait pas éteindre, et qui est destinée à rendre à l'Univers sa première splendeur. L'enseignement druidique qui avait rayonné sur toute la terre gauloise avait été la base d'un ordre social sur lequel s'appuyaient des institutions conformes à la Vérité, des lois qui sanctionnaient la stricte justice. Mais la France s'est divisée parce que les races qui l'ont occupée dans le courant de son histoire avaient des atavismes divers. Il a fallu la longue occupation romaine, puis l'invasion du Franc et l'introduction par lui de la loi Salique, il a fallu vingt siècles d'oppression et de servitude « latines » pour nous faire oublier les traditions glorieuses de nos aïeux. Cependant, c'est de la France qu'on attend la lumière nouvelle qui recommencera une civilisation.
Précisons que quand nous parlons de la France, c'est-à-dire de l'ancienne Gaule, la Belgique y est comprise. Elle semble même avoir un rôle important dans cette occurrence. Nous avons souvent l'occasion de citer des auteurs belges. Ce sont eux, en effet, qui ont le mieux conservé l'atavisme de la grande race celtique.

« Le Ciel est sur la Terre », certes, mais en Terre de France, et il semble bien y avoir imprimé un sceau, marquant ainsi la prédilection du Démiurge pour ce pays qui nous apparaît, dés lors, sous son aspect sacré. Il n'est que de confronter le dessin du cercle des polaires successives ainsi projeté sur le sol, cercle que Jacques Bourlanges a tracé en une belle carte hors texte, avec celui de Jean Phaure, pour se rendre compte qu'ils sont absolument identiques. Tous deux sont un tracé précis de l'horloge zodiacale et précessionnelle, dont on pourrait dire que l'aiguille en est l'axe terrestre. »
(G. Béatrice & S. Batfroi, Terre du Dauphin et Grand Œuvre Solaire)

« Je ne répondrai pas dans ce cahier aux nombreuses interrogations que pose cette étude. Chacun aura compris l'importance notamment de la valeur actuelle des mesures, et pourtant, les Celtes n'utilisaient pas le même système que le nôtre. Le système en pratique à l'époque était le système duodécimal. Chacun s'interrogera, sachant que s'interroger, poser la bonne question, c'est déjà avancer vers la vérité. Cette étude contient des informations sous jacentes qui permettront à chacun de poursuivre sa propre quête. Certains ne voudront voir ici que le fruit du hasard, qu'ils gardent donc les yeux fermés ! (Ils ont des yeux pour ne point voir et des oreilles pour ne pas entendre … ). D'autres espèreront peut être trouver trésor ou richesses matérielles, qu'ils reçoivent cet avertissement, « Que s'écarte tout de suite celui dont l'esprit n'est pas pur et qu'il sache qu'il y a des lieux qui ne se laissent pas violer impunément ! ».  Que celui qui recherche sincèrement la lumière soit encouragé. Qu'il sache qu'il n'y a pas d'acte isolé dans l'univers. Tout ce qui se fait ici bas retentit à l'autre bout du monde. L'homme est une parcelle de l'univers. Son cœur est incliné comme l'axe terrestre, le nombre de ses pulsations et de ses respirations dans un jour est en rapport direct avec celui de la grande année précessionnelle. Tous les organismes vivants accordent leurs rythmes particuliers aux grands rythmes cosmiques. L'homme ne peut se réaliser que dans sa communion avec l'univers. Se mettre en harmonie avec le monde, c'est déjà participer au divin. Telle était la sagesse des anciens. »
(Jean-Louis Omnès, Roquepertus Sanctuaire initiatique Clef de la géographie sacrée)

« Je lis dans le visage humain avec la même émotion que dans les étoiles. Mais ces choses si lointaines et si secrètes ne le sont plus pour moi depuis que je sais où je suis. Je m'attache à rechercher surtout l'humble lumière des étoiles qui demandent un certain effort pour être aperçues, et le regard de ceux-là de mes frères dont la vie a le plus à m'apprendre. Ainsi, les matins d'hiver, dans la vapeur de troupeau du métropolitain, j'aime bien, de mon coin, observer ces ouvriers de Paris, ces enfants de la plus vieille civilisation, la seule vraie. D'aspect malingre mais très robuste, ils se rendent à l'usine ou au chantier, la poche à outils pendue à l'épaule. Sous la gouaillerie de surface, quel air de supputer la valeur réelle des êtres, des institutions, des fabrications, des idées. »
(Oscar Vladislas de Lubicz-Milosz, Les Arcanes)

« Aux trois questions existentielles s’offrant à toute conscience humaine : qui suis-je ? d’où viens-je ? où vais-je ? Pierre Dac ajoutait « et à quelle heure on mange ? ». Il apparait qu’au début du troisième millénaire, dans le pays de France à la culture magnifique et à la langue pleine de finesse, on se contente de la dernière question. »
(J. Kelen, L'enjeu métaphysique et spirituel d’un juste combat)



☆☆☆☆☆☆☆☆☆

Français divisés, pardonnez-vous de toute votre âme !
(Jehanne d'Arc)





Il n'y a aucune possibilité de satisfaire chez un peuple le besoin de vérité si l'on ne peut trouver à cet effet des hommes qui aiment la vérité.
(Simone Weil, L'Enracinement)


Pour la première fois, il y eut des sociétés secrètes dont les membres, unis par les mêmes principes, se juraient fidélité inviolable et se reconnaissaient même, parmi les autres initiés, à de certains signes. La société pythagoricienne fut la plus étendue et la plus féconde en grands hommes. C'est pour les imiter qu'on fonda les Orphiques, les Mithriaques, les Nazaréens, etc.. Les Esséniens, les Isiaques, les Samanéens, les Tao-sse furent d'autres sociétés féministes, fondées toutes dans le but d'arrêter la corruption, de secourir les femmes, de s'opposer au despotisme des rois ou aux débordements des peuples. Ces sociétés se multiplièrent partout.



CELTES ET LATINS
Il existe deux courants dans l'opinion des intellectuels : l'un qui prétend que la civilisation est venue des Latins ; l'autre qui affirme qu'elle est venue des Celtes.
Les Latins appuient leur opinion sur le droit romain qui a instauré la puissance paternelle, et proclamé la déchéance de la Femme, et sur la littérature latine qui a sanctionné cet état de choses.
Les Celtiques appuient la leur sur le droit naturel, le règne de la raison représenté dans sa plus haute manifestation par la Femme, la Déesse-Mère, qui régnait dans les Républiques Celtiques.
Donc, le conflit représente la lutte de sexes, et la résume.
Contrairement à ce que croient les Latins, la primitive civilisation prit naissance dans le pays qui fut le berceau des Celtes, et qui est compris entre la Manche et le Rhin. C'est là que s'est constitué le fond de la race celtique ; « Fixés sur leur base séculaire, dit M. Cailleux, ils occupent aujourd'hui les mêmes positions où l'histoire les a trouvés, la science ne peut sonder leur origine ni prévoir leur décadence. »
La race celtique a affirmé la supériorité de sa nature par son empire sur le monde entier où elle a porté la civilisation dont elle possède en elle les éléments, c'est-à-dire la supériorité de l'esprit, la bonté et l'audace. Il existe en elle un principe de vie, une action secrète et puissante qui l'anime en tous ses mouvements et lui donne un empire qui n'appartient qu'à elle.
Ce sont ces caractères qui lui ont donné une si grande puissance de développement. Elle n'a pas reçu la civilisation comme les Grecs et les Romains, elle l'a créée.
La race celtique fut vaincue par les Romains, qui semèrent partout le désordre et l'impuissance. Leur séjour dans la Gaule fut une éclipse dans la vieille civilisation ; il laissa comme trace de son passage les luttes féodales, basées sur l'ambition et le despotisme de l'homme qui ne reconnaît plus aucune loi morale, puis les dissensions autour du principe de la monarchie dynastique, imitation de l'empire romain, qui firent régner pendant quinze siècles la barbarie latine sur le sol où s'étaient développées jadis, dans le calme et la sécurité, les Républiques Celtiques.
Sur quoi prétend-on appuyer la culture latine ?
Sur la philosophie grecque qui avait renversé l'Ecole Pythagoricienne, dernier foyer de haute culture scientifique, auquel on substitua une série de sophismes qui aboutirent aux erreurs modernes. (Voir l'article sur La Grèce antique)
Les Romains, héritiers et continuateurs des Grecs, allèrent plus loin encore, et de tout ce fatras incohérent firent le dogme surnaturel et superstitieux qui a envahi le monde. (Voir l'article sur Les origines et l'histoire du Christianisme)
Les principes de l'empire romain furent le despotisme de la puissance impériale, appuyé sur la force et sur le code romain qui donne à l'homme le droit de vie et de mort sur l'esclave, sur la femme et sur l’enfant.
Ce sont ces principes-là que l'« impérialisme » laïc ou religieux représente aujourd'hui ; c'est lui qui continue Rome, ce n'est pas la France républicaine qui est restée celtique au fond. Il ne lui manque plus que de rendre à la Femme la place que ses aïeux lui donnaient pour être revenue à la civilisation des anciens Celtes.
C'est contre ce que Rome nous a légué de despotisme et d'erreurs que les civilisés actuels doivent se liguer, ce n'est pas pour faire renaître la culture latine qui n'a été qu'une forme de la décadence morale. C'est sur les ruines définitives du droit romain que s'élèvera le monde nouveau, basé sur le droit naturel.
Si nous jetons les yeux autour de nous, nous voyons que, actuellement, les révolutionnaires de la pensée qui veulent plus de vérité et plus de justice sont presque toujours ceux qui n'ont pas fait leurs humanités, c'est-à-dire ceux qui n'ont pas reçu l'empreinte fatale de la culture latine qui atrophie l'esprit et développe l'orgueil de l'homme ; ceux-là sont les continuateurs des Celtes-Gaulois, ils cherchent en avant un progrès qui n'est qu'un retour vers la civilisation détruite par les Romains.
Pendant que les Latins brûlaient les Livres sibyllins, les Druidesses qui enseignaient dans leurs collèges formaient l'âme gauloise.
Rome, c'est le passé, c'est la barbarie basée sur l'erreur, la superstition, le mensonge.
Il nous faut un régime de vérité, un idéal nouveau que la Femme seule peut faire renaître.




L'heure n'est plus, dis-je, de s'en tenir sur ce point à des velléités, à des concessions plus ou moins honteuses, mais bien de se prononcer en art sans équivoque contre l'homme et pour la femme, de déchoir l'homme d'un pouvoir dont il est suffisamment établi qu'il a mésusé, pour remettre ce pouvoir entre les mains de la femme, de débouter l'homme de toutes ses instances tant que la femme ne sera pas parvenue à reprendre de ce pouvoir sa part équitable et cela non plus dans l'art mais dans la vie.
(André Breton)




LES CELTES
L'histoire du pays sur lequel nous vivons et qui s'appelle actuellement la France, la Belgique, et la Grande-Bretagne, a eu quatre périodes très distinctes les unes des autres :
1° La première époque fut la période celtique ou pré-celtique ; l'âge divin (féminin).
2° La seconde fut la période gauloise, que les historiens appellent l'âge du fer. C'est le millénaire qui précéda notre ère ; l'âge héroïque (masculin).
3° La période gallo-romaine.
4° La période franque.
Notre pays a accompli, à travers ces périodes diverses, tout le cycle de l'évolution humaine.
Dans le premier âge, l'âge heureux de la jeunesse humaine, une civilisation grandiose régna ; ce fut l'Âge d'Or, résultant partout de la première organisation sociale basée sur la Gynécocratie (représentée par la Maîtresse ou la Reine), de la première organisation religieuse basée sur la Théogonie (représentée par la Déesse), et de la première organisation familiale basée sur le Matriarcat (représentée par la Mère). Ce fut l'époque celtique et pré-celtique.
Dans l'âge suivant se produisit la première révolte de l'homme contre le régime féminin.
Chez les Celtes, c'est l'âge du fer qui commence. L'homme dispute à la femme sa suprématie ; c'est la révolte des Gaulois (masculinistes), combattant les Celtes et leur disputant le pouvoir.
Vient ensuite l'âge de la décadence qui livre la Gaule à la puissance romaine.
Et cela se termine dans la quatrième période, l'âge de la corruption qui résulte partout du règne de la Force triomphante. (Comme cela est si vrai aujourd’hui)

LES DEUX SOURCES DE L’HISTOIRE
Il y a deux manières de faire revivre le passé : l'une consiste à le remettre sous nos yeux en y réintégrant les deux sexes qui en ont été les auteurs ; l'autre expose sommairement ce que les hommes de l'époque étudiée on dit ou fait, en se gardant de rien ajouter au témoignage de ceux qui se justifiaient de crimes, de délits, de fautes commises ; ceux-là multiplient les références parce qu'ils savent que les gens sincères peuvent leur reprocher leur partialité, puisqu'ils suppriment le rôle joué par la femme à l'époque qu'ils étudient. Ceci prouve qu'il y a toujours eu, dans le monde, deux partis bien tranchés représentant les deux sexes :
1- Des féministes affirmant leurs droits naturels et cherchant la justice dans le présent et dans le passé.
2- Des masculinistes donnant les droits féminins aux hommes et défendant leur usurpation par des ruses, des hypocrisies, des mensonges.
L'histoire écrite par les auteurs masculins s'occupe exclusivement de ce que font les hommes : la guerre d'abord, la conquête, le commandement, puis l'industrie et quelques notions concernant la vie privée, les mœurs, et ce qu'ils entendent par le mot religion.
Tout cela dans le but d'affirmer les droits donnés aux hommes par les codes masculins. Quant à la vie morale et spirituelle des femmes, il n'en est jamais question ; non seulement on néglige ce chapitre, mais on l'amoindrit en le désignant dédaigneusement sous le nom de fables ou de Mythologie.
C'est cependant cette partie de l'histoire qui explique toutes les origines, en même temps que toute la vie intellectuelle des peuples.
Ainsi, ce qui distingue les Celtes féministes des Latins masculinistes et annonce une divergence entre eux, ce sont les conditions de leur civilisation, leurs pratiques religieuses, leur éducation, leur science, leur morale, leurs notions ethnographiques, leur gouvernement, c'est-à-dire tout leur programme de vie.
En un mot, les Celtes sont féministes, tandis que les Latins et les Grecs sont masculinistes, et ces derniers sont si avancés dans la dégénérescence qu'ils ne cherchent de différence entre les peuples que dans les choses matérielles, concrètes ; le reste leur échappe, et ils traitent les plus « intellectuels », c'est-à-dire « spirituels », comme des ennemis.
Donc, quelle valeur donner aux documents latins ?
« Les qualités et les défauts des Celtes n'ont été rapportés que par leurs ennemis », dit Dottin.
Les opinions des anciens sont du reste loin de concorder exactement.
Nous en trouvons de très favorables. Dans César, ils nous apparaissent comme livrés aux recherches de pure spéculation.
Dans Tite-Live, ils franchissent leurs barrières pour répandre au loin leurs émigrations et leurs idées. « Nul peuple, à aucune époque, n'a élevé plus haut ses recherches et propagé plus loin ses découvertes. » La colonisation de l'Inde par les anciens Celtes est connue.
L'histoire glorieuse de la Celtide a été cachée par les historiens grecs et romains parce qu'elle était à la gloire des femmes.
C'était une gynécocratie fondée sur le droit naturel. Les détracteurs de ce régime nous représentent les habitants du pays celtique, avant l'invasion romaine, comme des sauvages occupant une contrée presque déserte, et dont la température était âpre et froide. Guizot ose dire : « Les rivières gelaient presque tous les hivers assez fort pour être traversées par les chariots », ce qui est faux, car il est avéré que la température, plus élevée dans les temps anciens, s'abaisse graduellement. Mais ce mensonge est destiné à faire croire que le régime de l'homme apporte tous les progrès, même ceux du climat.
Chacun, parmi les anciens, leur attribue ses vices. « Aristote, Diodore et Athénée ont accusé les Celtes de pédérastie parce que c'était leur cas, mais les écrivains romains ne leur attribuent pas ce vice » (Dottin).
La haine des Latins pour les Celtes est telle que certains auteurs vont jusqu'à leur attribuer tous les crimes. D'après Pausanias, les Celtes « buvaient le sang des petits enfants et goûtaient de leur chair » (Dottin).
Remarquons aussi les ruses des savants modernes pour empêcher que la Vérité soit dite.
M. Dottin, que nous citons souvent, dit dans ses Etudes sur l’Antiquité celtique (p. 54) ceci :
« Parmi les inscriptions découvertes dans les pays qui portent dans l'antiquité le nom de celtiques, il en est quelques-unes qui sont rédigées en une langue qui n'est ni le grec ni le latin », et la crainte d'en découvrir le sens est exprimée par ceci :
« Tant qu'on ne les aura pas expliquées d'un bout à l'autre à l'aide des formes anciennes des langues celtiques, actuelles, il serait téméraire de leur donner le nom d'inscriptions celtiques. Du fait qu'on y trouve des noms propres celtiques on ne saurait rien conclure. Si même on découvre dans une inscription quelques mots qui, expliqués à l'aide des langues celtiques, auraient un sens vraisemblable, il est peu scientifique d'en tirer une conclusion sur la langue de l'ensemble de l'inscription, les coïncidences fortuites entre les mots appartenant à des familles de langues différentes n'étant pas rares ».
C'est ainsi qu'on prépare d'avance des arguments pour répondre à ceux qui apporteraient des découvertes nouvelles en faveur de la cause féministe.

LES PRÉ-CELTIQUES OU HYPERBORÉENS
On ne considère pas les Celtes comme les premières races ayant habité l'hémisphère boréal. Avant eux, on sait qu'une race pré-celtique a existé et peuplé la moitié de la terre, ce sont les Hyperboréens (1).
« Il est possible, dit Dottin, que le nom d'Hyperboréen, qui a désigné une race mythologique, peuple de l'âge d'or, habitant un pays fertile, ait été aussi une expression géographique. Héraclide du Pont, à la fin du IVème siècle avant notre ère, avait écrit que, d'après une nouvelle qui venait de l'ouest, Rome avait été prise par une armée qui venait de chez les Hyperboréens. A la même époque, Hécatée d'Abdère plaçait en face de la Celtique, le long de l'Océan, une île aussi grande que la Sicile, qui s'étendait vers le nord et était habitée par les Hyperboréens. Dans ces textes, le mot Hyperboréen semble être synonyme de Celte » (Etudes sur l'antiquité celtique, p. 22).
(1) « Ce que nous voulons dire ici, c’est que la tradition celtique pourrait vraisemblablement être regardée comme constituant un des « points de jonction » de la tradition atlante avec la tradition hyperboréenne, après la fin de la période secondaire où cette tradition atlante représenta la forme prédominante et comme le « substitut » du centre originel déjà inaccessible à l’humanité ordinaire ; et, sur ce point aussi, le même symbolisme que nous venons de mentionner peut apporter quelques indications qui ne sont pas sans intérêt. Remarquons tout d’abord l’importance donnée au symbole du sanglier par la tradition hindoue (varâha en sanscrit), elle-même issue directement de la tradition primordiale, et affirmant expressément dans le Vêda sa propre origine hyperboréenne. (...) la racine « var » (sanscrit), pour le nom du sanglier, se retrouve dans les langues nordiques sous la forme « bor » (de là l’anglais « boar », et aussi l’allemand « Eber ») ; l’exact équivalent de Vârâhî, « terre du sanglier », est donc « Borée », et la vérité est que le nom habituel d’« Hyperborée » fut employé seulement par les Grecs à une époque où ils avaient déjà perdu le sens de cette antique désignation ; il vaudrait donc mieux, en dépit de l’usage qui a prévalu depuis lors, qualifier la tradition primordiale, non pas d’« hyperboréenne », mais simplement de « boréenne », affirmant par là sans équivoque sa connexion avec la « Borée » ou « terre du sanglier ». » (R. Guénon, Symboles fondamentaux de la Science Sacrée, Le Sanglier et l'Ourse

LES BORÉENS ET LES SUDÉENS
Toutes les races sont autochtones ; nous nions les émigrations en masse de peuples entiers.
La race blanche habitait l'hémisphère boréal parce que c'est là qu'elle était sortie de la végétation boréale qui avait été son état embryonnaire. (1)
Une race noire, plus ancienne, était sortie de la végétation tropicale d'Afrique et d'une partie de l'Asie.
La race rouge, moins connue, s'était développée sur les hautes montagnes de l'Amérique du Nord. Cette race avait possédé l'hémisphère occidental, pendant que la race jaune possédait l'oriental.
(1) Voir l'article sur nos véritables origines

LEURS LUTTES
Dès que ces hommes de races diverses furent mis en contact, des rivalités se manifestèrent. La race noire, qui avait mûri plus vite que les autres dans les régions de l'Equateur, était entrée dans la vie à une époque où la race blanche possédait encore la pureté de l'enfance. Cela causa aux blancs hyperboréens de l'horreur pour cette race, en même temps que la couleur noire de leur peau les dégoûtait.
Fabre d'Olivet croit que la race noire fut appelée Suthéenne et que les blancs firent de leur pays le domicile de l'esprit infernal, appelé pour cette raison Suth ou Soth par les Égyptiens, Sath par les Phéniciens, et Sathan ou Satan par les Arabes et les Hébreux. Ce nom a servi de racine à celui de Saturne chez les Étrusques, et de Sathur, Suthur ou Surthun chez les Scandinaves, divinité terrible ou bienfaisante suivant la manière de l'envisager. C'est du celte saxon Suth que dérivent l'anglais South, le belge Sugd, l'allemand et le français Sud. Ce mot désigne proprement tout ce qui est opposé à l'élévation, tout ce qui est bas, tout ce qui sert de base ou de siège. Le mot sédiment en dérive par le latin sedere qui, lui-même, vient du celte saxon sitten, en allemand stizen, s'asseoir (Fabre d'Olivet, L'Etat social de l'homme, p. 91).
Donc, d'après cette doctrine de d'Olivet, la première lutte des hommes avait été celle des Sudéens contre les Boréens, des noirs contre les blancs.
Les noirs sont plus forts que les blancs parce qu'ils sont plus avancés dans l'évolution sexuelle.
Mais les Boréens ont une supériorité morale, ils sont purs, alors que les noirs sont les impurs.
Et c'est ce qui explique que le mot Boréen est devenu un titre d'honneur, dont on a fait Baron en Europe (1). Le titre de Barons et de hauts Barons que s'attribuaient les Hyperboréens signifiait vainqueurs. Et c'est pour cela que ce peuple entrait dans la vie sociale avec la réputation d'un peuple vainqueur. Mais les Sudéens, pour se défendre, donnaient au mot qui les désignait une signification aussi glorieuse : « ils mettaient leur gloire dans le mot Syd qu'on écrit mal à propos Cid » (Fabre d'Olivet, t. I.p. 129).
Les Celtes appellent leurs ennemis Pélasks, c'est-à-dire peaux tannées (Pélaskon, Pélasges). La région qui entoure toute la mer Méditerranée portait autrefois le nom de Pélasques, parce que des peuples noirs la possédaient.
Le Péloponèse, nom qui vient de Pélops, signifie archipel. Ce mot est remarquable parce qu'il signifie : ce qui domine sur la mer noire. Mais il peut se faire que le mot noire ait été pris symboliquement pour représenter la méchanceté ; alors, ce ne serait pas d'une lutte de races qu'il s'agirait, mais d'une lutte morale dans une même race (2).
Il est resté dans les anciennes traditions que les noirs sont les peuples ignorants, livrés aux instincts de la bête humaine, ce qui devait horripiler les femmes boréennes. Aussi la première lutte entre les deux races est au fond une lutte de sexes, c'est-à-dire une lutte entre les deux instincts spirituel et sexuel ; et ceci va mieux nous faire comprendre pourquoi cette première lutte est d'ordre moral.
Fabre d'Olivet dit : « Hébé, dans l'idiome phénicien, est le nom de l'amour féminin spirituel, Chaos est le principe masculin matériel. La secte qui adopta cette cosmogonie fut très répandue et très nombreuse : c'est celle des anciens Celtes. Le mot Chaos, opposé à celui d'Hébé, développe l'idée de tout ce qui sert de base aux choses, de résidu, comme le marc, l'excrément, le caput mortuum, c'est en général tout ce qui demeure d'un être après que l'esprit en est sorti ».
La couleur blanche représente la Vérité, la science chez les Celtes ; le mot blanc est synonyme de sage, de spirituel. On dit en allemand Weiss, blanc, et Wissen, savoir ; ichweiss, je sais. En anglais, white, blanc, et wit, esprit, witty, spirituel, wisdom, sagesse.
On donne le nom de noir aux pays occupés par des nègres.
Pélasgès, terre noire, était le nom de la Grèce quand elle était occupée par les peuples noirs. Les Héraclides qui vainquirent les Pélopides sont des Boréens appelés Hérules.
Les peuples dont on trouve les noms dans les anciens auteurs, compris ordinairement sous le nom générique de Celtes ou de Scythes, n'étaient, au fond, que les divisions d'un seul et même peuple, issu d'une seule et même race : les Boréens. Le nom de Celtes qu'ils se donnaient, en général, à eux-mêmes, signifiait les supérieurs, les illustres, les purs. Le nom de Scythes que leur donnaient leurs ennemis signifiait, au contraire, les impurs, les réprouvés ; il venait du mot cuth, ou scuth, appliqué à toute chose qu'on éloigne, qu'on repousse ou qui repousse. Il désignait au propre un crachat. C'était par ce mot injurieux que la race noire caractérisait la blanche, à cause de la couleur du crachat.
De là l'habitude de cracher en signe de mépris.
(1) Chez les peuples du Nord, l'homme bestial était comparé à l'Ours. Le mot « barbare » ou « berber » (de bær-bor) signifiait chez les Boréens ceux qui portent l'ours, les hommes chasseurs, les insociables, doués d'une grande force musculaire. Par extension, on arriva à appeler ces hommes des ours, ce qui voulait dire des gens non policés, vivant entre eux, loin des autres, et ne sachant pas se conduire dans la société des femmes. Cette épithète, d'abord mal prise, fut plus tard acceptée, et l'homme par réaction s'en para, comme d'un titre glorieux. Dans le blason armorial commun des temps primitifs, l'ours figurait, et son nom « bor » (ours dans les langues Scandinaves) devint la racine du mot Boréen. Quand vint la grande lutte de l'homme contre la Femme, c'est l'Ours, l'homme barbare, qui devint le lumineux ; l'homme se déifia et se fit si grand qu'il se compara au soleil.
(2) Les Grecs, au lieu de « Ethos » (morale), supposèrent pour racine « Aithos » qui signifie noirceur, et sur cette étymologie fictive ils transformèrent tous les Ethiopiens en noirs. Les Druides étaient appelés Ethi-opiens (« éthos », mœurs, « ops », terre) parce qu'ils prêchaient la morale. Pline énumère 45 peuples qui, dans des pays très éloignés les uns des autres, portaient ce nom, ce qui prouve qu'une seule morale régnait sur la Terre, celle qui était donnée dans les grands Livres sacrés des temps primitifs. En Abyssinie, en Colchide, en Mauritanie, dans les îles de la Méditerranée, on trouve des peuples appelés Ethiopiens et vivant sous la loi morale, Ethos, d'où Ethique, terre des hommes purs.
Dans l'Iliade, il est parlé des vertueux Ethiopiens, et, dans l'Odyssée, on mentionne les fêtes religieuses éthiopiennes.


La Chute de Númenor : une variante particulière de la tradition de l'Atlantide
(J. R. R. Tolkien)


LA LÉGENDE DES ATLANTES
On s'étonne de l'amour des anciens pour les îles, et l'on remarque que tout ce qu'il y a de sacré, de grand et d'antique s'y serait passé.
Evhémère raconte des merveilles à propos de ce que l'on trouve écrit en caractères d'or sur une colonne, dans l'île de Panchaïe.
Des îles sacrées étaient situées au delà de l'Angleterre, où Plutarque place le séjour des Daïmons et des Demi-Dieux. Diodore de Sicile parle de Basilée, située à l'opposite de la Scythie et au delà des Gaules (T. II, p. 225).
Pline donne à cette même île le nom d'Oséricta ou Océriclea, mot qui signifie dans les langues du Nord « île des Dieux-rois, île royale des Dieux ». La Bretagne, pour les Mystères de ses monuments druidiques, fut appelée « Ile des Dieux ».
C'est dans l'île Basilée, dit-on, qu'on recueille l'ambre. Or l'ambre est un symbole dont nous avons expliqué la signification profonde dans l'introduction de ce blog. Une île appelée Eixoia était surnommée l'île du bonheur (1).
Les Orientaux nous parlent encore d'une mer obscure, d'une région ténébreuse, où sont les îles fortunées, où se trouve la fontaine de vie (Fontaine de vie, Fontaine de Jouvence est une autre manière d'exprimer ce que l'ambre représentait.) (Herbelot, p. 393). Ce sont les Champs-Elysées de l'Âge d'Or, c'est le pays des Fées.
Or, si les îles ont un si grand rôle dans l'histoire, c'est que c'est dans des îles que se réfugièrent les Féministes quand l'homme s'empara des continents pour y exercer sa domination.
Si les îles prennent le caractère de « Séjour Divin » (2), c'est parce que ce fut là que les Déesses continuèrent l'enseignement des hautes vérités de la Nature et des lois de la morale. Pendant que les oracles des Latins étaient donnés par une Sibylle, ceux des Celtes l'étaient par une Mermine (de Mær et mine, fille de la mer). C'est dans l'île de Philæ (3) que se réfugièrent les dernières prêtresses égyptiennes ; dans l'île de Sein que s'abritèrent les dernières Druidesses.
Dans la langue indienne et malabare, le mot Div signifie île. Les Portugais possèdaient aux Indes, dans le royaume de Guzarate, une ville nommée Diu parce qu'elle est bâtie dans une île. Cette signification est évidemment dans les noms des îles Mal-dives et Laque-dives.
L'île de Ceylan porte chez les Arabes le nom de Seran-dib, mot à mot « île de Seran », parce que les Arabes, n'ayant pas le V dans leur langue, y ont substitué le B.
Dive ou duve signifie aussi colombe et Duveland veut dire île des colombes.
Hésiode dit que l'île des Hespérides, ou des Gorgones, est au delà de l'Océan, au bout du monde et dans le pays où habite la nuit (Théog., V, 274) ; en Scandinavie ou en Angleterre.
« La nuit, dit également Hésiode (Théog., V,211), a enfanté les Hespérides qui gardent les pommes d'or au delà de l'Océan. Atlas, dans la région des Hespérides et aux extrémités du monde, plie sous la nécessité et sous le poids du ciel porté sur ses épaules ».
Apollodore dit : « Les pommes d'or enlevées par Hercule ne sont point comme quelques-uns le pensent dans la Lybie, elles sont dans l'Atlantide des Hyperboréens » (Mytholog., liv. II).
C'est avec ces données qu'on a fait la légende de l'Atlantide.
Olaüs Rudbeck place en Scandinavie l'Atlantide de Platon ; Bailly met le berceau de toute la science, de tous les arts, de toutes les mythologies du monde au Spitzberg.
Il en est parlé dans le sixième chapitre du Sépher (la Genèse), sous le nom de Ghiboréens, dont les noms ont été si célèbres dans la profondeur des temps.
Les Ghèbres sont un reste de peuples appelés dans le Sépher Ghiborim (Ghiboréens) et que les Grecs ont connus sous le nom d'Hyperboréens, les seuls qui en ont conservé le nom.
« On trouve cent fois le nom des Hyperboréens dans les écrits des anciens et jamais aucune lumière sur leur compte. » Un certain Aristèe de Proconèse, qui avait fait, dit-on, un poème sur ces peuples et qui prétendait les avoir visités, assurait qu'ils occupaient la contrée du nord-est de la haute Asie que nous nommons aujourd'hui Sibérie.
Hécatée d'Abdère, dans un ouvrage publié du temps d'Alexandre, les rejetait encore plus loin et les logeait parmi les ours blancs de la Nouvelle Zemble, dans une île appelée Elixoia.
Eschyle, dans son Prométhée, les plaçait sur les monts Riphées.
Diodore de Sicile dit que leur pays est le plus voisin de la Lune.
« Les Atlantes, ajoute Diodore de Sicile, habitent une contrée maritime et très fertile. Ils diffèrent de tous leurs voisins par leur piété envers les Dieux (qui à ce moment sont des Déesses) et par leur hospitalité. Nymphe est le nom que portaient toutes les Femmes dans le pays des Atlantes » (Diodore, T. I, p. 454, traduction de Téraffou).
(1) Il y a une remarque à faire sur la représentation du centre spirituel comme une île : l'île demeure immuable au milieu de l'agitation incessante des flots, agitation qui est une image de celle du monde extérieur ; et il faut avoir traversé la « mer des passions » pour parvenir au « Mont du Salut », au « Sanctuaire de la Paix » ; « Le Yogî, ayant traversé la mer des passions, est uni avec la Tranquillité et possède le « Soi » dans sa plénitude », dit Shankarâchârya (Atmâ-Bodha).
(2) Dans les pays où ont pénétré les colonies des Celtes on doit s'attendre à trouver la religion associée aux arts et le souvenir de l'Ile-Mère (l'Ile des Dieux, la Bretagne), (Th. Cailleux).
(3) Île submergée dans les années 1970 par la hausse du niveau du lac de retenue de l'ancien barrage d'Assouan à la suite de la construction du haut barrage.


Le grand secret de la civilisation Celte
(Jacques Bergier, à propos de Numinor dans la Trilogie cosmique de C.S. Lewis)


ORIGINE DE LA LÉGENDE
Mais ce qui motiva la légende, c'est un chapitre de la loi des sexes dont on fit un mystère et que l'on cacha dans l'histoire d'un continent disparu.
Atala, la femme boréenne, a dépassé les hommes dans son évolution. C'est un fait connu que la jeune fille de 12 à 18 ans progresse en intelligence et en beauté plus que le jeune homme ; elle dépasse le garçon retardé dans son évolution par la crise de l'adolescence.
Nous avons expliqué rapidement dans l'introduction de ce blog cette doctrine qui est la base même de la religion, c'est-à-dire du culte que l'homme rend à la femme à l'époque où il la voit si supérieure à lui.
Les Hyperboréens sont donc une race supérieure, dans laquelle les femmes primitives ont devancé les hommes et ont organisé la vie sociale d'après leurs conceptions féminines. Cette primitive histoire a été conservée, quoique voilée, dans la légende des Atlantes.
La première forme de la légende nous montre Atalante, la Femme dépassant l'homme adolescent dans son évolution. Celui-ci se voyant dépasser veut la retarder et pour cela emploie le piège de la séduction ; l'amour arrête la Femme et la livre à l'homme qui, alors, se met en avant.
Voici les termes de la légende :
« Atalante, recherchée par de nombreux amants, promit sa main à celui qui la vaincrait à la course ; une foule de prétendants avaient déjà succombé ; Hippomène enfin, implorant le secours de Vénus, reçut de la Déesse trois pommes d'or et entra en lice ; chaque fois qu'il se voyait sur le point d'être dépassé, il jetait une pomme ; Atalante, s'amusant à la ramasser, retarda ainsi sa course et fut prise ».
Les pommes d'or symbolisent l'amour masculin.
Le nom d'Atalante a servi à faire le verbe adelantar (dépasser, surpasser) dans le vieux celte ; il s'est conservé en espagnol. Adelante, qui veut dire « en avant », est resté un nom de femme : Adèle ou Atala (d'où Atlas, la force morale qui soutient).
Atlas qui porte le globe sur ses épaules, c'est Atala, la Déesse (1).
Les Atlantes n'étaient pas confinés d'abord dans des îles, ils étaient partout, puisque c'était la race primitive, qui se soumettait aux lois de la Gynécocratie et de la Théogonie. Mais comme cette race fut partout persécutée, elle se réfugia dans les îles du grand Océan qui existait à l'Occident de l'Europe. Cet Océan prit le nom d'Atlantique parce que les Atlantes étaient venus s'établir dans ses îles.
Ce qui ne veut pas prouver, du reste, qu'il n'y eut pas un effondrement de terre dans la mer à une époque antérieure, ou une augmentation des eaux qui submergea quelques îles...
On connaît la guerre des Athéniens contre les Atlantes, c'est-à-dire contre ceux qui défendaient le régime féministe. Elle est mentionnée par Platon dans son Timée, où il fait parler un prêtre égyptien qui dit aux Grecs :
« Vous ne savez pas quelle était dans votre pays la plus belle et la meilleure génération d'hommes qui ait jamais existé ; il ne s'en est échappé qu'une faible semence dont vous êtes les descendants. Nos écrits rapportent comment votre république a résisté aux efforts d'une grande puissance qui, sortie de la mer Atlantique, avait injustement envahi toute l'Europe et l'Asie. » (Cette grande puissance, c'est la Celtide.)
Bailly, qui rapporte ces paroles, ajoute : « Lorsque Platon parle de la plus belle et de la meilleure génération qui ait jamais existé, il veut peindre par la plus belle une génération éclairée et instruite ; quand il la désigne pour la meilleure, il entend qu'elle avait des mœurs et des lois respectées. Si nous ne considérons que le physique de ces expressions, le beau serait la nature régulière et fleurie, le meilleur la nature forte et puissante ; mais nous écoutons un poète philosophe : le beau, c'est l'instruction ; le meilleur, c'est la vertu. Platon parlait donc d'un peuple antérieur, savant, policé, mais détruit et oublié, aux Athéniens, à ce peuple spirituel, léger, aimable, semblable en tout à nos Français.
« La conquête qui a tout bouleversé a mis la barrière d'un immense désert entre les peuples dont Platon nous parle et les peuples connus qui ont place dans l'histoire. On a daté de l'époque des nouveaux établissements, tout le reste est effacé ».
Mais ce qui a précédé cette époque est très intéressant.
Nous apercevons des peuples perdus comme celui que nous vous avons fait connaître. Si les sciences nous ont prouvé la nécessité d'un peuple détruit, l'histoire nous en offre des exemples.
Le peuple Atlantique, le peuple qui lui a résisté, sont perdus pour le temps, on ne sait dans quel siècle on doit les placer ; ils sont perdus pour le lieu, car l'Atlantide même a disparu. On dit que les abîmes de la mer l'ont englouti comme pour nous dérober le berceau de ces peuples.
Mais, en même temps que Platon nous apprend leur existence, il nous montre une grande invasion qui motive la perte des arts, des sciences et des lumières. Cet événement mérite toute notre attention. (C'est ce qu'on a appelé le déluge de Ram.)
« Oh ! Solon, Solon, disait le sage égyptien, vous autres Grecs, vous êtes toujours enfants ; si âgés que vous soyez, aucun de vous n'a l'instruction et l'expérience de son âge. Vous êtes tous des novices dans la connaissance de l'antiquité, vous ignorez ce qui s'est passé jadis, soit ici, soit chez vous-mêmes. L'histoire de 8.000 ans est écrite dans nos livres sacrés, mais je puis remonter plus haut et vous dire ce qu'ont fait nos pères pendant 9.000 ans, c'est-à-dire leurs institutions, leurs lois et leurs actions les plus éclatantes ».
Reprenons le récit que Platon nous fait de l'Atlantide : « Cette mer, dit le prêtre égyptien qui parle dans le Timée, était alors guéable ; sur les bords était une île vis-à-vis de l'embouchure que dans votre langue vous nommez Colonnes d'Hercule (le détroit de Gibraltar), et cette île était plus étendue que la Lybie et l'Asie ensemble. Dans cette île Atlantide, il y avait des rois dont la puissance était très grande, elle s'étendait sur toute cette île, sur plusieurs autres et sur des parties du continent. Ils régnaient en outre, d'une part, sur tous les pays depuis la Lybie jusqu'en Egypte, et, de l'autre, savoir du côté de l'Europe, jusqu'à Tyrrhénia. C'est alors que votre république s'est montrée supérieure à tous les mortels par la force et la vertu. Elle commandait à ceux de vos peuples qui ne l'avaient pas abandonnée ; elle triompha de ses ennemis et elle érigea des trophées de sa victoire. Mais lorsque dans les derniers temps il arriva des tremblements du globe et des inondations, tous vos guerriers ont été engloutis par la terre dans l'espace d'un jour et d'une nuit, l'île Atlantide a disparu dans la mer. C'est pourquoi la mer qui se trouve là n'est ni navigable ni reconnue par personne, puisqu'il s'y est formé peu à peu un limon provenant de cette île submergée. »
Puis ce prêtre qui se vante de connaître l'histoire de 9.000 ans va raconter ce qu'étaient le gouvernement et la religion du peuple primitif qui avait vécu sur cette île disparue, et nous pensons déjà que nous allons avoir là des données intéressantes sur le régime antérieur. Quelle n'est pas notre surprise en voyant que tout cela a été imaginé et arrangé pour faire croire aux naïfs de ce temps que le régime de la monarchie masculine, alors mal affermi et discuté, que les hommes voulaient faire prévaloir et la religion des prêtres grecs ont une haute antiquité, qu'ils ont toujours existé, puisque c'est ce régime et cette religion qui régnaient chez les Atlantes, ce peuple primitif disparu.
Quand on aperçoit cette grossière imposture, on n'attache plus aucune valeur aux écrits de Platon et on doute même de l'existence de l'Atlantide.
Dans le dialogue intitulé Critias, il remonte jusqu'à l'origine de l'homme apparu sur cette île mystérieuse, et nous dit que le premier couple sorti de la terre s'appelait Evenor (c'est l'homme qui porte ce nom dérivé de Eva) et Leucippe, est le nom donné à la femme ; ce couple a une jeune fille, Clito (nom symbolique), qui engendre cinq couples d'enfants mâles jumeaux (les races), pas de filles, ce qui n'empêche que c'est de ces dix enfants mâles que sort toute la population de l'île. Ce sont déjà les idées que nous verrons deux siècles plus tard mettre dans la traduction de la Bible la Version des Septante, qui elle aussi fera commencer la génération par trois enfants mâles. Ceci nous révèle l'état d'esprit de ces hommes. Mais continuons l'exposé du gouvernement de l'Atlantide. Parmi ces dix fils, il y en a un qui s'appelle Atlas. C'est lui qui, dans le partage des terres, a le centre de l'île, et lui donne son nom, Atlantique. Le royaume était transmis à l'aîné de la famille, voilà le principe de l'hérédité monarchique. Jamais Prince n'a eu ni n'aura de richesses semblables à celles de ces rois. Puis suivent des descriptions de la somptuosité des palais des rois, et du temple de Neptune, recouvert d'or, dont les voûtes étaient d'ivoire ciselé et le pavé d'argent et d'orichalque. Là étaient des statues d'or ; celle du Dieu monté sur un char tiré par six chevaux ailés, entouré de cent Néréides assises sur des dauphins. A l'entour étaient placées les statues de tous les Rois qui avaient succédé à Atlas et à ses frères.
Les prêtres d'Egypte, soigneux de conserver les usages antiques, montrèrent également à Hérodote (autre mensonge) les statues de 341 Rois qui avaient régné sur eux.
Puis Platon nous dit que chacun des dix chefs régnait dans son district et dans ses villes, sur ses sujets et selon ses lois. Cette société d'empire, semblable au gouvernement des Amphictyons de la Grèce, était établie en conséquence d'un ordre précis de Neptune, exprimé dans une loi respectée et gravée sur une colonne qui était dans son temple (voilà déjà l'homme qui règne par droit divin).
C'est dans ce temple que les dix chefs s'assemblaient alternativement tous les cinq ou six ans, ayant les mêmes égards pour le nombre pair et impair.
Or, dans ces temps de symbolisme, les nombres pairs et impairs représentaient l'homme et la femme.
L'homme est double (pair), la femme est simple (impaire), c'est le Dieu un, et toute l'antiquité s'était agenouillée devant l'un, l'unique, l'indivis, jusqu'au jour où l'homme revendiqua pour lui la moitié des hommages.
Ce fut alors, pendant un temps, l'égalité des sexes, et c'est ce régime que Platon met chez les primitifs habitants de l'Atlantide !
Platon nous montre ensuite ces insulaires pratiquer dans un temple la religion des prêtres, immoler un taureau, remplir un vase de son sang, en verser une goutte sur chacun d'eux, et enfin réaliser toutes les folies de la Grèce en décadence.
L'antiquité parle de la merveilleuse république des Atlantes comme remontant à la même antiquité que l'Egypte. On a donné des chiffres : Bunsen dit 21.000 ans, Mme Blavatsky dit 31.105 ans. D'autre part, au rapport des prêtres égyptiens, il y a 12.000 ans que les habitants de l'Atlantide arrivèrent sur nos plages, envahissant l'Espagne, l'Italie, la Sicile.
Diodore de Sicile ajoute que ces peuples avaient inventé la sphère (ce qui veut dire qu'ils connaissaient toute la Terre représentée par l'Atlas), qu'ils avaient dominé le monde entier (force de l'Atlas), et qu'ils fondèrent des villes.
(1) Aigle, en langue teutonne, se rend par Adelær, et Adèle veut dire Noblesse. Atlas est formé de Atel as ou Adel as, chef de Noblesse. Donc les Aigles représentent la Nation Atlante. Aëtos ou Aietos, en grec, signifie Aigle. C'est le nom donné au roi de Colchide, possesseur de la Toison d'or, frère de Circé, Déesse emblématique de la Communion religieuse des Atlantes (DE GRAVE, La République des Champs Elysées, t3).

RELATIONS DES EUROPÉENS ET DES AMÉRICAINS PRIMITIFS
On s'est demandé comment il se fait que les habitants du vieux monde ont pu communiquer avec ceux du monde nouveau dans la haute antiquité, ainsi, que l'attestent les anciens souvenirs qui sont les mêmes partout, puisque partout les mêmes idées, les mêmes traditions ont été retrouvées.
Nous pensons que cette communication a pu s'accomplir par terre, attendu que, à cette époque reculée, la mer Atlantique ne devait pas avoir une aussi grande étendue que dans les temps modernes, puisque l'eau augmente sur la terre. Il devait y avoir une terre qui reliait les deux mondes par le Nord.
Ce n'est que depuis l'envahissement de l'eau que les deux mondes sont séparés par une large mer. Il n'y a pas eu effondrement d'un continent, mais submersion de plusieurs îles.
L'Amérique s'appelait Antila (d'où est resté le mot Antilles). Une carte d'André Bianco se trouve à la Bibliothèque de Saint-Marc, à Venise, elle fut faite en 1436 et parle de l'Amérique sous le nom d'Antila.
Les deux frères Zeno, vénitiens, pénétrèrent en Amérique par le Nord-Ouest de l'Europe vers 1380, ils nommèrent le pays où est le banc de Terre-Neuve, Friesland.
Dans l'atlas d'André Bianco, Terre-Neuve est appelé Stoka-fixa (d'où l'on a fait Stockfisch).
Chez les peuples Ibériques, on savait par d'antiques traditions qu'il existait au delà de l'Océan un pays que certains nommaient Ile de la main, de ce que la divinité s'appelait Maïr, Mœra ou Mana (Mère).
On fit une légende sur le mot main. On raconta qu'une main en sortait la nuit pour saisir ceux qui s'approchaient.
M. Cailleux nous fait remarquer (Origine celtique, p. 463) que Mair-Monan, le Dieu des mexicains, n'est autre chose que la Déesse Mère (Maïr, Mœra), et il nous montre que par toute la Gaule on trouve des inscriptions rappelant la même Déesse, Deabus Mœrabus.
Le vrai nom est donc Mair, exactement écrit comme dans Mair-Monan, ce qui établit une communication d'idées entre l'ancien Mexique et l'ancienne Gaule.
(Cette Déesse porte dans une main cinq pommes de pin et dans l'autre une couleuvre ondulante.)
À propos de ces anciennes relations « transatlantiques », Godefroy de Roisel dans « Études anté-historiques : les Atlantes », dit : « Il est acquis qu'un peuple colonisateur étendit ses conquêtes sur les deux rives de l'Océan atlantique et domina sur toute l'Europe occidentale. Après la ruine de la mère-patrie, quelques-unes de ces colonies, gardiennes fidèles de la science, prospérèrent en diverses contrées, jusqu'aux temps relativement modernes des premières invasions asiatiques, qui furent suivies d'une période d'équilibration, pendant laquelle tout semble avoir été perdu. Notre histoire date des ces époques de confusion ; et c'est à peine si l'on soupçonne aujourd'hui que ce véritable moyen-âge succédait à une antique prospérité. »
Dans le Massachusetts (USA, Nouvelle-Angleterre), on voit des inscriptions phéniciennes gravées sur des roches (Malte-Brun, L. CXI).
En Amérique, le mot Hour (qui vient de Houri) signifie pro-stituée (premier-état), c'est-à-dire femme de l'ancien régime.
Le comte Maurice de Bregny, archéologue français, a découvert au Guatemala, dans le district de Peten, les vestiges d'une immense cité de l'époque des Mayas, c'est-à-dire de Maïr (Mères).

ORIGINE DU MOT CELTE (CELTÆ)
On a souvent cherché à pénétrer le sens de ce mot ethnique.
Gluck le rapproche du latin celsus (keltos élevé). D'Arbois de Jubainville l'explique par celui qui prend du butin, « j'enlève », to-cheli (victoire) (Les premiers habitants de l'Europe, t. II, p. 396).
De tout cela on peut inférer qu'après un combat ce peuple a remporté une victoire. Mais ce n'est pas une victoire guerrière, car à cette époque reculée il n'y a pas encore de guerre, c'est une victoire morale, et ce genre de victoire est toujours le résultat d'une lutte entre les hommes et les femmes. Or le triomphe dans une lutte morale, c'est une élévation, cela indique donc une élévation collective de la race. C'est bien là ce qui a toujours distingué les Celtes des autres peuples.
Ils furent, dans cette antiquité reculée, les maîtres de l'univers, les héros, les sachant, c'est-à-dire les féministes connaissant et utilisant la science primitive sans la discuter.

LES RACES
Nous venons de voir que, avant que le nom de Celtes fût connu des anciens, les peuples celtiques avaient été compris sous la dénomination générale de Boréens ou Hyperboréens.
Puis des noms divers de peuplades celtiques nous sont transmis par les auteurs anciens, en grand nombre, on en compte plus de 150, ce qui prouve que dans cette unité primitive on fit des divisions.
Ce qu'il y a de certain, c'est qu'ils forment des tribus éparses sur de vastes territoires sous une dénomination qui indiquait, non des peuples différents, mais des initiés à la même vérité, vivant de la même vie. L'unité de civilisation n'implique pas la parenté de race, ni l'identité de langue. Toutes les races de la terre ont été gynécocrates pendant la jeunesse de l'humanité, et des changements profonds peuvent s'accomplir dans la vie matérielle, dans l'industrie, sans cependant que des changements se produisent dans les croyances, et les institutions qui en sont la conséquence.
L'histoire classique divise les Celtes en deux rameaux.
Les Gaëls, et les Gallois, appelés aussi Kymris ou Belges.

LES CELTES GAËLS
Les Gaëls sont les peuples celtiques d'Irlande et d'Ecosse. Les Celtes d'Irlande sont les anciens Gâidel (ou Gôidel).
Les Celtes d'Ecosse sont les Calédoni (Kaledoni) ou Caledones (Kaldéens/Chaldéens).

LES CELTES GALLOIS
Le second rameau celtique, ce sont les Gallois (Galls, Galli, Galates, Galatæ).
Il comprend deux grandes divisions :
Les Kymris ou Belges, et les Gallois d'Armorique. Ce rameau diffère essentiellement du rameau gaélique d'Ecosse et d'Irlande.

LES KYMRIS OU BELGES
Les Kymris sont antérieurs aux Gallois d'Angleterre et à ceux d'Armorique. Des Belges, ayant occupé les côtes de la Grande-Bretagne, donnèrent leur nom au pays de Galles, et ce sont les Gallois de ce pays qui, plus tard, vinrent coloniser l'Armorique.
Le nom de Galls se dit Wal ou Wallon chez les Belges.
On a donné une origine des Wallons que voici (Dottin, Etudes sur l'antiquité celtique, p. 29) :
« Les Volcæ sont partagés en deux branches : les Arecomici établis entre le Rhône et la Garonne ; les Tectosages dans la région de la Haute-Garonne. »
Le nom de Volcæ est devenu chez les Allemands Walach, puis Walch, d'où est dérivé Welsch qui désigne les peuples de langue romane, italien et français ; chez les Anglo-Saxons, Wealh, d'où le dérivé Welsh qui désigne les Gaulois.
Si cela était ainsi, les habitants de la Celtide galloise se seraient appelés Welsch, c'est-à-dire Belges, avant de s'appeler Gaulois.
C. Jullian pense que l'ancienne dénomination est Kelte et que Galate désignait primitivement les Belges (Hist. de la Gaule, t. I, p. 317). Pour César, les Belges, les Aquitains, les Celtes, diffèrent les uns des autres par la langue, les institutions, les lois.
Le type gallois ou wallon, c'est une âme spéciale dans la vivace petite nation belge.
La Belgique a fixé sa race dans un travail séculaire, dans une direction donnée qui fait le caractère d'un peuple. L'individu en est le type, il a créé et entretenu en lui l'Esprit libéral.
Les races qui habitent la Gaule au moment où l'histoire masculine commence, sont : les Ibères qui sont en Espagne, les Celtes ou Galls, les Belges ou Kymris. On fait venir les Celtes d'Asie pour rester fidèle à la tradition biblique qui les appelle les fils de Japhet. Mais c'est une erreur, ils sont autochtones.
D'autres les rattachent aux Aryas, qui seraient les habitants d'une terre appelée Arie. L'origine de ces peuples aryens fondateurs de la grande civilisation celtique est mal connue, elle a été dénaturée avec intention par les Grecs et les Latins.
Non seulement les Celtes ne viennent pas d'Asie, 1600 avant notre ère, comme on l'a dit, mais ce sont eux, au contraire, qui allèrent y porter la civilisation. D'après les mêmes historiens, les Kymris seraient venus en Europe dix siècles après les Celtes (600 avant notre ère).
Or ce nom de Kymris rappelle le nom des premières femmes régnant dans cette région, les Val-Kyries, qui donnèrent leur nom au pays.

LES LANGUES
Nous ignorons si une langue primitive a régné chez les peuples hyperboréens.
Au moment où on envisage l'histoire des Celtes, ils forment les deux grands rameaux dont nous venons de parler : les Gaëls (d'Ecosse et d'Irlande) et les Gallois (de Belgique et d'Armorique).
Les langues de ces peuples sont :
Le gallois ou kymræg, appelé welsh par les Anglais, c'est la langue conservée dans le Wallon belge.
L'armoricain, bas-breton ou breyzard, conservé en Bretagne.
Le gaélique ou erse, parlé encore par les montagnards écossais.
Ils se donnent à eux-mêmes le nom de Gaëls, qu'ils écrivent, Gædheal, et ils donnent à leur langue le nom de Gælig.
L'irish ou irlandais ressemble tellement à la langue erse des Ecossais que ces deux peuples s'entendent quand ils se sont un peu familiarisés avec les différences de prononciation.
La langue erse est très propre à la poésie, ainsi que le prouvent les poèmes ou chants recueillis et imités par Macpherson sous le nom d'Ossian.
Le gallois ou kymræg est de tous les idiomes celtiques celui qui a été le plus anciennement cultivé, son alphabet se compose de 16 caractères radicaux et de 27 caractères dérivés, faisant en tout 43 lettres. Chaque son de la langue est fixé d'une manière invariable. Le gallois est encore parlé dans le pays de Galles, où il fut porté par les Kymris, mais la race de ces bardes, jadis fameux, est complètement, éteinte (le nom des Kmers semble une altération de kymreag).
« Nous croyons, écrit Godefroy de Roisel, que les colons atlantes trouvèrent dans les Gaules et adoptèrent, après leurs premières expéditions, la langue gallique. Nous croyons qu'ils vulgarisèrent en Europe leurs sciences séculaire par cet idiôme que nous retrouvons non-seulement dans les Iles britanniques, mais encore dans un coin perdu du nord-ouest de la France, resserré entre la Lys et la mer, où il devint le vieux morinien. Les conquérants ne pénétrèrent que fort peu sur ces terres humides, dont la tristesse n'attirait pas les spoliations de peuples nés sous des cieux plus cléments. Le gallique s'y conserva donc comme en Irlande et en Ecosse ; et, lorsque l'on voit que c'est précisément des contrées où cet idiôme était en usage que partit le grand courant civilisateur, il faut définitivement admettre que les apôtres qui transportèrent au loin les connaissances occidentales, après avoir abandonné leur langage agglutinatif, adoptèrent la langue gallique, généralement employée dans le nord-ouest de l'Europe. » (Études anté-historiques : les Atlantes, p.106)
L'armoricain ou breyzard est encore parlé dans la partie la plus occidentale de la Bretagne ; une population de plus de 700 000 âmes parle cette langue (dans le Finistère, le Morbihan, les Côtes d’Armor). Elle est elle-même divisée en quatre dialectes :
1°- Le trécorien, ou breton-bretonnant, qui est le plus pur et le plus concis et qui est usité dans le diocèse de Tréguier.
2°- Le leonard, qui se fait remarquer par sa douceur et qui se parle dans l'ancien diocèse de Saint-Pol-de-Léon.
3° Le cornouaillier, qui est dur et aspiré et qui se parle aux environs de Quimper-Corentin.
4° Le vannetais, qu'on regarde comme le plus corrompu, et qui est en usage dans l'arrondissement, de Vannes, ancien pays des Vénètes (disciples de Vénus).
Le bas-breton est moins pur que le gallois sans doute parce que l'armoricain s'est corrompu plus tôt en devenant une langue populaire (1), tandis que le gallois est resté la langue des intellectuels, il a été conservé longtemps comme langue sacrée et, avec le temps, employé seulement par les initiés (2).
D'après Edwards, les langues celtiques ont laissé des traces profondes dans le français.
Pictet a écrit, en 1837, « de l'affinité des langues celtiques avec le sanscrit ». Ces affinités doivent, être nombreuses, et plus encore avec le zend, la langue de l'Avesta. La suite de cette histoire en donnera la raison.
Les Basques ont aussi, un dialecte d'origine celtique.
Non seulement, les langues d'Asie avaient été formées aux dépens d'idiomes celtiques, mais aussi le grec. « Tacite rapporte l’opinion d'après laquelle il y avait sur les confins de la Rhétie et de la Germanie des monuments et des tumuli portant des inscriptions en caractères grecs. » « Les plus anciennes monnaies gauloises portent des caractères grecs. » (Dottin, Etudes sur l'antiquité celtique, p. 96).
(1) Le breton armorique Volcke fait Vulgus d'où vulgaire.
(2) C’est comme, langue d'initiés que nous retrouvons des mots de l’idiome kymrique dans les termes restés dans toutes les liturgies, comme Kyrie eleison, Kyrielle (litanie), longue suite de peuples qui ne finissent pas.



L'étymologie a une très grande importance dans la compréhension du monde, ses origines, son histoire, et l'évolution des mœurs.
Prenons un exemple : la Rose.
La langue gauloise s'est surpassée dans la création de la Rose, la Reine des Fleurs.
La désinence « os », du gaulois, donne au nom le sens de la « plus tendre affection ».
De « plant », enfant, le gaulois fait « plant-os », « enfantelets », « chers petits enfants ».
De là le latin « planta » et tous les mots de cette famille dans toutes les langues.
Et de « ro », don, présent, cadeau, la désinence « os » fait « ro-os », « ros », le « présent aimé », « le don d'amour », le don de la rose.
Le hollandais reproduit les racines gauloises telles quelles : « Roos ».
Le danois, l'allemand, l'anglais font « Rose ».
Le vieil allemand, « Rosa ».
L'islandais, le suédois, « Rôs ».
Le breton, « Roz », « Rose » ; « Roz-èn », « Rose-une », une Rose, « ène Rose ».
Passons à cette déclinaison de « Rosa » en latin :
Que signifie le « rosa » latin si l'on prend le radical gaulois « Ros », de « Ro-os » ?
- La Rose ?
- Non ! « Rosa » signifie « Rose-la », et aussi « Rose-une », « une Rose », premier signe de l'imprécision du latin.
« A » est l'article gaulois, dont les bretons ont fait « an », « ar », « al », par euphonie, selon le mot qui suit l'article.
Cet article défini est resté, en anglais, l'article indéfini, invariable, « a man », « a woman », « a girl », « a boy », sans lequel il serait impossible de prononcer une phrase d'anglais.
(Oscar Vignon, fondateur de la ligue panceltique et rénovateur de l'académie celtique)
Plutôt se fier à Owen Pughe et à Oscar Vignon qu'à Littré en ce qui concerne l'étymologie.
La langue gauloise est la véritable source des langues de l'Europe et de l'Inde.



COLONISATION
Si nous suivons l'évolution sociale des Celtes, ou Keltes, nous voyons que, partis des bords de la Meuse, ils se répandent dans toute l'Europe et dans l'Asie.
Wallen ou gallen (wallon) veut dire voyageur. « Les Atlantes, dit de Grave, passant pour être les inventeurs de la géographie, nous devons nous attendre à la voir rédigée en idiome du Bas-Rhin, la langue de la Belgique. »
Les Celtes vainqueurs des peuples noirs, en même temps que de la noirceur des méchants, se répandirent sur toute la terre pour y porter la Vérité qui était leur grande force morale, et, pendant plusieurs siècles, ils portèrent leur civilisation partout, instruisant tous les peuples de l'Europe.
Les Celtes qui occupaient le nord de la France, de la Belgique et de la Hollande, franchirent d'abord la Manche et allèrent peupler l'Angleterre ; ils allèrent ensuite chez les Ibères et occupèrent l'Espagne où, mêlés aux indigènes, ils formèrent les Celtibères.
Les Serbes (Serves) sont aussi les descendants des anciens peuples de la Meuse. Leurs légendes racontent que, partis de régions lointaines, ils eurent pour guide une souris (Maus, pour Mosa, Meuse), qui coupait les montagnes, pontait les rivières et les établit finalement dans le pays devenu la Serbie.
Maus signifie souris en celtique, en latin et en grec (voir les poésies de Mme Elise Vogart). Comme la femme est plus petite que l'homme, on se moque de sa petitesse et on l'appelle Maus (souris), au lieu de l'appeler Muse, nom des Déesses qui vivaient sur les bord de la Meuse, les Muses. Et c'est ainsi que dans la géographie ancienne la Meuse s'appelle Mosa.
Ce sont les Celtes d'Ecosse qui allèrent en Asie et donnèrent leur nom au peuple primitif qui habita la Kaldée (Chaldée), les Ak-Kad : (Ak signifie chef et Kad montagne). C'étaient les anciens montagnards écossais (Caledoni), qui étaient allés porter leur science et leur civilisation en Orient. Les Ak-Kad sont les pré-Kaldéens.
La ville d'Ask-Kaldan, appelée aujourd'hui Ascalon, célèbre par la naissance de Sémiramis, peut signifier peuple celte (kelte) aussi bien que peuple kaldéen. Les Hindous considèrent encore aujourd'hui la ville d'Ascalon comme sacrée.
Les Accadiens et les Sumirs, déduits de la traduction des tablettes, n'existent pas, disent les savants modernes, et ils ajoutent : « l'antiquité ne les a jamais mentionnés ».
C'est une erreur. Les Ak-Kad, devenus les Kétas, ont été souvent mentionnés, mais toujours avec l'intention de les rendre odieux parce que c'étaient des féministes ; on a fait disparaître leur nom aussi souvent qu'on a pu.
Révilloud dit : « Les documents sont très rares concernant les Kétas ou Kétéens, qui avaient l'hégémonie asiatique que possédèrent plus tard successivement les Assyriens, les Babyloniens et les Perses. Ce que je tiens surtout à mettre en lumière, c'est ce fait que, plus on remonte dans les origines de la civilisation chaldéenne, plus on voit la situation de la femme être considérable. Il en est de même dans l'Egypte archaïque. »
Donc, c'est le mot Kad qui devint Kéta. Le peuple ainsi nommé est celui qui fut persécuté en Egypte et que les hommes avilissaient en les appelant « vils Kétas ». Ils s'exilèrent et vinrent en Phénicie. Les Phéniciens s'appelaient alors Kennanis, nom qui semble être une altération ou un dérivé du mot Kymris, et ce sont certainement les Belges-Kymris qui ont donné leur nom à cette peuplade d'Asie, cinq siècles avant le schisme d'Irshou, époque à laquelle on fait remonter les Kennanis.
Le chef des Kétas est appelé Kétasar ou Kétasou. Ils sont décrits par les masculinistes comme des tribus sémitiques de l'est de l'Egypte, qui se livraient au brigandage. On les trouve habitant des îles ; leur ville est surnommée Isah (Jérémie, L. I, 41) et le peuple est appelé Ionah (ce sont les Ioniens).
Quand Tyr est prise par les Chaldéens, sa flotte fait voile vers les Kétim (Isaïe, xxm, 12) ; Hébron devient la capitale des Kétas, qui sont quelquefois appelés Rhétas. « Dans le traité d'alliance et de commerce qui fut conclu entre les deux nations des Kétas et d'Egypte, on remarque le rôle très important joué par la Reine des Kétas qui, de son propre chef, était Reine de Kidjautan. » (C. Renooz, Le monde ancien, p.37).
Donc, les Ak-Kad et les Choumirs, c'est-à-dire les Kmers, seraient de la race celtique.
Les Chaldéens, en relation avec les émigrés de l'Inde (les Israélites), leur communiquèrent la science des Celtes, en même temps que leur langue. Ils en font un dialecte qui est le fond de l'hébreu. Quand ils s'en vont en Egypte, ils y portent cette langue qui se mêle à l'ancien égyptien.
Eburonis a fait hebrus ; hebrus a fait hébreu ; ce serait donc l'hébreu qui ressemblerait le plus au celte. La Tour d'Auvergne a donné une liste de mots hébreux pris dans la langue celtique. Ce même auteur dit: « Les Celtes, peuple valeureux qui étendit la gloire de son nom jusqu'aux parties les plus reculées de l'Europe et de l'Asie et qui étonna l'univers » (Origines gauloises).
Les Assyriens et les Chaldéens, au moment où l'histoire nous les montre comme de grands peuples, avaient déjà une histoire ancienne, ils avaient hérité d'une civilisation acquise avant eux et qui leur avait été léguée par les Accadiens qui les avaient précédés. C'était une race gynécocrate qui avait fondé de sages institutions en même temps qu'elle avait fait des découvertes importantes. Les Accadiens parlaient une langue antérieure à l'Assyrien et avaient créé l'écriture cunéiforme. Un certain nombre d'ouvrages découverts dans la bibliothèque d'Assourbanipal étaient écrits dans cette langue et avaient été traduits en assyrien ; tantôt l'original et la traduction ont été trouvés ensemble, tantôt l'original est resté seul. Ceci est de la plus haute importance, car il est bien certain que c'est dans le passage de ce monde primitif au régime postérieur que se firent les altérations des légendes et des mythes accadiens. Le fond de la religion des Babyloniens et des Assyriens est tout entier pris aux Accads : leurs Déesses, leur culte, leurs connaissances astronomiques, leur mathématique et leur chronologie (leur système chronologique repose sur le nombre 60 pris pour unité), leur architecture, leurs travaux hydrauliques, le creusage des canaux, etc. Enfin, ce qui prouve que c'était surtout une race intellectuelle, c'est qu'ils ont laissé une riche littérature. Aussi ils sont restés longtemps considérés comme le phare qui éclaire et guide le monde, et leur langue est restée la langue de la religion et du savoir.
Les Déesses Wallonnes, appelées Val-Kyries, laissent la trace de leur passage en Asie ; de leur nom Kyrie, on fait le Çri sanscrit qui est un titre de suprématie ; et de Wall on fait Wali qui signifie roi en sanscrit (validus en latin). Leur nom Valia (Gaule de l'est) indiquait la force, la puissance, la valeur.
D'autre part, on trouve des mots sanscrits dans l'ancienne Celtide ; ainsi, de même que la Meuse signifie Muse, la Dive (de Dêvâ) est une rivière qui se jette dans la Manche près de la petite ville de Dives (Calvados).
Les grandes traditions indo-européennes datent de cette époque.
Des faits importants, dont le souvenir a été conservé, nous montrent le grand rôle des femmes celtes : une princesse nommée Nanca, qui partit du 62e degré de latitude, arriva en Chine et y fonda la ville de Nankin (Cailleux, Origine celtique).
D'après une tradition recueillie par un compilateur grec anonyme, c'était une femme nommée Onomaris qui avait guidé les Galates lorsqu'ils franchirent l'Istros, et qui était devenue leur reine dans le pays qu'ils conquirent (voir Revue des Etudes anciennes, t. VIII, p. 123, cité par Dottin, Etudes sur l'antiquité celtique, p. 182).
Cependant, les auteurs modernes admettent difficilement cette origine de la civilisation.

Les quelques informations d'ordre général qui vont suivre, vont nous préparer à aborder un long résumé chronologique de la période romaine, à l'issue de laquelle nous rétablirons une connexion avec la Celtide et plus particulièrement avec la Gaule.


Tous les peuples obéissaient à la Femme
(Aristote)


CERIDVEN OU KERIDVEN (Cérès)
Une grande personnalité divine est à l'aurore des temps celtiques : c'est Céridven (ou Kéridven), dont les Grecs et les romains feront Cérès.
C'est la Mère universelle, comme la Déméter des Hellènes, la Hévah des Hébreux.
Dans les mythologies masculines, elle sera représentée tenant en main deux épis dont on fera un symbole agricole, alors que c'est un symbole maternel. L'épi, c'est l'ovaire qui sécrète l'ovule, la graine humaine.
Céridven, ou Cérés, fut adorée dans des endroits appelés Ædes Cereris. Plus tard, on dira des temples.
La racine Æ réunie à la préposition de, en anglais the, en allemand die, arrive à former le mot diète, auquel on donne le sens de nourriture, Cérès représentant symboliquement, le blé qui fait le pain.
Mais en réalité il s'agit de la nourriture de l'esprit, de la Vérité enseignée dans cette première religion maternelle.
En effet, c'est Céridven (Cérès) qui explique l'Univers et ses lois, la vie et ses mystères, qu'elle a trouvés spontanément par la grande lumière de l'intuition féminine. Elle connaît les lois cosmiques, elle sait qu'il existe sept principes de vie révélés par la couleur des étoiles du ciel, dont les radiations subtiles sont visibles autour de nous dans l'arc-en-ciel.
A travers le symbolisme déformé, on retrouve les grandes vérités des temps primitifs. Ainsi, Céridven est représentée comme la première Mère, celle qui enfante la Déesse des sept Etoiles. (Il faut, sans doute, entendre par là celle qui les expliqua.) C'est pour cela qu'elle est personnifiée par l'Iris, elle est l'arc-en-ciel.
Dans son vrai caractère de Céridven, elle était la Déesse celtique des sciences, la Minerve de Bretagne, celle qui inventa les lettres écrites.
Dans les chants archaïques des bardes, les plus hautes-branches des premiers arbres étaient représentées comme l'Arbre de la science, et il était féminin. La tête de la tige était comparée à celle d'une femme issue de l'arbre par création naturelle spontanée.
Le nom de Gadhæl est dérivé de Ked, la Mère, la branche de l'arbre de la vie. Gwydd est le bois de la race et devient le Gaël d'Irlande et d'Ecosse.
Cérès était aussi regardée comme la Muse inspiratrice, la voix vivante qui expliquait la périodicité des heures et des temps. C'est pour cela que de son nom Kéridven on a fait Keer, qui signifie une période de temps. Keer-mon, période, signifie mois lunaire (mæn, lune). Les Grecs ont fait de ce mot kairos qui signifie simplement temps.
Cependant, Kéridven, la Déesse maternelle, source primordiale de la vie, représentera, pour l'homme, la source de l'amour, la chair féminine, qu'il appelle Keer, d'où le latin caro et le Grec kreas qui signifient chair.
Des fêtes, telle la Pâque, ont toujours été réglées sur le cycle lunaire (Keermon). C'est la Néoménie, nouvelle lune de printemps.
Comme ces choses constituaient l'enseignement religieux, on les désigna par le nom de la Déesse Cérés, et de Keer-mon on fit Cœre-monia (1). Mais aussi on avait fait de ce mot Keermesse (2).
Dans la région appelée Arduena Silva se trouve une ville appelée Cérès (Cœres), près de Arduatiei, non loin de la ville de Arduatuca (devenue Tongres), dans le Limbourg belge, à l'est des Nerviens (province de Namur). C'était la capitale des Eburons.
Et les Kymris proclamaient (et réclamaient) être les enfants de la grande Vierge Mère qui symbolisa la lumière.
La Celtide est la matrice des idées, le pays de la race-mère, la race-nature. Pour le Celte, l'idéal est dans la vraie réalité, dans la substance des choses qui sont abstraites, non vues ; l'idéal est dans la vision de l'esprit, celle qui inspire les héros et les saints et fait de la vie la réalisation de l'éternel rêve de Vérité des temps qui furent et qui devraient toujours être.
Nous venons de voir que la Déesse Céridven était la Mère des sciences et que c'est à elle qu'on faisait remonter l'invention des lettres. Cependant, les Egyptiens attribuaient à la Déesse Taoth (Thot) l'origine de toutes les connaissances humaines, géométrie, astronomie, astrologie, arithmétique, théologie, invention des lettres, nature et harmonie des mots, rituel du culte divin.
« Les prêtres assuraient, dit Diodore de Sicile, que Taoth avait inventé les sciences, les arts et les lois. »
Est-ce donc la même Déesse qui porta un nom différent chez les Celtes et chez les Egyptiens ? Ou bien l'une était-elle la Mère de l'autre, puisque l'on nous dit que Céridven est la mère de la Déesse aux sept Etoiles ?
Nous l'ignorons. Mais ce que nous savons, c'est que la Déesse égyptienne eut un grand rôle dans l'Europe celtique.
(1). Le mot al-manach, qu'on croit arabe, est formé de al, article, el mane, lune. C'est par lunes que les Arabes comptent encore le temps. C'est sur les révolutions de la lune qu'était régie le calendrier sacré ou l'ordre des fêtes religieuses.
(2) Le terme celtique employé pour désigner un acte périodique, un tour qui finit pour recommencer, est Keer. De là on l'emploie pour désigner un tracé Circulaire.


LA DÉESSE THAOTH (Thot)
Nous avons vu que la Déesse Céridven était là Mère des sciences et que c'est à elle qu'on faisait remonter l'invention des lettres.
Son nom, déjà altéré en Phénicie où l'on disait Taout, va, dans les langues du Nord, s'altérer encore ; on y ajoutera les deux lettres « at » et l'on dira That-at ou Theut-at, et ainsi, peu à peu, ce nom va devenir Tath, Teutad, Teutatès.
Pour la race germanique, l'être divin est Teutatès. Il représente l'Esprit, les Arts, l'Intelligence. De Teut-Sohn (fils de Taoth) on a fait teuton. « Les Allemands appellent encore leur pays Deuth-land (terre divine), terre de Taoth », dit Fabre d'Olivet (Etat soc., p. 157).
Du mot Teut-Æsk qui signifie « le peuple de Taoth », on a fait Tudesque. C'est sous les traits d'une belle jeune fille blonde que cette « Terre divine » est représentée.
Le principe du mal, c'est Teufel, de Tiefe, « l'abîme ». C'est la pierre brute qu'il faut travailler, c'est-à-dire discipliner, ce qui nous explique que la Germanie a fait de son nom Teuth le synonyme de discipline. On disait Teuth-land, qui voulait dire pays discipliné. On donnait à tous les livres scientifiques le nom de Thoth.
Jablonski, dans son Panthéon égyptien, remarque que les vastes connaissances qu'on attribuait à Thoth étaient inscrites ou gravées sur des colonnes de pierre nommées stèles (en grec stylai), et qu'on donnait à ces stèles le nom de « Livres de Taoth ». Ces livres contenaient l'histoire de la civilisation de l'Egypte.
Les Égyptiens ont donné au premier mois de leur année et au premier jour de ce mois le nom de Taoth. Chose curieuse, parmi les Grecs, le premier qui a parlé de cette Déesse, c'est Platon, et il en fait un dieu qu'il nomme Theuth, ainsi qu'on le prononçait chez les Germains.

LES DÉESSES-MÈRES
Le caractère général qui unit les Celtes, c'est le gouvernement maternel, en même temps que le culte de la Mère divine ; c'est là qu'est le fondement des anciennes croyances des âges archaïques, chez les peuples celtes. Ce fut, du reste, après eux, la base de la religion dans toutes les parties du monde.
La base légitime et idéale du pouvoir de la Femme réside dans sa nature spirituelle et maternelle. Elle produit l'œuvre de la création. Elle fait naître l'enfant, elle le guide, elle le soutient, elle est la source de la lumière qui l'éclaire.
En dehors de cette cause idéale, il n'en existe aucune qui légitime la domination du monde. Par la vertu de cette cause naturelle, tout enfant créé bénéficie de la nature bienfaisante maternelle, réelle, vraie, connue.
La Mère divine, c'est la Grand'Mère (Edda). Son nom druidique de créatrice était Heuwen, la Dame ancienne, la primordiale source de la vie, Dame des eaux de la vie.
Dans toute l'étendue des Iles Britanniques, le culte primitif s'adressait au principe féminin dans sa nature vivante (Déesse vivante dont on fera le Dieu vivant).
Partout on trouvait des enclos de pierres, de forme circulaire, semés dans les montagnes et les vallées, représentant la place mystérieuse de l'acte de vie, l'abri, le home.
Ker (de Kéridven) signifie « foyer maternel », demeure. Et, dans la première astronomie comme dans l'eschatologie, ce cercle est appelé du nom de Ked, le centre des pouvoirs créateurs de la Grande Mère.
A Edimbourg, cela s'appelait Arthur's seat (le siège d'Arthur), place de la Mère, le séjour natal de l'enfant (Arthur était la parole ou la fille d'Arth).
Ceci explique l'origine du prestige attaché aux mots Saint-Siege, dont l'hiéroglyphe, en Egypte, était une chaise portée sur la tête. Et c'est de là que vient la prérogative de la Mère, de la Femme, qui reste assise quand l'homme est debout.
La primitive Gaule celtique a aussi connu le culte des Déesses-Mères.
Dans ses Etudes sur l'antiquité celtique, Dottin dit (p. 316) : « Les Déesses-Mères, Matres ou Matronæ, auxquelles sont adressées en Gaule de nombreuses dédicaces, sont des divinités répandues surtout chez les Celtes et les Germains. Elles sont souvent groupées deux ou trois. Les Matronæ Dervannæ ou Fatæ Dervones portent un nom qui s'explique par le nom celtique du chêne. Les Ambiomarcæ, les Uro-brocæ, les Nemetiales, les Oll-totæ, semblent aussi porter un nom celtique. Nous ne savons rien des Dii Casses dont le nom est comparable au premier terme des noms gaulois cassi-gnatus, cassi-mara, cassi-talus, cassi-vellaunus, et auxquels ont été faites des dédicaces sur les bords du Rhin. »
Et M. Dottin nous dit encore : « Les Déesses-Mères portaient des chapeaux à larges bords » (p. 171), et il ajoute (p. 172) : « D'après les bas-reliefs des Déesses-Mères, on peut conjecturer que les femmes gauloises ont porté une tunique descendant aux talons et un manteau attaché sur le devant par un nœud, un bouton, ou une fibule. »
Donc, si on dit peu de choses de leur rôle social, on sait au moins comment elles étaient habillées.
Quelques-uns de leurs noms sont restés. Dottin cite les suivants (p. 315) :
Ancasta et Latis en Grande-Bretagne.
Bergusia à Alise.
Brigantia (Nympha ou Victoria) en Grande-Bretagne. Ce nom est identique à celui de Brigit, la Fée du moyen âge irlandais, qu'un texte appelle « Mère des dieux ».
Burorina à Damburg.
Camuloriga à Soissons.
Camiorica à Soissons.
Dexsiva dans le Vaucluse.
Icaunis à Auxerre.
Icovellauna sur les bords du Rhin.
Moguntia à Metz.
Noreia dans l'ancienne Norique.
Rosmerta dans la Côte-d'Or.
Segeta dans la Loire.
Soio à Soyons (Ardèche).
Sanuxsalis sur les bords du Rhin.
Temusio à Saint-Marcel-lès-Chalon (Saône-et-Loire).
Virodactis à Mayenne.

LES AGAPES
Un monastère de femmes suppose des initiées vivant entre elles comme des sœurs et enseignant la même doctrine.
Ces communautés de femmes réunies pour simplifier les complications de la vie en faisant le travail en commun, ont toujours existé quand la doctrine de Vérité qui les unit a régné.
On appelle ces sœurs initiées Agapètes, mot que les Dictionnaires font suivre de cette explication : « Filles qui vivent en communauté sans faire de vœux (1). »
Ce mot aga est, évidemment, l'origine du mot agape, qui indique des repas en commun. C'était les réunions données le 7ème jour, suivant l'ancienne Loi qui régnait aussi bien chez les Celtes que chez les Israélites. Ce 7ème jour était un temps de repos, aussi le nom de la Déesse Venia signifiait congé, liberté.
C'était un jour CONSACRÉ, c'est-à-dire donné aux unions.
Cette consécration du 7ème jour laissé aux divertissements, aux agapes et au sacrifice eucharistique, a joué un grand rôle dans le premier culte, puisqu'elle a été imitée et parodiée par toutes les religions.
Sacrum facere (consacrer) suppose un autel sur lequel on met la victime, c'est-à-dire l'agneau sans tache qui va être sacrifié.
Le mot latin ara (autel) dérive de ar, spica (épi, ovule). Le sacrificateur lui offre son sacrifice.
Et nous voulons faire remarquer que ce mot ar signifie frère en hébreu. Ce sont donc des frères qui sont admis dans ces agapes offertes par des sœurs.
A propos des festins du vendredi et des noces qui étaient les agapes des Mystères, de Grave dit :
« Les festins, qui avaient particulièrement lieu le vendredi, étaient des repas en commun, institués pour faire naître l'amitié et entretenir la paix et la concorde (2) entre les fidèles. C'est dans ces banquets fraternels qu'on répandait les premiers germes des religions et qu'on introduisait les premiers exercices du culte.
« Avant d'admettre le peuple à table, on lui faisait sentir que les mets étaient un bienfait de la Providence (celle qui pourvoit), qu'on devait en reconnaître la Déesse comme auteur, qu'en conséquence il fallait les lui offrir comme un hommage dû à sa bonté et à sa puissance ; aussi les Prêtresses les bénissaient, et, cette sainte cérémonie finie, on se mettait à table pour manger, on pratiquait l'offrande.
« Telle est l'origine des sacrifices, terme formé de sacrum facere. »
Et, pour montrer comment cette fête religieuse est entrée dans les mœurs, de Grave ajoute (Ch. El, t. III, p. 48) : « Après avoir consacré les six premiers jours à des travaux et des devoirs, les législateurs ont proclamé le septième jour libre. Vrydag, nom du vendredi, signifie libre jour. On employait ce jour de relâche dans l'ivresse et les plaisirs.
« Le 7e jour était destiné à la célébration des noces. Sous ce rapport, l'amour présidait aussi à ce jour. C'est de là que le mot Vry a donné naissance au verbe Vryen qui, dans l'usage du peuple moderne, signifie faire l'amour.
« Et on donne aussi le nom de frayer, Vryen, à l'amour des poissons. »
Le vendredi s'exprime en latin par le mot dies Veneris.
On a jeté tant de défaveur sur le vendredi qu'il en est résulté un préjugé singulier contre ce jour, préjugé qui se soutient encore par l'effet d'une tradition sourde, quoiqu'on en ait perdu la raison. Dans l'opinion vulgaire, le vendredi est devenu un jour funeste et de mauvais augure. Et le vendredi, jour de Vénus, a été remplacé par le dimanche, jour du Seigneur. Toujours la substitution des sexes accompagnée du renversement des idées (3). L'ancienne loi donnait un jour sur sept à l'union ; la loi masculine fera du dimanche un jour d'abstinence et donnera à la licence masculine six jours sur sept.
« Mais ces sages institutions, dit de Grave, n'ont point été à l'abri de la corruption du temps. Le vendredi, ce jour de liberté consacré à la récréation du peuple, est dégénéré insensiblement en jour de licence et de débauche ; des orgies et des bacchanales ont succédé aux repas fraternels des sacrifices. Le mal était porté à tel point que la nouvelle loi, en conservant l'institution divine de la semaine, n'a pas trouvé de meilleur moyen pour y remédier que de changer l'ordre des jours et de déplacer le jour du Sabbat. Non contente de cela, et considérant combien les hommes tiennent aux vieilles habitudes, l'Eglise n'a pas cru pouvoir mieux atteindre son but qu'en frappant le vendredi d'une espèce d'anathème ; elle a, comme par forme d'expiation, transformé ce jour gras par excellence en jour maigre ; le vendredi, ce jour de délices, et de bonne chère, est devenu, par le nouvel, ordre de choses, un jour d'abstinence perpétuelle. »
(1) Nous disons Agapète, mais dans l'Iliade on dit que la médecine était enseignée par la blonde Agamède ; on a changé la terminaison du mot.
(2) Il est à remarquer que le mot « concorde » signifie littéralement « union des cœurs » (cum-cordia)
(3) Le théâtre persan reproduit deux scènes relatives à la tragédie de Kerbéla au sud de Badgad, c'est-à-dire à cette bataille qui sera livrée cinquante ans après la mort de Fatima, fille du prophète Mohammed/Mahomet (on oublie que celui-ci n’est que la déformation de Mohammed), par l'armée du calife oméyade Yazid aux troupes de Hosseïn, fils cadet de Fatima.
Dans cette scène, on entend Hossein se plaindre de la situation et dire : « Toute l'eau du monde avait pourtant été donné en dot à notre mère. Pourquoi faut-il que nous soyons frustrés maintenant de cet héritage ? » Et dans une autre scène du même drame, c'est Fatima elle-même qui, prévoyant et annonçant, cinquante ans à l'avance les évènements, s'écrie : « J'ai bien reçu en dot l'eau de l'Euphrate. Et pourtant, mes enfants seront un jour privés de cette eau, par la méchanceté de la famille Hind (Hind est le nom de la mère de Mo'awia, le fondateur de la dysnastie des Oméyades). » (Ch. Virolleaud, La passion de l'Imam Hosseïn)
Cette tradition est, en dehors du théatre persan, attestée par d'autres documents, iraniens aussi, et suivant lesquels l'eau est la propriété personnelle de Fatima : et l'on ajoute que le vendredi, qui est le jour de la prière publique, l'eau est, plus encore que les autres jours, le bien ou l'apanage de la fille du Prophète. (Voir Croyances et coutûmes persanes)
Précisons que parmi les surnoms de Fatima, l'un des plus usuels est Zohra, qui est le nom de la planète Vénus, qu'on appelait Isthar dans l'ancien Orient.
Et Fatima, quoique mère de plusieurs enfants, est très souvent qualifiée « betoul », mot qui a, en arabe et en arabo-persan, le même sens que « betoulat » en cananéen (« La vierge »). Il faut dire aussi que celui des signes du zodiaque qui est consacré spécialement à Fatima est le Sombolé ou l'Épi, qui est le même que le signe de la Vierge. (source)

LES CHAMPS ÉLYSÉES
Le régime maternel, que nous venons d'esquisser rapidement, c'est l'Age divin.
La mythologie des hommes l'a situé dans un séjour délicieux appelé les Champs Elysées.
C'est de là que serait partie la première impulsion qui a créé la grande civilisation des temps anciens.
Diodore de Sicile, dans ses rapports sur les Atlantes, dit qu'ils avaient étendu leur empire sur la presque totalité du globe, ce qui veut dire qu'ils avaient propagé leurs principes et leur culte chez la plupart des nations.
De Grave dit : « Les Atlantes ont été, les uns les fondateurs des nations, les autres les fondateurs des villes (les grands Architectes) et des républiques ». Et il ajoute que tous les peuples étrangers, que les Grecs même, rapportent généralement l'origine de leur civilisation aux Atlantes.
On appelle Démiourgos ces premiers législateurs, qui sont des créateurs de peuple ; on les a relégués dans un passé fabuleux, ce qui fait dire à de Grave : « L'histoire des fables doit être la tradition allégorique de l'objet le plus intéressant qui ait existé pour le genre humain » (République des Champs Elysées, t. I, p. 7).
En effet, la mythologie, c'est l'histoire du monde primitif, mais falsifiée et parodiée par les Grecs pour y introduire leur masculinisme. Ce peuple orgueilleux a voulu se glorifier de tout ce qui a été fait par les autres peuples, comme si la Grèce avait été véritablement la patrie des Déesses et la scène des événements de l'histoire.
C'est dans les Champs Elysées qu'on trouvait une vie de repos, la connaissance de la Vérité, des lois de la Nature, et enfin tout ce qui fait le charme de l'existence.
Aux Champs Elysées se trouvaient des prés fleuris, des fruits délicieux, des concerts à l'ombre des bois, mêlés à l'entretien des sages, et point de passions troublantes, on n'y sentait pas cette inquiétude dévorante qui trouble la paix intérieure et empêche l'éclosion des sentiments élevés, des tendresses calmes.
Dans l'Odyssée (t. IV), Protée dit à Ménélas : « Les dieux vous enverront dans les Champs Elysées, à l'extrémité de la Terre, où la sage Rhadamante donne des lois, où les hommes passent une vie douce et tranquille, où l'on n'éprouve point la rigueur des hivers, mais où l'air est toujours rafraîchi par les douces haleines des zéphyrs venus de l'Océan. »
Le lieu de délices que les Perses appellent « Erien-Vedjo », que les Israélites appelleront l'Eden, c'est la Terre pendant l'Âge d'Or, c'est-à-dire avant la domination de l'homme.
« Rien n'égalait la beauté de ce lieu de délices que j'avais donné, dit Ahura-Mazda. J'ai agi la première, et ensuite Pétiaré Ahriman, plein de mort, fit dans le fleuve la grande couleuvre mère de l'hiver » (symbole de l'ignorance qui stérilise et persécute).
De Grave, savant belge, a écrit, en 1806, un ouvrage intitulé République des Champs Elysées. Nous y lisons ceci (t. I, p. 43) :
« La République des Champs Elysées avait attiré la vénération des peuples, tant à cause des jours heureux que, dans l'innocence des mœurs, on y coulait, sous l'égide de la plus excellente des constitutions sociales, qu'à cause des grands bienfaits que, par leurs lumières scientifiques et religieuses, les législateurs élyséens avaient répandus chez la plupart des nations de la Terre.
« Sous ces rapports, l'Elysée était un lieu de délices morales ; c'était un jardin de cette volupté d'âme, compagne fidèle d'une vie pure et vertueuse. Les Elyséens étant déchus de cet état de félicité, la mémoire ne s'en effaçait pas tout entière, elle était trop profondément gravée dans les esprits. Mais elle fut altérée. On se rappelait toujours ces heureux siècles ;on s'entretenait, d'âge en âge, des demeures fortunées de nos premiers parents ; les regrets même qu'on ressentait de la perte de cet ancien état de choses en perpétuaient la tradition. Mais les hommes, ou trop attachés aux sens, ou trop avides de merveilleux, ne se souvenaient plus de l'Elysée que comme d'un lieu de délices sensuelles ou surnaturelles. Les uns ne voyaient dans les Champs Elysées qu'un lieu consacré à la demeure des Justes dans l'autre monde ; d'autres ne les regardaient que comme un jardin de délices terrestres. »
Homère, dans l'Odyssée (IVème livre), fait la description des Champs Elysées. Il dit :
« Ton destin ne te laissera pas mourir à Argos ; les dieux immortels t'enverront dans les Champs Elysées, à l'extrémité de la Terre, où les hommes trouvent une vie très facile. Le temps des neiges, de l'hiver et des pluies, n'y est pas long ; mais l'Océan y envoie sans cesse des vents doux pour rafraîchir les habitants. »
On a cherché à déterminer où se trouvaient les Champs Elysées.
« Nous venons de voir que dans l'Odyssée le poète commence par dire que le Champ Elyséen est situé à l'extrémité de la Terre, mais quelle est cette extrémité ? Homère ne le dit pas, sans doute parce que de son temps elle était connue. Virgile va nous l'expliquer : « L'extrémité de la Terre, dit le poète latin, est le pays des MORINS (1), et la double embouchure du Rhin ». Sur ce point, Virgile est l'organe de toute l'antiquité. La côte maritime de la France, dit Solin, était le bout du monde.
« Hélium était le bras du Rhin appelé depuis la grande bouche de la Meuse, magnum ostium Mosœ.
« Ne perdons pas de vue que Hélium était le point central de la mythologie. Dans la langue du Bas-Rhin, Hélium, c'est Helisch (ou Helish), d'où Helische ou Helishe Kampen, traduit par Champs Elysées. »
Ajoutons à cette citation de de Grave que de ce mot il est resté un nom de femme : Elisa.
Tacite mentionne les Elysii parmi les peuples de la Germanie.
Remarquons que la Meuse s'est appelée d'abord Hélium, avant de s'appeler Mosa (Muse).
De Grave dit encore ceci : « Les monuments les plus respectables de l'antiquité ramenaient toujours les Champs Elysées et la patrie des Dieux au même endroit du globe, et cet endroit a pour point central le territoire du Bas-Rhin » (t. I, p. 75).
Là où nous découvrirons les Atlantes, nous y trouverons le berceau des arts et des sciences. Les Atlantes sont les législateurs des nations, ils étaient, selon Diodore de Sicile, les chefs de plusieurs peuples, et leur empire scientifique s'étendait sur toute la Terre. Les familles les plus illustres de la Grèce se faisaient gloire d'en descendre.
Les cités des Hyperboréens, les Ari-maspiens, et les Champs Elysées, sont des républiques d'hommes justes. Ari-maspien est le nom des gouvernants ; selon Pomponius Mêla, les Hyperboréens sont les mortels les plus vertueux de la Terre ; Solin les appelle un peuple heureux par excellence, GENS BEATISSIMA.
Apollonius de Rhodes leur donne le titre de nation sacrée.
Platon et Diodore de Sicile parlent des Atlantes dans le même sens. Ce peuple se distinguait par sa justice et la pureté de ses mœurs ; sa demeure était appelée sainte. Poètes, historiens, tous s'accordent à célébrer un ancien peuple supérieurement juste, religieux, et dont la longue et heureuse existence a été appelée l'Âge d'Or.
(1) « Selon Hérodote, une nation étrangère communiqua aux premiers habitants de la Perse les notions civilisatrices. « on n'a jamais su, ajoute t-il, d'où venaient ces étrangers. ». Pour plus de certitude, voyons si la linguistique ne nous fournira pas quelques indices.
« D'après le morinien, la racine gallique maet, meet, med, mid, servait à exprimer la liaison, et par suite l'union et la camaraderie. « Mèdes » était donc synonyme de « frère », et symbolisait le dogme hyperboréen de la fraternité, dogme aussi célèbre qu'incompris, et dont les sectateurs conservèrent le nom.
» (Godefroy de Roisel, Études anté-historiques : les Atlantes)

LE JARDIN DES HESPÉRIDES
Les anciens confondaient le Jardin des Hespérides avec les Champs-Elysées. Helish ou Heilich sont les équivalents de saint, de mystérieux.
Hésiode, dans sa Théogonie, parle plusieurs fois des Hespérides, qu'il situe toujours à l'extrémité de la Terre (in finibus Terrœ), à l'extrémité de l'Océan ou au delà de l'Océan. C'est là, dit-il, qu'Atlas soutient le poids du ciel, près du séjour des Hespérides.
Le roi Aëtès dit, dans les Argonautiques, que sa sœur Circé demeure dans l'Hespérie. Qu'est-ce donc que ces pommes d'or et que ce jardin dans lequel on les trouve ?
Pendant cette époque bienheureuse, qui dura longtemps, il y avait déjà des unions, puisqu'il y avait des Mères.
Cette belle jeunesse, exubérante de vie, cherchait des rapprochements qui devaient être soumis à certaines conditions ; il fallait être l'élu, et nous devons croire que c'est au sein de la grande Nature, dans un jardin d'une beauté idéale, que les unions avaient lieu.
Les adolescents modernes n'ont-ils pas encore un atavisme secret qui leur rappelle, dans une vision lointaine, un lieu de délices où nulle entrave, nulle indiscrétion, ne venait s'opposer à leurs premiers bonheurs ?
C'est pour cela, évidemment, que Diodore de Sicile dit des Atlantes qu'ils occupent une contrée heureuse dans la proximité de la mer.
En ce temps-là, l'amour était sacré et sanctifié. On ne l'avait pas encore profané par des abus, des excès, des débauches immondes.
Il y avait, sans doute, des jours consacrés, et ces jours étaient attendus, ce qui peut nous faire supposer que hespéride fut l'origine du mot espérance.
« Ils se distinguent par leur piété envers les dieux » (qui alors sont des Déesses), disent les anciens.
Platon donne à l'Atlantide l'épithète de sainte. Il dit que le pays des Atlantes formait une île, qu'elle renfermait d'autres îles nommées Fortunées. De Grave répond à cela que les îles situées dans les eaux du Bas-Rhin portent encore, de nos jours, le nom de Fortunées, et que l'Atlantide est encore également appelée pays heureux.
Pourquoi la mythologie des Grecs a-t-elle mis dans ce jardin des pommes d'or, car elle nous dit qu'Hercule a volé les pommes d'or du jardin des Hespérides ?
Ces pommes d'or représentaient la séduction, comme la pomme du jardin d'Eden offerte à Eve par le serpent. Le mot pomme, pris comme symbole, vient d'un jeu de mots qui est expliqué à l'article sur l'Israélisme.
Rappelons qu'on appelait malum la déchéance morale, les troubles du cerveau ; comme ce mot signifiait aussi pomme, on embrouilla les textes à dessein pour les rendre obscurs, et de malum habere, qui signifiait « être puni du péché », on fit cette expression : manger la pomme.
Il est des gens naïfs qui, ne connaissant pas le langage conventionnel du symbolisme, prennent les choses à la lettre. C'est ainsi que certains ont vu, dans les pommes du Jardin des Hespérides, des oranges, et pour cela ont situé ce jardin en Espagne, pays des oranges. Peut-être aussi en Afrique, ce qui donne à Apollodore l'occasion de répondre « que les pommes d'or enlevées par Hercule ne sont point, comme on le pense, dans la Lybie, elles sont dans l'Atlantide des Hyperboréens ».
Il en est d'autres qui ont traduit Hespérides par Filles de la nuit.
De Hesper on a fait Vesper, et de Vesper on a fait soir.
Quand les Prêtres ont pris la direction de la religion, ils n'ont pas manqué d'y remettre l'idée d'un lieu de délices dans lequel l'homme trouve la satisfaction de ses instincts.
Le paradis d'Odin, et, après lui, celui de Mohammed, sont inspirés par le souvenir atavique de ce jardin délicieux dans lequel l'homme jeune rencontrait des houris toujours belles et toujours vierges, dit la tradition, ce qui représente bien l'éternelle virginité spirituelle de la Femme, mais ils n'ont pas mis dans ce séjour idéal la vie de l'Esprit qui était celle de l'Atlantide, ils l'ont négligée et n'ont vu que deux choses à mettre dans un paradis masculin : la domination et l'amour.

LES PREMIÈRES INSTITUTRICES : MINERVE
Toutes les sciences, toutes les institutions, émanent d'une source unique : celle des Institutrices Elyséennes (1).
Les prêtres de toutes les religions les ont altérées et les ont propagées dans tous les pays en les masculinisant ; c'est le fond de la mythologie.
Mais remontons à la source de cette Ecole unique et nous verrons qu'un nom est resté pour la représenter : c'est Minerve.
Le mot Minerve (min-erve) est composé de min, minne, minni en islandais (2), qui signifie mémoire, esprit, intelligence (en latin mens). Ment en Irlandais signifie encore institution, institut, et, dit Ihm, « pour ainsi dire, mentis cultura. Le mot Mentor, dans la même langue, signifie eruditus, institutor, savant, pédagogue ». Mentor vient de men (esprit) et tor abrégé de thorah (loi). Erve signifie culture, par extension champs labourés, mais primitivement culture de l'esprit.
D'autre part, le surnom de Minerve, Athéné, est formé de At-aland, qui a la même signification que Atlante ou Athélé.
Il faut donc croire qu'une Déesse a été réellement connue sous le nom d'Athélé « et même par ceux, dit Athénagore, qui traitent la chose avec le plus de mystère, c'est-à-dire par les savants qui sont les mieux instruits de l'origine de la nature de la Déesse ».
Ce qui prouve, du reste, que Minerve fut une femme réelle, c'est qu'on l'appelle la Déesse aux yeux pers (3). Et Homère donne constamment à Minerve le surnom de Glaucopis, Déesse aux yeux bleus. Pausanias veut expliquer pourquoi elle a les yeux pers (verts). Donc, Minerve fut la première maîtresse d'école, c'est elle qui a fondé ce que, plus tard, on appellera les Collèges des Druidesses.
On se sert du mot Druidesse pour désigner les grandes femmes de la Celtide qui dirigeaient la vie spirituelle de la nation, mais ce nom n'est pas celui qu'on leur donnait et ne semble avoir été employé par les Grecs et les Latins que pour donner un féminin au mot Druide, qui représenta le degré supérieur de l'initiation quand on institua des Mystères.
Il est certain que, puisque les Déesses conféraient aux initiés des Mystères qu'elles avaient fondés des titres tels que Barde, Vate, Druide, elles ne pouvaient pas, elles-mêmes, porter un titre qui aurait été le féminin de celui qu'elles donnaient à leurs élèves. C'est pour cela que le mot Druidesse ne se trouve nulle part avant le premier siècle de notre ère.
(1) Les Champs Élysées est le lieu géographique d'où est partie la première impulsion qui a créé la grande civilisation des temps anciens.
(2) Minnie est le prénom d'un des principaux personnages de Walt Disney, c'est une petite souris ou Maus, ou Mouse, mais au départ, et dans l'esprit, assurément une Muse.
(3) On devinait la patrie des Cimbres à la couleur de leurs yeux. Cérès est appelée « la blonde », Vénus aussi. La plus célèbre des Sibylles se nommait Erythrée, Sibylle rouge ou rousse.

L'ÉCOLE
On s'est habitué à rapprocher le nom de Minerve de celui des Muses et du Mont Parnasse.
Ceci a une cause lointaine qu'il faut expliquer.
Parnasse se disait antérieurement Larnassas (voir Noël, Dict. de la Fable), mot qui signifie Ecole. Il dérive du verbe laren ou leeren, enseigner en anglo-saxon. Lar signifie doctrine, et Lareow, Maître ou interprète de la parole divine. Il existe dans la Belgique plusieurs endroits nommés Lærne, Leerne, Lerne ; c'était des lieux consacrés à l'instruction du peuple.
« Les dieux Lares étaient, dans leur origine, des précepteurs du public. Diane était réputée Lare » (De Grave, Ch. E., t. I, p. 96).
Il s'est donc formé, chez les Celtes, une catégorie de Maîtresses d'Ecole qui a porté différents noms. On les appelle souvent des Normes (d'où normale), et on nous représente trois Normes fondant un collège chez les Germains et les Scandinaves ; de là le mot Dryade (dry, trois). Mais le nom qui a surtout été conservé est Druidesse, féminin de Druide.
D'où vient-il ?
Fabre d'Olivet dit (Etat social de l'homme, t. I, p. 165) : « Le mot Drud signifie l'enseignement radical, le principe de la science. Il vient du mot rad ou rud (mots qui ont fait irradier et radiation), qui veut dire une racine. De là le latin radix, l'anglais root, le gallois gredham, etc. »
Chez les Irlandais, il est quelquefois question de Druidesses appelées ban-drui, et plus souvent de ban-filé, qui, comme les filé, étaient à la fois devineresses et poétesses.
Or ban signifie Mère. Ce mot ban-drui voudrait donc dire Mère-Enseignante.
Dans la mythologie, on résumera cet enseignement en quelques mots, on dira que la parole des femmes éclairées était l'oracle des voyantes. On nous parle de l'enseignement des Prêtresses qui était oral, et on nous dira aussi que, si elles ont laissé des écrits, ils ont été détruits.
Mais ce qui est certain, c'est qu'elles ont laissé une tradition qui s'est perpétuée de Mère en fille, et c'est cela qui est le fond même de l'éducation.
Dans l'île de Trinacrie, qui serait l'Angleterre, les compagnes de Minerve sont appelées Etairoi. « Nom encore en usage en Flandre », dit de Grave (t. II, p. 163).
C'est de ce nom qu'on a fait hétaïre (prêtresse) (1).
(1) Les Hétaïres grecques n'étaient pas les ennemies des hommes, elles étaient des intellectuelles qui voulaient faire respecter leur liberté individuelle, mais elles savaient mêler les sentiments aux choses de l'esprit, elles n'étaient rebelles à aucune manifestation de la nature. Elles ne combattaient que le vice, le mensonge et l'oppression.
Périclès voulait briller par la parole, mais le talent lui manquait et c'est Aspasie qui lui préparait ses discours. C'est ainsi que les Hétaïres devinrent pour les hommes des Amies, des Compagnes, nom resté comme synonyme de Maîtresse.


« L'école a cessé de remplir sa fonction principale, qui est de structurer l'intelligence et l'expression des élèves. Elle est devenue paradoxalement un système de désinstruction. À l'école primaire on n'apprend plus à lire ni à écrire : les deux tiers des élèves ne le savent plus. Cela s'inscrit dans un relativisme généralisé des valeurs morales, des cultures, des religions et des manières de s'exprimer, aucune manière de vivre n'étant jugée supérieure à une autre. On a cassé tous les repères normatifs. On a supprimé l'histoire chronologique. Une démarche analogue a été effectuée pour saper l'enseignement de la langue et de la littérature. Globalement, on fait des élèves des barbares qui ne parlent et ne comprennent qu'un seul idiome, celui de la télévision. Une formation sacrifiée au nom d'un utilitarisme à courte vue qui empêche d'accéder aux idées générales. Il n'y a pas un élève sur cent qui soit capable de bâtir une phrase complexe. Une attitude qui va jusqu'à bannir toute discipline ; tout ce qui est contrainte est jugé comme un mal. L'exemple le plus illustre de cet état d'esprit est le ministre actuel (en 1983), Jack Lang, le ministre du tag et du rap. C'est comme ça qu'on ramène les enfants à l'animalité. »
(I. Stal et F. Thom)


ÉDUCATION
A l'époque reculée où l'homme n'avait encore pour mœurs que ses instincts, on avait remarqué combien sa nature le portait à l'opposition, à la contradiction, à la domination.
C'est pour enrayer ses mauvais instincts que les Mères instituèrent une discipline élémentaire (1) qui est toujours restée depuis dans la société, et qu'on désigne encore par les mots « éducation », « convenance », « savoir-vivre », « manières comme il faut ».
C'est cette retenue des mauvais instincts qui fut d'abord la Religion. La connaissance que l'on avait des lois qui régissent la nature humaine avait fait comprendre que l'homme doit être discipliné, « apprivoisé », pourrait-on dire, afin de pouvoir vivre dans la société des femmes, des enfants et même des autres hommes.
On institua donc une règle de vie commune, dont l'homme comprenait la nécessité, car il s'y soumettait volontairement. C'est dans cette vie calme et bien organisée qu'on élevait son esprit vers la pensée abstraite et qu'on lui donnait les moyens de vaincre les sens dont on sut bientôt que l'usage abusif mène à la folie.
Dans cette société idéale, l'homme ne s'appartenait pas à lui-même, il était à la vie familiale qui devint la vie sociale, et c'est cela qu'on exprime par le mot civilisé (civis, citoyen, à Rome, était l'homme affilié à la communauté).
Toutes les communes, toutes les républiques furent primitivement des associations de vie et de travail, sous les auspices d'une Déesse nationale. Et ces républiques ont été puissantes tant qu'un même lien unissait les citoyens entre eux comme des frères, et les unissait avec la Déesse comme avec une Mère.
La dissolution des Etats, c'est-à-dire le désordre, commença quand certains hommes, troublés par le mauvais esprit qui engendre l'orgueil, voulurent mettre leur personnalité au-dessus des autres, s'affranchir des lois établies et dominer les faibles. Cette révolte fut le commencement de l'erreur sociale, c'est-à-dire de l'injustice.
L'éducation était encore donnée chez les Gaulois par les grandes prêtresses et prophétesses que les Romains trouvèrent dans la Gaule et dans la Germanie lorsqu'ils allèrent combattre les guerriers de Vercingétorix et d'Arminius.
Dion parle de Gama, vierge voyante des Marcomans ; Strabon, des prophétesses chez les Cimbres ; il dit des Gauloises qu'elles sont « fécondes et bonnes éducatrices ».
(1) De disciple, discipulus, latin, de discere, s'instruire.

Ces premières institutrices n'enseignaient pas seulement l'astronomie, la physique et la biologie, elles avaient acquis la connaissance des propriétés des plantes et en avaient fait la base de l'art de guérir, premier mot des sciences médicales. Et c'est pour cela que Minerve est surnommée Bélisama, quelquefois aussi Hygie ou Hygiœa. Ceacht est la Déesse de la médecine chez les Irlandais. Telles sont les institutrices philanthropes qui ont été nommées Helisiens, Heilige (médecin).
Nous comprenons maintenant combien les femmes qui savaient tant de choses devaient avoir de prestige dans ce monde primitif.
Nous disions qu'on a rapproché le nom de Minerve de celui des Muses et du mont Parnasse. Nous venons d'expliquer l'origine du mot Parnasse, il nous reste à expliquer celle du mot Muse. Dans le pays des Atlantes qu'on appela les Champs Elysées, le séjour des Muses (les savantes) s'appelait Hélicon. Le pays, Hel-land, avait donné son nom au fleuve qui le traversait ; on l'appelait Hélium, pris symboliquement pour le soleil, parce qu'il arrosait la maison sainte, le ciel appelé Hemel. « Junon et Minerve étaient surnommées hélotes, qui veut dire surveillantes du Hel », dit de Grave (t. n, p. 92).
Helléniste vient de Hélium, qui veut dire Hel-Land. Hel ou Hal a toujours servi à désigner un paradis (Wal-Halla, devenu Waux-Hal, jardin délicieux).
Nous avons déjà dit que c'est le fleuve appelé d'abord Hélium qui finit par s'appeler du nom même des Déesses qui vivaient sur ses bords, les Muses, et c'est ainsi que dans la géographie ancienne la Meuse s'appelle Mosa.
(On sait que M. Cailleux donne une origine celtique à toutes les civilisations qui auraient commencé entre la Meuse, l'Escaut et le Rhin.)

Nous avons donc trouvé le centre où s'est élaborée la science antique. Voyons maintenant la façon dont elle s'est propagée dans le monde ancien. Nous trouvons qu'elle a trois succursales : l'une en Phénicie, une autre dans la Thrace, et la troisième en Etrurie.

Thrace
Attique et Atlante sont une même dénomination. Les Hellènes, enfants du Hélium, ont transporté en Grèce les usages de leur nation et leurs dénominations.
« Delphes a été fondée au pied du Mont Parnasse par les Hyperboréens », dit de Grave.
La fondation de l'oracle de Delphes marque une époque très remarquable dans les fastes de la Grèce, c'est l'ère de la civilisation de ce pays.
« On donna à l'endroit où l'on construisit la ville de Delphes le nom d'OMPHALOS (nombril) ; on y érigea un temple dans lequel on plaça un monument de pierre blanche figurant un nombril, auquel fut attaché un ruban, en forme de cordon ombilical, et on sculpta sur la pierre l'image de deux aigles. » (De Grave, T. I, p. 92.)
Voilà du symbolisme facile à expliquer.
Le gouvernement maternel est représenté par le cordon ombilical qui attache l'enfant à sa mère ; et les deux enfants, représentés par les deux aigles, montrent que la mère enfante des fils et des filles qui doivent vivre en paix sous l'égide maternelle.
Comme Helf, dans les langues du Nord, signifie moitié, on s'est figuré que d'Helf (ou Delphes) voulait dire milieu (milieu de la Terre) ; c'est une erreur. Cela signifie égalité des sexes devant la mère, et cela répond, évidemment, à une prétention de domination masculine ; les Grecs, donnant partout à l'homme le rôle de la femme, on a sans doute voulu lui rappeler qu'il n'est que la moitié de l'humanité. Delphes devint le siège de la religion, le centre des sciences et l'académie de la Grèce.
La ville de Delphes fut, plus tard, appelée Pytho (de Put qui signifie puits ou caverne), d'où les noms de Pythie, pythonisse (écrits comme ils doivent l'être, Puthie, puthonisse, qui dérivent du verbe putten (puiser), d'où cette expression : un puits de science).
Les Mystères de Samothrace furent apportés du Nord ; Pausanias appelle cette ville « une colonie de réfugiés ». (De samen, ensemble, et trechein, ce qui veut dire voyager, émigrer, se réfugier.)
Eleusis vient de El-hus, qui est synonyme de Hem-el (ciel, maison sainte), quoique écrit autrement. On sait que les Galates portèrent leur divinité Gala-thée dans la partie centrale de l'Asie Mineure.

Phénicie
« Les Phéniciens, dit de Grave (T. I, p. 109), sont originaires de la côte septentrionale de la Gaule. Il existait, dans ces endroits, des peuples de ce nom du temps de César, ce sont les Veneti de la Gaule. »
Strabon nous donne les premières idées de cette origine en disant que les Vénitiens de l'Adriatique étaient une colonie de Vénètes gaulois. Vénitien et Phénicien sont des termes équivalents, le ph grec remplace notre lettre V.
Dans son ouvrage « Études anté-historiques : les Atlantes », Godefroy de Roisel précise : « Quelques savants ont déjà soutenu que les phéniciens ne sont qu'une ancienne colonie Galloise ; et voici leur raisonnement. Les Veneti, peuple de la troisième Lyonnaise, s'étendaient le long de l'Atlantique. Au temps de César, ils avaient encore une grande supériorité maritime sur les peuples voisins, et possédaient à peu près tous les ports de la Gaule, situés sur cette côte, ainsi que les petites îles de l'Océan connues sous le nom de Veneticæ insulæ. D'un autre côté, Strabon nous apprend que les Vénitiens de l'adriatique étaient une colonie des Veneti Gaulois ; et il est reconnu que les noms de Veneti, Vénitiens, Phéniciens ont une origine commune. L'on peut affirmer sans témérité que les Phéniciens étaient sortis de l'Armorique, pays maritime des Gaules, duquel provenait également la colonie adriatique ; avec d'autant plus de raison qu'ils avaient les mêmes dieux, professaient les mêmes sciences, et possédaient les mêmes esprits entreprenants, non-seulement que leurs congénères les Vénéti, mais que toute la race Galloise. »
Il y a plus : on sait que le mot Phénicie vient du mot Phénix. Or, si nous écrivons ce mot avec un V au lieu du ph, nous avons Venix, dont les Latins ont fait Vénus. Et les Vénètes sont les disciples de Vénus.
Les noms de villes phéniciennes se retrouvent également dans le nord de l'Europe.
On y trouve les Sidoniens-Atlantes, qui auraient fondé la ville de Sidon. On les appelle aussi Sithoniens. Par le mot Sithoniens on doit entendre les colons de Sithium, dans la Mœrinie gauloise. « La patrie des Saxons portait le nom de Morinie, mot que plusieurs écrivent Mœres. » (De Grave, T. III, p: 219.)
Les Sithoniens sont les Morisènes, qui s'écrit Morigènes. Morigène signifie aussi né des Mœres, c'est le même mot que Mœrini. Sa signification n'est pas douteuse, c'est le pays où règnent les Déesses-Mères (Mœres).
Quelques-uns, pour cacher cette origine, ont fait venir Morini de mor (mer), disant que, autrefois, mor, devenu mar, est devenu finalement meer. Et alors Morin veut dire marin et non Mœrini (de Mère ou maternel). Et, pour soutenir cette origine, on nous dit que les Suèves vénéraient Isis sous la forme d'un bateau et que Suève vient de swenen (voguer). Mais tout cela ne prouve-t-il pas que les relations qui s'étaient établies entre le centre primitif de la culture et les diverses succursales se faisaient par mer ? Il y a longtemps que l'on sait que les Phéniciens étaient de hardis navigateurs.
Parmi les villes sacrées de l'Assyrie, nous trouvons Istha-Kar. « Ce nom devrait être écrit Ysdham-Khaîr, c'est-à-dire ville divine », dit Fabre d'Olivet, parce que, dans l'ancienne langue des Celtes, Is est le nom de la Divinité.
Du reste, Fabre d'Olivet ajoute : « Dans l'ancien idiome des Iraniens, Isdham signifie Dieu ou Génie, comme il le signifie encore en hongrois. »
Ajoutons que le mot Kar, qui complète le nom, signifie chez les Celtes demeure, maison.

Etrurie
Celles que nous avons appelées les premières institutrices sont désignées chez les Latins par le mot Dryades, mot qui signifie dans la mythologie Nymphes des forêts. Les Germains les appellent les Dames des forêts et des eaux. On disait aussi Hamadryades. Mais on ajoute que Dryade vient de Drud, et nous avons vu que drud sert à désigner l'enseignement des sciences. Voici comment Dottin l'explique (Etudes sur l'antiquité celtique, p. 364). « Il est probable, dit-il, que le dratis drasidæ dryaridæ d'Ammien Marcellin repose sur une mauvaise lecture, ou est la traduction d'une étymologie populaire. Pour les copistes de Lucain et les historiens de l'Histoire d'Auguste, l'étymologie grecque de druide est si bien passée dans le domaine public que les druides et les druidesses sont devenus des dryades, driadæ, dryadæ. »
Voilà une explication qui met après ce qui est avant et fait venir les dryades des druides, alors que ce sont les druides qui ont remplacé les dryades. Nous n'avons pas à nous en étonner, c'est ainsi qu'on a écrit l'histoire.
Citons encore de Grave, qui dit (T. I, p. 87) :
« Les savants élyséens, en propageant leur sublime doctrine, se sont affilié tous les grands peuples de la Terre, partout ils ont laissé des traces de leur science qui, souvent, nous serviront d'éclaircissement dans des points difficiles ».
Et ailleurs (p. 84), le même auteur dit ceci :
« Originairement, les savants étrangers sont tous frères des druides. Les brahmanes, les mages de Perse, les prêtres Chaldéens, les pontifes d'Egypte, les philosophes grecs, les druides, ont tous une patrie commune ; et cette patrie, c'est la République Elyséenne ou des Atlantes, qu'on peut regarder, sous ce rapport, comme une OFFICINA GENTIUM. C'est de cette région que sont partis les savants philanthropes qui ont civilisé et endoctriné les nations : les brahmanes conviennent eux-mêmes qu'ils sont étrangers aux Indes. Le Zend-Avesta suppose la patrie primitive des prêtres chaldéens au 50ème degré de latitude, où la nuit la plus longue est le double du jour le plus court (1). Les mots brahmanes et mages expriment dans la langue néerlandaise (flamande) la véritable profession de ces savants ; brachman signifie Gymno-Sophiste, savant d'école et Mage naturaliste ou scrutateur de la nature divine et humaine. » (2) .
(1) « Sous quelle latitude vivaient ces grands initiateurs de l'humanité ? M. Guyméner nous l'apprend encore. « Ce législateur de la Perse, écrit-il à propos de Zoroastre, avait recueilli, dans ses voyages au nord de l'Asie, des notions astronomiques qu'il communiqua à ses disciples, et qui prouvent leur origine. Ainsi, en disant que le plus long jour de l'été était le double du jour le plus court de l'hiver, il indique la latitude de la Tartarie qui est de 49°, à peu près celle de Paris, où effectivement le plus grand jour est d'environ seize heures, et le plus court d'à peu près huit heures, tandis que la latitude de la Perse, étant beaucoup moins haute, cette indication ne peut s'y appliquer.
« Zoroastre avouait donc tenir du nord ses doctrines astronomiques antérieurement établies, suivant le 49° degré de latitude. Or quel peuple pouvait les lui avoir fournis ? Seraient-ce les Indiens, qui ne surent même pas les conserver, et qui, du reste, habitèrent une contrée beaucoup plus méridionale ? Seraient-ce les Touraniens, chez lesquels aucun collège sacerdotal ne paraît jamais s'être établi, et qui oublièrent plus promptement encore les connaissances scientifiques ? Nous ne trouvons que les occidentaux, dont l'antique civilisation est attestée par tant de témoignages, et qui florissaient vers le 49° parallèle. Ce ne fut que dans les Gaules que les dépositaires de la doctrine sacrée se disaient Autochtones ; et l'impossibilité de placer autre part le centre de l'antique apostolat en établirait suffisamment, si nous ne devions encore le constater par la comparaison des dogmes religieux. » (Godefroy de Roisel, Études anté-historiques : les Atlantes, p.134)
(2) L'Avesta, Le Livre sacré des anciens Iraniens, se divisait en vingt-et-une sections (« Nackas » en zend, « Nosks » en pehlvi), nombre symétrique produit par sept et trois, qui jouent un si grand rôle dans le Parsisme. Composé de deux racines galliques, le mot « Nackas » résume l'idée du bien triomphant sur la terre comme au ciel, et celle de rédemption. « Nac, Nagt, Nacht, signifie la négation, le non être, l'obscurité ; au figuré le fini ou le mal. Les flamands écrivent encore indifféremment Nagt ou Nacht pour désigner la nuit. « Kas de Kassen » signifie chasser, repousser, faire fuire dans le but de détruire. Chasser la nuit, dissiper les ténèbres, c'est faire triomper la science, la lumière. « Nagt-Kars, ou comme le prononce un des plus vieux patois flamands, « Nachtkas », signifie encore chandelle de nuit. » (G. de Roisel, Études anté-historiques : les Atlantes, p.348)

MÉDIOMATRICI
Précédemment, nous avons vu qu'on a beaucoup cherché dans quelle région de la Terre se trouvait le pays fortuné appelé les Champs Elysées.
Nous avons à ce sujet un document qui nous donne une certitude : ce sont les cartes de géographie qui nous montrent la Gaule du temps de César.
A l'endroit indiqué par les auteurs que nous venons de citer, c'est-à-dire à l'est de la Gaule-Belgique, nous trouvons une région appelée encore, du temps de César, MEDIOMATRICI. C'est évidemment là qu'était le centre du monde spirituel quand la religion des grandes Déesses celtiques régnait sur la Terre tout entière.
Cette région forme aujourd'hui trois départements : la Moselle, la Meuse, le Bas-Rhin.
La ville centrale de cette région était appelée Divodurum, nom qui signifie tente des Déesses, ou forteresse des Déesses. Cette ville est devenue Metz.
Nous ne savons, de ce centre de la vie spirituelle d'une époque qui fut grande et belle, que ce que la mythologie nous a conservé.
Cependant, dans les Etudes sur l'antiquité celtique de Dottin, nous trouvons un nom : Nantosuela. Il dit ceci (p. 321) :
« Sur un des autels de Sarrebourg (Médiomatrice), étudié par Salomon Reinach (Revue Celtique, T. XVIII, pp. 253 à 266, avec figure), est figuré un personnage debout, vêtu d'une tunique, tenant de la main gauche un maillet à longue hampe et de la main droite un vase. A sa droite est une femme de même grandeur, complètement drapée, tenant de la main gauche levée une longue hampe surmontée d'une espèce d'édicule et abaissant la main droite, qui tient une patère, vers un autel. Une inscription placée au-dessus du bas-relief nous apprend que l'homme s'appelle Sucellos et sa parèdre Nantosuela ».
Dans le vocabulaire de géographie comparée, publié à la suite des Commentaires de César, nous lisons :
Mediomatrici, peuple de la Belgique, au sud des Trévires, aujourd'hui partie de la Lorraine et de l'Alsace. Départements de la Moselle, de la Meuse et du Bas-Rhin.
Mosa, fleuve qui traversait la Belgique (Meuse). Si Mosa signifie Muse, Moselle n'est-elle pas le nom d'une petite Muse ?
Et nous voilà bien près de Da-moiselle, qui fut un titre de noblesse.
Comme la femme est plus petite que l'homme, on se moque de sa petitesse et on l'appelle Maus (souris), au lieu de l'appeler Muse.
Sequana, fleuve servant de limite entre la Belgique et la Celtique ; aujourd'hui la Seine.
Arduenna Silva, forêt de la Belgique s'étendant du pays des Nerviens aux bords du Rhin. Aujourd'hui forêt des Ardennes.
Matrona, affluent de la Seine servant de limite entre la Celtique et la Belgique. Aujourd'hui la Marne.
Lutetia, Ile de Notre-Dame. Ajoutons que Liège s'appelait Lüttich et que c'est de ce nom qu'on a fait Lutèce.
Pæmani, peuple de la Belgique, client de Trévires ; aujourd'hui province de Namur ; pays de Famenne (Fée, qui en latin a fait Fæmina).

LA RÉPUBLIQUE DES ATLANTES
On voit par le récit de Platon sur l'Atlantide que le gouvernement des Atlantes était fédératif. Il était partagé en dix Matrices dont chaque Déesse-Mère régnait sur ses propres sujets et selon ses lois.
C'était une société de souveraines, qui a servi de modèle à celle des Amphictyons en Grèce.
De Grave dit (T. I, p. 51) : « L'Elysée était une République fédérative dont les chefs s'assemblaient à des temps donnés, pour délibérer sur les affaires de la généralité. »
Quels étaient ces chefs ?
On en met trois dans les Champs Elysées : Minos, Eaque et Rhadamante.
Précisions d'abord que Minos, comme Menés ou Mena, est le nom donné partout au premier souverain, à la première autorité, qui est maternelle. Mannas est le titre symbolique des premiers fondateurs des empires. Mannas, c'est la Mère (On lui a fait un masculin Menos, puis Man, homme).
Minos, que les Grecs ont mis pour Manas, tient un sceptre d'or, symbole d'une administration douce et équitable.
Chez les Boréens, nous retrouvons ce nom dans Minnur ou Minner. (Les changements de voyelles sont fréquents chez les Scandinaves.)
Tous les neuf ans, ce Minos du Nord rendait des oracles. C'était les Jugements du Nord (les neuvaines), que l'on célébrait en Suède avec grande solennité.
Homère nous dit que Minos rendait des oracles tous les neuf ans.
Ce chiffre neuf a pour but de rappeler les neuf mois de la gestation. Tout le symbolisme primitif est maternel. On nous dira aussi que Manou est une intelligence législative qui préside sur la Terre d'un déluge à l'autre, c'est-à-dire d'un cataclysme social à l'autre. Rejetée par les masculinistes, on est obligé de la rappeler quand le désordre va trop loin. Alors elle rapporte une constitution providentielle qui remet la vie humaine dans la bonne voie.

Le nom de Rhadamante vient de Radaman, qui signifie « un Juge Royal ».
Rad signifie un sénateur, un juge, comme red, dont on fait red-ligio (religion).
Homère donne à Rhadamante le surnom de roux ou blond :
Flavus Rhadamantus, dit la version latine.
Les celtisants s'appuient sur ce texte pour montrer, que c'est bien d'une personnalité du Nord qu'il s'agit.
On a décomposé le nom de Rhada-manto, et montré que Manto fut une grande prophétesse et une des fondatrices de l'oracle de Delphes.
N'y aurait-il pas un rapprochement à faire de ce nom, Manto, avec le nom trouvé sur un bas-relief dans la Médiomatrice, Nanto-suela ?
De Rhada-Manto, les Grecs et les Latins feront Rhada-Mantus.

On ne sait pas d'où vient le nom d'Eaque, mais ce que nous savons, c'est que ses descendants sont les Eacides, parmi lesquels se trouvent Télamon, Pelée, Achille, Néoptolème, etc.

C'étaient des femmes bien vivantes qui étaient les juges suprêmes. On les a longtemps appelées les anciennes, parce que ces fonctions étaient remplies par les aïeules, les Mères, les Matrones ; et c'est pour cela que l'homme méchant a toujours continué à craindre la femme âgée, celle qui connaît la vie, et le connaît, c'est-à-dire le juge.
Ceux d'entre les hommes qui avaient passé leur vie dans la Justice, et agi selon la loi morale étaient reçus dans les îles fortunées, les prairies bienheureuses du pays des Déesses, où ils vivaient dans la félicité. Les méchants et les impies étaient relégués au Tartare, au pays des hommes.

LES AMPHICTYONS
C'est à Céridven (Cérès) que l'on doit les codes qui ont été le fondement de la civilisation européenne. C'est pour cela, évidemment, que, parmi les appellations diverses données à la Déesse, nous trouvons qu'en Grèce et à Rome on a toujours continué à l'appeler Thesmophore, c'est-à-dire Cérès Législatrice.
Elle fonda le Conseil des Amphictyons, admirable institution élevée au-dessus des peuples et des rois, pour les juger également.
En Grèce, ce Conseil s'assemblait deux fois l'an, au printemps et à l'automne, dans le Temple de Cérès, aux Thermopyles, près de l'embouchure du fleuve Asope.
Les décrets de ce tribunal devaient être soumis à la suprême Déesse-Mère avant d'avoir force de loi, et ce n'est qu'après avoir été approuvés et signés par Elle qu'ils étaient gravés sur des colonnes et considérés comme authentiques.
Deux étymologies sont données du mot Amphictyon. Dans l'une, on nous dit que ce mot est composé de deux mots grecs et signifie proprement ce qui fait une contrée de plusieurs contrées et un peuple de plusieurs peuples.
L'autre dit que le mot vient de amphi, circa (près), et de trion (ce qui est formé de sept étoiles). Ce sont les sept lumières nécessaires pour former le Conseil. Nous les retrouverons dans la fondation des Mystères.
Ceux qui en font partie sont les Eumolpides, c'est-à-dire les parfaits.
Quand les Grecs supprimeront les femmes et mettront l'homme partout, ils diront que la fondation de ce tribunal remonte à Orphée, qui résidait sur le Mont Sacré.
Henri Martin, qui continue la tradition masculiniste, nous dira que les Gaulois étaient partagés en nations (matries), en cantons et en tribus. Puis il ajoutera que chaque nation élisait un chef civil et un chef militaire.
Or le chef civil, c'est la Déesse-Mère, elle existait encore lors de l'invasion romaine ; le chef militaire, c'est l'homme qu'elle choisissait pour en faire l'exécuteur de ses ordres.
« Les Gaulois, suivant la tradition conservée dans le pays de Galles, disaient que, selon l'ordre et le droit primitif, une nation (matrie) est au-dessus d'un chef. »
Donc, l'autorité maternelle est au-dessus de l'autorité du chef militaire. Et la vieille loi des Celtes d'Irlande, frères des Gaulois de France, dit qu'un roi injuste et un chef qui ne remplit pas ses devoirs peuvent être dégradés.
Donc, il existe une autorité supérieure à eux et qui les juge !...
Remarquons que, parmi les noms collectifs donnés aux femmes, on trouve, dans les langues Scandinaves, le mot Queen, qui veut dire Reine et s'applique à la Femme en général. Changez le q de queen en g et vous arrivez à gun, d'où gunè qui signifie femme en grec. Il est donc bien vrai que de la langue celtique dérivent toutes les autres.

LE TARTARE
La mythologie a gardé l'idée d'un enfer dans lequel sont précipités les méchants, et d'un jugement qui précède leur condamnation.
« L'enfer était l'endroit consacré au jugement et à la sépulture des morts », dira-t-on.
Mais il ne s'agit que de la mort morale, et c'est cette question qu'on a le plus cachée, altérée, dénaturée, l'homme pervers ne se reconnaissant jamais coupable d'aucun méfait.
Chez les Grecs et les Latins, le mâle inférieur, c'est-à-dire sexuel, c'est le Faune, le Satyre, qui n'a de l'homme que la moitié du corps, la partie inférieure est celle de l'animal.
On a donné à l'enfer des Atlantes le nom de Tartare, qui fut, plus tard, celui d'un peuple révolté contre la loi divine (féminine). Mais primitivement ce tribunal ne devait pas porter ce nom, qui a dû être employé très postérieurement à l'époque dont nous nous occupons. C'est la mythologie grecque qui a embrouillé les dates. Le titre qu'il porte, Tartare, prouve que c'était le peuple tartare qui était considéré comme hors la loi, c'est-à-dire vivant sans direction morale (1).
Pluton règne dans ce séjour ténébreux.
Pluton vient de la racine Blota, qui signifie égorger des victimes.
C'est en anglais Blood (sang), meurtre. Dans les langues du Nord, on appelle encore blottries les statues de Pluton, considéré comme l'homme qui tue. Sa statue est teinte de sang humain.
Les Grecs donnèrent à ce dieu le surnom d'Adès, qui vient d'Odin. Les blottries sont encore appelées Odin.
Les Grecs dénaturèrent tout ce qui venait du Nord, en masculinisant les idées féminines des Celtes qu'ils ne comprenaient pas.
Ainsi, Plutarque dit qu'Adès, c'est ce qui plaît aux hommes, mais il n'ajoute pas que c'est le meurtre.
Le mot Odin vient de ad, aüd, qui, dans les langues du Nord, fait auda ou oda (détruire, perdre), d'où Œden, roi des enfers et des ombres. Œden devient Oden, puis Odin.
Ce mot descendit en Phénicie, où ed, aüd devint Adès, qui signifie perte, mort (morale), mais non cessation de la vie, mort de l'âme dans le corps vivant ; autrement, comment expliquerait-on que Pluton est un dieu vivant qui agit comme les vivants ?
C'est de Odin que, plus tard, on fit Adonis et sans doute Odieu ; peut-être aussi Odyssée et la ville d'Odinsée.
Les fleuves qui coulent dans le « Tartare » sont des symboles. On y trouve :
L'Achéron, dont les ondes sont amères comme la douleur, c'est le péché (picros, amer) ; son nom annonce l'angoisse et les lamentations. Il est fils de la Terre (symbole de ce qui est bas) ; il fut précipité dans les Enfers parce qu'il avait servi à étancher la soif des Titans.
Le symbole est transparent.
C'est ensuite le Cocyte, un marais formé des larmes que les méchants font couler.
Le Phlégéton, qui roule des ondes de feu (les passions).
Le Styx, où coule l'eau du silence et de la mort (mort de l'âme, obscurité de l'Esprit).
Et le Léthé, où l'on puise l'eau de l'oubli (perte de la mémoire, oubli de la science).
Ces noms des fleuves qui coulent dans le Tartare ne sont pas grecs, ils viennent du Nord et se sont altérés en s'acclimatant en Grèce.
Achéron vient de gondt, qui signifie fond ; l'a privatif en a fait agondt (sans fond), d'où est venu a-chéron. Le g ou le k sont deux articulations gutturales ; pour adoucir le mot agondt, les Grecs n'ont fait que substituer une articulation à une autre, et ils ont fait akondt, puis, en donnant plus de valeur au scheva ou à l'e muet qui dans la prononciation suit la consonne k, ils ont fait akeron, et nous qui représentons les k par ch, nous écrivons achéron.
Le Léthé vient de Lata ou Leta, qui signifie oublier, abandonner (laisser).
Le Cocyte vient de la racine Kota, qui désigne une source bouillonnante.
Le Styx vient de Stegg ou Stigg, qui signifie une chose déplaisante, désagréable. (D'après Rudberk.)
Phlégéton vient de flaga ou flogeld, météore igné, et thon, fleuve. Flogeldthon veut dire fleuve de feu (passion).
Le lac Averne, dont Virgile fait un antre dont l'entrée est facile et la sortie si rare parce qu'il représente la mort, est le symbole de la voie descendante de la sexualité mâle ; il prend son nom de aa qui signifie eau et de werna qui signifie renfermer.
(1) Tartare, ou Tatar, est le nom d'un peuple masculiniste qui renversa la Gynécocratie au nord de l'Asie et à l'est de l'Europe ; leurs descendants furent les Huns, les Avares, les Bulgares, les Magyars, les Finnois, les Mongols, les Turcs.

LES GRANDES DÉESSES
Quelques grandes femmes, supérieures aux autres, ont laissé dans l'histoire un nom immortel. Il en est qui jetèrent un tel éclat sur leur époque, que leur nom est resté dans la mémoire des peuples.
Nous trouvons dans l'histoire cachée des Celtes trois noms arrivés jusqu'à nous à travers des légendes fantastiques, mais l'obscurité la plus profonde règne sur les femmes réelles qui portèrent ces noms. Ce sont :
- La Voluspa
- Ardui-Anaïta, surnommée Diana
- Vénus-Bélisama, surnommée Hémœra.
Nous dirons également quelques mots sur Junon.

LA VOLUSPA (Auteure de l'Edda Islandorum)
Nous connaissons la science primitive des Celtes par un poème intitulé la Voluspa, nom qui signifie : Celle qui voit l'universalité des choses.
Dans l'Edda, l'idée de chute et de rédemption est très longuement développée. La chute, c'est l'orgueil divin (masculin) s'arrogeant d'exorbitants attributs, ceux de la Déesse, et voulant se placer sur une cime inaccessible à l'homme voulant dominer la Fatalité, c'est-à-dire la loi qui régit les sexes et sur laquelle s'appuie le règne des Fatæ (Déesses).
Le mythe dit : « Les dieux ne pouvaient user légitimement de l'or et furent maudits dès qu'ils se le furent approprié. » On a compris, sans doute, que l'or est un symbole, puisqu'il régit les attributs sexuels. Les dieux, ayant profané l’or sacré, furent maudits, ils moururent ; telle est la faute, la chute. Mais la résurrection viendra quand l’or sera restitué aux Ondines. La femme seule peut sauver l'homme et lui restituer la science (ceci est le sujet de la Tétralogie de Wagner) ; ce qui est or dans un sexe devient plomb vil dans l'autre sexe. C'est sur ce symbolisme incompris qu'on a édifié l'alchimie de la transmutation des métaux.
On a comparé l'Edda à un Livre sibyllin, et le nom de la Voluspa a pris depuis la signification de Prophétesse ou Devineresse. Il se dit aussi Volva.
Ce livre contient une histoire cosmogonique ; ce qui en reste se trouve maintenant intercalé dans l'Edda Islandorum.
(Edda signifie aïeule.)
L'Edda est un poème composé de deux livres, l'un en vers, l'autre en prose (Edda Islandorum, Hæmiæ, 1665). C'est tout ce qui reste d'authentique touchant le culte des anciens druides, dit-on. Ce livre a été écrit pour les glorifier. La première partie date du XIème siècle et est attribuée à un poète islandais. Il fut découvert en 1643. Il chante les exploits des dieux mâles, Odin, Thor, Balder.
Le nom de ce poème inspire quelques réflexions : pourquoi Is-landorum ?
Is, nous l'avons vu, est la divinité primitive chez les Celtes, land (terre), « terre des Déesses ».
Nous retrouvons la racine Is dans Is-is, Isthar, Istacar, Is-ra-el, Isa-ac, Ish-wara. Dans les langues Scandinaves, Is devient As (l'un absolu).
Dans l'Edda, on mentionne neuf femmes rassemblées autour de la sage Mengleod (sans doute Minerve), sur une roche élevée, vers laquelle toutes les femmes, surtout les malades, se dirigent. La Déesse Eir préside à la médecine.
Ce sont les neuf Muses des Grecs sur le Mont Parnasse. On voit aussi dans ce poème des « Dames blanches » qui parcourent le pays en qualité de « voyantes » (prophétesses) et de médeciennes. Elles chantent des hymnes, elles écrivent des runes, elles préparent des boissons pour les malades et leur donnent tous les soins nécessaires.
Elles écrivent aussi l'histoire et nous donnent la description des batailles, c'est-à-dire que dans l'Edda révisé on a introduit des récits de guerre qui ne pouvaient pas exister dans le poème original.
Dans l'épisode de Hromund Greipsson, nous voyons qu'un adversaire de ce guerrier lui ouvre le ventre ; il repousse les intestins dans la cavité abdominale, les maintient à l'aide d'une ceinture et court de nouveau à la lutte. Après la bataille, sa Svanhvit bien-aimée examine la blessure et la coud magistralement. Soigné par elle, il est bientôt guéri totalement.
Cet épisode nous apprend que ce sont les femmes qui, dans l'antiquité, ont trouvé et appliqué les procédés chirurgicaux, dont la médecine moderne a hérité et dont les hommes se font gloire.
Dans un autre épisode, on nous montre la bataille de Siklastad, le Scale Thormod Kolbrunarskal grièvement frappé, arrivant dans une cabane où étaient couchés nombre de blessés. Une femme était occupée à les panser, à laver leurs plaies avec l'eau chaude, et sur le feu bouillaient dans un chaudron des plantes odorantes qu'elle donnait en breuvage aux guerriers.
Les Sagas étaient très douces et très compatissantes. Elles se rendaient sur les champs de bataille et soignaient tous les blessés. Dans les duels, elles étaient aussi présentes pour soigner les blessures.
Quand Thorfim Selthorisson et Gudlang le riche se blessèrent l'un l'autre en duel, Thunt, la mère de Gudlang, les guérit et, ensuite, les réconcilia.
Voilà bien la Femme, guérissant l'âme et le corps et remettant l'homme dans la voie de la raison.
Le mot Scale, que nous venons de trouver dans cet épisode, est le nom de la Norme Skalda. C'est le nom qui, plus tard, sera donné aux prêtres Scandinaves quand il y aura un sacerdoce masculin. On le dit dérivé de Kalad qui devint Kalds. Or Kalad a fait Kaldée, mot kabbalistique dans lequel se trouvent les trois lettres hébraïques kaph, lamed, daleth, qui ont un sens symbolique.
C'est de ce mot Kald que l'on aurait fait Gals et Gaulois. C'est du mot Scale, qui en dérive, que l'on aurait fait Celte et Celtique.
Nous citons ces étymologies sans commentaires.
L'île sacrée de Scaldia est aujourd'hui Schouwen.

ARDUINA
Arduina est la grande Déesse celtique qui donna son nom à une région de la Gaule-Belgique : la forêt des Ardennes, formant la région nord de Médiomatrice.
Nous lisons dans l'Origine celtique de Cailleux : « Arduenna, surnom de Diane, régnait sur une vaste forêt des Gaulois, les Ardennes, qui gardèrent son nom. Dans les environs du Hélion (la Meuse), la Déesse Arduina avait une chapelle où ses affiliés lui apportaient leur tribut. Sa statue retrouvée nous la montre entre une biche et un chien. Chez les Eburons (pays de Liège), elle était la patronne des chasseurs. » (Orig. celt., p. 152.)
Ailleurs, le même auteur dit aussi : « Diana représente souvent les trois fleuves (Meuse, Escaut, Rhin), ce qui la fait appeler Hithye, c'est-à-dire Déesse du Hélion. »
Donc, c'est Arduina qui est Diane.
D'autre part, les Bouddhistes ont dans la pagode de Jikadzé ou Shigatsé, ville proche de Tashilunpo (Petit Tibet), sept statues qui toutes s'appellent « Erdeni » (traduction de Arduina).
Mais elle a bien d'autres surnoms.
Nous savons maintenant que c'est cette Déesse qui est l'auteur de l'A-vesta, qui la nomme Ardui-Souria-Anaïta.
Souria est un titre qui indique la souveraineté. Il nous reste à chercher la signification du nom d'Anaïta.
Mais, d'abord, un mot sur la localité qui semble avoir été le foyer principal d'où cette lumière a jailli.
Liège, dont le nom ancien est Lüttich, a été appelée la Ville ardente. Ce surnom semble indiquer qu'elle fut le berceau à Arduina. De Lüttich on a fait Lutèce.
L'A-Vesta aurait été écrit dans la langue qu'on y parlait à cette époque et qui est devenue le wallon belge, reste d'une ancienne langue sacrée.
Plus tard, le livre a été porté en Perse par les Mages, qui en ont fait une révision qui l'a complètement dénaturé.

Anaïta est un surnom qu'il faut écrire en deux mots : Ana-ita. ce dernier vocable étant un diminutif.
Ana signifie ancien ; Ahne, en langue teutone.
Ce nom a la même signification que le mot Edda.
Ce n'est pas seulement l'aïeule au point de vue de l'ascendance, c'est la lumière ancienne, la science primitive.
Le mot Ary-ana signifie « Terre d'Ana » (rapprochons ary de aretz, terre en hébreu). Ceci nous fait comprendre que l'opposition des sexes, qui est le fond de l'A-Vesta, est représentée par Ary-man, la Terre de l'homme, l'obscurité, tandis que Ary-ana, la Terre ancienne des Déesses, c'est le jour, la lumière.
Ana est la racine d'une multitude de noms de femmes. Nous trouvons Anaïtis à Comare.
Chez les Chaldéens, Ana signifie ciel, ou lumière astrale, Anima Mundi, d'où vient Anaitia.
Dêvi-Durgâ, la femme de Shiva, est aussi nommée Anna-pûrnâ (1) et Kanyâ (la Vierge).
Umâ-Kanyâ est un nom ésotérique et signifie « la Vierge de Lumière ».
C'est pour cela que les Catholiques ont appelé la Mère de la Vierge Marie Anne et qu'ils l'ont déclarée conçue sans péché.
Quand les Grecs feront leur mythologie, qui a pour but de cacher le rôle de la femme, ils diront qu'Ariane était la fille de Minos, que dans le Labyrinthe de Crète Thésée se serait égaré sans le fil d'Ariane (c'est-à-dire la Science). Ce qui prouve bien que le Labyrinthe, c'est le symbole de l'erreur, de la parole de mensonge des imposteurs qui sont venus tout embrouiller en supprimant le rôle des femmes et en substituant des Dieux mâles aux antiques Déesses.
Dans les Mystères, la danse des jeunes Crétoises imitait les détours du Labyrinthe.
(1) « Nous insisterons un peu sur une autre de ses hypostases, celle d’Anna, dont le nom se présente d’ailleurs sous plusieurs autres formes : Ana, Anu, Anis, Dana, peu importe pour notre propos ; retenons la forme Anna la plus intéressante par rapport à ce que nous allons voir. Anna est une divinité noire, elle est, comme nous l’avons déjà dit au début de ce chapitre, la « Black Annis » du folklore gallois et une effigie en pierre noire est conservée à Montluçon. Cette Anna est la « Grande Mère des Bretons » (Goz ar Vretened). On a rapproché son nom de celui d’Anna Perenna et d’Anna Pourna ; avec raison : en effet Anna Perenna présidait à Rome à l’alimentation puisqu’aussi bien le mot latin anna, qui est d’origine indo-européenne, se rapporte à la nourriture ; de même dans le domaine hindou, Anna Pourna dont le nom signifie « la déesse regorgeant de nourriture ». Nous sommes ici, dans les deux cas, en présence d’une puissance de fécondité sous toutes ses formes sans préjudice d’ailleurs, nous le verrons, d’un rôle bien supérieur à celui de fournir une alimentation.
« Toute la Gaule a vénéré Anna comme le prouve une fois de plus la toponymie : Annegray (Haute-Savoie), Annebecq (Calvados), Amnepont (Charente-Maritime), Annequin (Pas-de-Calais), Anneville (Haute-Marne), la fontaine de Marianne (Champagne), la fontaine de Cou-Anne, ce qui signifie le « Creux d’Anne », près de Châtillon s/Seine, enfin Commana (Finistère) qui a le même sens « le Creux d’Ana ». Dans plusieurs de ces lieux la divinité celtique a été relayée par SainteAnne ; le cas le plus célèbre est celui de la Bretagne, où le site de Sainte Anne d’Auray qui, bien avant la “découverte” de la statue de la sainte par Nicolazic au XVIIe siècle s’appelait déjà Ker-Anna, « le domicile d’Anna », et cela depuis toujours. » (J. Hani, La Vierge noire et le mystère marial)

Un autre surnom d'Arduina, c'est Diana. Les Parsis remplacent souvent le mot A-Vesta par le mot Dîn, qui signifie Loi en zend.
Din fait Dina et Diana, et l'expression Dæna A-Vesta serait synonyme de Diana. (Voir l'article sur la Perse)
Diane a donc signifié la Loi, avant d'être le surnom d'une Déesse (comme la Loi d'Israël, Ha-thorah, « Hathor », est devenue le surnom de la Déesse Myriam qui en fut l'auteur). (Voir l'article sur l'Israélisme)
La Loi d'Ahoura, « l'Esprit Lumière de Diana », paraît constituer le fond du Vendidad.
Les auteurs relativement modernes ne savent rien de cette histoire ancienne.
Diodore de Sicile assure que Diane était particulièrement honorée chez les Perses et que ces barbares célébraient encore de son temps, en son honneur, les mêmes Mystères dont elle était l'objet chez les autres nations.
Donc, elle n'est pas originaire de Perse, mais y a été importée probablement à l'époque où régnait la magie des Zoroastres.
Dans le Zend-A-Vesta réformé du temps des Mages, on dit que les prêtres chaldéens sont originaires d'un pays où la nuit la plus longue est double du jour le plus court. Sur ces données, Bailly reconnaît que l'auteur désigne le 50ème degré de latitude, qui est celui de la Belgique.
On sait que Diane était adorée à Bibracte ou Bibrax, dont elle était la grande Déesse.
Bibrax était située entre la Meuse et l'Aisne, non loin de Médiomatrice.

Dans la mythologie, Diane, dont le nom se retrouve dans Dhiava, Diva ou Daiva, signifie « le Jour », la lumière engendrée par le soleil. En latin archaïque, on disait Divis sub dio, qu'on traduit par sous le ciel. Elle fut représentée par le soleil d'abord, et jusqu'au jour où les hommes lui disputèrent sa gloire ; alors ils la représenteront par la lune.
Dans l'ancien culte italique, on l'appelait Dea, Dia, Bona Dea, Maïa. Pour ses fidèles, elle représentait tout à la fois la Nature et la pureté féminine.
On lui consacrait une fête en décembre, sans doute à l'époque du Solstice, qui est le retour vers la lumière qui va réveiller la Nature endormie.
Diane est surnommée Propylæa, et aussi Lucifer, surnom donné aux antiques Déesses porte-lumière, que l'on nous représente un flambeau à la main, telle la Déesse Até. Elle est appelée aussi Phosphore-Lucifer.
Tous ces noms changeront de signification quand le principe mâle régnera. Alors c'est lui qui sera le dieu de lumière et la femme sera l'esprit du mal, les ténèbres.

HERTHA-ARTÉMISE
Les grandes Déesses ont toujours une multitude de surnoms. Celle qui nous occupe est surnommée Herta, mot qui veut dire jardin.
N'est-ce pas pour rappeler le Jardin des Hespérides, l'Âge d'Or dans un Eden, symbole qui représente la vie heureuse de la première jeunesse ? Ce qui le prouverait, c'est que Herta est appelée Sainte Mère (Mœra, Deœ Mœrœ, Pomair, d'où Poméranie). Les Latins, qui ne remontent pas si haut, ont donné, de ce nom, une autre explication ; ils nous disent que l'habitude qu'avaient les druides de faire leurs cérémonies religieuses dans les forêts se transmit aux peuples chez lesquels ils émigrèrent. « Les Germains, dit Tacite, les Perses, dit Hérodote, n'avaient point de temples abrités ; les uns en Europe, les autres en Asie se sont fait une religion de renverser les constructions en pierre, où l'on prétendait renfermer la Divinité. Les uns étaient disciples de Herta (de ce nom on fit Huerta, jardin), les autres appelés Artœis. Or Herta, dit Tacite, n'avait pour temple qu'une forêt. » (La forêt des Ardennes.)
Herta était la Déesse des Suèves, et jamais, dit Tacite, aucun homme ne parut en sa présence nisi vinculo ligatus, sans porter le collier de l'ordre. C'est dans le même sens que d'autres lui donnaient le nom de Diane, qui dérive de Dienen, servir, et désigne la Déesse dont on était le serf.
Au midi de la Baltique se trouvaient des hommes menant la vie druidique, et liés au culte de Herta ; Tacite les appelait Semmones, mais plus vulgairement on les appelle Germains.
Les mots qui signifient morale en celtique, en latin, en grec, ont aussi été pris pour désigner la vie druidique. En Celtique, Sitten, qui veut dire mœurs, a fait nommer Sitones les druides des îles Scandinaves ; dans la Thrace ils étaient de même appelés Sithones ; ils étaient voisins des Semmones, et comme eux sous la domination d'une femme (Tacite, Germania). (C'est de ce mot Sitones qu'on a fait Sidonia, Sidon.) Sidi est un terme honorifique qui ne s'adresse qu'au personnage de qualité.
La Déesse Herta fut appelée Herta-Meisse par les peuples de la Méditerranée, qui écrivaient Artémise, et, comme Hert signifie cerf, on donna à Diane cet animal comme emblème.
Meisse signifiait jeune fille, d'où Miss.
M. Cailleux fait venir l'Arthémise persique de Herta-Mise. Et il ajoute : « Arthémis serait le nom de la Sibylle de Delphes, appelée aussi Daphné, nom donné aussi à Diane ».
Arthémis serait une variante du nom de la Déesse Arété consacrée comme Déesse. Elle est citée par Bachofen, qui dit qu'Eusthate considère son histoire comme une fable.
On a fait d'Arthémise une reine d'Halicarnasse qui se serait distinguée au combat de Salamine. Puis on a donné ce nom à une reine de Carie (IVème siècle avant notre ère), célèbre par sa douleur à la mort de Mausole, son mari, et par le monument qu'elle lui éleva, monument connu sous le nom de Mausolée.
Tout cela, c'est de l'adaptation masculiniste, c'est-à-dire grecque.
On nous parle aussi de la fontaine d'Aréthuse où coulait la source sacrée, et on la place dans une île de la mer de Sicile. Ce serait encore le souvenir de l'ancienne Déesse.

EUROPE
La chevalerie, qui est le culte primitif, a toujours représenté les chevaliers, initiés à la doctrine, munis d'un cordon qui est l'insigne de l'ordre. Ce cordon représente le lien moral qui attache l'homme à la Divinité, comme le cordon ombilical attache l'enfant à sa mère.
Le mot Europe le désigne (Eu, lien ; rope, corde, cordon, lien, ligature). Cette corde a fait cordial, lien du cœur. C'est parce qu'une Déesse a créé la doctrine de Vérité, qui est la base même de toute religion, qu'on la désigne elle-même sous le nom d'Europe. On sait que c'est un des surnoms de la Déesse Diane. Ce mot, traduit dans toutes les langues, est devenu chez les Latins religare, c'est-à-dire religion ; primitivement, on disait red-ligio.
La vie morale était tout dans cette société antique. Le lien qui unissait les hommes à la femme était la base de la domination de soi-même qui élève l'homme.
Le mot serf indiqua d'abord la soumission volontaire des hommes liés à la Déesse. Ce lien, fait d'affection, de tendresse, était si heureux qu'on le désignait par ces mots : « un doux servage ».

JUNON
Dans la seconde période religieuse, celle de l'hermaphrodisme divin (le Polythéisme), nous allons voir le nom d'Ana subir la transformation qu'on imposait alors aux noms des Déesses. On va lui annexer la lettre idéographique I, J, ou Iod, qui représente le sexe mâle et qui ouvre la voie à la substitution des sexes qui se fera plus tard. Les Prêtres mettent devant les noms de femmes la lettre qui est l'emblème de leur sexe et créent ainsi des couples divins. Ana, précédé de J, va devenir Io-ana, Juno, Jonan, Johanna, etc., parce que sous cette forme nouvelle il subira des variations diverses.
Juno va faire Junan et enfin Junon.
Mais, si le nom varie, les attributs restent les mêmes.
Junon est la grande Déesse, « le Ciel sur la Terre », la lumière de l'Esprit.
Juno-Lucina était adorée dans des fêtes intitulées les Calendes, qui lui étaient spécialement consacrées.
Juno-Regina est « la Reine du Ciel ». On l'adore sur les hauteurs. Elle est la protectrice des villes et des maisons. De Junon on fera Juvans (favorable).
Saint Augustin, et d'autres auteurs, remarquent que la planète Vénus a été nommée autrefois Junon. Un endroit de la Campine consacré à Junon était appelé Cœlena.
Junon est la première des Déesses italiques, la plus grande. On la nomme Princeps Dearum. La fleur qu'elle tient à la main désigne les Floralies (les Mystères).
« D'une fleur que lui donna la Déesse Flore, naquit le dieu Mars », disent les masculinistes. Pour expliquer la pureté féminine, Pausanias dit que chaque fois que Junon perdait sa fleur, elle la retrouvait dans les eaux du Canœcthe, « ce qui nous retrace figurativement les Floralies d'Aveburg, dit Cailleux. Au centre de ce magnifique Cromleck est la source de Kenneth, qui emportait dans la mer les impuretés de l'ancien Olympe. »
Le mois de Janvier (January) était sous la protection de Junon, et de son nom on fit Jonassa, nymphe qui présidait à la modération dans le gouvernement.
On appelait Junonia les fêtes en l'honneur de Junon.
Cette Déesse représentait si bien la psychologie féminine, que chaque femme invoquait sa Junon.
Elle était aussi surnommée Moneta (Juno-Moneta), parce que c'est elle qui inventa la monnaie, qui était frappée dans son temple. Près d'elle nous trouvons Pecunia, dont on fait la Déesse de l'argent monnayé.
M. Nélis, membre de l'Académie Royale de Bruxelles, donnait une autre origine du nom de Junon. Dans ce mot, l'I, c'est-à-dire J, se prononce comme un G. Pour lui, c'est le même terme que gunè qui signifie femme et qui, dans cette acception, est encore en usage dans la langue anglaise. Junon veut dire femme par excellence.
Quand les hommes introduiront, dans le Panthéon, des dieux à côté des Déesses, du nom de Junon, ils feront Jovino qui se confondra avec Jupiter. La grande Déesse Junon deviendra alors la sœur de Jupiter, et on lui donnera les défauts de l'homme. D'abord, on la représente comme une femme jalouse, par réaction contre les féministes qui assistaient à ces substitutions et reprochaient aux hommes leur jalousie de sexe. Ensuite, on lui attribue l'orgueil masculin et on la représente sur un char traîné par des paons.

ORIGINE DE LA MONNAIE
L'autorité des Déesses-Mères leur donnait le pouvoir de faire travailler les hommes. Toute l'organisation économique des tribus en dépendait. Chacun trouvait dans cette vie familiale la vie matérielle assurée, quoique subordonnée au travail de tous.
Mais, dans tout groupement humain, il y a des travailleurs et des paresseux. Il fallut donc trouver un moyen de régulariser le travail en stimulant les activités. Pour punir ou retenir ceux qui voulaient s'évader de la vie régulière et s'affranchir du travail, on essaya tous les moyens de remontrance. Du nom même de la demeure familiale, Mora, on fit le verbe morigéner, former les mœurs, remettre dans l'ordre ; ad-monester, de monere (avertir).
Mais les ad-monestations n'ayant pas suffi, on ne trouva pour punir les insoumis, ou les retenir, qu'un moyen ; on créa un équivalent du travail, tout en laissant au travailleur la liberté qu'il réclamait, et ce fut l'origine du travail salarié.
Cependant, ceux qui acceptaient ce système, qui les affranchissait des devoirs envers les Déesses (les dieux lares, dira-t-on), avaient reçu d'abord l'avertissement divin, Monitus, mettre au régime de la monnaie ; ad-monester, c'est inférioriser les hommes, c'est une punition.
Mais le mot qu'il faut surtout remarquer, c'est Monitum, prédiction, oracle de la Déesse qui aperçoit le désordre que ce système nouveau va produire. Cependant, il fallut s'y contraindre, et l'on fabriqua cette valeur représentative qu'on appelle la monnaie dans le Temple de Junon à Rome, ce qui fit donner à la Déesse le surnom de Juno Moneta (au lieu de Monitor, celui qui guide, qui conseille).
C'est Junon, dit la Mythologie, qui inventa la monnaie ; près d'elle se trouve une autre Déesse, Pecunia, dont on fit la Déesse de l'argent monnayé et qui pendant longtemps centralisa dans le Temple de Junon l'administration des monnaies à Rome. C'est l'autorité spirituelle seule qui avait le droit de frapper monnaie, ce qui lui donne une force nouvelle, appuyée, du reste, sur celui qui est l'auxiliaire dévoué de la Déesse, le chevalier (eques), vassal de la Dame Faée. Il est Féal, ce qui indique la foi et l'hommage à sa suzeraine (de sus préfixe, en haut, de sursum). Suzeraine a fait Suzanne.
La foi, c'est la grâce suprême.
Le cheval monté par le chevalier est appelé dans la langue celtique Marc'h, et le chevalier qui le monte marquis, dont on fait homme de marque au lieu d'homme de cheval.
On met le cheval sur les monnaies gauloises, et c'est de ce nom marc'h qu'on a fait le nom de la monnaie allemande : Mark.
Les Egyptiens ne se servaient pas primitivement de monnaie ; ils n'en usent qu'après Alexandre et sous les Ptolémées. On se servait pour les échanges de métaux qu'on pesait et qui avaient la forme d'anneaux, pour que le maniement en fût plus facile. On en faisait des sortes de chapelets, comme on se sert encore de nos jours des cauries dans certains pays africains.
La monnaie, dans le régime masculin, contribua à changer complètement les mœurs, On créa le régime que Fabre d'Olivet appelle emporocratique, mot nouveau pour exprimer une idée nouvelle. Il est tiré du grec et signifie marchand et force (Etat social, t. II, p. 140). C'est le régime dans lequel tout se vend ; l'homme est un marchand, il se vend lui-même, c'est-à-dire vend ses services et vend tout ce dont il peut disposer.
Les auteurs qui ont envisagé l'origine de la monnaie n'ont envisagé que cet aspect de la question. Ils font tout commencer au régime masculin et ne nous disent rien du régime antérieur. Cependant, tout existait déjà avant ce régime, et c'est ce qu'on nous a caché, les lois naturelles du matriarcat, qui contiennent l'explication de toutes les origines. Sans ces lois, nous ne pouvons pas comprendre le premier régime économique.

NEHAL-ENNIA
Nous lisons, dans les Champs Elysées de de Grave, ceci (T. 1. p. 261) :
« On a découvert sur les côtes maritimes de l'île de Walcheren des monuments très intéressants de différentes Divinités, qu'on a conservés jusqu'à ce jour ; quelques-uns représentent Neptune d'autres la Déesse Nehal-Ennia. C'est entre Domburg et West-Kappel qu'on a déterré les monuments qui regardent la Déesse Nehal-Ennia. Un violent vent d'est ayant éloigné les eaux de la mer à une large distance de la côte, en 1647, on aperçut dans les sables une grande masse de ruines dont la vétusté excita la curiosité des spectateurs, et on s'empressa de les retirer avant le retour des flots. Ces monuments consistaient en statues, autels, vases, médailles et autres pièces dont on peut voir le détail et les figures dans l'ouvrage de Vredims. La plupart représentaient une Divinité inconnue jusqu'alors, que les inscriptions nomment NEHAL-ENNIA. La Déesse y est tantôt debout, tantôt assise ; les symboles qui l'accompagnent sont communément un CHIEN, un panier de fleurs et de fruits, qu'elle porte sur son giron, et quelquefois une corne d'abondance. On la trouve aussi posant un pied sur la proue d'un navire, au bas de laquelle sont les lettres D et B.
« Il n'existe guère de monument qui ait enfanté tant de discussions ; on a fouillé jusque dans les langues orientales et grecques pour trouver l'étymologie du mot.
« L'inscription placée sur l'une de ses offrandes était ob merces recte conservatas (en reconnaissance de la bonne conservation des marchandises). Nehal-Ennia, qui joue un si grand rôle en Occident, est aussi appelée Diana. La terre occidentale était appelée le Royaume de Nili, c'est-à-dire de Nehal. »

HEMŒRA
Hemœra est une Déesse dont le nom et l'histoire remplissaient l'Europe, qui joua un grand rôle en Grèce et particulièrement dans l'ancienne Achaïe.
On confond Eôs, l'aurore, avec Hemœra, Déesse du jour ; elle a des ailes aux épaules, elle plane dans l'espace et verse la rosée sur la terre.
De ce nom Hemœra, on fit, par la suite, un nom collectif : les Hemœrides, désignant les prêtresses de la grande Déesse. Dans de nombreuses inscriptions trouvées sur les bords de la Méditerranée, les Prêtresses sont appelées Mœres, d'où le mot Mère. Hemœra, c'est la mère spirituelle. Les Muses sont surnommées Mœmonides (1).
Il est facile de comprendre comment le nom fut altéré : en voulant le masculiniser, on remplaça l'article féminin He par l'article masculin Ho, et Hemœra devint alors Homeros (Homère). Ce fut tout simplement un changement de genre pour consacrer un changement de sexe. (Voir l'article sur la Grèce antique)
Donc, c'est par antithèse que de mœra, lumière, voyance, on fait d'Homère un aveugle.
(1) Dans la langue celtique, le mot Mère se dit Ma. (Ce mot répété a fait mama.) Il a servi de racine au mot Mère dans toutes les langues (Matri, Mater, etc.). On s'est étonné que le mot français Mère n'ait pas la même racine ; c'est qu'il a une autre origine : il signifie Mère spirituelle. Il y a donc en français deux mots pour désigner la même personne : Maman et Mère.

La neuvième Déesse révélatrice
Lorsque nous nous sommes occupés de l'origine de la fête de Noël, nous avons montré que le jour du solstice d'hiver fut appelé d'abord New-Heyl, mot qui voulait dire nouveau soleil, parce que, à ce moment, le soleil remonte.
C'est ce mot New-Heyl, devenu Nehal, qui a été un des surnoms de Vénus, et comme elle était la neuvième Déesse qui restituait les lois de la Nature, de ces deux mots Nehal et Ennia qui signifie neuf, on a fait Nehal-Ennia.
Deux faits se détachent de cette antique histoire. Vénus-Hemœra est une Déesse voyageuse. Elle est connue par sa fécondité mystique.

Déesse voyageuse
Parmi les statues de la Déesse Nehal-Ennia qui ont été trouvées, il en est une qui la représente le pied sur la proue d'un navire, ce qui indique bien qu'elle avait traversé les mers.
Il est bien évident qu'entre la Celtide et la Phénicie de constants échanges intellectuels et commerciaux se faisaient. Nous trouvons la même science dans les deux pays, la même religion et les mêmes mœurs.
L'Odyssée témoigne des connaissances géographiques communes aux Celtes et aux Phéniciens.
Les ports odysséens ne répondent pas aux connaissances de la Grèce, mais aux débarcadères phéniciens.
Les Grecs du temps assigné à Homère essayaient à peine leurs premières tentatives nautiques, comment le poète aurait-il si bien décrit les escales lointaines que connaissaient si bien les phéniciens, maîtres de la mer, mille ans avant la Grèce d'Homère ?
Autre constatation : Cailleux dit : « Les Scythes ont transporté au bord du Tanaïs les Mystères de nos régions ; Nehal-Ennia y fut nommée Vénus Tanaïtis.
« Les anciens appellent Vénus Tanaïtis la Déesse des esclaves, mais des esclaves volontaires, les Slaves. »
Or les esclaves volontaires, ce sont les affiliés à la primitive doctrine théogonique.

Fécondité mystique
L'autre aspect sous lequel nous avons à envisager cette grande Déesse, c'est sa fécondité spirituelle. On nous dit qu'elle eut quarante-cinq enfants, ce qui veut dire qu'elle écrivit quarante-cinq livres.
Pour symboliser cette abondance d'idées, elle est représentée ayant des fleurs dans son giron ou avec une corne d'abondance.
Elle est appelée Mère des sciences, parce qu'elle les aborda toutes ; ses connaissances multiples semblaient tenir du prodige.
Sa science nous a été conservée dans des traditions, dans les symboles des anciens Mystères, dans les connaissances générales qui ont alimenté l'humanité pendant des siècles.
Sa poésie a été parodiée dans l'Iliade et l'Odyssée. Mais les modernes parlent peu d'un autre ouvrage, attribué aussi à Homère ; c'est celui qui est intitulé Batrachomyomachie, ou Combat des rats et des grenouilles, ouvrage héroï-comique, qui avait pour but de montrer sous une forme satirique les luttes de sexes.
Les grands services qu'elle rendit à l'humanité la firent regarder comme un être bienfaisant, supérieure à toute son époque. Elle fut classée parmi les plus grandes Déesses, et on donna au ciel son nom Uranie.
Sous le nom de Vénus, sa mémoire est venue jusqu'à nous. On ne saurait trop se pénétrer de cette vérité qu'il n'y a que les choses du plus haut intérêt auquel le temps décerne les honneurs de l'immortalité.
Mais il ne faut pas oublier non plus que les grandes supériorités éveillent les grandes jalousies et que la haine des hommes se traduit par l'insulte et l'outrage. Aucune Déesse n'a été plus outragée que Vénus.
Quand les hommes eurent supprimé les Déesses, on fit dire à Hésiode : « La Terre a engendré à son image le ciel orné de constellations. Uranie y remonta afin de s'y mettre à couvert pour donner aux dieux une demeure sûre et éternelle. »

Hésiode
Nous avons vu qu'Hésiode est celte comme Homère. Mais ce qu'aucun homme ne nous dit, c'est que ces deux auteurs sont des femmes.
La question d'Homère-Hemœra est élucidée. Il reste celle d'Hésiode.
Il suffit de lire sa Théogonie pour comprendre que c'est une femme qui a écrit cela. Ce qui a pu faire illusion aux modernes, c'est qu'on y a mêlé, plus tard, les dieux de la mythologie grecque.
Le premier cycle de l'histoire des peuples est résumé dans cette phrase d'Hésiode : Les dieux mènent le monde ; mais personne ne comprendrait la signification de cette phrase si on ne rendait pas au mot Dieu sa première signification, si on n'expliquait pas que l'entité divine est d'abord exclusivement féminine. Le Dieu qui mène le monde, c'est la Déesse, c'est la Femme !
Et Hésiode nous dit encore, en parlant de ces êtres divins : « Les dieux interviennent en tout, l'homme doit leur obéir, car il est petit auprès des dieux, il doit se préoccuper de leur volonté, écouter leurs oracles, respecter leur puissance. Obéir aux dieux, c'est obéir à la loi qui domine la destinée humaine. Et cette loi dit à l'homme : Connais-toi toi-même, n'oublie pas ta misère, c'est la moïra, la loi de la vie. »
C'est parce que cette loi de la vie était à la base de la société, que la sagesse divine (Théosophia) fut le facteur de la grande civilisation qu'on a appelée l'Âge d'Or.
Le sentiment religieux, si profond dans cette jeunesse humaine, répondait au besoin naturel d'adoration qui est dans le cœur de l'homme jeune.
Par la piété il s'efforçait de conformer ses actions aux désirs de la Femme divine et de rendre à la Déesse ce qui lui est dû en respect, en soumission dévouée, en vénération.
Par la foi l'homme s'abandonnait complètement aux décisions de la Déesse dont il reconnaissait la suprématie.
La religion était alors le lien moral qui unissait l'homme à la Femme sur le plan divin, c'est-à-dire spirituel.

Légende septentrionale en passant
Le folklore (1) belge nous retrace la lutte de la Femme et de l'Homme dans une légende connue dans toute la Flandre et qui reproduit l'épisode homérique de Polyphème et Ulysse. (Vertelsels van het vlaamsch Volk, de A. Joos.)
Ce n'est pas la femme guerrière luttant ouvertement contre son oppresseur qu'il nous montre, c'est celle qui, se soumettant à ses caprices, lui verse le poison de l'amour, qui l'aveugle.
C'est encore, sous une forme originale, une parabole de la loi des sexes.
Dans ce récit, l'homme, c'est le « géant », la Femme, c'est le « nain ».
Un géant avait pris un nain, avec l'intention de s'en régaler.
Pendant les quelques jours de vie qui lui furent accordés, celui-ci fut chargé de tous les travaux du ménage : nettoyer, laver, coudre et cuisiner. Cela ennuyait beaucoup le petit prisonnier, qui chercha un moyen d'échapper au géant.
Or le nain était petit de corps, mais grand d'esprit ; le géant, au contraire, était grand de corps et petit d'esprit.
Certain soir, il prenait le frais sur le seuil de la porte.
« Vieux, dit le nain, voyez-vous les animaux étranges qui se promènent là-bas derrière les nuages ? »
Le géant regarda, mais ne vit rien.
« Il est curieux, dit-il, qu'un petit homme comme toi ait une vue si perçante, tandis que moi, le plus fort de tous les géants, je vois si mal. »
« Oui, répondit le nain, mais il y a un remède à cela. »
« Lequel, petit ? Je voudrais en user, car c'est une grande force que de voir très loin. »
« Il faut laisser verser du plomb fondu dans vos yeux. »
« Essayons. »
« Bon ! mais cela fait grand mal et l'on est aveugle durant plusieurs jours. »
« Je résisterai bien à la douleur. Fonds tout de suite le plomb, et verse-le dans mes yeux. »
Le nain, riant sous cape, se mit à la besogne, et ce fut fait au bout de dix minutes. Le géant hurla de douleur ; la montagne en trembla, et les animaux sauvages se cachèrent dans leurs antres. Le géant était aveugle !
« Maintenant, je suis le maître ici, pensa le nain. Je vais faire bonne chère et, quand je me verrai en danger, je me sauverai. »
Il commença par tuer un chien et une brebis. Le chien rôti fut pour le géant ; la brebis pour lui.
« Comment se fait-il, dit le géant, que tu sembles savourer ton morceau et que je mange, moi, à contre-cœur ? Ma viande est coriace comme du cuir et a une mauvaise odeur. »
« C'est que vous êtes encore un peu malade, répliqua le nain. Il faudra du temps avant que vous soyez tout à fait rétabli. »
Mais le nain fit tant de farces que le géant devint méfiant et résolut de le manger.
Un matin il se leva tôt, chercha en tâtonnant toutes les portes, les ferma bien et s'assit devant la sortie du bercail où couchait le nain. Les brebis passèrent entre ses jambes, l'une après l'autre.
Le nain, voyant qu'il fallait ruser, tua la plus grande brebis et s'enveloppa de sa toison. Ainsi travesti, il put se sauver.
Lorsque toutes les brebis furent passées, le géant appela : « Et toi, petit, où restes-tu ? »
« Vieux, ricana au dehors le nain, je suis sorti depuis bien longtemps. »
Le géant grinça des dents ; mais sa rage était impuissante. Le nain jeta la toison et s'enfuit au loin.
(1) « Par « folklore », nous entendons cet ensemble cohérent de formes et faits de civilisation qui a été transmis, non par les livres, mais par la voie orale, et ceci depuis une époque située hors de la portée des recherches historiques ; ces formes et faits de civilisations se présentent sous l'aspect de légendes, contes de fées, balades, jeux, jouets, arts, médecine, rites agricoles et autres… C'est un ensemble « culturel » indépendant des frontières nationales ou même raciales, et offrant une uniformité remarquable sur toute la surface du globe… Les éléments composants du folklore diffèrent de ceux de la « religion » exotérique… la situation la plus comique, et aussi la plus pathétique, est celle où l'église (anglicane)… s'allie à la science pour proposer que les contes de fées soient retirés des mains des enfants comme étant « faux »... Le contenu du folklore est métaphysique. » (Ananda K. Coomaraswamy, De la mentalité primitive, Etudes Traditionnelles)

La tradition des nains qui, dans les familles, ont le droit de tout dire, qui ont de l'esprit et se moquent de la vanité des orgueilleux et de la comédie sociale, tout cela vient de ce que les nains, ce furent d'abord les petites femmes, qui ont l'esprit et l'audace, la répartie et la science. Esope fut un nain de ce genre (1).
Plus tard, prenant le symbolisme à la lettre, on remplaça la petite femme par un vrai nain masculin. Finalement, ces nains devinrent les bouffons à qui on laissait le droit de tout dire pour faire rire, mais qui étaient des hommes de taille ordinaire.
(1) « Autrefois, quand les hommes étaient moins mauvais, le roi des nains, Laurin, entretenait ici un magnifique « jardin de roses ». Il me semble que ce qu’il y avait de plus merveilleux dans Laurin, c’était sa science du jour et de la nuit, science qui se confondait avec celle de la vie et de la mort. « Oh, comme nous aimerions avoir cette connaissance ! » disent les hommes en se lamentant. Pourtant, ils n’ont pas à se lamenter. Car il est toujours possible d’entrer dans le royaume merveilleux de Laurin, malgré le fil de soie qui le protège ! À condition d’être un chevalier, ou un enfant, ou un poète ! » (Otto Rahn, La cour de Lucifer - citant un passage du Roi Laurin, légende du Tyrol du Sud)


Dans l’obscuration et l’oubli des sciences sacrées, il y a une question de race et de latitude. Les savants de la Chine et de l’Inde n’ont rien oublié, mais nous avons été séparés d’eux par des barbares. Seuls les Ninivites, destructeurs des sciences védiques, et les Sémites, copistes insuffisants et cruels des sciences égyptiennes, ont créé un hiatus entre l’antiquité et la contemporanéité, entre la science orientale et la recherche occidentale. C’est en passant à côté, à travers, ou par dessus ces races médiocres, que nous retrouverons notre voie, et que l’humanité moderne se rattachera dignement à ses ancêtres du cycle de Ram.
(Matgioi, La Voie Métaphysique)


RAM, LE GRAND PERTURBATEUR
L'apparition du Sépher (la Genèse biblique) avait provoqué un grand mouvement d'idées. Par toute la Terre on discuta les Principes exposés dans l'œuvre de la Déesse Hathor.
Ce sont les Phéniciens qui auraient apportés dans la Celtide l'histoire, cachée dans les Mystères de Jérusalem, de la grande Myriam, et c'est à partir de ce moment que cette histoire se propage et devient la base du culte d'une Déesse nouvelle, « Maria », dite aussi « Marjolaine », dont on trouve trace dans une quantité de souvenirs antérieurs à l'invasion romaine.
Mais cet événement eut un résultat inattendu ; il provoqua un déchaînement de jalousie pour la grande Déesse égyptienne et une formidable réaction contre son œuvre, à cause des révélations qu'elle faisait sur les causes de la déchéance masculine.
Cela provoqua une violente réaction chez certains hommes. Et le premier qui prit, chez les Celtes, la direction d'un mouvement d'opposition fut le fameux Ram (1) dont le nom est resté pans l'histoire comme celui d'un formidable perturbateur. Sa doctrine et son mouvement révolutionnaire ne furent qu'une réaction contre la doctrine de Myriam-Hathor exposée dans le Sépher (2).
Il remplace la Mère universelle par le Père universel, la grande aïeule Kéridven par l'ancêtre Oghas ou Ogham (dont on fera l'ogre) ; c'est lui, Ram, qui est son représentant sur la terre, et c'est lui qui possède l'immortalité de la Déesse.
Ceci est une réaction contre le passage du Sépher où il est dit à l'homme que, s'il consomme sa substance de vie, il mourra. Il nie cette vérité et se donne les attributs de la Déesse. Du reste, il fait croire à ceux qui l'écoutent que son âme ne quittera son corps terrestre que pour en prendre un autre afin de continuer à les instruire et à les gouverner ainsi de corps en corps jusqu'à la consommation des siècles ; c'est son autorité qu'il veut immortelle pour assurer l'éternité du mensonge.
Il crée le type de l'imposture messianique que tant d'autres vont imiter après lui en perfectionnant le système, c'est-à-dire en l'adaptant aux conditions sociales de leur époque.
Ram est un révolté contre la vie régulière et le travail des tribus matriarcales.
Déjà en Egypte une semblable révolte s'était produite; Cécrops, personnage réel ou légendaire, avait réuni les chasseurs nomades en village et s'était emparé de terres qu'il avait déclarées propriété publique des hommes.
Cette prétention de Ram de s'affranchir du travail et de se déclarer prophète pour imiter les femmes avait semblé exorbitante aux habitants des tribus, ce qui le fit comparer au gui, plante parasite qui vit comme l'homme paresseux aux dépens des autres.
Voici comment il explique l'origine de cette surprenante révélation :
Endormi sous un chêne, il lui sembla entendre une voix forte qui l'appelait par son nom et il vit devant lui un homme d'une taille majestueuse, en costume de Druide, portant à la main une baguette autour de laquelle s'enroulait un serpent (le caducée dont on fera la verge de Moïse) et ce personnage mystérieux lui expliqua que le gui a des propriétés médicinales. Ram va donc se faire guérisseur en même temps qu'envoyé d'une Divinité nouvelle.
On se rappelle que le départ d'Egypte des Israélites avait été causé par une épidémie ; c'est ce fait que nous voyons invoqué ici : une épidémie.
La Femme avait son arbre sacré, l'Acacia, parce qu'il était l'arbre de vie, ancêtre du genre humain ; l'homme aussi aura le sien : ce sera le chêne, à cause de la forme de son fruit, le gland, qui désormais représentera la force du mâle (fort comme un chêne).
Ram ignore la science, mais il veut cependant en avoir le prestige. Lui aussi, il écrira un livre : le Zodiaque, parce que le Zodiaque de Myriam résumait sa doctrine. Mais dans son livre Ram remplacera la Thorah par le taureau symbolisant la force, et il donnera au mot Thorah un masculin, Thor, qui deviendra le dieu de la guerre.
Cette nouvelle Divinité, Thor, sera l'image de l'homme perverti, le père du carnage, le dépopulateur, l'incendiaire, l'exterminateur. On lui donne pour épouse Friga ou Freya, qu'on va appeler la Dame par excellence parce qu'on va en faire la complice de ses cruautés.
C'est la base d'un nouveau culte qui va devenir superstitieux et farouche parce que ces sectaires mettent dans leur dieu toutes les passions qui les animent : il est jaloux, avide, soupçonneux. On lui immole des animaux parce que l'homme perverti aime le sang, il tue pour le plaisir de tuer et peut-être parce que la Thorah avait dit : TU NE TUERAS PAS. Il va jusqu'au sacrifice des victimes humaines, prenant à l'envers toutes les prescriptions des Déesses.
Alors, la Force, principe nouveau, fut introduite dans la religion et représentée par Thor. Un taureau en était l'emblème. En face de lui, la femme fut terrorisée. C'est du nom de Thor, le dieu de la guerre et du tonnerre, que sont venus les mots terreur et terrible. Les mots effroi, effroyable, frayeur, etc., viennent de Freya (la Déesse) et expriment la frayeur de la femme en face de Thor : le Mal. On dit encore en saxon frihtan, en danois freyeter, en anglais to frighten, épouvanter.
Thor est armé d'une massue qu'il manie avec des gants d'airain. Il porte une ceinture magique qui double ses forces (allusion à sa physiologie sexuelle). On le représente aussi armé d'un marteau et assis sur une borne (le marteau, c'est l'industrie, la borne, l'arrêt du progrès intellectuel).
Quand l'homme masculinise la religion, il met à côté de la Déesse Freya un homme, un dieu mâle appelé Freyr et à qui il donne tous les attributs de la Femme. Quant à Freya, « la Dame par excellence », celle qui était « la Maîtresse du monde », elle n'est plus qu'une génératrice. On lui met dans une main la coupe de volupté, dans l'autre le glaive qui voue à la mort. C'est elle qui a les attributs de l'homme, puisque l'homme a les attributs de la Femme, et de son nom on fait venir le verbe fringær (pratiquer l'amour), en langue d'oc fringar et en français fringuer. De là aussi les mots frai et frayer en parlant des poissons.
Puis Ram fonde un système théocratique. Il se met à la place de la Déesse-Mère et usurpe les honneurs divins. Il prétend enseigner aux hommes sauvages l'agriculture pour imiter Cérès qui porte les épis ; il dit qu'avant lui les hommes menaient une vie errante et sauvage, mais que lui est venu et leur a enseigné la manière d'ensemencer les terres et de cultiver la vigne.
Il va donner des lois nouvelles aux peuples, toujours pour imiter la Déesse Myriam-Hathor, et il annonce qu'il va répandre partout la félicité.
Il crée une nouvelle Divinité surnaturelle, à laquelle il donne son sexe et qui va être en communication avec lui.
« Les Gaulois, dit Henri Martin, n'avaient point d'idoles ni de temples somptueux comme les Egyptiens, les Grecs et les Romains. Ils adoraient la puissance invisible sous la voûte sombre des forêts de chênes : le chêne (symbole de l'homme) leur semblait l'image du dieu fort qu'ils nommaient Esus, et le gui, lorsqu'il croit sur le chêne (parasite), était pour eux l'image de l'homme uni à Dieu. Le gui du chêne était leur plante sacrée. »
L'ancienne Divinité Taoth / Thot (Teutad chez les Celtes), jadis considérée comme une Mère bienfaisante, devient maintenant une Déesse tyrannique. On lui reproche d'avoir parlé de calamités, de péchés commis, d'expiations demandées, de pénitence à faire. On va en faire un Dieu jaloux et tyrannique comme la Déesse Hévah devenue I-Haveh.
Ce qui prouve la Divinité de Ram, dit-on, c'est qu'il va faire des miracles. Fabre d'Olivet nous dit (Etat social, T. I, p. 236) : « Etant en guerre aux Indes, il se trouvait au milieu des plus arides déserts et ses troupes étaient dévorées par une soif ardente. Alors, il découvrit des sources abondantes, qui parurent sourdre à sa voix, du sein des rochers.
« Tandis que les vivres manquaient, il trouva des ressources inattendues dans une sorte de manne dont il enseigna l'usage. »
Une épidémie cruelle s'étant manifestée, il reçut encore de son Génie l'indication du remède qui en arrêta les ravages : ce fut d'une plante nommée hom qu'il tira le suc salutaire. Cette plante, qui resta sacrée parmi ses sectateurs, imitait l'Acacia. C'était l'arbre-ancêtre pour les Hindous. On le représente comme découvrant des mines d'or et d'argent parce que Myriam faisait de la chimie sur le Mont Sinaï, et c'est de là que naquit l'idée de la transmutation des métaux (du plomb en or, etc.), prenant un symbole moral pour une opération chimique. On alla jusqu'à vouloir l'appeler Adam pour faire opposition à la Déesse-Mère Eva (Adam, nom de la terre adamique). Ce nom s'est imposé après lui. Quant à lui, il s'est contenté de prendre un des surnoms de Myriam, Mar et de le retourner, et c'est cela qui a fait Ram.
Et maintenant rappelons qu'il est écrit dans le Talmud que le Sinaï est un mont d'où la haine est descendue sur les peuples du monde. En voilà le commencement. Nous allons voir la suite.
(1) Egalement connu sous le nom Ramachandra ; c'est ce Ram celtique que les Hindous appellent Râma, le grand perturbateur et usurpateur du régime féminin en Asie (les disciples de Ram étaient appelés Ramsès en Egypte) ; c'est lui que le Tibet, la Chine, le Japon et les immenses régions du Nord de l'Asie honorent sous le nom de Lama. Il est connu sous le nom de Fo, de Pa, de Pa-pa (monarque paternel) ou de Pa-si-pa (Père des pères). C'est lui qu'en Perse on a appelé Giam-Shyd (Djamchid) et dont on a fait le premier monarque du monde.
(2) Le nom de « Ram » provient du surnom retourné de Myriam, « Mar ».

LE SCHISME DE RAM
Les Celtes d'Europe regardaient le schisme de Ram comme peu considérable et donnèrent à ses sectateurs le nom de Esk-Wander, peuple égaré.
De là le nom de Scander donné à tous les grands perturbateurs. Le premier de tous, Ram, est appelé le Scander aux deux cornes (type du diable) à cause du bélier qu'il avait pris pour emblème. C'est l'histoire du satanisme qui commence (Le renversement des facultés psychiques des sexes).
Ram appuie sa prétention de dominer le monde sur la force d'une armée composée des castes inférieures appelées Folk (Folk ou Volg, d'où vulgaire, foule, latin vulgus).
Cette classe était considérée comme composée de ce qui suit, ce qui sert, mais ne dirige pas (1), et de la classe guerrière qui s'intitula Leyt, c'est-à-dire élite, les plus forts ayant toujours eu la prétention d'être les meilleurs.
Les Folk (peuple) et les Leyt (guerriers) s'unirent contre les intellectuels qui formaient une caste supérieure. De ces deux mots Leyt-Folk, contractés, on fit Leyolk qui est devenu laïque.
Les intellectuels étaient appelés Lœhr, mot qui signifie clarté ; c'étaient les savants. Ce mot clarté, évoluant à travers diverses croyances, est devenu ce qu'aujourd'hui on appelle clergé.
René Guénon nous dit : « le mot même de « clergé », originairement, « clerc » ne signifie pas autre chose que « savant », et il s’oppose à « laïque », qui désigne l’homme du peuple, c’est-à-dire du « vulgaire », assimilé à l’ignorant ou au « profane », à qui on ne peut demander que de croire ce qu’il n’est pas capable de comprendre, parce que c’est là le seul moyen de le faire participer à la tradition dans la mesure de ses possibilités. » (Autorité Spirituelle et Pouvoir Temporel, p.14)
Lorsque la Théogonie seule dominait, des souveraines théocratiques avaient leurs sièges principaux en Thrace, en Etrurie et dans les Iles Britanniques. Elles prirent le titre de Lar ; de là chez les Latins le mot Lares et chez les Anglais modernes Lady et Lord.
Le nom de Ram signifiait un bélier, symbole de force brutale.
De Ram on fit lam (2), qui signifie agneau. Ce nom lui resta, et le voilà devenu l'agneau, l'être doux, comme la frêle jeune fille. C'est le commencement de la comédie, mais les suites furent si terribles que de lam on fit les mots lamenter, lamentable, lamentations.
Les hommes se vengent de ces reproches en appelant les femmes des Lamies, qu'ils représentent comme des monstres à tête de femme et à corps de serpent et qu'ils accusent de dévorer les enfants.
Jamais guerre civile ne fut plus horrible que celle que ce schisme souleva. Et toute la discussion que cette révolte provoqua avait pour cause première « le sacrifice », à cause des versets du Sépher qui s'y rapportent.
C'est cela qu'on discutait passionnément, cela qui exaspérait les hommes. Ils mettaient dans la lutte des arguments de mauvaise foi, cherchant partout à substituer le culte du principe mâle au culte du principe féminin. C'est la lutte d'Oghas contre Teutad, du Père contre la Mère. Une grande division en résulta. Dans la nation, dans les familles, les opinions furent partagées. Les uns défendaient l'ancien régime, les autres le nouveau. Ce fut le point de départ de la guerre intestine qui ne devait jamais finir ; les uns voulaient conserver les lois de la Nature, les autres voulaient les réformer. Mais il ne faut pas oublier que cette réforme était une profanation et l'origine de toutes les erreurs qui devaient envahir le monde.
La lutte entre l'homme et la femme devint terrible. Partout, les audacieux encouragés par ce mouvement se soulevaient contre l'autorité morale de la Déesse.
La Cheffesse des Druidesses (que Fabre d'Olivet appelle la Voluspa) s'opposa à l'envahisseur et fut soutenue par ceux qui avaient conservé l'usage de la raison. Il dit : « Tandis que le plus grand nombre de peuplades recevaient avec respect les ordres du collège féminin et se soumettaient sans aucune résistance au souverain pontife, tandis que les oracles de la Voluspa étaient reçus comme des lois sacrées, il y avait d'autres peuples qui les rejetaient » (L'Etat social, T. I, p. 171).
Cependant, le gouvernement féminin n'était pas organisé pour soutenir une lutte de ce genre, premier mot d'une démocratie turbulente unie à l'imposture des thaumaturges guérisseurs qui allaient promettre le salut et donnaient aux hommes un droit nouveau, celui du libertinage, de la révolte et du vice.
La lutte s'engagea entre l'imposture et le collège sacerdotal. La Grande-Maîtresse invita Ram à se rendre aux pieds des autels et à s'offrir lui-même en sacrifice à son dieu nouveau qu'il disait tout-puissant, son fameux ancêtre mâle Oghas. Il se déroba et s'enfuit.
Alors le collège sacerdotal expulsa Ram du territoire. Il partit, entraînant avec lui tous les révoltés comme lui, un Ram-massi (d'où ramasser), et s'en fut vers l'Orient.
Et ce fut là que, arrivant en vue du Caucase, occupé par des hordes nomades, il y répandit sa doctrine. Comme il était suivi d'une puissante armée, les peuplades effrayées à l'aspect de tant de guerriers le laissèrent faire, plusieurs se réunirent à eux. Le pays qu'il était venu occuper s'appelait Touran, par opposition à un pays moins élevé qui s'appelait Iran. Les Tourans avaient été chassés du pays des Irans. Les peuples touraniens se soumirent à sa doctrine. Il existait vers le Nord une immense contrée que ces peuples masculins appelaient la terre paternelle, Tat-Arah (3) ; il leur parla en frère, leur montra qu'il était masculiniste comme eux et qu'il venait les délivrer du joug de la servitude maternelle. Cette idée qui flatta leur orgueil gagna sans peine leur confiance ; leur enthousiasme croissait sans cesse ; il fut bientôt à son comble et devint un fanatisme aveugle. Les plus fougueux, aveuglés par leurs passions, n'envisageaient qu'une  idée : se débarrasser des entraves morales et prendre la première place partout ; ce fut une folie et une furie.
Ram s'était déclaré Souverain Pontife. Après la première soumission des masculinistes, cela amena une révolte. Cela lui donne de l'audace. Il déclare que le grand ancêtre, c'est lui, en attendant que plus tard il dise que le dieu s'est incarné dans un fils divin.
Tel est le culte Lamaïque qu'on veut opposer au Sabéïsme de l'A-Vesta. Sa vertu principale, la Paternité, allait créer la guerre et faire naître le culte de la terre paternelle en même temps qu'un nouveau principe religieux, la piété filiale, qui n'honore plus la Mère, mais le Père.
Cette profanation eut des suites terribles. Les grandes colonies celtiques européennes restées fidèles à la Vérité se révoltèrent ; elles écoutèrent la voix de leurs souveraines résidant sur les montagnes sacrées de la Thrace, de l'Etrurie et de l'Hespérie, et refusèrent de reconnaître le nouveau pouvoir qui voulait s'imposer.
Les Anaxes des Thraces, les Larthes des Etrusques, les Reghes des Vasques, qui jusque là n'avaient reconnu d'autre autorité que celle de leur souveraine, déclarèrent qu'elle seule possédait le pouvoir légitime.
(1) « La conception même du folk-lore, tel qu’on l’entend habituellement, repose sur une idée radicalement fausse, l’idée qu’il y a des « créations populaires », produits spontanés de la masse du peuple ; et l’on voit tout de suite le rapport étroit de cette façon de voir avec les préjugés « démocratiques ». Comme on l’a dit très justement, « l’intérêt profond de toutes les traditions dites populaires réside surtout dans le fait qu’elles ne sont pas populaires d’origine » ; et nous ajouterons que, s’il s’agit, comme c’est presque toujours le cas, d’éléments traditionnels au vrai sens de ce mot, si déformés, amoindris ou fragmentaires qu’ils puissent être parfois, et de choses ayant une valeur symbolique réelle, tout cela, bien loin d’être d’origine populaire, n’est même pas d’origine humaine. » (René Guénon, Le Saint Graal, Publié dans le Voile d’Isis, février-mars 1934)
(2) Lam, qu'il fait signifier agneau, c'est mal retourné.
(3) De ce mot Tat-Arah (terre paternelle) dérive le mot Tatare que nous avons longtemps écrit Tartare. Les Tatares de nos jours révèrent encore Oghas ou Oghous comme leur premier Patriarche. Ceux qu'on appelle Oïghours à cause de cela sont les moins instruits et les moins civilisés.

LA GUERRE
Le culte féroce est la conséquence de la loi fatale du sexe mâle qui trouble l'esprit en même temps qu'il augmente la force musculaire, ce qui fait de ces hommes des révoltés.
La guerre était leur élément, la superstition leur religion, les fantômes du surnaturel leur occupation mentale.
Semant partout la dévastation, implacables ennemis de l'ancienne Théogonie dont ils détruisent les symboles, renversent les temples, brisent les statues, effacent les inscriptions, ce fut une fureur, un carnage et une dévastation.
Tout cela pour honorer Thor, le dieu de la guerre, le dieu taureau.
La seule vertu pour ces hommes est la vaillance ; pour eux, la guerre est la source de la gloire, et ils mettent le droit dans la force, pillant et saccageant la propriété des autres, sans aucun scrupule : c'est le droit de la force. Du reste, Ogmi, en celte, signifie la grande puissance ou la grande armée.
Nous ne connaissons ni la date, ni l'histoire réelle de la grande révolte suscitée par cet audacieux malfaiteur. Certains auteurs font remonter cet événement, appelé le « déluge de Ram », à 2416 ; mais nous savons que les apologistes du régime masculin n'ont jamais respecté la chronologie.
Ram fut posé par les masculinistes en réformateur qui serait venu apporter le salut à ceux qui souffraient, alors que c'est lui qui vint créer le régime de la grande souffrance. Il se faisait appeler Æsc-heyl-hopa (d'où Fabre d'Olivet fait venir le mot Esculape), qui signifie « Espérance de Salut ». Cet audacieux qui se donne comme un Messie, qui change le culte, qui condamne le « sacrifice féminin » et renverse tout, se donne aussi comme un génie de la médecine ; il prétend faire des miracles pour se faire écouter, coupe le gui et le présente comme devant tout guérir, préparé par lui ; il prédit l'avenir, prononce des oracles et prétend assujettir la Nature à ses ordres. C'est un des premiers déments de l'orgueil, dont l'esprit troublé par tous les excès tomba dans toutes sortes de divagations ; et la première de ses folies, la principale, c'est l'interversion sexuelle qui consiste à transporter dans le sexe masculin les conditions mentales et psychiques de l'Esprit et de la nature de la Femme.
On le regardait comme un novateur dangereux et, comme il entraînait avec lui tous ceux qui avaient fait les premiers pas dans la révolte, la crainte s'empara des femmes et des hommes raisonnables et l'on vit, dès lors, se constituer des ordres fermés, comme celui des Chaldéens, destinés à conserver la science que ces vandales voulaient détruire.
L'homme révolté, en établissant le principe de la suprématie de la force sur l'Esprit, remonta jusqu'aux origines physiologiques des sexes et établit le culte du Linga pour faire opposition au culte de la Yoni, en même temps que pour glorifier la sexualité mâle, source de la force de l'homme. Ce fut une révolution qui créa l'origine lointaine de la séparation des pouvoirs. En inaugurant une domination mâle en face de l'autorité morale de la Femme (qui était le vrai sacerdoce), on peut dire que le principe du pouvoir civil fut créé et, par là, la lutte entre ce pouvoir et l'autorité religieuse dans son sens primitif, c'est-à-dire moral. L'autorité morale devait changer de signification quand la Théosophie vaincue fut remplacée par l'anthropomorphisme. Nous retrouvons l'indignation de la Femme contre son usurpateur dans ces paroles citées par Michelet (La Bible de l'humanité, p. 53) : « Dans un transport maternel, la Mère de Rama indignée de son exil dit au Roi : Rappelez-vous, Roi puissant, ce tant célèbre distique : J'ai jeté dans ma balance, d'un côté la vérité, de l'autre mille sacrifices, mais la vérité l'emportera. »

RAM A T-IL EXISTÉ ?
C'est ce Ram celtique que les Hindous appellent Râma, c'est lui que le Tibet, la Chine, le Japon et les immenses régions du Nord de l'Asie honorent sous le nom de Lama. Il est connu sous le nom de Fo, de Pa, de Pa-pa (monarque paternel) ou de Pa-si-pa (Père des pères). C'est lui qu'en Perse on a appelé Giam-Shyd et dont on a fait le premier monarque du monde.
Pour Zoroastre, il est le premier homme qu'Ormuzd ait favorisé de son inspiration. Il le nomme le chef des peuples et des troupeaux, le très puissant et le très fort monarque.
On lui attribue toute la science du Sépher. Anquetil du Perron a écrit Djemschid, mais c'est une mauvaise orthographe de Giam-Shyd, que les masculinistes feront signifier le monarque du monde, ou le soleil universel, ou le Dominateur.
Les anciens fidèles appelleront noir ce qui est opposé au blanc qui pour eux symbolisait la Vérité.
Ram sera donc le monarque du peuple noir c'est-à-dire du monde de l'erreur. Ce monde se donne le titre d'universel, ce qui veut dire « ceux qui s'appuient sur le nombre » (tous les hommes) ; on l'appelle Gian ou Géan ou lan ou Zan, selon le dialecte. Le mot gian qui signifie le monde s'est appliqué à l'esprit dans le premier culte ; par ironie, ce mot va désigner le vin (dit spiritueux), et c'est ce qui explique que Ram, Osiris, Dionysos et Bacchus sont un même personnage, c'est-à-dire la représentation de la même idée bacchique.
Fabre d'Olivet fait venir Dionysos de Deva-nahousha (l'esprit divin), qui prononcé vulgairement serait devenu Deo-naûsh, dont les Grecs ont fait Dio-nysos.
On rapproche le Ràmâyana, poème de Valmiki, des Dionysiaques de Nonnos.
Le sujet : Ram et Dionysos dans leur jeunesse sont persécutés, livrés à la haine d'une femme astucieuse et cruelle qui les force à quitter leur patrie. Après des aventures bizarres, ils finissent par triompher de tous leurs ennemis et font la conquête de l'Inde où ils obtiennent les honneurs divins.
Ce qui peut faire douter de l'existence de Ram, c'est qu'on la reporte à une antiquité fabuleuse. Arrien rapporte que, depuis Théocrate jusqu'à Sandracottos qui fut vaincu par Alexandre, on comptait 6.402 ans. Pline s'accorde avec Arrien. Or l'expédition d'Alexandre aux Indes eut lieu 326 ans avant notre ère, d'où il résulte qu'on peut établir depuis Ram jusqu'à 1821, dit Fabre d'Olivet, une durée de 8550 ans. Pour prouver son ancienneté, on le fait naître le jour de Noël et on fait le calcul suivant :
Le mois était composé de 30 jours, l'année de 365 jours et six heures et les siècles de 30 et de 60 ans. La fête de New-heyl (1), qui devait avoir lieu la première nuit du solstice d'hiver, se trouvait reculée de 45 jours au temps d'Olaùs Magnus, l'an 1000 de notre ère, et cela par la raison que l'année celtique, étant plus longue que la révolution du soleil, donnait un jour d'erreur en 132 ans. Ces 45 jours de retard répondent à 5930 ans et font remonter, par conséquent, l'établissement du calendrier celtique à près de 5.000 ans avant notre ère, en supposant même qu'il n'y ait eu aucune réformation.
La légende de Ram s'élabora lentement comme toutes les légendes. Elle mit des siècles à devenir ce qu'elle est aujourd'hui.
La révolution qui porte son nom aurait été faite par tous les ambitieux de pays divers, qui se seraient donnés au chef auquel ils auraient fait une légende pour lui donner un semblant de réalité.
Fabre d'Olivet, dans son ouvrage. L'Etat social de l'homme, publié de son vivant (vers 1815), s'étend longuement sur l'histoire de Ram, qu'il présente comme un révolté contre le régime établi chez les Celtes. Et il ajoute : « La Voluspa consultée déclara que Ram était un novateur dangereux, « qu'il était incapable de s'élever jusqu'à l'austère hauteur des pensées divines » (c'est-à-dire jusqu'à l'Esprit Féminin). C'est la Voluspa, auteure de l'Edda, qui avait enseigné la musique et la poésie ; elle avait un grand prestige, aussi elle était soutenue par la multitude indignée. »
Ce livre étant épuisé, l'éditeur Chacornac en a fait faire une nouvelle édition, dans laquelle le passage que nous venons de citer est rendu par ceci (page 212) : « La Voluspa consultée n'osa pas d'abord le traiter d'impie et de rebelle, l'ascendant qu'il aurait acquis sur une grande partie de la nation par l'immense service qu'il venait de lui rendre... Mais après avoir fait son éloge, elle s'apitoya sur la faiblesse de son âme et le présenta comme un homme pusillanime. »
Cette édition révisée est précédée d'une préface dans laquelle il est dit qu'on a respecté la distribution des pages. En effet, c'est à la page 212 de la première édition que la Voluspa condamne Ram, c'est à la page 212 de la deuxième édition qu'elle l'excuse et le glorifie.
(1) La fête de Noël était inconnue des premiers Chrétiens ; c'était le solstice d'hiver, mais non la naissance d'un Dieu.

LE DÉLUGE DE RAM
La grande perturbation instituée pour imposer cette nouvelle doctrine fut appelée le Déluge de Ram.
On sait que le mot déluge est symbolique et indique la vague humaine qui déferle sur le monde pour le bouleverser.
Ce mouvement fut aussi appelé le Déluge d'Og-Gygès, parce qu'il établit le culte d'Oghas, le grand ancêtre. Le mot Og fut opposé à celui de Ma-gog (la Mère). Rappelons encore que le déluge est le symbole d'un cataclysme moral, c'est l'invasion de la barbarie des hommes forts dans le monde régi par des femmes, des brutes éteignant les lumières de l'esprit.
Le déluge est représenté dans le Zodiaque par le Verseau, ce qui verse, non pas de l'eau, mais de l'erreur et de la terreur. C'est une invasion d'hommes, ce n'est pas une invasion d'eau.
Ogygès, Ram, Tamerlan, Gengis-Khan, Alexandre, César, sont des hommes de déluge, des hommes de nuit détruisant sur leur passage les œuvres de l'esprit féminin, semant partout des ruines où régnaient des idées, brûlant les livres pour cacher les Vérités.
Les conquérants menaient des essaims de barbares qui terrorisaient le monde.
Une île s'appela O-gygie, île disparue, qu'on n'a pas retrouvée et qu'on suppose effondrée dans la mer. C'était un lieu d'orgies, on y célébrait le culte de Bacchus. Or, est-ce que le mot Orgie n'est pas une altération d'O-gygie, difficile à prononcer ?
C'est de cette île, dit-on, qu'est partie la multitude d'hommes qui descendit dans l'Inde sous la conduite de Bacchus et qui envahit l'Egypte sous les ordres d'Osiris.
Ce n'est pas en une fois que se fit l'invasion, mais par étapes et avec des intervalles de plusieurs siècles.
Les Titans envahisseurs sont représentés vomissant des flammes comme les volcans : c'est l'injure, c'est l'outrage, c'est la folie.
On a cherché ce qu'avait pu être ce déluge d'Ogygès et on n'a rien trouvé à répondre. L'abbé Bamior dit : « Il n'y a rien de si obscur que l'histoire d'Ogygès et du déluge qui arriva sous son règne. Ce prince était-il originaire de la Grèce ou était-il étranger ? En quel temps vivait-il ? Qu'est-ce que le déluge d'Ogygès ? Voilà trois questions qu'il n'est pas possible d'éclaircir » (Mythologie, t. III, p. 32).
Et la tradition nous dira : Parmi les persécuteurs, ceux qu'on appela des Titans, se trouvaient Cottus, Briarée, Gygès, « qui avaient cent mains et cinquante têtes », c'est-à-dire une multitude dont ils étaient les chefs.
Les modernes confondent presque toujours les bouleversements sociaux de l'antiquité avec les cataclysmes physiques que le mot déluge indique. Et alors, au lieu d'une révolution, on décrit une époque de catastrophe physique. C'est ainsi que Fabre d'Olivet parle du déluge de Ram. Il dit : « La guerre allumée fut longue et terrible. Pendant plus de trois siècles, le sang ne cessa de couler. Au milieu de ces troubles politiques, il sembla que la Nature elle-même voulait ajouter aux horreurs de la guerre. Les fléaux les plus horribles se manifestèrent. Des déluges effroyables inondèrent plusieurs pays, les mers surmontèrent leurs bords ; les lacs s'ouvrirent des passages à travers les montagnes de la Thessalie et, tandis que des peuples entiers étaient entraînés par les vagues courroucées, un ciel d'airain couvrait d'autres contrées et pendant l'espace de 7 années les laissait sans une goutte de pluie ou de rosée. Des volcans se déclarèrent en plusieurs endroits. L'Etna lança ses premiers tourbillons de flammes ; un furieux incendie éclata dans les forêts de la Gaule, sans qu'on sût d'où en étaient parties les premières étincelles. Presque toute l'Italie brûla.
« Les monts Hespériens furent embrasés et prirent à cause de cet événement le nom de monts Pyrénéens.
« Pour la première fois on vit le sang des rois (c'est-à-dire des Reines) couler sur leur trône. On vit des scélérats obscurs porter sur leurs souverains une main impie et se mettre à leur place.
« La terre trembla. Des montagnes furent renversées et des villes entières ensevelies sous leurs débris. De quelque côté que l'on jette les yeux depuis le règne de l'Assyrien Bélochus, on ne voit que désastre et calamité. Ce sont des fragments de peuples qui se heurtent et se brisent, qui passent d'Asie en Europe et d'Europe en Asie pour en abreuver les rivages de leur sang.
« Au milieu de cette confusion, on voit descendre des hauteurs septentrionales des hordes de Boréens encore sauvages. Ils viennent comme des oiseaux de proie affamés de carnage, pour dévorer les restes de l'Empire phénicien tombant en lambeaux. » (Fabre d'Olivet, L'Etat social, p. 314.)

ÉPOQUE DE TERREUR
Le grand mouvement qui venait de se produire dans le monde celtique était la conséquence fatale de la psychologie masculine, le résultat de la crise de l'adolescence qui se produisait partout et jetait dans l'humanité un ferment de révolte contre les contraintes imposées par l'autorité maternelle. Les hommes mènent une vie vagabonde, cherchent à s'emparer des femmes, à les violenter, à les asservir, ils volent leurs biens, détruisent leurs constructions.
Fabre d'Olivet parle en ces termes de cette époque de terreur (L'Etat social de l'homme, pp. 201 et 203) : « Le culte superstitieux et féroce auquel une fatale déviation des lois providentielles avait soumis les Celtes, la terreur qui en était la suite naturelle et cette habitude de sentir toujours la mort planant sur leur tête, les rendaient inaccessibles à la pitié. Intolérants par système et valeureux par instinct, ils donnaient la mort avec la même facilité qu'ils la recevaient, la guerre était leur élément. Ce n'est qu'au milieu des batailles et tandis que la fatigue accablait leur corps, que leur esprit, par ailleurs assailli de fantômes, trouvait une sorte de repos. Dans quelque lieu que la victoire guidât leurs pas, la dévastation les suivait. Implacables ennemis des autres religions, ils en détruisaient les symboles, renversaient les temples, brisaient les statues et souvent, sur le point d'en venir à une bataille décisive, faisaient vœu d'exterminer tous les hommes et tous les animaux qui tomberaient entre leurs mains, ce qu'ils exécutaient à la manière de l'interdit, comme les Hébreux le firent longtemps après eux. Ils croyaient honorer ainsi le terrible Thor, le plus vaillant de leurs ancêtres, et n'imaginèrent pas qu'il y eût une autre manière pour Teutad lui-même de montrer sa force et sa puissance, que le carnage et la destruction. La seule vertu était pour eux la valeur, le seul vice la lâcheté. Ils nommaient l'enfer Nifelheim, le séjour des lâches (c'est le renversement de l'idée primitive qui faisait de l'enfer le séjour des forts). Convaincus que la guerre est la source de la gloire dans ce monde et celle du salut dans l'autre, ils la regardaient comme un acte de justice et pensaient que la Force donne sur le faible un droit incontestable et établit la marque visible de la Divinité. Quand ils étaient vaincus, ils s'efforçaient de rire en sortant de la vie, même au milieu des tourments.
« Lorsque la crainte d'un danger imminent agitait les esprits, la superstition déployait ce qu'il y avait de plus horrible. Ici c'est une armée qui dévoue à la mort son général ; là c'est un général qui décime ses officiers ; partout méfiance, terreur, sauvagerie. On brûle un monarque sexagénaire en l'honneur de Teutad, on égorge les neuf enfants de Haquin sur l'autel de Thor.
« Toute l'Europe est envahie depuis les bords glacés de la Suède et de l'Irlande jusqu'aux fertiles rivages de la Sicile, partout le sacrifice sert de prétexte pour répandre le sang de ceux que l'on veut faire disparaître. »
On prenait de jeunes vierges que l'on enterrait vivantes « en l'honneur de Freya ». Quelle ironie ! Puis on fit naître l'opinion superstitieuse qui se développa si vite et qui obligeait les femmes des rois (quand il y en eut) et des principaux de l'Etat à suivre leurs époux dans le tombeau, en s'étranglant à leurs funérailles ou en se jetant dans les flammes de leur bûcher, coutume qui a longtemps existé en Asie. Le motif de cette barbarie, c'était la crainte que ces monstres avaient d'être empoisonnés par la femme qu'ils avaient torturée, leur mort devant entraîner la sienne. Il s'y mêlait peut-être un peu de jalousie posthume.
Après Thor, nous trouvons l'homme représenté par « Niord », qui symbolise la navigation et la pêche ; Cumulex, un Mars gaulois, on lui sacrifiait le bétail pris sur l'ennemi ; Uller, habile dans l'art de patiner et de lancer des traits ; Grannus, assimilé à Apollon, il préside aux eaux minérales et donne son nom a Aix-la-Chapelle (Aquæ Grannæ).
On appelle pro-zélites les premiers zélateurs qui passent au schisme masculiniste.
Dans les contrées du Nord, comme partout ailleurs, les Zélateurs ont marqué leur passage par des indices qui ne laissent aucun doute sur leur origine (ils venaient de Zélande) ; Ziel, Zelus, Zala, chez les Celtes, les Latins, les Maures, signifient zèle ; la Seeland danoise, qui est une colonie de la Zélande du Rhin, s'écrivait anciennement Ziel-land, terre du zèle (zelos, en espagnol, jalousie). See-land : terre de la mer ; il y a entre ces deux expressions : jalousie et eaux de la mer (qui éteignent la lumière de l'esprit), un rapport symbolique.
Les Géants, Jotes, sont les antagonistes des Alfes ou Elfes ; ces derniers représentent les forces spirituelles de la Nature en même temps que les bons Génies. C'est un des noms qui avaient été donnés aux anciennes Faës. Par ironie, on représenta l'esprit masculin sous la forme de l'animal le plus lourd et de Elf on fit Eléphant.
Sur les plus vieux monuments de l'Inde, on a trouvé des éléphants à sept trompes imitant les serpents à sept têtes.
Les masculinistes se vengèrent de ces comparaisons en niant la science des Prêtresses qu'ils appellent des rêves, des visions, puis en prétendant que la femme se change en chouette et que c'est sous cette forme que, la nuit, elle va rejoindre ses amants. Et voilà bien le mot si profond du Sépher réalisé :
« La femme attaquera l'homme à la tête (dans son esprit) et le serpent la mordra au talon (ce qui veut dire l'attaquera par en bas, dans son sexe). »
Les hommes qui, dès lors, disputèrent aux femmes le droit d'enseigner, furent considérés comme des Magiciens, des sorciers, parce qu'ils introduisirent le surnaturel dans leur enseignement. Ils étaient sanguinaires et firent une religion barbare dans laquelle ils introduisirent des sacrifices humains. Ils immolaient à leur dieu les captifs de guerre et les esclaves ; ils sacrifiaient aussi des innocents qui, disaient-ils, s'offraient volontairement à la mort. C'est que l'homme sanguinaire hypnotise et fanatise ses victimes pour les décider à mourir afin de lui donner le spectacle du sang. C'est une forme du sadisme.

TAMAS
En Hollande celui qui enseigne l'erreur (le Prêtre, dira-t-on plus tard) s'appelle Tam. Nous allons retrouver ce nom aux Indes. Là, Tamas représente la puissance du mal. Dans les Védas, ce mot a le sens d'obscurité, de ténèbres ; c'est la négation, l'opposition du mauvais esprit en face de l'esprit lumineux de la femme, appelée (en Egypte), Rhéa (en Celtide), ou Rajas (aux Indes). Ce mot signifie rayonnement. Tamas nie la Vérité suprême, et c'est lui, incarné dans Hermès, qui dit : ce qui est en haut est comme ce qui est en bas ; c'est la négation de la polarité sexuelle.
Tamas, c'est le principe de l'opposition au progrès spirituel. Il obéit aux instincts sexuels les plus bas, sans hésiter, à ce qu'on a très bien appelé « l'appel de la bête ». La pensée s'est obscurcie en lui, il garde ce qui fut acquis avant la chute, mais depuis il ne monte plus, il descend et ne comprend plus ce qui monte.
L'instinct tamasique, c'est l'entraînement vers ce qui abaisse, c'est le véhicule inférieur. Il veut dominer parce qu'il est orgueilleux, mais en faisant le moindre effort, et, comme il veut être le premier, il empêche les autres de le dépasser. Il tend à éteindre les lumières, il a des égoïsmes impérieux, c'est lui qu'il faut écouter, lui le Véridique qui ne représente que le mal, les ténèbres. Le bruit qu'il fait dans le monde est désigné par cette locution : Tam-Tam ; c'est ce que dans les temps modernes on appellera le bluff.
Tant que Tamas régnera, la Vérité sera cachée et le Bien vaincu.

LES VILLES SACRÉES DES CELTES
La vie féminine était représentée comme le symbole de la vertu et du bonheur. La femme est celle qui porte en elle le bonheur. Chez les Scaldes ou Celtes du Nord, on trouve des villes sacrées et fermées appelées « Asgard ». C'est là que les Valkyries distillent tous les plaisirs, disent les légendes masculines, qui ne voient dans le bonheur spirituel que des plaisirs. C'est le paradis du Nord. Là les trois Normes, Urda, Véranda, Skalda, jugent les hommes ; les poètes inspirés y chantent sur la harpe d'or les louanges des Déesses et des héros. Ceci est un symbole de foi chez les Scandinaves.
Asgard, c'est la ville des « Ases ».
As signifie unité centrale. As-gard est la ville des Divines unités (de là le terme Dieu unique) (1). Ce nom ne se rencontre que dans l'histoire sacrée, la mythologie. C'est un centre religieux, c'est la Jérusalem mystique.
D'après la poésie scandinave, les « bons » sont reçus dans l'Asgard, les lâches en sont rejetés, ils sont uit, qui veut dire « au dehors » et qui est opposé à as. Partout des villes sacrées furent bâties. On trouve As-bourg dans le voisinage de Cologne. En Zélande Asciburgium, bâtie par Ulysse et vénérée des Germains, selon Tacite (dans Germania). Plus loin Aspurgium dont parle Strabon et qui serait la ville type imitée par les autres.
Dans les poésies sanscrites, on trouve aussi Mid-gard (Mid, milieu) et As-gartha. On trouve aussi Midi-hama (hama est le celtique heim, séjour). Ce sont d'abord des enceintes fortifiées bâties en pierres brutes, sur les hautes roches, et qui furent comme les cloîtres primitifs. (Monastère veut encore dire demeure d'un seul sexe.)
La Norme Scalda (qui donne son nom à la Scandinavie, Norvège vient de Nord-vœg) aurait fondé autour de l'Escaut (qui lui doit aussi son nom) une région interdite aux profanes. Les fouilles ont fait trouver dans cette région des charbons, des ossements, des urnes cinéraires.
Dans l'île Scaldia se trouvait un endroit appelé Sion.
(1) As, unité monétaire chez les Romains ; as, point unique dans différents jeux ; as, le pôle, l'axe. Le mot essieu, voulant dire que le monde tourne autour de lui, vient de axôn, axis, ashe.
Gard, ward signifie que les premières villes furent des enceintes où se gardaient les femmes et les enfants.
On dit plus tard qu'elles gardaient aussi les ossements des morts, quand les femmes furent mises à l'interdit et assimilées aux morts

AS - LES ASÉENS
Pline, qui parle des Aséens, les place aux environs du Mont Taurus. Strabon cite une ville nommée As-burg, qui paraît avoir été la capitale des Ases. Cette ville est appelée Asgard dans l'Edda. Le mot As signifie un prince et même un Dieu dans la langue primitive des Celtes. On le trouve, avec la même signification de Prince ou de Principe, chez les Scandinaves, les Etrusques et les Vasques. Les Romains se servaient du mot As pour exprimer une unité de mesure ou de poids. Nous l'appliquons encore aujourd'hui au premier nombre des dés ou des cartes. C'est de ce mot très antique que dérive le nom donné à l'Asie.
Dans tous les dialectes masculinistes, il exprime la base des choses.
Nous devons croire que, lors de la grande persécution des sectateurs de Ram, les villes sacrées ne semblaient plus un refuge suffisant pour assurer la sécurité des femmes, car nous les voyons quitter les continents et aller se réfugier dans des îles, ce qui fait dire à de Grave :
« Ile, lieu de refuge des femmes, lieux fortifiés par la nature que la Providence semblait offrir comme un asile aux femmes traquées ; cette espèce de continent défendu par des remparts d'eau était le grand objet des vœux de l'homme ; c'est de là que ces demeures isolées ont été la scène de tant de grands événements de l'antiquité. C'est dans une île que nous trouvons le palais de Circé ; c'est dans une île que Pluton exerce son empire. Le chef-lieu des Atlantes était une île. La République des Champs Elysées s'étendait sur plusieurs îles. Bailly en demande la raison à Voltaire.
« N'êtes-vous pas étonné de voir que tout ce qu'il y a de plus intéressant dans l'antiquité se passe dans les îles ? »
Les îles étaient tellement en vénération qu'on les appelle : Terres sacrées, pays de salut. Leur nom Eiland, ou, avec un H, ; Heiland est formé du mot Heil qui signifie salut et saint. Lieu de sûreté divine, as-île (asile contre la terreur). Et on appelle ex-il le bannissement des hommes injustes ou impies.

LES CITÉS LACUSTRES
Mais on alla plus loin. On construisit des villes au milieu des lacs.
Le lac Mœris en Egypte serait un exemple de ces cités de refuge des féministes.
« Le lac Mœris avait 75 lieues de circonférence (362 km) et il en a encore 50 ».
« Ce lac creusé de main d'homme a passé pour une des merveilles du monde. Hérodote assure que le circuit du lac était aussi étendu que toute la côte maritime de l'Egypte. Les endroits les plus bas avaient trois cents pieds de profondeur (environ 90 m). Au milieu s'élevaient deux pyramides à trois cents pieds au-dessus des eaux ; elles s'abaissaient aussi à 300 pieds au-dessous ; chacune portait une figure colossale posée sur un trône. Ce lac communiquait avec le Nil par un long canal muni de grandes écluses qu'on ouvrait et fermait à volonté, selon les besoins » (De Grave, Ch. Elys., t. I, p. 216).
En Irlande, on a découvert des débris de cités lacustres dans lesquelles on a trouvé des armes et des ustensiles de l'âge de bronze.
Ballinlough recèle dans ses abîmes le Thier-na-oge, terre de l'éternelle jeunesse, paradis païen, dit-on, analogue au Walhalla de la mythologie scandinave.
Le Lough Drine est peuplé d'îles fées qui, chaque été, une certaine nuit, dansent une sarabande folle, dira la mythologie masculine.
« En se promenant autour de la baie (du Nord de l'Irlande), on trébuche à chaque pas sur des vestiges de civilisation druidique : Cairns, pierres levées, Cromlechs et autres monuments mégalithiques, généralement édifiés au-dessus de curieux souterrains. Près de la cascade de Dunamare, on montre l'empreinte du premier pied humain qui se soit posé sur le sol irlandais 40 jours après le déluge. Cet intrépide voyageur avait nom Ladra ; c'était vraiment bien la peine de venir si loin, pour périr à peine débarqué dans un cataclysme général » (L'Irlande, Mme de Bovet, p. 184).
Ce cataclysme fut une persécution si violente que dans le comté d'Antrim on montre le rocher du haut duquel toutes les femmes d'âge mûr furent précipitées dans la mer.
Ces événements sont restés dans la mémoire populaire. Les enfants d'Erin, île que Diodore de Sicile appelle hyperboréenne, en ont dans l'esprit un atavisme tenace, et c'est la raison pour laquelle les gamins, dans les écoles pauvres, sont avides d'apprendre ; ils veulent tout savoir, et, dans les classes populaires irlandaises, on enseigne que la Mère est considérée comme l'aide la plus utile à la famille, celle qui travaille le plus, gagne davantage et boit moins (Mme de Bovet).
Cailleux, dans son livre Origine celtique de toutes les civilisations, donne de nombreux détails sur cette question ; nous lui empruntons le chapitre qu'il y consacre. Il dit :
« On construisit jusque dans les lacs de véritables hameaux posés sur des pilotis et auxquels on arrivait du rivage par une trappe (subbelen, être pris dans une trappe, d'où Pons sublicius dans les Mystères de Rome). De Pyl (pilotis) et Huyske (maisonnette) on a fait Pélasge, nom générique donné aux peuples qui avaient, à cette ancienne époque, leurs Mystères dans ces îles factices, et surtout aux habitants du lac Togolia en Grèce.
(Il ne faut pas confondre les Pélasges avec les peuples de la Péla-gonie, ces derniers tirent leur nom de Belech, druide.)
Le mot stæch (pieu fiché en terre) a également prêté un nom aux îles Stœchades (îles d'Hyères) où se célébraient les Mystères phocéens de Marseille (1) ; au Sinus Astacanus qui baigne Cadix (les golfes de Nicée et de Varna portent aussi ce nom).
Notre mot pieu, en celtique Pyche, a fait nommer Pictes différents peuples, ceux, par exemple, qui avaient leurs cités lacustres dans les lacs d'Ecosse, ceux qui les avaient à l'embouchure de la Somme ou de la Loire (Picardie, Pick Erd, terre des Pictes).
Hérodote, parlant d'une de ces constructions insulaires établies dans le lac Prasias, en Thrace, dit qu'elles avaient été élevées par les Péoniens, ce qui montre l'ancienneté de notre mot pionnier. (Peon, en espagnol, veut dire terrassier, et Pion, en français, surveillant.)
Chaque temple avait son lac sacré. Hérodote (T. II, p. 171) parle des représentations nocturnes qu'il vit à Saïs, en Egypte, sur le lac sacré de Neith : « On les appelle des Mystères, dit-il, et, tout en ayant appris sur ce sujet quantité de choses des plus curieuses, je me tairai par respect. »
(1) Ces Mystères se faisaient dans le Delphicus Templum. Le pays fut appelé Dauphiné et, en souvenir du mot Phocée, les fêtes de villages y sont toujours appelées Vogues. Les Vogues de Bresse se font encore avec le costume antique.

DESTRUCTION DES CITÉS LACUSTRES
Th. Cailleux nous raconte un épisode de cette époque. Il dit (Origine Celtique, p. 300 et suivantes) ;
« Les cités lacustres furent vouées à une implacable destruction. Construites en bois, elles furent toutes livrées aux flammes. Eu Suisse, en Italie, en Allemagne, en Ecosse, partout on retrouva au fond des lacs, mais à demi brûlés, les pilotis qui supportaient ces bourgades. 113 stations ont été reconnues en Suisse seulement, celle de Wangen au lac de Constance était construite sur 40.000 pilotis. »
Brûler se dit en celtique Brennen. Or ce mot se retrouve dans toutes les contrées lacustres qui ont été le théâtre de ces incendies, les premières explorations de leurs ruines ont été faites en 1853 au lac de Zurich par M. Keller.
Les incendiaires arrivaient avec leur étendard appelé Fæn (fanion).
Près de Constance, les destructeurs des cités lacustres formèrent des établissements connus des Romains sous le nom de Brennes et souvent fondèrent une abbaye druidique qui, de leur nom, fut, plus tard, appelée Saint-Gall (les Druides étaient des Gallois).
Au centre de la Gaule est un pays de lagunes que traverse l'Indre et qui, depuis ces événements, a toujours été appelé Brenne (ce sont les Brannovices de César ; wick, vicus signifiant bourg, ce mot signifie bourg brûlé, Brandebourg) (1). Les Bituriges, ses dévastateurs, s'y fixèrent, laissant dans le nom même de leur capitale Avaricum un souvenir de leur zèle (yver, zélé, a formé Iberi, Hebrœi, Avari ; zelos veut dire jalousie). La croisade incendiaire ayant franchi les Alpes, on appela Brenner le col par lequel elle avait débouché en Italie et Brandis un monastère fameux qu'elle fonda au Au voisinage des lacs. Dès lors, le nom de Brennus se joint à tout ce qui est destructeur par le fer et la flamme. Un Brennus, accompagné de Belgius, dévasta Delphes et la Grèce ; en Bresse se trouve une petite contrée lacustre, la Dombe, où se faisaient, dans des îles factices, les anciennes Vogues ; Polybe, n'ayant qu'une idée confuse de ces pays éloignés, y fait arriver, avec un Brennus, des destructeurs et des incendiaires. (Polybe y place la ville de Bellica. Ce mot ainsi que Belgius vient de Belech qui veut dire Druide.)
En avançant vers l'Orient, on retrouve chez les Phrygiens le Sinus Astacanus, ayant, comme son nom l'indique (stæck, pilotis), des îles sur pilotis ; ce canton, depuis ces désastres, fut nommé Phrygie brûlée. Plus loin, les dévastateurs, qui, selon Hérodote, sont appelés Perses, disent dans leurs histoires (Histoire de Perse par le Persan Mirkhond) (2) que leur plus ancien chef est Kaian (Kaiô, brûler en grec, en garamis, en chinois), c'est-à-dire brûleur, dévastateur des cités flottantes établies dans les lacs de la Haute-Asie. (Kaian, c'est le Kaïn de la Bible : Kaï uni à Æsar fait César, uni à Æser fait Kaiser.)
Dans les régions méridionales, les Européens trouvèrent aux Canaries mille légendes sur une île incendiée et introuvable que l'on désignait sous le nom de Brandon (Brandon de discorde).
Dans le Nord de l'Europe, mêmes mystères, mêmes dévastations ; l'Ecosse est pleine de débris de cités lacustres, lesquels portent encore des noms incendiaires ; tel est Burnt-Island, sur le Forth, au voisinage d'Edimbourg. Au delà du Rhin, le Brandebourg renferme une quinzaine d'étangs où se faisaient les mystères de ces peuples du Nord ; l'incendie fit tout disparaître et la province tira de là son nom qui signifie bourgs brûlés. Dans le Mecklembourg se trouve, parmi d'autres lacs, celui de Tollen, et, sur ses bords, une ville qui, appelée aussi Brandebourg, nous révèle les mêmes mystères, les mêmes fureurs, les mêmes incendies. Par suite de ces graves événements, les bourgades maudites disparurent de tous les lacs ; mais pendant longtemps le peuple effrayé put encore apercevoir au-dessus de l'eau leur squelette, ne présentant plus aux yeux qu'une forêt de troncs carbonisés et informes. La vague qui venait gémir contre ces noirs débris poursuivit sans relâche l'œuvre de la vengeance ; peu à peu ils descendirent sous l'abîme, puis le silence couvrit cette vaste tombe. Lorsque le temps eut tout effacé, les habitants du voisinage se transmirent d'une génération à l'autre le souvenir de ce qui s'était passé là. De nos jours seulement, il fut donné à l'homme de s'en approcher, et il peut aujourd'hui jeter un dernier coup d'œil sur ces restes, avant qu'ils n'aient achevé de rentrer dans le néant ; il y voit des tronçons de bois à demi rongés, il y trouve, intact sous la vase, tout ce qui reste encore à détruire de ces anciens temps.
Stæch (pieu) fit appeler Stœchades les îles factices qui servaient aux célèbres Floralies de Marseille (Marseille était appelée Massilia (3) ; ces îles n'existent plus, mais nous nommons encore estacade les constructions qui leur ressemblent. Ces sortes de pilotis se nomment aussi perche, d'où le nom de parc donné aux jardins de plaisir qu'ils tenaient élevés au-dessus de l'eau ; un grand nombre de villes placées au bord des étangs laissent voir cette racine, par exemple Bergame est au milieu des lacs italiens (Berg-heim, demeure perchée ; Virgile dit Pergama) ; Percha en espagnol signifie ce qui est élevé, comme acropole.
Le lac de Constance n'est connu des Latins que sous le nom de Brigantinus. (Les Espagnols disent de même briga pour berge. Briguer, chercher à atteindre.)
Blankenberg remplace une cité détruite dont les piquets ont été vus longtemps ; la ville se nommait autrefois Scarphout, de Scarp, escarpé, et Hout, bois.
« On a exploré les pilotages de Brandebourg, dit un géologue, et, parmi ces ruines, on trouve Perlebourg, Spremberg (bourgade sur la Sprée), Reins-berg, Havel-berg (aucun de ces villages n'est sur une montagne).
Balk, dans la langue des Celtes, signifie poutre, étançon, pour supporter une habitation lacustre ; sur cette racine, nous appelons encore balcon une construction aérienne du même genre ; mais ce qui montre ce que la signification de ce mot était autrefois, c'est que le mot Balk signifie toujours pro-stituée (premier statut) ; les écrivains arabes appellent « Balkis » la Sabéenne qui vint voir Salomon. (Zabbe, pro-stituée, d'où les mots Saba, Sabine, Sabbat, Sabbéens). C'est la vie archaïque, la première vérité, la première morale qui est le premier statut condamné par les hommes jaloux. Souvent ces îles n'étaient point fixes et flottaient sur l'eau ; c'est pourquoi on les appelait baraques ou îles flottantes.
Dans la province de Brandebourg, les mêmes noms nous révèlent les mêmes mystères. Là se trouve Berlin ; la Sprée, qui l'arrose et qui formait autrefois de vastes marais, d'où son nom, de Spar qui signifie pilotis, de Sperre, qui désigne une clôture sacrée interdite aux profanes, nous montre par ces racines tous les éléments d'une cité flottante, d'un jardin des Hespérides, d'un Olympe où étaient admis les héros ; en outre, au voisinage de ces retraites aériennes était ordinairement une tour, où se trouvait une cloche. Un guetteur, à l'approche de l'ennemi, sonnait pour avertir de rentrer. Or, dans la langue parlée à Berlin, un beffroi se dit encore Spergloche.
Dans certaines contrées, pour construire ces bourgades flottantes, on avait transformé une vallée en étang par un barrage qui arrêtait l'eau ; les dévastateurs firent une tranchée au barrage, vidèrent l'étang et arrivèrent à la bourgade.
Quand ces jardins de plaisir (Eden) eurent disparu, il fallut les remplacer dans les mystères. On figura donc un autre Olympe où entraient encore ceux qui étaient vainqueurs dans les tournois ; là, comme dans l'ancien séjour des Déesses, c'était encore la beauté qui décernait des faveurs, c'est-à-dire des couronnes de lauriers, des armes de luxe, des sourires encourageants, des fleurs symboliques. A Olympie, le vainqueur recevait pour prix de sa victoire la plante lacustre que nous appelons berle, pour figurer ces îles flottantes qui n'existaient plus, et, comme jouissance d'un ancien droit, il entrait par la brèche dans la ville où il devait consommer son triomphe. (Cette plante berle était figurative comme le lotus dans d'autres contrées. Elle s'appelle berle, apium, sion en celtique, en latin, en grec.)
Toutes ces destructions, ayant eu lieu avant qu'on n'écrivit l'histoire, ont cependant laissé dans le souvenir des peuples des traces qui ne se sont pas encore effacées. Ainsi les Bretons n'ont jamais oublié dans la baie de Douarnenez l'emplacement d'Is-la-Grande et savent sur elle de tragiques histoires (Is est devenue Isa aux Indes et Isis en Egypte). Douar en arabe, Aduar en espagnol, Durum en celtique, signifient tente.
Les Etrusques montraient avec effroi la place où était, dans le lac Vulsinie, la ville du même nom que le feu du ciel, selon Pline, avait détruite. La Palestine voit encore, au fond de la Mer Morte, les débris de quatre villes maudites et incendiées.
Des fêtes furent établies pour transmettre aux âges futurs le souvenir de ces graves événements (4), et, jusque dans ces derniers siècles, nos aïeux ont célébré vers le temps du Carnaval le dimanche des Brandons ; on arrivait dans les églises armé de bâtons et de torches et l'on figurait des luttes, un embrasement, une victoire. Ailleurs, on conduisait un fantôme de paille sur un étang et, à l'aide d'une échelle posée sur le rivage, on y mettait le feu, au milieu des acclamations de la foule ; cette figure dans le midi de la France s'appelle Papesue, c'est-à-dire île flottante. Quant aux étangs desséchés, on conte d'un bout à l'autre du monde la même légende en donnant le beau rôle à l'homme, le vilain rôle à la Femme : une vallée était remplie d'eau ; une méchante femme avait causé cette inondation ; un homme divin se présente qui fend la roche et met l'étang à sec ; ce personnage s'appelait Yu en Chine, Kashyapa à Cachemire, Bel à Babylone, Hercule dans la vallée de Tempé, Ram dans les pays du Nord. Sa révolte s'appelle le déluge de Ram.
C'est ainsi que la tradition masculine fit une légende destinée à justifier les hommes de tous ces crimes et à les imputer à la Femme.
On raconte que l'ennemie de Ram, Râvana, forcée d'abandonner sa capitale Ayodhyâ (aujourd'hui Aoud ou Houd sur le bord méridional du Gange) et de sortir même du continent, se retira dans l'île de Lanka (aujourd'hui Ceylan) et s'y crut à l'abri des efforts de son ennemi, regardant les flots qui l'environnaient comme un obstacle insurmontable.
La tradition rapporte que les compagnons de Ram profitèrent de quelques rocs épars dans les ondes pour arrêter et lier ensemble un nombre considérable de bateaux dont ils formèrent une immense pont sur lequel ils passèrent. Les Hindous montrent encore les ruines de ce fameux pont dans une suite de rochers qu'ils appellent le pont de Ram.
Le grand Khan (Caïn) porta par ce moyen l'incendie dans le palais même de Râvana qui fut tuée, et Ram resta seul le maître de l'Asie. (Fabre d'Olivet, L'Etat social, p. 239.)
D'après une tradition anglaise, tous ces malheurs seraient arrivés en l'an du Christ 65, sous le règne de Lugail Rhiaberg ; c'est une femme qui en fut la cause. Même tradition à Killarnay.
Les plongeurs qui vont chercher dans les sables du lac des opales, des cornalines et des chalcédoines disent merveille des tours rondes, des temples et des palais qu'ils aperçoivent au sein de l'humide demeure.
M. Lehon dans L'Homme fossile, nous parle des débris trouvés dans les cités lacustres ; il mentionne des haches en pierre, des poignards en bois de cerf, des pointes de flèches en silex ou en os.
Dans d'autres bourgades plus récentes, les armes sont en bronze, ainsi que tous les objets tranchants qui servent aux usages de la vie ; ce bronze est toujours composé de cuivre et d'étain. Le bronze des Egyptiens, des Grecs et des Etrusques contient ordinairement du plomb, celui des lacs suisses jamais.
Enfin, dans quelques stations plus modernes, il y avait des objets en fer, des épées en fer (5), du type gaulois, sans garde ni croisière.
A la Tiefenau, en Suisse, on a découvert tout un champ de bataille, des épées, des roues de chariots, des mors argentés, des cottes de mailles, des monnaies avec l'effigie du cheval celtique.
On a trouvé aussi des symboles religieux : des croissants lunaires en argile, des amulettes trinitaires, formées de trois tiges portant un anneau de suspension et se terminant chacune par un globule, comme les pendants d'oreilles de Junon, tels qu'ils furent plus tard décrits dans l'Iliade ; des bracelets, des colliers, des tissus de lin, des dentelles, du blé, de l'orge, des pois, de la vigne et des cerises dans des pots.
(1) Les castels qui furent renversés ont laissé leurs ruines sur les escarpements de nos rivières, où leur nom d'Alcazar les a fait nommer camps de César.
(2) Les noms de Perses, de Mèdes, nous viennent d'Hérodote et sont inconnus aux Asiatiques, qui nommaient la Perse Iran.
(3) Chez les anciens, les masculinistes disaient sous forme de proverbe à un homme qui se corrompait, d'après eux (c'est-à-dire qui devenait féministe) : Massiliam navigas
(4) Les jeux du cirque à Rome, les jeux Olympiques en Grèce, les tournois du Moyen Age.
(5) Ou raconte que le fer aurait été découvert du temps de Minos dans l'embrasement du mont Ida. Ce serait par suite des incendies que le fer aurait été trouvé, et cela explique l'horreur que les femmes avaient pour ce métal.

Au milieu de ce désordre, une grande femme se lève, restitue toute la science primitive, puis écrit des poèmes immortels qui racontent les luttes soutenues contre les femmes. Cette nouvelle Déesse est connue sous différents noms et surnoms. On l'appelle Vénus, Uranie, Hemœra, Bélisama ou Mater-idea.

VÉNUS
Nous avons à restituer sa personnalité.
Son histoire réelle ayant été effacée, on ne la connaît plus que par la mythologie.
Vénus est surtout considérée comme représentant la lumière de l'Esprit. Elle est surnommée Uranie et aussi Lucifer. La colombe est son symbole et représente le Saint-Esprit qui est en elle, l'Esprit qui s'élève et qui élève. Elle fut mise au nombre des astres. Son nom fut donné à une brillante planète. Sa fonction est d'annoncer le jour, dira-t-on, parce que sa présence fait la lumière.
Vénus était appelée Lucifer le matin, ou l'Etoile du Berger, et Vesper le soir. On dit aussi Hesper ou Vesperugo quand elle paraît à l'Occident, peu après le coucher du soleil.
Elle était surnommée Basilée (Basilis), c'est-à-dire Reine ; elle est fille de Cœlus, le Ciel.

LES VÉNÈTES
Les affiliés de Vénus sont les Vénètes.
En Gaule, ils ont une importante colonie sur le territoire où l'on fondera la ville de Vannes.
Ce nom, corruption de Veneta, restera dans certaines régions du Nord où la particule Van se mettra devant les noms pour les ennoblir. Cela indique serviteur de Vénus. Van est devenu Von chez les Saxons. Il existe à deux lieues de Liège, au bord de l'Ourthe, un endroit encore appelé les Vennes, près de Froidmont.
Vénus serait un nom déformé. La terminaison us aurait été ajoutée par les Latins quand ils masculinisèrent tous les noms. C'est une terminaison masculine. Le féminin, selon le génie de leur langue, serait Vena.
M. Dottin nous apprend que, parmi les inscriptions celtiques, on trouve Bena, sacra Bena (Etudes sur l'antiquité celtique, p. 109). Et il donne au mot ben la signification de femme. Alors, sans doute, Femme Divine. Vénus serait donc le nom même de la Femme, Ben ou Ven. (Dans certaines langues, le B et le V se confondent ; c'est la prononciation qui les différencie.)
Nous avons montré déjà que Vénitien et Phénicien étaient le même mot écrit différemment, et que l'oiseau sacré des Phéniciens, le Phénix, pouvait aussi s'écrire Venix. Or nous trouvons qu'on représente Vénus par l'oiseau Vennou ou Bennou, qu'on appelle le Phénix des Grecs.
Comme dérivé de Bena (Vena), nous trouvons chez les Celtes la Déesse Bendis ; elle a des serviteurs qu'on appelle Bendès, Bender.
La Déesse Bendis est devenue Bhavanî aux Indes. Chez les Israélites, nous trouvons les Beni-Israël. Et nous retrouvons cet usage de mettre le nom de la Femme devant les noms propres, dans l'habitude de mettre EVA devant les noms : Eva-Marie, Ave-Maria.
Les Grecs, qui copiaient tout, firent de eva le mot eu (le V et l'U se confondent dans leur langue) et mirent ce eu (qui signifie Lien) devant certains noms : Eu-rope.

BÉLISAMA (Surnom de Vénus)
Nous disons : surnom de Vénus, mais il faudrait peut-être dire Vénus surnom de Bélisama, car nous ne savons pas quel est le nom et quel est le surnom.
Cailleux dit : « Les Gaulois avaient gardé dans leur mythologie une ancienne personnification féminine, Bélisama, qui avait enseigné à leurs aïeux la médecine, les arts et les métiers (1). On la considérait comme une Déesse sanitaire ; les eaux thermales lui étaient consacrées. Les inscriptions l'assimilent à Minerve. » Elle fut la première des « Sagas », ces anciennes Doctoresses de la Celtide, que les Gaulois appelaient « Sages-Femmes ».
De Bélisama, on a fait basilique, édifice où l'on rendait la justice, église principale, parce que cette Déesse avait restitué le culte déformé par la révolte de Ram.
La Déesse Bélisama donna son nom à une classe d'hommes appelés Belech. Ce sont les Druides, qui sont ses fidèles serviteurs, ses vrais initiés. On croit qu'ils sont appelés ainsi parce que belech veut dire lin et qu'ils sont vêtus de lin, mais ce nom a une autre origine, il signifie Prêtre de Bel.
Belgius vient de Belech, qui veut dire Druide. De Belgia, terre de Bel, on a fait Belgique. Polybe parle de la ville de Bellica.
Le Belech célébrait ses Mystères à Is, à Isca Silurum, à Isca Dumnoniorum.
Jusqu'en Irlande, nous retrouvons ce nom devenu Beal. En anglais Bold, en australien Bool. Dans l'Afrique septentrionale, nous trouvons à Cyrène le nom de Balis. Ce nom, adopté par les Hindous, est devenu Mahâ-Bali (grand Bali).
Dans le premier chapitre de l'Iliade, nous retrouvons Belos, qui est arrivé à signifier le Ciel dans le dialecte grec de Laconie. Bela signifie éclat, splendeur.
Bel-tene (feu de Bal en irlandais) était fêté le 1er mai ; c'était la fête des fleurs, la fête de la Femme (2).
Les Belgæ, au temps de César, habitaient la partie de la Gaule comprise entre le Rhin, la Marne et l'Océan. Strabon comprend les Armoricains, parmi les Belges. Les Rémi apprirent à César que la plupart des Belges étaient issus de Germains. Les Belges différaient des Galli et des Aquitains par la langue, les institutions, les lois. Pour Strabon, ils ne diffèrent pas des Gaulois par l'aspect physique, ils parlent la même langue, sauf quelques particularités dialectales ; leurs institutions et leur genre de vie ne diffèrent qu'un peu de ceux des Gaulois. César donne expressément le nom de Germains à quelques peuples belges : Condrusos, Eburones, etc. Mais Ambiorix, roi des Eburons, appelle Galli ses compatriotes.
Rappelons que c'est en l'honneur de Vénus-Bélisama qu'on appela Baléares les îles où on avait installé des observatoires appelés Héméroscopes, que c'est aussi pour rappeler son règne dans les régions du Nord qu'une mer s'appela Baltique.
(1) Jean Hani, dans « La Vierge noire et le mystère marial » écrit : « Quelle qu’ait été l’influence exercée par les divinités gréco-romaines sur le culte de la Vierge en général et de la Vierge noire en particulier, on ne doit pas oublier une autre influence, dont le rôle fut sans doute plus important encore, celle des divinités celtiques dont le culte était florissant particulièrement en terre gauloise. Un culte dont les origines lointaines remontaient à l’âge néolithique (à partir de 9 000 avant J.-C.) et même au-delà, au paléolithique. Les statuettes stéatopyges de ce dernier âge témoignent d’un culte à la Magna Mater présidant à la maternité et à la fécondité générale. En ce qui concerne les débuts de l’histoire nous possédons des statuettes des déesse-mères gauloises habitant des grottes, qui ont été retrouvées sur le sol français, et sont conservées au Musée des Eyzies. Il est remarquable que les figures de ces déesses ont la même attitude que celle de nos vierges, par exemple. La statue gallo-romaine découverte au fond d’un puits près du Bernard en Vendée. Les différentes entités divines que nous rencontrons dans le panthéon féminin, ne sont en réalité que les différents noms que revêt, selon les peuplades et les régions, la Magna Mater. Elle est à la fois Belisama, Régantona, Brigantia, Brigit et, surtout Ana ou Dana. Sous le nom de Belisama elle était vénérée principalement dans le Centre, l’Ouest et le Nord de la Gaule comme le signale ici encore la toponymie : Bellême (Orne), Balesmes (Haute-Marne), Blesmes (Aisne), Blismes (Nièvre), Beleymas (Dordogne).
« On sera particulièrement attentif à la forme réduite du nom : Belisa qui, par l’intermédiaire Belsa a donné son nom à la Beauce, car la Beauce, chère au poète Péguy, est le pays de Chartres, l’un des plus célèbres sanctuaires de la Vierge noire, ce qui donne à penser que la virgo paritura qu’y honoraient les Druides était Belisama, la Grande-Mère sous ce nom. »
(2) Mey en vieux teuton signifie puella, fille. Meymænd (mois de mai) signifie mois consacré aux filles. Les garçons décorent la façade de leur demeure de branches de feuillage.

LE CULTE DE L'ESPRIT RESTITUÉ : LE FEU SACRÉ
Nous avons vu que du nom de Bélisama (Vénus) on a fait Basilique. C'est que cette Déesse va réorganiser l'ancien culte, jadis institué par les Mazdéens.
Le nom grec du feu est Pyr, d'où Pyramis, en égyptien Pyramide. Donc les Pyramides étaient des Temples sacrés dans lesquels on se cachait et qui étaient construits de façon à en rendre l'accès impossible à ceux qui n'étaient pas initiés.
Le mot Pyr est phrygien.
Dans l'Edda suédoise, le feu est nommé fyr ou fur ; les Grecs, dit-on, prononçaient pyr comme nous prononçons pur.
Il existait en Orient des Temples du feu qu'on appelait Pyres. Il s'agissait du feu symbolique représentant l'Esprit.
C'est parce qu'il y avait des Temples du feu sur les montagnes qui séparent l'Espagne de la France qu'on les a appelées Pyrénées, et non parce qu'elles furent embrasées. Ces montagnes servirent de refuge aux femmes persécutées ; partout où elles étaient, celles-ci établissaient ce que, symboliquement, on a appelé le culte du feu, du Feu sacré.
Pyrénée fut le surnom de la Vénus adorée dans les Gaules, et, du reste, la mythologie nous dira que Pyrène, fille du roi Babrycinus, donna son nom aux montagnes de l'Ibérie.
La femme, pour échapper à l'homme, se cache sur les montagnes élevées, d'où l'on peut voir venir l'ennemi, ou dans des cités bâties au milieu des lacs, ou bien dans des lieux fortifiés , à l'embouchure des fleuves. Ces lieux de refuge des femmes étaient interdits aux hommes. Un retranchement sacré s'appelait Mound, d'où le mot Mundus (pur) donné à ceux qui étaient dans le retranchement, et in-mondus (impur - immonde) à ceux qui étaient dehors.
En grec, le mot latin mundus se traduisait par kosmos. Mais les hommes pervertis retourneront la signification des mots ; pour eux, mundus viendra de in et undu (dans l'onde, allusion au déluge), et on opposera ce mot au mot kosmos qui servait à désigner le monde féminin.
On exprimait cette séparation des sexes qui se produisit partout par un langage spécial. En Egypte, les villes des hommes révoltés étaient appelées Villes des morts.
C'est partout la même opposition : le Ciel et la Terre, d'où naîtront les idées de Paradis et d'Enfer.
Ceux qui vivaient dans le mundus des hommes étaient des Mânes, tandis que ceux qui vivaient dans le kosmos étaient des Déas.
Les Prêtres, qui cacheront toute vérité, diront qu'il s'agissait d'un endroit où l'on va après la mort, alors qu'il s'agit d'un régime terrestre. Ainsi les Paradis furent dans maints endroits a la fois, comme les Enfers, qui étaient les villes où régnait l'homme pervers. Il y eut un Tartare au Nord, comme il y eut un Shéol chez les Israélites, un pays des ombres chez les Egyptiens, et le régime masculin s'étendant devait envahir le monde et, peu à peu, supprimer ce qui restait des Champs Elysées c'est-à-dire des anciens empires gynécocratiques.

LE TEMPS DES GAULOIS
Les historiens appellent cette époque l'âge du fer. Ils la divisent en deux sous-périodes.
La première, qui s'étend depuis l'apparition du fer en Europe (vers l'an 900) jusqu'aux environs de 500, s'appelle civilisation hallstattienne, du nom d'une nécropole célèbre, Hallstatt, située dans l'ancienne Norique, actuellement en Haute-Autriche (Dottin, Etudes sur l'antiquité celtique, p. 42).
La seconde est l'époque de la Tène, ainsi nommée d'une sorte de blockhaus sur le lac de Neuchâtel ; c'est le second âge du fer, où les progrès de la métallurgie développent à la fois l'industrie et le commerce extérieur, et qui s'étend de 500 au début du 1er siècle de notre ère.
La monnaie apparaît. On construit des Oppida. C'est à cette époque que se rattache la civilisation décrite dans les épopées irlandaises du cycle d'Ulster.
L'âge du fer a mauvaise réputation. Voici comment il est décrit par Ovide :
« Le dernier âge est l'âge du fer.
« A l'instant tous les crimes se font jour, dans ce siècle d'un plus vil métal ; la pudeur, la Vérité, la bonne foi prennent la fuite ; à leur place régnent la ruse, l'artifice, la trahison, la violence et la coupable soif de posséder. Le nautonnier abandonne sa voile aux vents, sans bien les connaître ; les arbres, après avoir longtemps séjourné sur la cîme des monts, transformés en vaisseaux, bravèrent des flots inconnus. La terre avait été jusque là commune à tous, comme l'air et la lumière ; lors le laboureur défiant entoura son champ d'une vaste limite. On ne se contenta plus de demander à la terre féconde les moissons et les aliments nécessaires ; on descendit jusque dans ses entrailles, et les richesses qu'elle y tenait cachées près des ténèbres du Styx, tirées à la lumière, donnèrent l'éveil à tous les maux : bientôt se montre le fer si nuisible, l'or plus nuisible encore, la guerre qui les prend l'un et l'autre pour instruments et dont la main, rougie dans le sang, secoue des armes bruyantes. On vit de rapines : l'hôte redoute son hôte et le beau-père son gendre ; rarement l'union règne parmi les frères ; l'époux trame la perte de son épouse et celle-ci la perte de son époux ; les marâtres cruelles préparent de mortels poisons ; le fils cherche d'avance à connaître le dernier jour de son père ; la piété vaincue succombe ; et la Vierge Astrée abandonne enfin la terre arrosée de carnage, lorsque déjà tous les dieux l'ont quittée. »

INVASION DES GAULOIS
C'est plusieurs siècles après le schisme de Ram que nous voyons les Gaulois envahir la terre celtique. Henri Martin les représente comme des hordes venues d'Asie. Il dit : « C'étaient les sujets nomades ou errants qui ne cultivaient pas la terre et qui étaient de la famille des Touraniens, des Tartares et des Russes moscovites, et ces Scythes étaient conduits par des guerriers aryens de notre race qui avaient pris leur coutume.
« Les Kymris cédèrent devant le flot envahissant, et la plupart d'entre eux s'en allèrent en corps de nation vers le nord et vers le couchant et passèrent jusque dans l'île qui reçut d'eux le nom de Bretagne ( l'Angleterre).
« Il y eut de grandes luttes et de grandes mêlées entre les anciens Celtes et les nouveaux Gaulois. » Henri Martin nous parle d'une émigration qui eut lieu 8 ou 9 siècles avant notre ère. Il dit : « Les Bretons de France et d'Angleterre sont un rameau de la souche des Kymris. On croit que des tribus de ces Kymris ou de ces Bretons s'étaient déjà mises en marche vers l'Occident 8 ou 9 siècles avant notre ère, avec un autre peuple, leur allié, nommé Vénète, duquel descendent les gens de Vannes en Bretagne et de Nord-Galles en Angleterre. Les Vénitiens et les Slaves sont issus d'une autre branche de ces Vénètes, qui n'ont pas pris la langue celtique des Gaulois comme ont fait les Vénètes de Vannes et de Galles. »
Les Gaulois qui envahirent la Celtide furent d'abord appelés Kalata, mot qui signifie « qui marche en conquérant ».
Dans ces invasions de peuples révoltés contre l'ancien régime qui représente l'ordre et le travail régulier, les nations établies sous la loi maternelle sont en infériorité évidente et ne peuvent pas lutter contre les envahisseurs qui les attaquent en grands corps d'armée.
Les peuples féministes ne sont pas organisés pour la lutte, ils sont répartis sur la terre en tribus qui se soutiennent faiblement les unes les autres.
Les Gaulois gagnèrent donc le dessus dans le nord et dans l'ouest de la grande Celtide. Les anciens habitants restèrent maîtres dans le centre, dans l'est et dans le midi.
Mais la terre qu'ils avaient été contraints de partager avec les nouveaux venus leur sembla désormais trop étroite, et 300.000 des anciens Celtes partirent avec leurs femmes et leurs enfants pour aller conquérir des terres nouvelles.
La moitié passa le Rhin, traversa la grande forêt dont la Forêt Noire d'aujourd'hui n'est plus qu'un faible débris et s'établit dans la région du Danube, depuis les monts Carpathes jusqu'à la mer Adriatique, c'est-à-dire depuis la Pologne jusqu'à la Dalmatie.
C'est du mot Kymris que provient le nom altéré de la fameuse presqu'île de Crimée.
Ces événements s'échelonnent dans le millénaire qui précéda le Christianisme. On donne une date, 587, qui serait celle de la fondation des Etats celtiques sur les bords du Danube.
Les nouveaux venus étaient des hommes de guerre ; ils venaient armés de la lance. Henri Martin les appelle « un peuple guerrier ».
« Les hommes de la lance ne croyaient bien à eux, nous dit Gaius, que ce qu'ils avaient acquis par la lance ; ce qui leur fit même donner le nom de mancipatio, manucaptio, prise avec la main. »

ORIGINE DU MOT GAULOIS
Plusieurs étymologies ont été données. Voici celle qui est proposée par Fabre d'Olivet (L'Etat social, t. II, p. 244).
Le vieux mot français ost signifie un peuple, une multitude armée ; il s'écrit ask, osk ou esk. Le mot armée en dérive.
Le mot wander, réuni au radical esk, signifie un peuple errant ou égaré. Il vient du primitif wand, tourbillon. De cette dernière racine se sont formés le saxon, l'anglais, l'allemand wind, le français vent et le latin ventus. Du radical Osk (un peuple) dérive notre terminaison moderne ois. On disait autrefois Gôl-osk ou Ghol-land-isk pour Gaulois ou Hollandais (Ghol, bas ; land, pays; osk, peuple). Et cela voulait dire peuples des terres basses. Pôl-land-ost est devenu Polonais, peuples des hautes terres.
Gaule est formé de Gallia, corruption de Wallia.
Les Grecs et les Romains n'ont pas la lettre W dans leur écriture, ce sont eux qui ont changé les mots celtiques en remplaçant les noms commençant par W par des noms commençant par un g ou par un v simple. C'est ainsi que Wallia, Wallon sont devenus Gallia. Wallia dérive de Wallien, Wal-land ou Wel-land. Les Allemands disent Welsch-Land, Walsch-Land ; tout cela signifie bon pays, pays heureux.
Wal-halla signifie paradis.
Les Scandinaves ont toujours donné à la France le nom de Wal-land.
Les Romains désignent les Celtes par le nom de Galli, ceux d'Occident comme ceux d'Asie Mineure.
Gallus, d'après W. Stokes, signifierait « étranger ». (Dottin, Etudes sur l'antiquité celtique, p. 14, note.)
Les Gaulois sont appelés Galathoi par les Grecs. On a cherché la racine du mot galathoi dans gala (lait), alors qu'il fallait la chercher dans gala (galanterie) (1) ; la terminaison thoi l'indique, c'était le culte du divin (2).
C'est pour imiter l'oiseau phénix qui est un emblème féminin et aussi la colombe de Vénus que les Gaulois prendront pour emblème un coq (gallus), qui est un symbole masculin. Ils vont pratiquer le système du renversement, qui consiste à mettre au masculin ce que les Celtes avaient mis au féminin. Mais le coq sera mal vu, ses partisans seront appelés des coquins (3).
C'est ainsi que, à ceux qui leur montraient que l'ancienne Wallia était le pays heureux, ils opposaient la Gaule comme étant le bon pays, le pays heureux.
Gallia apparaît pour la première fois dans les Origines de Caton, vers l'année 168 avant notre ère.
La Province fut appelée « Gallia Bracata ». Le nom de Celtes, qu'il faut prononcer Keltes, était une appellation qui désignait la supériorité. Il resta pour désigner les réguliers du régime primitif. Mais ceux qui s'étaient révoltés contre la loi morale étaient désignés sous le nom de Scythes, qui signifiait, au contraire, les impurs, les réprouvés. Cependant, les Scythes étaient des descendants des Kymris. Donc les Celtes et les Scythes n'étaient au début qu'un même peuple boréen, désigné différemment pour les louer par les uns, pour les réprouver par les autres.
Il n'est donc pas étonnant que l'on ait fait confusion entre Celtes et Gaulois ; ce n'est pas une différence de race qui les sépare, c'est surtout une différence de vie morale.
« Les historiens latins, dit M. Rougon, donnent à ces hommes les noms de Gaulois ou de Celtes d'une manière indifférente. Les Grecs paraissent préférer les mots de Celtes et de Galates, les Latins celui de Gaulois. Les anciens, surtout à l'époque où les Gaulois étaient bien connus, les distinguent très soigneusement des Germains également blonds ; d'où il faut conclure que les Celtes ou Gaulois étaient une race blonde particulière et les Germains une autre, mais toutes deux aryennes d'origine. Plus tard, il fut question d'une Gaule Belgique et d'une autre Celtique ; ceci a fait penser qu'il y avait deux races gauloises, une gaélique et une kymrique. On a même été jusqu'à soutenir que les Gaëls étaient bruns et les Kymris blonds. »
Les Grecs et les Romains, qui ont toujours confondu les Celtes et les Gaulois, parce que les uns et les autres venaient du Nord, désignent les Gaulois de la mer du Nord par le mot Cimmériens.
Les Grecs faisaient sur eux et sur leur pays mille récits contradictoires et tantôt les redoutaient comme les fils de la nuit et les protégés des dieux infernaux (les Déesses pour les misogynes), tantôt les célébraient comme ayant propagé jusqu'en Grèce le culte du Dieu de la lumière et de la poésie (Hemœra), que les masculinistes confondront avec Apollon. Les Grecs ne distinguaient pas entre les Celtes et les Gaulois.
(1) Le mot galanterie vient de gala qui, dans le haut allemand, a signifié, d'abord, pompeux. Il indiquait la pompe avec laquelle on devait recevoir la Femme et se comporter vis-à-vis d'Elle. C'est par corruption que ce mot est arrivé à avoir une signification sexuelle avilissante pour la femme.
(2) Le « Thé » des phéniciens, d'où « Thée », « Théa », « Théos », veut dire parfait, et se place avant ou après les noms de femmes : Thé-mis, Astar-Thée ; de même, le « Ti » chinois que l'on retrouve dans le principe divin (féminin), appelé « Chang-Ti », indique la « souveraineté suprême ».
(3) Le coq doit son nom à une onomatopée tirée de son cri. Il s ’appelait encore « jal » au Moyen-Age.

TRANSFORMATION DES INSTITUTIONS ET DES MŒURS
C'est par la puissance de l'Esprit et par la science des Déesses que la Celtide avait civilisé le monde. La nouvelle puissance guerrière des hommes, qui se répandait sur l'Europe, allait changer le régime social.
Dans l'ancien système de gouvernement, la Déesse régnait, mais elle avait des auxiliaires, qui l'aimaient et la respectaient. Un homme, près d'elle, était son lieutenant, il servait d'intermédiaire entre elle et le peuple et transmettait ses ordres.
En Chaldée, on l'appelait Lou-gal (homme grand) ou Patesi, ce qui veut dire « soumis à la Déesse ».
Chez les Hébreux, à côté de la Déesse Hevah se trouve celui qu'on appelle son Maléak, qui deviendra, plus tard, roi lui-même sous le nom de Mélek.
A côté de la Voluspa, chez les Celtes de la Scandinavie, on trouve le Kang, qui deviendra le King (roi). A Rome, à côté de la Bona Dea est le Prator Consul. Mais, d'abord, on arrive par cette substitution à créer de nouvelles personnes ou hypostases divines.
Ces unions d'une Déesse et d'un mortel élèvent l'homme en le faisant participer aux privilèges de la Divinité. Cela lui donne de l'orgueil ; il se croit un demi-Dieu, puisqu'il est la moitié d'une Déesse. C'est ainsi qu'apparaissent dans les mythologies des couples divins ; c'est la création de l'andro-gyne, qu'il va bientôt franchir, car, aussitôt qu'il entre dans la constitution du couple, il met son nom le premier.
Les Judéo-chrétiens exagérèrent cette nuance ; on en vint, dans presque tous les vieux récits, à substituer à la Déesse cette espèce de seconde personne de la Divinité. Le nom joua un rôle analogue ; le nom de la personne, c'est la représentation de la personne elle-même. On supprima peu à peu le nom de la Femme, le fondant dans celui de l'homme. C'est de là que sont sorties les trinités ; on mettra à côté de la Déesse-une un Père et un Fils, et, si on arrive à représenter la Mère par le Saint-Esprit, il ne restera plus de femme du tout. Partout, les premiers « Rois » ne sont d'abord que les médiateurs entre le peuple et la Divinité.
« Dans l'âge héroïque, dit de Pouqueville (dans La Grèce), les rois prétendent tenir leur puissance des dieux, dont ils sont les représentants. Obtenir la faveur des Dieux est leur plus grand bonheur. »
Les premiers historiens qui relateront ces origines ne pourront pas dénaturer les faits aussi complètement que les modernes ; leurs récits seront une transition entre la vérité et le mensonge, un compromis.
On citait encore les noms des femmes, ce qui rendait les récits compréhensibles ; dans le système moderne, on n'en a laissé aucun, tout se passe entre hommes, alors l'histoire devient absurde.
Ainsi, nous allons trouver chez les Gaulois, jusqu'aux Francs, un roi suprême, inamovible, c'est-à-dire une Reine.
Leurs prêtres, les Druides, étaient supérieurs aux chefs dits petits rois ; mais ils obéissaient au Roi des Rois, c'est-à-dire à la Reine des Rois.
Les petits rois portaient le nom de cunic (cun-ic), ils étaient révocables.
La terminaison ic servait à former des diminutifs. On prononçait aussi Conic ou Konig (d'où Kœnig, King, etc.).
Dans les anciennes ballades des deux Bretagnes, on chante le monarque des temps primitifs, qu'on appelle cône, conan ou codon. Faut-il faire remarquer que c'est de cône qu'on fera gone ?
La ville de Cæn s'appelle de son nom primitif Cathom ; c'est de là qu'est venu le mot cathare, d'où Catherine.
L'intendant de la Reine s'appelle Gondioc, ce mot vient de gone et dioc qui signifie conducteur, inspecteur, surveillant (de là doge et duc). C'est le lieutenant de la Reine, le gérant, le messager. De gone et de gonic on fait gérance.
Gondiac se retrouve en breton dans goni-dec. Les Burgondes, qui sont les primitifs Bourguignons, se disaient d'abord Borgon-dyn.
(Bor signifie gras, gone femme, dyn homme.)
Bor-gogne a fait Bourgogne, et gogne (de gone) a fait gonia (chez les Grecs gunia). Les Latins en feront Cognât (parenté par les femmes).
Le Melek des Israélites, c'est le Basileus des Grecs homériques, qui marche en tête du peuple un bâton à la main, c'est le Herzog germanique, c'est-à-dire un homme, chef entraînant les autres hommes. On ne peut voir dans ces fonctions que le commencement du régime masculiniste, mais nullement la royauté sous la forme morale ou sacerdotale. Cet envahissement du pouvoir ne répond qu'à l'esprit de lutte qui est dans l'homme.
Chez les anciens Celtes, chaque nation avait un chef militaire chargé de la défense de la Matrie, mot qui a précédé le mot Patrie. Mais ce chef n'avait pas d'autorité dans la nation et on le remplaçait s'il ne donnait pas satisfaction. « Quand les nations gauloises se confédéraient contre l'ennemi, dit Henri Martin, elles élisaient un chef suprême pour le temps que durait la guerre. »
Le gouvernement de l'homme qui se prépare est une rébellion contre les choses de l'Esprit, qu'il ne comprend pas, et une affirmation de ses instincts profonds, système qui en s'accentuant va transformer le monde.
L'homme est roi dans un Etat gouverné par la force. Mais la femme, qui a en partage l'esprit de justice, était reine dans un Etat gouverné par le droit.
Ce fut une révolution qui créa l'origine lointaine de la séparation des pouvoirs, en inaugurant une domination mâle en face de l'autorité morale de la Femme qui était le vrai sacerdoce. On peut dire que le principe du pouvoir fut créé et par là la lutte entre ce pouvoir et l'autorité religieuse dans son sens primitif, c'est-à-dire moral, qui devait changer de signification quand la Théogonie vaincue fut remplacée par l'Anthropomorphisme. C'est ce pouvoir civil, c'est-à-dire anti-religieux et anti-féministe, qui créa la politique et tua la civilisation.

TRAVAIL ET INDUSTRIE
Le caractère dominateur de l'homme, en prenant une part plus grande dans la vie sociale, allait créer le despotisme, sous ses formes diverses : l'esclavage ; l'assujettissement de la Femme par le mariage jusque là inconnu ; l'assujettissement de l'homme par la guerre, par la conquête du plus fort. Mais en même temps ce régime nouveau allait affranchir l'homme du travail régulier, car celui qui a des esclaves pour faire sa besogne ne fait plus rien d'utile. Ce qui fait faire cette réflexion à de Grave : « Telle est la nature de l'homme qu'il doit être commandé et forcé à faire le bien. » (Champs Elysées, t. III, p. 57.)
Dans le premier régime social, le travail était organisé, les femmes étaient honorées, respectées, en possession du droit naturel et de tous les biens qu'il donne ; elles disposaient du travail des membres de la famille qu'elles dirigeaient ; c'étaient elles qui faisaient travailler les hommes tant qu'ils restaient dans le régime légal ; chaque sexe avait le rôle qu'implique ses facultés : aux hommes les gros travaux qui demandent la force musculaire, aux femmes les occupations qui exigent moins de force, mais plus de réflexion.
Et, dans cette première organisation familiale, la femme travaille bien plus que l'homme.
« Dans les tribus, on faisait tous les travaux de l'agriculture ; on savait cultiver les céréales, fabriquer la bière, le vin, élever les animaux domestiques, les porcs, préparer les salaisons, etc. Quantité d'industries datent de cette époque, telle la charrue à deux roues inventée par les Celtes d'Italie. Ce sont les Celtes qui, les premiers, employèrent l'écume de bière (la levure) comme ferment pour lever le pain. Ils inventèrent aussi le crible de crin, les tonneaux de bois cerclés, etc.
« Les Celtes de Gaule inventèrent l'étamage et le placage, application de l'étain et de l'argent à chaud sur le cuivre ; donc ils connaissaient bien la métallurgie ; les hommes exploitaient les mines. Des villes puissantes comme Aix, Arles, Besançon, Reims, Lyon, Paris, étaient remarquables par leur industrie, Nîmes surtout se distinguait.
« Dans ces villes se trouvaient des fabriques de drap, de toile, et un commerce actif existait. Il y avait dans différentes villes des établissements de femmes qui confectionnaient les toiles. Quand les Romains vinrent en Gaule, Rome en tira tous les habillements de ses troupes. Un fonctionnaire fut créé pour surveiller spécialement ses fournitures, et c'est ainsi que nous trouvons dans la notice de l'Empire un Procurator gynœcei Tornacensis Belgicœ secundas. » (Bosc, Les Gaulois, p. 352.)
On ne peut donc pas les représenter comme un peuple barbare, sans industrie.
Il existait déjà chez les Celtes un commerce d'exportation, c'est-à-dire d'échange entre nations.
Mais l'ordre ne devait pas toujours durer : un jour, l'homme se révolta et refusa son travail. Alors, qui va nourrir la femme et l'enfant qui ne possèdent pas la force que les gros travaux exigent ? Puis la question se complique. L'homme qui s'affranchit du devoir familial se livre à la guerre, à la rapine : il bataille et il vole.
C'est le commencement des mœurs des temps héroïques décrits par Bachofen qui dit :
« Dans ces temps où les hommes n'étaient occupés qu'à faire la guerre, les femmes seules pouvaient gouverner, s'occuper des enfants et des biens ; les hommes vivaient séparés d'elles, faisant des incursions lointaines, cherchant des butins, fuyant le travail. Mais les femmes voulaient les retenir et souvent elles achetaient leur retour par de riches présents. »
Le chemin que les hommes parcouraient était semé de dévastations ; ils étaient nomades, vagabonds. Tantôt leur départ était déterminé par des querelles à l'intérieur, tantôt par l'invasion de peuples étrangers.
Les femmes gardaient les enfants et le bétail. Elles étaient protégées par leur inviolabilité qui éloignait d'elles les ennemis.
Les femmes avaient la richesse familiale. Les filles seules en héritaient.
Les hommes, étant exclus de la propriété, donnaient leur vie aux entreprises du dehors ; ils s'affranchissaient de tout souci de la famille. Strabon dit : Les hommes portaient toute leur fortune dans leur arc et leur lance.
Chez les Cariens, les hommes, au lieu de se livrer à la guerre, exercent déjà une profession, quoiqu'ils la croient dégradante. Ils pensent que, hors la guerre et la rapine, tout ce que fait l'homme le rabaisse ; ils croient que le travail les fait déchoir et les rend méprisables aux yeux des femmes.
La femme était rehaussée par l'autorité dont elle jouissait et par l'avantage qu'elle avait d'hériter seule. Par là, elle dominait l'homme.
Elle choisissait celui sur lequel elle était appelée à exercer cette domination ; c'était elle qui faisait le contrat, ce qui fait dire à Henri Martin : « La loi de la tribu, comme on le voit dans la vieille loi des Celtes d'Irlande, était bonne et protectrice pour les faibles, pour les vieillards, pour les femmes et pour les petits enfants. » C'était la loi matriarcale, loi de famille étendue à la tribu.
Ce qu'Henri Martin complète en ajoutant : « A côté de la loi de famille, il y avait la loi de patronage et la loi d'amitié. Les faibles se mettaient sous le patronage des forts et les servaient pour être protégés par eux ; les vaillants faisaient ensemble des amitiés, des confréries où il n'y avait ni supérieurs ni inférieurs. »
La paternité ne donnait aucun droit à l'homme. Elle n'était jamais mentionnée, parce qu'elle était ignorée. César lui-même nous dit que le fils reste sous la direction de sa mère jusqu'à 16 ans ; alors seulement il est admis dans la société des hommes, mais il ne sait pas qui est son père. Longtemps même on ignora les lois de la génération, et l'enfant qui ne connaissait que sa Mère ne savait pas qu'il avait un père.
La filiation maternelle était considérée comme divine. On disait Divo-gena (fille divine), etc., mais ces noms seront mis au masculin par les auteurs modernes.
Les classiques ne veulent pas reconnaître cet ancien régime et expliquent l'histoire en l'appuyant sur le Droit romain qui ne devait naître que plusieurs siècles après l'invasion des Gaulois dans la Celtide. Ainsi, voici Henri Martin qui, pour ne pas avouer que la fille seule hérite, la représente comme étant le fils dernier-né (on sait que l'homme est le premier-né). Et c'est ce dernier-né, dit-il, qui aura la maison paternelle. Il ose dire : « L'égalité était entre les enfants mâles, si ce n'est que le dernier-né avait la maison paternelle, comme étant le plus faible. »
D'abord, il n'y a pas de maison paternelle, le domaine appartient à la Mère (Domina vient de domaine), et il passe de mère en fille ; c'est le nid qui abrite la famille et la fait vivre. Puis il n'y a pas de raison pour qu'un fils dernier-né soit plus faible que les autres.
Le même auteur, faisant confusion entre les dates, les pays et les lois, écrira ceci : « La jeune fille avait droit de choisir son mari à sa volonté, tandis que, chez d'autres peuples, la fille était donnée et quelquefois même vendue par son père. »
Ces mœurs barbares ont été le résultat du nouveau régime masculin ; il a fallu du temps et beaucoup de sang versé pour les introduire dans le monde. On ne change pas subitement les mœurs d'une race et les institutions d'un peuple, ancrées dans la nature humaine et cimentées par un atavisme tenace qu'on ne vaincra jamais.
Diodore de Sicile nous parle de la grandeur d'âme des femmes de la Gaule, qui rivalisent avec les hommes pour la grandeur de leur taille.
Ce détail prouve que c'était une race jeune. La différence de taille entre l'homme et la femme s'accentue pendant et par le fait de l'évolution sexuelle.
Au début même la femme, qui représente la jeune fille de 12 à 16 ans, est plus grande que le garçon du même âge, dont la croissance commence, quand celle de la fille s'arrête.
Donc, nous allons voir la Celtide, cette terre glorieuse qui a tant fait parler d'elle, livrée aux luttes de sexes qui vont se dérouler sur son sol privilégié de la Nature. La grande lutte de la force contre l'Esprit ne lui sera pas épargnée.
Cependant, cette galanterie dont les modernes se targuent a existé réellement, dans un passé lointain ; bien réellement la Femme a été honorée, respectée. C'étaient alors les temps heureux, le malheur n'avait pas encore pénétré dans le monde, la Nature connue, admirée, n'était pas encore violée dans ses lois sacrées. Mais ce culte de la Femme devait soulever des jalousies. La réaction fut féroce.
Malgré toutes les qualités et tout le prestige de la femme celte, nous allons retrouver dans ce pays comme partout l'homme grand, mais petit d'esprit, qui veut assujettir la femme à ses caprices. Nous avons déjà trouvé la preuve des efforts faits par celle-ci pour échapper à sa domination, employant la ruse, c'est-à-dire l'esprit, puisqu'elle n'a pas la force pour échapper à la persécution. Tout ce chapitre des luttes de sexes remplit l'histoire de cette époque qu'Ovide a appelée « l'Age du fer ».
De Grave fait remarquer comme une chose singulière que « les auteurs tant anciens que modernes, qui ont traité des mœurs des Gaulois et des Germains, n'ont rien dit au sujet du mariage. César, Strabon, Pline, Tacite, etc., passent sous silence cet intéressant sujet.
« Pelloutier, qui a fait un ouvrage sur les mœurs des Celtes, en deux volumes in-quarto, où il entre souvent dans les détails les plus minutieux sur quelques-uns de leurs usages, ne touche pas la même matière.
« Il n'est pas croyable qu'un peuple, chez lequel on trouve la source de toutes les bonnes institutions sociales, ait manqué de régulateur sur un objet si intéressant.
« La raison de cet incompréhensible silence, c'est que la sanctification du lien du mariage des Celtes se pratiquait dans les cérémonies religieuses, sous une forme mystique dont les étrangers ignoraient la nature » (Ch. EL, t. III, p. 199).
Tacite dit que chaque Germain n'avait qu'une femme, et César dit qu'on regardait comme une chose honteuse d'avoir connu une femme avant l'âge de 20 ans.

ORIGINE DE LA MONNAIE CHEZ LES CELTES
« Avec les métaux précieux qu'ils trouvaient dans leur pays, les Gaulois fabriquèrent des monnaies aussitôt que les commerçants grecs leur firent connaître ce moyen d'échange. Luernios, père du roi Bituitos (121 avant notre ère), parcourait la plaine sur un char d'où il semait de la monnaie d'or et d'argent que son cortège ramassait (Strabon, IV, 2, 3). Nous avons conservé des milliers de monnaies gauloises, dont les variétés sont presque aussi nombreuses que les pièces mêmes. A. de Barthélémy a essayé d'en établir le classement chronologique. Les plus anciennes sont celles de Marseille (Strabon) ; elles ne peuvent guère être antérieures au Vème siècle avant notre ère, époque où furent conclus entre diverses villes grecques, parmi lesquelles Phocée, des traités monétaires. Un autre groupe de monnaies sont imitées de celles de Rhoda et d'Emporium (Ampurias), colonie de Marseille, deux ports situés au nord-est de l'Espagne ; les monnaies de ces deux villes et certaines monnaies marseillaises ont une grande analogie avec les monnaies frappées en Sicile dès la fin du Vème siècle ; elles peuvent avoir été introduites en Gaule dès le IVème siècle. Les monnaies de Marseille, d'Emporium et de Rhoda sont en argent. Les premières monnaies de bronze semblent avoir été fabriquées entre les Pyrénées et l'Hérault vers la fin du IIIème siècle ; elles se rapprochent singulièrement des pièces de Phintias d'Agrigente (287-279) et de Hiéron II de Syracuse (275-215). Quant au numéraire d'or, on n'en a pas constaté l'usage dans le Sud ni dans le Sud-Ouest de la Gaule. Il se répandit en Gaule peut-être dès la première moitié du IIIème siècle. Il procède des statères de Philippe II, roi de Macédoine (360-336 avant notre ère), représentant sur un côté une tête d'Apollon de profil et sur l'autre un char à deux chevaux, ou des statères de Tarente portant sur la face une tête d'Amphitrite et sur le revers les Dioscures à cheval.
« Les premières imitations furent assez exactes, mais peu à peu les graveurs altérèrent leurs modèles au point qu'il est impossible de saisir le rapport qui unit les philippes aux pièces gauloises si l'on n'a pas toute la série des pièces progressivement défigurées. Ces imitations paraissent avoir cessé en Gaule lors de la conquête romaine. Les dernières statères portent les noms de Vercingétorix et de quelques autres chefs. Dès l'époque de l'établissement des Romains dans la Province (118 ans avant notre ère), les deniers de la République servirent de modèle, même pour des monnaies de bronze. Après la conquête de la Gaule, les villes libres et alliées eurent le droit de battre monnaie.
« En Grande-Bretagne, au temps de César, on se servait de monnaie de cuivre ou de fer en forme d'anneaux d'un poids déterminé.

« Les habitants de l'île Silure, en face des Dumnonii (actuel Comté des Cornouailles au sud-ouest de l'Angleterre), ne se servaient pas de monnaie, d'après Solin, et ne connaissaient que l'échange de marchandises.
« Les plus anciennes monnaies recueillies en Grande-Bretagne dérivent des monnaies de la Gaule continentale ; les graveurs se sont efforcés de transformer les types monétaires en figures symétriques d'exécution facile. Dans les oppida et les crannogs de Grande-Bretagne, on a trouvé des barres de fer qui semblent bien être les instruments d'échange dont parle César. » (Dottin, Etudes sur l'antiquité celtique, pp. 215 et suiv.)

LES FÉMINISTES VAINCUS EN PHÉNICIE
La Phénicie était une colonie celtique. Lorsque le régime féministe fut vaincu chez les Celtes, il fut vaincu également chez les Phéniciens.
L'histoire de Didon, quittant son pays avec tout le parti aristocratique (c'est-à-dire gynécocratique), est encore un épisode qui caractérise bien les luttes de cette époque.
C'est son propre frère, Pygmalion, qui veut lui disputer le pouvoir et qui soulève contre elle le parti des masculinistes. Nous ne devons pas nous étonner de ces luttes d'un frère contre sa sœur quand nous avons vu des Reines-Mères attaquées par leurs propres fils.
Didon s'appelait Elissar ; le nom qu'on lui donna plus tard et qui reste dans l'histoire, « Didon », est, dit-on, un surnom qui signifie « la fugitive ». Mais M. Ledrain lui donne une autre signification. Ne faudrait-il pas le rattacher à celui de Daud ou Dod (David) ? Son oncle Séchar (ou Sichée) la défendit contre Pygmalion ; celui-ci le fit assassiner. Didon, ayant échoué dans tous ses efforts pour garder le pouvoir, s'embarqua avec son parti pour l'Afrique et alla fonder une nouvelle ville qui s'appela d'abord Charthada ou Kartha Hadad (ville neuve), en grec Karkêdôn, en latin Carthage. Le peuple de Carthage parlait un langage analogue à l'hébreu. Il avait des Soffetim. Cette émigration d'un peuple sous la conduite d'une femme rappelle la sortie d'Egypte des Hébreux sous la conduite de Myriam (voir l'article sur l'Israélisme). Ces déplacements étaient fréquents. Chaque fois que le parti des gens raisonnables était attaqué, opprimé par le parti des gens déraisonnables, il quittait le pays et allait s'établir ailleurs.
La constitution que Didon établit à Carthage ressemblait à celle des Hébreux sous les Juges. Il y avait un conseil des anciens (Sénat) où les familles les plus importantes étaient représentées par les Mères (les anciennes, Zeqenim), puisque la famille, à cette époque, n'accorde pas encore de place ni de droit au père ; puis un conseil de 110 membres chargé par le Sénat de l'examen des affaires. Les propositions des membres du Conseil étaient soumises à l'approbation de l'assemblée. A la tête du Sénat étaient deux Soffetim (les Sophias, femmes sages que l'on retrouve partout), d'abord nommées à vie ; par la suite, on limita leur mandat et elles ne furent plus nommées que pour un an.
Les Suffètes représentaient l'autorité morale. Les historiens ont tâché de diminuer l'importance de cette autorité et de nous la montrer comme très limitée. Cela nous confirme dans notre conviction que partout les Suffètes sont des femmes, comme les Juges d'Israël.
Ces mêmes historiens nous disent que les Suffètes ne pouvaient commander l'armée, qu'on eût craint qu'ils abusent de leur autorité à l'aide des mercenaires dont ils étaient les maîtres. Cette crainte est une révélation, elle nous montre qu'il y a antagonisme entre les Suffètes et l'armée, entre le pouvoir moral exercé par la femme et la puissance brutale exercée par l'homme : car l'armée, c'est l'homme.
Du reste, Carthage ayant été fondée par une femme qui fuyait le despotisme masculin, il est bien évident que son gouvernement ne pouvait être que gynécocratique. D'ailleurs, les effigies de ses monnaies en sont le témoignage.
La guerre n'était aux yeux des Carthaginois qu'un accessoire, une nécessité, non un but comme chez les nations gouvernées par des hommes. On n'y avait recours que pour protéger les opérations commerciales, non pour faire des conquêtes. Les Suffètes carthaginois étaient des sages qui calculaient, avant d'entreprendre une expédition, ce qu'elle devait coûter et rapporter ; Carthage ne mettait pas son honneur dans la guerre, elle le mettait dans la bonne gestion des affaires, dans la prospérité du commerce, dans l'accroissement de la fortune.
C'était des mercenaires qui étaient chargés de se battre pour défendre les Carthaginois. On les payait le moins cher possible, ce qui prouve que c'était le dernier des métiers. Aussi, ils n'étaient pas toujours facile à trouver, on les engageait un peu partout, sur les côtes d'Espagne, en Gaule, en Sardaigne, en Afrique.
Carthage avait ses généraux pour les commander. Ils appartenaient à la famille des Barca, qui représentait les tendances de l'esprit militaire. Les Barca avaient pour adversaires la famille des Hannon, animée d'un esprit d'ordre, représentant les tendances pacifiques. Ces deux fractions étaient en lutte, les uns poussant à la guerre, les autres voulant la paix. Le peuple flottait entre elles, se laissant aller parfois à céder à un Barca et regrettant sa faiblesse aussitôt qu'un désordre éclatait.
On attribue à Didon la fondation de la citadelle Byrsa et les travaux du port de Carthage, qui était assez vaste pour contenir les plus grandes flottes.
L'agriculture et la marine occupaient surtout les sujets de Didon. Son territoire était assez fertile pour lui permettre d'exporter au loin des céréales. La reine consacrait ses propres enfants au commerce et à la navigation. Les peuples des contrées voisines devinrent ses tributaires, depuis les Syrtes jusqu'au détroit de Gadès. Dans leurs excursions lointaines, les Carthaginois rivalisaient avec les Tyriens, mais, pour éviter les conflits, les Carthaginois portaient leurs entreprises à l'Occident, laissant l'Orient aux Tyriens. Ils se partageaient la Méditerranée et le monde commercial.
Les Carthaginois franchirent les Colonnes d'Hercule (le détroit de Gibraltar) et s'avancèrent au Nord jusqu'en Irlande, au Sud jusqu'au Sénégal.
La religion des Carthaginois resta celle des Phéniciens. Astarte s'y retrouve dans des inscriptions votives offertes à Tanit, la Déesse virginale, qui est nommée sur une centaine d'inscriptions, qui portent cette dédicace : « A Dame Tanit » ou « à Notre-Dame Tanit ».
On a trouvé, en grand nombre, à Carthage des stèles votives qu'on a comparées aux ex-votos catholiques. Elles avaient, du reste, la même origine : un homme en danger, en mer surtout, implorait la Déesse Tanit et, s'il échappait, lui faisait un don (bélier, agneau, fruits). Une petite stèle, encastrée dans la muraille du temple, en faisait foi.
En voici une comme exemple, quoiqu'elle date de l'époque où au culte de Tanit fut annexé le culte de Baal :
A la Dame Tanit, perle de Baal,
Et au seigneur Baal-Hammon,
Est offert ce qu'a voué...
(ici le nom du donateur),
Car elle a entendu sa voix, elle l'a béni.
(Cité par M. Leblois dans Les Bibles, T. II, page 91, planche VII)
A la fin du IVème siècle de notre ère, on continuait, à Carthage, à vénérer la Déesse Tanit, quoique les Carthaginois, comme tout le Nord de l'Afrique, furent déjà convertis au Christianisme.
Ce culte ne cessa jamais. Tous les attributs de la Déesse Tanit passèrent à Marie ; le nom seul changea et les temples passèrent d'un culte à l'autre sans secousse. On se contenta de modifier l'inscription qui surmontait la porte d'entrée, sans rien changer à la disposition intérieure.

GADÈS
Les Phéniciens portèrent leur civilisation et leurs croyances dans de nombreuses colonies, ils voyageaient facilement par terre et par mer. Nous les retrouvons peuplant l'Atlas, l'Ibérie, les îles de l'Italie, la célèbre île de Phéaciens, les côtes de la Grèce, l'Asie Mineure, les Cyclades, les Sporades, Chypre, Malte, les environs du lac Triton et jusqu'à l'Irlande.
En Afrique et en Espagne, ils étaient connus sous le nom de Thérésiens. Partout, sur les côtes et dans les îles, ils marquèrent leur passage par des établissements utiles. Ils fondèrent des comptoirs qui furent une source de fortune. Hérodote raconte qu'il a vu à Thèbes des mines dont les Phéniciens avaient commencé l'exploitation.
Les Mystères célébrés dans les îles de la Meuse et qui se répandirent au loin, se retrouvent dans ceux qu'on célébrait à Gadès.
Gadès (aujourd'hui Cadix) était la ville-lumière qui répandait son éclat dans le monde entier ; elle était célèbre entre toutes. Cadix, aux bouches du Bétis (Guadalquivir), tient le premier rang, d'après Pline, dans la juridiction d'Hispalis (Hispalis, de Pali, les Celtibères). Elle tire son nom du celtique gat qui signifie embouchure sacrée (gad, en hébreu, signifie fortune), en sanscrit gaut.
Dans les embouchures sacrées, comme dans les temples, on nourrissait des chats, l'animal aimé des Femmes ; c'est sans doute pour cela qu'il tire son nom du mot gat (en espagnol gato, gata).
A propos du Temple célèbre de Gadès (Cadix), Hérodote dit que des navigateurs de Samos, revenant du pays des Hyperboréens, arrivèrent à Gadès, où ils firent des bénéfices inespérés ; par reconnaissance, ils consacrèrent à la Divinité du Temple une coupe merveilleuse sur laquelle étaient sculptés des griffons. Philostrate en parle dans sa légende d'Apollonius de Tyane :
« On y voyait, dit-il, des colonnes chargées d'hiéroglyphes, un olivier en or, dont les fruits étaient d'émeraudes ; aux côtés du portique étaient, comme aux Temples de Jérusalem et de la Déesse Syrienne, deux colonnes en bronze, hautes de huit coudées (elles s'appelaient aussi Boaz et Jakin). Les Temples de Tolède et de Sagonte étaient bâtis sur ce même modèle et rivalisaient d'art et de richesse. »
Les Gaditanæ du Midi et les Walkyries du Nord ne diffèrent pas. Les Bayadères de Gadès, qui furent fameuses chez les Romains, reçurent le nom de Gaditanæ, lequel se transforma peu à peu en Gætanæ et devint, finalement Gitana, derniers vestiges des anciens peuples théogoniques.
Le Temple de Gadès fut plus tard masculinisé. Melkarth y régna ainsi qu'Hercule.

L'ITALIE AVANT ROME
Une haute civilisation régnait en Italie avant la fondation de Rome. « Elle était due aux Etrusques ou Toscans, qui élevèrent des cités somptueuses, qui portaient des costumes splendides et qui ne furent jamais surpassés dans la civilisation et dans les arts », dit. Henri Martin (Hist. de Fr., p13).
L'Etrurie n'était qu'une colonie celtique, que l'on trouve vers le Xème siècle en Italie. Elle garde jalousement l'organisation du gouvernement féministe comme la Thrace.
Fabre d'Olivet nous dit (Etat social, T.. II, p. 22) : « Avant que les Romains fussent constitués en République, ils dépendaient des Etrusques, appelés aussi Tusces, Tosques et Toscans. »
Les vice-rois qui, plus tard, viendront gouverner les Romains, seront appelés Tarquins.
Le nom de Tarquin se compose de deux mots phéniciens, Tôr-Kin, celui qui régularise la possession ou la conquête (Tôr, loi, King, roi).
On fait vice-rois, Romulus, Quirinus et autres personnages légendaires qui ne sont représentés que comme des révoltés et non des envoyés. Du reste, on nous dit que les vice-rois arrivèrent, à se rendre indépendants des Larthes étrusques. Tite Live nous dira que ce peuple venait de la Rhétie environ 434 ans avant la fondation de Rome, qu'il place en 753 (donc 1187 ans avant notre ère).Il aurait franchi le Pô, l'Apennin, et se serait établi dans la contrée située entre les Alpes et le Tibre.
Nous n'avons pas besoin de tant de peuples émigrés pour expliquer l'histoire. Tous ont une origine commune et une même évolution, tous ont, au début de leur vie sociale, des institutions sages, des éléments d'ordre, tous ont vécu paisiblement dans des tribus matriarcales ; aussi, chez les Etrusques, comme en Asie, comme en Afrique, la filiation s'énonce par la lignée maternelle, l'enfant porte le nom de sa Mère et ne connaît pas son père.
La religion qui régnait en Etrurie était, comme partout, théogonique ; c'est d'elle que Rome reçut ses premières croyances ; on les retrouve mêlées à la mythologie romaine.
Les Pères de l'Eglise, qui n'aiment pas le culte théogonique qu'ils sont venus détruire, appellent l'Etrurie « la Mère des superstitions » ; ils voient dans sa religion « un culte étrange » ; c'est que, en effet, le culte du principe féminin est tout le contraire du culte du principe masculin.
Les Etrusques, malgré, ou plutôt, à cause de cette étrangeté, devinrent le peuple le plus prospère de l'Italie. Les Etrusques Tyrrhéniens, ou Rha Sena, envoyèrent des colonies dans les contrées voisines ; ils lancèrent des flottes sur la mer Tyrrhénienne et dominèrent sur la péninsule.
Herculanum, Pompéi et d'autres grandes villes furent fondées par les Etrusques. Vers 800, l'Etrurie était la puissance dominante de l'Italie.

FONDATION DE ROME EN 746
Ce qu'on enseigne à la jeunesse dans les écoles est pris dans l'histoire romaine de Tite-Live, qui était caractérisée par un masculinisme intense et un surnaturel extravagant.
C'est par Tite-Live, historien latin, né à Padoue 59 ans avant notre, ère, mort 17 ans après, que nous savons quelque chose sur les commencements de Rome. Son histoire romaine, dont il reste à peine le quart, comprenait 140 livres ; il en reste 35, dont le dernier, qui est le 45ème, finit à l'an 585 de Rome.
Son ouvrage fut accueilli avec faveur par Auguste, ce qui prouve qu'il était écrit avec soin, dans le but de justifier et même de flatter le pouvoir alors existant. Ces approbations de souverains sont toujours, pour nous, un motif de méfiance sur l'exactitude des faits racontés. Ce n'est que dans l'opposition qu'on ose tout dire.
Avant lui, Fabius Pictor, considéré comme le premier historien romain, avait écrit environ 540 ans après l'époque de la fondation de Rome et avait mis dans son histoire les traditions reçues de son temps et les écrits altérés par la transmission des générations. Tite-Live a dû s'en inspirer. C'est ainsi qu'il mit dans son histoire de la fondation de Rome un mélange de traditions lointaines incomprises, de merveilleux, très en vogue à son époque, et de réalité. Il prend à la tradition antique, dont il fait du surnaturel, l'histoire des deux Principes, devenu pour lui deux Princes.
La science antique des Déesses avait enseigné l'origine végétale produite par la radiation solaire ; le surnaturel fit de l'arbre ancêtre, que l'on ne comprenait plus, deux enfants : Romulus et Rémus, d'abord représentant les deux sexes nés de Rhéa-Sylvia. Rhéa, c'est le Râ des Egyptiens, la radiation solaire, et Sylvia, c'est la forêt.
Puis on prend aux vieilles légendes de l'antiquité féministe la lutte des sexes : l'homme tuant la femme, déjà représentée partout (Caïn et Habel), et ici c'est Romulus (le mâle) qui va vaincre Rémus (la femelle). Ensuite, il fallait représenter la légende du déluge ; c'est pour cela qu'on fait voguer les deux enfants sur le Tibre dans une corbeille, afin de les sauver des eaux.
« Les jumeaux ayant été déposés sur le Tibre, le fleuve débordé porte doucement leur berceau sous un figuier sauvage au pied du mont Palatin, une louve les nourrit, ils furent adoptés par un berger, Faustulus, et sa femme Acca Laurentia. »
Voilà la légende.
Les êtres primitifs, formés par la Nature par suite d'une évolution végétale, n'avaient pas de parents. Pour expliquer la première alimentation de Romulus et Rémus, on les fait nourrir par le lait d'une chèvre ou d'une louve.
Une autre légende dira que c'est Rumina qui fut la mère nourricière qui est symbolisée par la louve, et que c'est elle qui donna son nom au Ruminal et à la ville de Rome.
Dans cette légende, nous voyons aussi apparaître Enée, personnage fabuleux qui vient s'établir sur les côtes du Latium et y apporte le Palladium de Troie, qui est une statue en bois de pallas-Athéné dont on considérait la possession comme une garantie de la conservation de la ville où elle se trouvait. Ce qui indique que la souveraineté féminine était considérée comme donnant à la cité des garanties de paix et de durée.

Voyons maintenant les réalités cachées que la tradition occulte nous apprend :
A vingt kilomètres de la mer, existaient des prairies entrecoupées de marais qui rendaient ce lieu insaluble et inhabitable. Cet endroit était entouré de collines, ce qui fait qu'on pouvait s'y enfermer et s'y fortifier. Sur une de ces collines, le Palatin, une petite troupe d'hommes échappés de la vie régulière vint s'établir. Elle était séparée du pays des Etrusques par le Tibre.
La future Rome fut d'abord une espèce de fort bâti sur le bord du fleuve. Le premier nom qu'on lui donna fut « Valentia » (rendez-vous de la Force). Par la suite, ces révoltés des tribus matriarcales cachèrent son nom dont on leur faisait honte et en firent un nom secret. Puis ils en prirent un autre, Amor, qui indiquait que ce que voulaient ces jeunes libertins, c'était la libre pratique de l'amour.
C'est de ce nom, après les Tarquins, que ce lieu fut appelé Roma, qui est le mot amor lu à l'envers. On fit de cette origine un mystère, on retourna le nom parce qu'on en avait honte, comme du nom de Valentia que les Etrusques avaient continué à lui donner (1).
Les masculinistes expliqueront l'étymologie du mot Roma en le rattachant à un mot grec qui signifie liberté.
Ce fut le commencement en Italie du régime masculin opposé au régime féminin.
On raconte que dans l'enceinte de la ville nouvelle on creusa un grand trou et que chacun y jeta une poignée de terre apportée de son pays. C'étaient donc des hommes venus de différentes régions qui se réunissaient là.
Ceci se passait de 753 à 746, date attribuée, à la naissance légendaire de Romulus, ce qui n'est pas très ancien dans l'histoire.
La nouvelle ville fut un refuge pour les échappés de la vie régulière, les révoltés qui avaient secoué le joug de la vie matriarcale, les « enfants prodigues ». Ils formaient des bandes et on les appelait les bandits de la Montagne.
Mais il n'y avait pas de femmes parmi eux et ils en désiraient. C'est ce qui motiva l'idée que l'amour à Rome s'inaugura par l'enlèvement des Sabines.
Tite-Live prétend que les peuples voisins dirent aux fondateurs de Rome : « Ouvrez un refuge aux femmes perdues. » Seulement, en 746, on ne connaissait pas encore les « femmes perdues », qui ne furent inventées que quand on créa l'assujettissement de la Femme, dans des formes diverses qui ont abouti au mariage institué beaucoup plus tard par le Droit romain. C'étaient les hommes qui étaient « perdus » à cette époque-là. Mais Tite-Live met les idées de son temps dans son histoire. Du reste, un peu plus loin, il nous raconte l'enlèvement des Sabines, destinées à venir peupler la nouvelle colonie. Ces femmes volées, par ruse, au milieu d'une fête, c'est bien là l'acte d'une bande de vauriens !
Puis la guerre avec les voisins, qui suit cet acte de brigandage, est encore un fait très humain. Les masculinistes, pour justifier cet acte, nous diront que les femmes en jeu dans cette lutte se seraient jetées elles-mêmes entre les combattants, ce qui est contraire à toutes les lois de la psychologie féminine : des femmes volées ne pensent qu'à reprendre leur liberté. C'est ce fait qui aurait fait croire que le mariage avait commencé par le rapt. C'est possible, et ce n'est pas glorieux pour les hommes. L'enlèvement des femmes fut la suite d'une révolte des insoumis contre l'ordre antérieurement établi, il ne fut pas un fait général, mais un acte exceptionnel, suivi d'une lutte à main armée entre les défenseurs du droit et de la liberté des femmes et ceux qui voulaient violer ce droit.
Ces futurs Romains étaient alors surnommés « Quirites » (hommes, de lance, quiris), ce qui prouve que c'étaient des batailleurs qui s'armaient pour se défendre.
L'histoire de Romulus n'a aucune réalité. C'est un personnage imaginaire ; la naissance qu'on lui assigne, comme sa mort, sont miraculeuses. Ce qui n'empêche qu'on lui attribue la fondation de diverses institutions, celles auxquelles on voulut, plus tard, donner une haute antiquité, telles que les comices ou assemblées par curies et le Sénat, cette copie du Conseil des Matrones.
A Rome, actuellement, on fête le 21 avril l'anniversaire de la fondation de la ville, on illumine le Forum et le Colisée.
Pourquoi cette date, 21 avril ? On dit que c'est parce qu'elle est indiquée par une tradition très ancienne, dont Tacite fait mention. D'après cette tradition, la ville de Rome aurait 2.770 ans (en 2017).
Chez les anciens Romains, l'anniversaire de la fondation de l'Urbs était un jour de réjouissances publiques.
Le matin, les paysans devaient se purifier avec des parfums mêlés de sang de cheval recueilli dans les sacrifices de chevaux immolés en octobre au dieu Mars, et dont le sang était conservé spécialement par les Vestales. On nettoyait les écuries et les étables et on offrait à la Déesse Palès la majeure partie des produits des champs (2).
(1) Les Etrusques sont ceux qui, en Italie, gardèrent le plus longtemps le régime maternel. Jusqu'à l'ère actuelle, les Etrusques portaient le nom de leur mère.
« À titre de curiosité, si on écrit cette simple phrase : « In Italia è Roma », et si on la lit en sens inverse, elle devient : « Amore ai Latini » ; le « hasard » est parfois d’une surprenante ingéniosité ! » (René Guénon, L'Esotérisme de Dante)
(2) Conserver le sang au lieu de conserver ce qui représente l'esprit est une parodie.

LES DÉFENSEURS DE LA MATRIE
C'est par une révolte contre la Matrie que Rome commence.
De temps à autre, un homme sortait des rangs. C'était toujours quelque mauvaise tête dont les autres ne tardaient pas à subir l'ascendant, soit par la terreur qu'il inspirait, soit par la conformité de mauvais instincts.
Alors, une bande se formait, se jetait à travers le monde, se grossissant, en passant par les nations, de tous les révoltés prêts à l'action, car des centaines de voix répondaient à l'appel du Mal, des centaines de bras se levaient avec entrain à l'idée d'une lutte, chassant tout scrupule et s'affermissant dans le mal par le nombre.
Dans ces heures de révoltes impies et sacrilèges, on savait profiter de toutes les défaillances, narguer les indécis, ridiculiser ceux qui voulaient rester dans l'ordre et dans le devoir. C'est que le succès de ces entreprises n'était pas facile, il soulevait une lutte.
Pendant que les dévastateurs audacieux manaçaient les murs des cités, pendant que flambaient les habitations qu'ils prenaient plaisir à détruire et le chaume des toits sous lequel dormait la couvée humaine, on voyait se former des bataillons sacrés et les frères, les fils, les amis surgir, pour défendre ou venger les mères, les sœurs ou les amies offensées ; on les voyait, animés d'une noble fierté, se jeter dans la mêlée, refouler les envahisseurs, et reconquérir les villes perdues.
Cette défense du Droit leur donnait aux yeux des femmes un prestige surhumain. Quand ces hommes revenaient vainqueurs des ouvriers de néant qui attaquaient l'ordre établi, on les accueillait avec enthousiasme, en triomphateurs, on les entourait, on soignait leurs blessures avec tendresse et reconnaissance.
Les joies du retour au foyer, de la paix reconquise, de la liberté rachetée, que l'ennemi ne viendrait plus troubler, le bonheur du devoir accompli, tout cela était, pour le défenseur de l'ordre établi dans le gouvernement maternel, la suprême récompense.
C'est ainsi que naquit l'idée sacrée de la Matrie, de l'honneur qu'il y a pour l'homme à savoir la défendre. Et, fier d'une première victoire, il en voulut d'autres, organisa des bataillons sacrés qui s'en allèrent par le monde libérer les nations asservies. Ce fut un flot libérateur qui se rua contre le flot destructeur. Ils marchaient glorieux et vaillants, sachant qu'ils défendaient le Droit, ils allaient, le cœur plein d'une sainte allégresse, parce qu'ils savaient que toutes les Femmes les approuvaient. Ces hommes, qui avaient préféré le devoir à l'orgueil, portaient l'étendard féministe (les Chevaleries leur ont donné plus tard un collier). Ils chantaient des fanfares éclatantes et les régiments sacrés qu'ils formaient étaient salués au passage par la foule enthousiasmée, les chefs étaient acclamés, exaltés, les vivats sans fin les suivaient, on dressait sur leur passage des arcs de triomphe, on leur jetait des fleurs, car tous étaient mus par une même pensée, poussés par une même cause grande et sainte, la défense du Droit de la Mère, le vrai Droit naturel, base de l'ordre social.
L'histoire ne nous a pas gardé les noms de ces héros, sauveurs modestes des heures solennelles, elle n'a glorifié que les usurpateurs. Du reste, ils se firent rares avec le temps. A certains moments de la vie, une mélancolie insondable s'éveillait dans l'esprit des hommes, même parmi ceux qui luttaient pour les femmes, l'orgueil de leur sexe les tourmentait, et puis les femmes leur prodiguaient une adoration trop grande, elles firent naître, en eux, la vanité.
A toutes les pages du livre des Temps, nous voyons la femme refaire la même maladresse, nous la voyons briser elle-même son sceptre pour en faire une couronne à l'homme, nous la voyons descendre de son trône et mettre l'homme sur le pavois. Alors, que devient l'œuvre sainte pour laquelle lui-même lutta ? A quoi bon le sang versé si elle-même en détruit le résultat ? Que fait-elle de sa liberté rachetée, si dans son mépris d'elle-même elle chante un autre esclavage, elle se donne un autre maître ?
Elle exalte l'homme avec exagération, le traite en être surhumain et lui indique ainsi elle-même la place à prendre, le trône divin à escalader ; c'est elle qui fit du triomphateur un demi-dieu ; ce fut une démence, elle lui mit sur la tête la couronne des rois.
Mais lui, modeste devant les ovations outrancières, les enthousiasmes exagérés, se dérobait souvent, n'osait pas s'élever si haut, se sentait indigne de tant d'honneur. Il avait voulu remplir un devoir, obéir à un ordre de sa conscience, la bonne action accomplie l'avait assez récompensé.

C'est la Matrie qu'on appellera, plus tard, la Patrie, quand le régime paternel sera venu remplacer le primitif régime maternel.
Alors, les beaux sentiments des défenseurs du Droit maternel n'auront plus aucune occasion de se manifester, puisque c'est l'usurpation de ce droit qu'on défendra, mais on invoquera toujours le souvenir des gloires du passé pour justifier les guerres, et c'est ainsi que le patriotisme deviendra un préjugé, c'est-à-dire une idée déviée dans son principe, bénéficiant du prestige qui s'attachait à la signification antérieure de l'idée qui était légitime.
Combien, plus tard, cette idée sera corrompue ! (1)
Les Romains vont se déclarer nobles, généreux, héroïques, parce que leurs gros bataillons vont bravement (c'est-à-dire en bravant le droit) écraser les petits peuples gynécocratiques ; et ce sont ces tristes victoires qui ont renversé le régime primitif et imposé au monde le règne de la force !
La confusion que les modernes font entre le mot Père et le mot Mère est aussi étrange que contradictoire.
En voici un exemple : c'est Fabre d'Olivet qui parle ; il dit : « Il n'existe point de Patrie pour celui qui n'a point de Père, et le respect et l'amour que l'homme, dans son âge viril, ressent pour les lieux de sa naissance, tiennent leur principe et reçoivent leur force de ces mêmes sentiments qu'il ressent dans son enfance pour sa Mère. La véritable cause de l'amour de la Patrie est l'amour maternel. Les seuls fondements de l'édifice social sont la puissance paternelle et le respect filial. De cette puissance découle Celle du Prince qui, dans tout Etat bien organisé, était considéré comme le Père du peuple » (Vers Dorés, p. 209).
La confusion est tout entière dans cette citation qui nous montre le passage de la Matrie à la Patrie, du sentiment maternel au sentiment factice qu'on appelle paternel, n'osant pas, cependant, supprimer tout à fait le droit maternel, puisqu'on dit encore, la Mère-Patrie.
Voici comment Fabre d'Olivet juge les Romains (Etat social, T. II, p..24) :
« Les Romains n'étaient dans l'origine que des sortes de flibustiers que l'appât du butin réunit, des brigands courageux dont l'unique vertu, décorée du nom pompeux d'amour de la Patrie, ne consista pendant plusieurs siècles qu'à rapporter à la masse commune ce qu'ils avaient pillé aux nations du voisinage. Quand ces guerriers allaient en course, ils portaient pour enseigne des poignées de foin, appelées manipuli. (Donc on les comparait à l'âne.) La grue, qu'ils reçurent des prêtres saliens et qu'ils transformèrent en aigle, ne parut que longtemps après sur leurs drapeaux. L'aigle fut consacrée à Jupiter.
« Si l'on aime le mouvement dans l'histoire, si l'on se plaît aux événements tumultueux, rapides et violents, si les vertus farouches d'un certain genre, un héroïsme dur et sans aménité peuvent intéresser au milieu de scènes de carnage et de dévastation, on doit lire avec ravissement les annales de Rome. Jamais ville, jamais peuple, n'en donna de pareils exemples. En quelques siècles, l'univers vit cette bourgade étrurienne, encore meurtrie par les chaînes qu'elle avait portées, sortant à peine des mains de Porsenna qui l'avait rançonnée et réduite au Capitole, essayer ses forces, s'étendre au dehors, s'élever et, du sein de la poussière, atteindre au faîte des grandeurs.
« Rome resta fort longtemps dans une grande obscurité. C'était l'asile d'une foule de vagabonds sans connaissances et sans envie d'en acquérir ; ils étaient tombés dans un tel état d'ignorance que pour compter le temps ils posaient un clou tous les ans à la porte du temple de Jupiter, pour conserver la chronologie. »
(1) « il est évident que le patriotisme n'est qu'un odieux mensonge bourgeois, une hypocrisie que démentent tous les actes de la vie courante, un sentiment que l'on proclame, que l'on crie, que l'on chante dans la rue, sous les plis du drapeau, dans les banquets politiques, entre deux beuveries populaires, mais que l'on se garde bien de mettre pécuniairement en pratique. » (E.J. Grillot de Givry, Le Christ et la patrie)

NUMA POMPILIUS (715-672)
Numa Pompilius est un personnage mystérieux au sujet duquel on a raconté beaucoup de fables, ce qui prouve qu'on a cherché à cacher sa réelle personnalité.
On croit qu'il fut un puissant législateur parmi les Etrusques et que son nom fut ensuite donné à ceux qui l'imitaient, pour les honorer. Il y aurait donc eu des Numa comme il y eut des Zoroastres. Ce nom représenterait la caste supérieure sacerdotale et sociale.
Sur des médailles émises par les gentes Calpurnia et Pomponia, on voit la tête de Numa ; sur d'autres, il est représenté sacrifiant un bouc ; ce qui ferait croire qu'il régnait sur son compte deux opinions : l'une, l'opinion des féministes de l'ancien régime qui voyaient en lui le restaurateur de l'ancien culte de vérité ; l'autre est celle de ceux qui vinrent, plus tard, révolutionner la religion en y introduisant les aberrations qu'on lui opposait ; et ceux-là, pour se donner du prestige, représentaient Numa comme étant un des leurs.
D'après Tite-Live, le Sabin Numa Pompilius régla les cérémonies religieuses de Rome et institua des Pontifes qu'il fit gardiens du culte. Mais ce culte qu'il voulait imposer ne pouvait être que celui qui régnait chez les Etrusques et qu'il voulait importer dans la Rome naissante qui marchait déjà dans la voie de l'erreur ; aussi fut-il le grand ennemi des dieux qu'on voulait substituer aux Déesses, en même temps que des manifestations religieuses qui étaient la parodie de l'ancien culte. Numa fit édifier et respecter le temple de Vesta où brûlait un feu perpétuel.
Ce que l'on sait maintenant, c'est que Numa Pompilius avait une Mère et une grand'Mère remarquables. Sa grand'Mère surtout, appelée Mocé ou Mœça, eut une grande influence sur sa direction morale. En mourant, il laissa des livres qu'il fit mettre dans un sarcophage, à côté du sien, et il prescrivit qu'ils ne fussent lus que plusieurs années après sa mort. Celui qui lui succéda n'obéissant pas à cet ordre, fit enlever ses livres et les fit brûler.
D'autres disent que c'est après l'établissement de la République que les consuls firent secrètement détruire les livres de Numa et tout ce qui pouvait rappeler la domination des Etrusques.
Parmi les œuvres de Numa, il en est une qui semble avoir eu pour but d'empêcher le vol des terres par la force, qui tendait à déposséder les anciens partisans du régime maternel des Etrusques.
On nous dit : Numa distribua au peuple les terres conquises et en consacra la propriété par les fêtes appelées Terminalia et par le culte du dieu Terme, Divinité qui veille jour et nuit sur les champs et voue aux dieux infernaux quiconque déplace les bornes qui limitent les terres.
La meilleure garantie est dans la volonté de l'homme de bien faire, de respecter un droit, elle est dans la conscience. Numa le savait bien, car, pour se donner plus d'autorité, il disait que les lois qu'il faisait lui étaient dictées par la nymphe Egérie, qui lui apparut près d'une fontaine située au pied du mont Cœlius, dans le bois d'Aricie (l'enceinte actuelle de Rome). Il s'appuyait sur le Verbe divin d'une femme pour se donner de l'autorité morale et se faire écouter de ceux qui avaient violé tous les droits.
Après avoir détruit les livres de Numa, on lui fit une histoire mensongère, le représentant comme ayant lui-même organisé le culte nouveau des dieux mâles, qu'on voulait introduire dans la religion romaine. Et voici comment on résume ce culte, mêlant la vérité et l'erreur :
« Cette organisation comprenait les Flamines, ministres des grands dieux, reconnaissables à leur bonnet de forme particulière ; les Féciaux, qui prévenaient les guerres injustes ; les Saliens, prêtres de Mars, chargés de la garde des boucliers sacrés tombés du ciel. » Voilà déjà du surnaturel. « Enfin les Vestales, choisies parmi les vierges patriciennes, et dont la fonction était de conserver le Palladium et d'entretenir le feu perpétuel sur l'autel de Vesta. »
Tout cela est d'une époque postérieure à Numa. C'est évidemment parce que les vrais auteurs des réformes voulurent rester cachés qu'ils firent remonter à Numa ce qu'ils faisaient eux-mêmes.
Quant à l'inspiration féminine, qu'on effaça naturellement, voici par quelle fable on la remplaça : « Vesta voulait que les Vierges conservassent avec soin le feu sacré. Elle eut une fille d'une grande beauté et d'une sagesse extrême, la divine Egérie, de qui Numa Pompilius reçut toutes ses lois. Elle obligea Numa à construire un temple à Vesta sa Mère, où on entretenait le feu sacré. » (D'après Dupuis, Origine de tous les cultes.)
Alors, c'est Egérie elle-même qui a écrit les livres attribués à Numa !
Du reste, nous ne savons de Numa que ce que les Romains ont bien voulu nous dire, et cela doit être bien loin de la vérité.

LE GOUVERNEMENT ROMAIN
Rome, à peine fondée, fut livrée au désordre du gouvernement anarchique. Ce fut une ville où régnèrent des agitations perpétuelles, et c'est pour tâcher d'y rétablir un peu d'ordre que se forma lentement la constitution romaine.
En 587, l'armée des Gaulois passa les Alpes et renversa la domination des Etrusques. Le Nord de l'Italie et la côte de la mer Adriatique restèrent sous la puissance des Gaulois. Les Etrusques ne gardèrent que le pays situé au Sud des Monts Apennins. Plutarque, in Mario, rapporte que les Galli ont enlevé aux Toscans la plus fertile partie de leur domaine. C'est alors que « dans le centre, au bord du Tibre, croissait une puissance nouvelle, la République romaine, qui s'était formée par la réunion de tribus diverses de la race italienne proprement dite instruites par les Etrusques » (Henri Martin).
Les Gaulois se fixèrent en Italie sous le nom d'Ombriens et d'Insubres.
En 509, nous voyons, après l'expulsion des Tarquins, la fondation de la République et la création de deux consuls. Puis un Sénat, qui se composait de 300 Patriciens, représentant le pouvoir paternel et imitant le conseil des Mères.
Patrice est la forme masculinisée de Matrice.
En Grèce, on avait appelé Pithèques ceux qui donnaient au Père le droit maternel. A Rome, on appela Métèques ceux qui voulaient garder le droit de la Mère. Et cela devint un terme de flétrissure équivalent à étranger. Alors les Métèques se retirèrent sur le mont Aventin. On les appela la plèbe (Métèque vient de Meta, terme au-dessus, cône, pyramide, but).
Le Pithèque devint le serpent Python. Le Dieu-Père fut appelé Apollon Pythien.
On nomme les sénateurs Pères conscrits (Patres conscripti) titre qui, aujourd'hui, nous semble plutôt ridicule.
C'est le Sénat qui dirige la République. Ses décrets (senatus-consulta) ont force de loi. Les clients des Patriciens doivent soutenir de leurs votes leurs puissants patrons (Patron est le masculin de Matrone). C'est le commencement de la comédie politique exploitant l'homme pour la satisfaction d'un des leurs.
Et, cependant, ils se sentent si faibles qu'ils n'osent pas agir sans demander « l'approbation des dieux ». Et comme les dieux sont encore surtout des Déesses, nous voyons en cela un reste de la soumission de l'homme à la volonté féminine.
Et les hommes, qui ne veulent plus suivre ouvertement la direction des femmes, tombent dans toutes sortes de superstitions, de folies. Avant de réunir les comices, ils observent le ciel, ils consultent les oiseaux, les augures, et, si le présage est défavorable, ils ne s'assemblent pas. Telle est la faiblesse d'esprit de ces magistrats qui veulent marcher sans une direction tutélaire.
Ce sont les Patriciens qui fondent le collège des Prêtres, eux qui possèdent la science augurale (1). Ce sont eux aussi qui rendent la justice, mais en secret, car ils savent bien que leur justice, c'est l'injustice, et ils ne veulent pas de témoins gênants. Aussi les heures et les jours de procès sont soigneusement cachés, le huis-clos est la règle et les formes judiciaires mêmes doivent être ignorées du public, et, pour se donner plus de prestige, on les multiplie à dessin. Donc on trompe quelqu'un. Qui ? Les femmes et les plébéiens (2).
Et pendant qu'ils sont mis à l'écart dans cette société nouvelle, le moindre fait accompli par les Patriciens est glorifié à l'excès. C'est le triomphe de l'orgueil.
Rome confie le soin des sacrifices, offerts d'abord par les rois, à un nouveau magistrat nommé à vie : le roi des sacrifices (Rex sacrorum, Rex sacrificulus). Il est exempt du service militaire, mais soumis au Grand Pontife.
(1) Augure, le nom des prêtres romains, vient d'une racine qui signifie Vautour, geir, en celtique, agur en hébreu, guira en garamis. Chez les Grecs, le prêtre est appelé Iareus (de Uréus, serpent).
(2) L'injustice était si bien dans les mœurs chez les Romains qu'on appelait « Faste » le jour exceptionnel où il était permis de rendre la Justice.

LES DIEUX
Cette religion romaine est trop connue pour qu'il soit besoin de l'expliquer. Mais ce qu'on ne sait pas assez, c'est qu'elle eut des phases diverses, subit une évolution, et que toutes les Divinités qu'elle reconnaît sont loin d'avoir été acceptées à une même époque. Il y a une chronologie à étudier et qu'on néglige généralement parce qu'elle nous montre les Déesses régnant seules au début et l'arrivée postérieure des dieux dans le Panthéon. Cette révolution religieuse se produisit partout entre le VIIIème siècle et l'ère actuelle.
Dans la religion romaine qu'on allait opposer à la grande science des Celtes, on reconnaissait douze grands dieux parmi lesquels se trouvaient six Déesses : Vesta, Junon, Minerve, Cérès, Diane et Vénus.
Cependant, en remontant dans le passé, nous ne trouvons la personnalité vivante d'aucune d'elles en Italie. Toutes viennent du dehors, de la Celtide, elles sont importées à une époque où leur histoire même est perdue. Il reste d'Elles seulement, des légendes mythologiques et des représentations figurées. Il y avait eu d'autres grandes Déesses qui avaient écrit les Livres sacrés : aux Indes Saraswatî, auteur du Véda, Krishna qui écrivit la Bhagavad-Gîtâ, en Assyrie Istar, en Egypte Taoth, en Chine Iao ; Rome ne les connaît pas et ne prend ses Déesses que dans le Panthéon celtique qui lui est transmis par les Etrusques ou par les Grecs qui en ont dénaturé l'histoire.

Parmi les idées nouvelles nées de l'introduction des dieux mâles dans la religion romaine, mentionnons ce qui concerne Saturne et Ops, qui forment un couple analogue à celui de Tellus et Telluno. Chez les Celtes, Saturne constituait le couple humain avec sa sœur Atala, mais elle représentait l'Esprit et lui le sexe. On l'appelait Sadens (l'ensemenceur). Les Grecs, pour l'ennoblir, firent de cette faculté le symbole de l'agriculture, et, comme il y a un temps pour semer, on fit de lui le dieu du temps, Chronos, alors qu'en Celtide, de Sat (semence) on avait fait Satan, Satur, Saturnus.
Les Grecs lui ont laissé une faculté bizarre : il dévore ses enfants. Sanchoniaton nous représente tous les dieux (les Déesses) saisis d'épouvante à la vue de Saturne faisant périr son fils Salid. La première mort violente, le premier crime, c'est le fond de la fable de Saturne dévorant ses enfants ; ce fut une épouvante.
C'est pour cela que, chez les Celtes, Saturne représente les gouvernés, ceux qu'il faut conduire et surveiller.
Saturne est, dans les traditions latines, le représentant d'une époque légendaire de prospérité et d'abondance, un Âge d'Or. La fête qu'on célébrait en son honneur, d'abord en décembre, ensuite en janvier, était un retour fictif à cette heureuse époque.
Inutile de faire remarquer que ce temps était celui du régime matriarcal. Les fêtes qui en perpétuaient le souvenir, les Saturnales, duraient sept jours, mais elles dégénérèrent en débauches.

Mars personnifiait l'élément viril générateur. Il était représenté par les emblèmes mâles comme le chêne et le figuier, et aussi par des animaux, le loup et le bœuf, le pic et le cheval de bataille.
Il présidait aux semailles du printemps (allusion à la fécondation). Son arme symbolique est la lance. Et n'est-ce pas pour cela que les premiers Romains se font appeler Quirites ? On mettait ce dieu à côté de Juno Lucina, dont il est le contraste. Le Mars guerrier n'apparut que plus tard et finit par devenir le dieu national des Romains, quand la guerre devint leur principale occupation.
Les prêtres Saliens exécutaient des danses et chantaient des hymnes autour de l'autel de Mars.
Auguste fit élever le temple de Mars Ultor. Un particulier fit élever à ce dieu un temple voisin du cirque Flaminius. Les Sabins l'appellent Quirinus et le confondent avec Romulus. Il remonte à la fondation de la Rome masculiniste.

Vulcain, Vulcanus ou plutôt Volcanus, fut d'abord un « destructeur » comme le Çiva indien. On lui vouait ce qui devait être brûlé. C'est de ce nom qu'on a fait volcan.
Le volcanal de Comitium lui était consacré ; c'était une sorte de foyer public.
On met à côté de lui une Déesse préservatrice des incendies, « Stata Mater ». Par la suite, on fit de ce destructeur un bienfaiteur. C'est ainsi que, peu à peu, on modifiait les idées primitives, changeant la signification des symboles afin d'arriver à glorifier l'homme qui, dans la première religion, avait été représenté comme l'adversaire de la Femme divine, le principe du mal. Maintenant nous allons le voir triomphant.

On donnait le nom de Neptune à certains génies dont on faisait une description à peu près semblable à celle des Faunes et des Satyres. Neptunia-proles, Neptunio-héros (Thésée).
Faunus remplaça Fauna, la Femme champêtre, protectrice des pâturages et des montagnes, en même temps prophétesse expliquant les secrets de la Nature. On la dédouble en mettant près d'elle un dieu Faunus, l'homme des champs, identifié avec Pan ; c'est encore un dieu de la fécondation. On l'appelle Lupercus ; d'abord comparé au loup que l'on craint, il devient le protecteur contre les loups. On célébrait en son honneur la fête des Lupercales, qui avait souvent un caractère licencieux.
Priape est un dieu mâle qui représente aussi la fécondation. Son culte se rattache au culte bacchique de l'Asie Mineure, qui ne vint que tard en Grèce, puis en Italie.
Tous ces dieux ont pour but de représenter la Nature, parce que les anciens peuples de l'Italie adoraient une Déesse de la Nature, des fleurs, du printemps, des séductions, qu'ils appelaient Flora ou Feronia.
Mercure, l'Hermès romain, représente le commerce et le vol.
Esculape, l'Asklépios des Grecs, prend la place de la Déesse Salus, qui présidait aux guérisons.
Orcus, dieu actif de la mort, comparable à Osiris, est un dieu souterrain.

Les Parques tiraient leur nom du mot Partus (naissance). C'était les Déesses médicales qui donnaient la vie, c'est-à-dire qui présidaient aux naissances. Plus tard, on renversa cette idée et on fit des Parques les Déesses de la mort.
Quand la religion fut ainsi transformée, on donna aux grandes Déesses des attributs outrageants. On consacra le porc à Cérès, puisque l'homme avait été représenté par le sanglier. Jupiter avait été figuré par un jeune taureau avec une tache blanche sur le front, pour rappeler le bœuf Apis. En vertu de l'égalité des sexes, on représenta Junon par une vache. Dans sa fonction de Lucina (lumineuse), elle fut représentée par une porca ou une agna.
On consacra à Minerve une vache ou une génisse, ou bien le hibou, oiseau nocturne. A Bona Dea une porca. A Tellus une vache pleine. Cette Déesse continua, du reste, à représenter la Femme dans un rôle inférieur, la force féminine de conception, comparée à la Terre, que le soleil féconde. Elle n'est plus que le principe de fixité du germe, la mère nourricière.
C'est la Bona Dea des Etrusques qui est devenue le Bon Dieu des religions modernes.
Toute cette population divine avait des Temples. Ce renversement de la religion primitive ne fut pas accepté facilement. Les mots mêmes de la langue qui se formait désignaient les choses tout autrement.
De mas (mâle) on fit masque, masquer, mascarade. Un vieux mot arabe, maskara, exprimait déjà cette idée.
C'est cet homme masqué que la Comédie étrusque représenta dans Arlequin.
On fait aussi de la même racine mastino (mâtin), chien de garde (le Cerbère de la mythologie, qui interdit à la Femme l'entrée du monde masculin) ; on fait matois, qui indique la ruse, mas-culin, puis on fait male dicere, qui deviendra maudire, mal gré, qui deviendra maugréer.
Tout cela montre que ce n'étaient pas des bénédictions que l'homme récoltait.

LE REVERS DE LA MÉDAILLE
Les médailles portaient d'abord l'image de la Déesse. C'est ainsi que l'on voit la tête de Diane ou celle d'Aphrodite sur les anciennes médailles.
Mais l'homme qui voulait sa part de glorification fit des médailles qui portaient d'un côté Diane et de l'autre Janus. De Diane ou Dianus, on avait fait Janus. Diane et Janus sont les représentants du Couple humain (1). Cette forme nouvelle fut acceptée avec restriction, ou avec ironie ; Janus devint « le revers de la médaille », ce qu'il y a de mauvais dans une chose. Ainsi, l'on disait que Janus a deux visages, l'un qui grimace et l'autre qui sourit.
Les hommes se vengèrent en supprimant la tête de femme des nouvelles médailles qu'ils firent et en la remplaçant par une nacelle, symbole de ce qui flotte sur l'eau (l'Esprit divin).
On gravait sur le revers une caravelle, barque de rivière faite pour voguer dans les deux sens, en avant et en arrière. Cette figure fut placée à l'embouchure du Tibre (2).
C'est ainsi que les masculinistes, cachant la vérité dans des légendes, voulurent faire remonter Janus à l'origine de Rome. « Leurs aïeux, disaient-ils, arrivés à l'embouchure du Tibre, remontèrent le fleuve sur des barques ; le grand pontife Janus, qui les conduisait, les fixa à Rome et, possédant la double connaissance (puisqu'on lui donne les deux sexes) du passé et de l'avenir, voyant ce qui était avant et après lui, il prédit les hautes destinées de la ville. » Seulement, ce sont là des prédictions faites longtemps après que les faits annoncés se sont produits, et, pour appuyer la légende, on prétendit que Numa avait fait bâtir un temple à Janus.
Donc la légende eut plusieurs phases. D'abord, Diane était la Déesse bienfaisante, la Femme qui aide, qui aime, qui sauve ; elle présidait à la naissance et au salut.
Diane fut d'abord symbolisée par le soleil, puisque son nom signifie le jour. Mais Janus prit sa place et c'est lui, alors, qui eut en partage tous les attributs solaires primitivement féminins : il ouvre le ciel, c'est-à-dire donne le bonheur qui est le ciel sur la Terre ; il a deux visages qui représentent le levant et le couchant : l'un qui regarde en avant, c'est l'aurore, la vue droite des temps heureux ; l'autre qui regarde en arrière, c'est le couchant, la fin des beaux jours et le commencement de la nuit dans la chute.
Quand on eut ainsi donné à Janus les attributs de la Déesse, on donna à Diane les attributs de l'homme, la lune pour symbole, la chasse pour occupation (3).
Mais le travestissement n'est jamais durable, la nature reprend ses droits et l'homme retourne à la force, c'est-à-dire à l'instinct de lutte qui résulte de ses conditions sexuelles. C'est cet attribut que le dieu représente dans le Janus Quirinus qui préside à la guerre. Il ouvre les portes de son temple à ceux qui viennent l'invoquer pendant la guerre et les ferme pendant la paix.
Janus était surnommé par les masculinistes Junonius parce qu'il imitait Junon, et ils appelaient Janicule la colline où on lui rendait un culte. Mais le parti opposé avait fait de Janus une caricature appelée Morote. C'était une tête avec un visage devant et derrière, placée au bout d'un bâton que portaient ceux qui contrefaisaient. On en mettait un dans les mains de Momus. Morote est devenu Marotte.
(1) La lettre I (iod en hébreu) donne le genre masculin aux noms. La syllabe dia leur donne le genre féminin. Ianus est le masculin de Iona-Iana.
(2) Cette barque voguant sur les eaux (alors que l'eau est le symbole de ce qui éteint le flambeau de l'Esprit) revient à chaque instant dans l'antiquité et sous toutes sortes de formes. Ainsi, nous voyons le Prêtre représenté, dans les Mystères des religions masculines, par un homme identifié avec le dieu océanique et élevant l'eau sur la tête de la Divinité femme, pour mieux éteindre les rayons qui forment son nimbe. C'est cette élévation de l'eau sur la tête qui est l'idée première du baptême des Catholiques, qui prendront le symbole sans en connaître l'origine. Plus tard, perdant, de vue la signification primitive des mythes, on voulut leur donner une explication rationnelle. L'eau devint ce qui lave et non plus ce qui éteint. De là tout un système nouveau de croyances.
(3) « Dans la région de la Meuse, on appelait Diane cette puissance lunaire qui, du haut des cieux, soulève les flots, leur fait remonter le cours des fleuves et donnait ainsi au culte son premier élément de purification ; cette mystérieuse divinité laissa son nom et ses légendes dans les deux mondes : à Cusco, le trône où était assis l'Inca, fils du Soleil, s'appelait Tiana ; en Chine, Thian est encore aujourd'hui la déité souveraine qui règne dans les cieux et sur la terre.
« Nous retrouvons chez les japonais tout ce mysticisme. Ces peuples reconnaissent un ancien législateur qui, venu de loin, leur donna les éléments de leur culte ; il portait deux cornes au front ; il se nommait Mousa ; il avait pour emblème un Soleil rayonnant qui est resté jusqu'à aujourd'hui dans les armes du Japon. Mais la légende suivante mérite d'être remarquée (Encyclopédie japonaise, tome XIII, feuillet 7) :
« Il y avait, non loin du Japon, une terre merveilleuse, favorisée de tous les dons de la nature ; on résolut de l'aller conquérir. Une femme inspirée commandait l'expédition ; ayant rencontré sur sa route une mer, elle y jeta la perle du reflux et passa à pied sec, puis, se voyant attaquée par des ennemis puissants, elle jeta la perle du flux et ceux-ci furent ensevelis dans les eaux ; arrivée dans un pays aride, elle fendit un rocher et en fit jaillir une source. Pour continuer l'expédition, elle prit des habits d'homme ; elle traversa miraculeusement un fleuve, soumit les peuples du roi Basan (Basan-Kin), attaqua une armée de géants, et, dans ce combat, voyant que le soleil descendait sous l'horizon, elle l'arrêta et se donna le temps d'achever sa victoire.
« Ainsi, dans cette conquête merveilleuse, c'est une Muse qui commence l'expédition et c'est un homme qui l'achève ; dans le récit biblique du même fait, nous voyons une répartition semblable, mais là, cette Muse est remplacée par Moïse et cet homme est Josué. » (T. Cailleux, La Judée en Europe)

LE THÉATRE ÉTRUSQUE
Si l'histoire ne nous a pas conservé le plaidoyer des vaincus dans ces formidables luttes, la tradition, sous ses mille formes, en est l'écho. Le jugement porté sur nos lointains aïeux par les mécontents de leur époque (et les femmes devaient être parmi eux en majorité) nous est révélé par ce qu'on représentait alors dans les jeux publics.
Ainsi, la pantomime étrusque nous montre un polichinelle cynique et railleur qui fut évidemment copié sur un type de l'époque.
Cette pantomime antique s'est perpétuée à travers les âges, en conservant le thème primitif, modifié sans doute, mais resté bien humain. Il résumait certainement les idées régnantes chez les Etrusques, mais ce qui diffère avec notre temps, c'est la franchise avec laquelle elles étaient exprimées. C'était l'éternelle comédie humaine, l'éternelle lutte des instincts masculins contre les instincts féminins
Voici d'abord Arlequin, l'homme masqué, qui cache ce qu'il est réellement et qui porte un habit fait de toutes sortes de pièces d'étoffes différentes. C'est le type de l'homme qui fait sa personnalité de tout ce qu'il prend aux autres. Ces morceaux disparates représentent les idées nées dans le cerveau des autres qu'il s'est assimilées.
Pierrot enfariné, c'est l'homme qui parodie la pureté de la femme, son innocence que la couleur blanche représente. Son habit porte des boutons rouges, la couleur symbolique des féministes.
Polichinelle (pulcinella, de pulcino, diminutif de pullus, poulet), c'est l'être grotesque, la laideur, c'est aussi le dégénéré (déjà !), car les deux bosses qu'il porte, l'une descendant par devant, l'autre montant par derrière, indiquant ses deux pôles physiologiques, sont un symbole qui indique une science profonde de la vie : il montre le chemin que suit son âme qui descend par devant, tandis que par en haut elle n'occupe plus que la partie postérieure du crâne.
L'action que représente la pantomime est toujours la même : séduire la femme jeune, Colombine, et tromper la femme vieille ; donner des coups quand on n'est pas vu, tel est l'usage de la batte d'Arlequin, prendre l'attitude de celui qui n'a rien fait quand la femme âgée regarde, s'unir, se concerter pour la tromper.
Les savants ont cherché l'étymologie du nom d'Arlequin et l'origine de ce type à la fois comique et vicieux.
Court de Gébelin fait venir Arlequin de lecchino, mot italien qui signifie aussi bien paillasse que gourmand.
Depuis, on a trouvé une signification plus ancienne et plus réelle. On fait venir Arlequin de Alucus qui, en latin, signifie chouette, et que les Italiens ont transformé en Allochino. Et ce point établi, on nous démontre que ce rôle de la farce italienne fut autrefois tenu par un personnage qui symbolisait la stupidité balourde et la laideur de l'oiseau nocturne. Son visage se couvrait d'un emplâtre noir où le nez affectait la forme d'un bec rapace et trapu ; des lunettes énormes, aux verres glauques, imitaient les orbites larges, les pupilles rondes et dilatées entourées du cercle de plumes drues que possède la chouette. Et l'Arlequin ainsi conçu était bête et grotesque, mais mauvais aussi. C'était, évidemment, la caricature d'un type d'homme qui existait alors et qui devait être puissant, car c'est certainement lui qui, pour se venger d'avoir été ainsi représenté, voua la chouette à la femme et attribua le hibou à Minerve. Ce type traversa le théâtre de tous les âges, perdant peu à peu sa maladresse et sa laideur, mais gardant ses vices, s'affinant à tous les contacts, profitant de ses fautes, se dégageant léger et gracieux de l'ébauche informe des premiers jours.
Si nous remontons dans l'histoire du théâtre pour y chercher les traces d'Arlequin, nous nous rendons compte des métamorphoses qu'il a subies. C'était ce même type, d'ailleurs, que les Grecs avaient peint dans un satyre barbu, velu, hérissé de poils fauves, masqué de noir. C'était le rustre primitif qui devint le fourbe stupide, dont la bêtise immense déchaîne les rires et les sarcasmes. C'est l'homme effronté, bon pour toutes les besognes et prêt à toutes les audaces.
Ch. Nodier disait : « Arlequin a le vêtement bigarré de certains perroquets, le masque noir et lustré du grillon, et la tradition le fait borgne.
« Nous aurions donc, dans ce personnage, l'évolution d'un type curieux à étudier, les phases traversées par l'homme bête et méchant. Il est d'abord ridiculisé, rendu grotesque, il est stupide et laid, et comparé à la chouette, oiseau de nuit, symbole de ténèbres. Puis il se dégrossit, manie sa batte avec adresse, dit des mots amoureux à Colombine, se moque de Pierrot, berne tout le monde. Il devient alors l'image de l'homme qui ose tout, qui s'est habitué au personnage d'emprunt qu'il joue et en tire le meilleur parti possible. Il devient cynique et fieffé gredin, raille avec une verve mordante les travers d'autrui, leur attribue les siens. Son audace le mène aux plus hautes destinées ; alors, quand il est au pouvoir, il fait prendre sa bêtise pour de l'esprit. La chouette, son emblème, c'est, dit-il, l'oiseau cher à Minerve ! Et cette idée renversée fait son chemin. Aujourd'hui que l'esprit d'Arlequin a triomphé, quand on compare quelqu'un à une chouette, notre jeunesse pervertie pense bien plus à la femme qu'à l'homme arrivé si ennobli.
« Bien curieuse est l'évolution de cette chouette.
« Symbole de malheur et de mort, représentant l'homme bête et méchant, ridicule et odieux, elle arrive par des degrés insensibles, par des phases diverses, à l'homme moderne, l'Arlequin politique, scientifique ou littéraire, le prêtre de toutes les religions, dans lequel J.-J. Rousseau et Balzac voyaient l'homme sans idées fixes, sans principes et sans scrupules, trouvant dans son costume bigarré l'image de ses opinions changeantes. »

PYTHAGORISME
Au milieu du désordre que les révolutions religieuses avaient provoqué, une renaissance de l'Esprit féminin se produisit encore ; elle était représentée par une sorte de congrégation sacrée, assemblée secrète de gens sages et religieux qui se répandit en Europe, en Asie et même en Afrique, et qui lutta contre l'ignorance et l'impiété.
Cette société secrète tendait à devenir universelle, elle rendit à l'humanité des services immenses. C'est ce que les Grecs ont caché sous le nom de Pythagore, quand on arriva à fonder à Crotone une succursale de cette société, déjà répandue partout.
Rappelons que, dans le Dictionnaire de Owen Pughes, le mot Pythagore, qui est d'origine galloise, est ainsi expliqué :
- Pythagoras : Explication de l'Univers, Cosmogonie.
- Pythagori : expliquer le système de l'Univers (mot composé de Pyth, période de temps ; agori, découvrir)
- Python : système de l'Univers.
- Pythones : une cosmogoniste, une pythonisse.
- Pythoni : traiter de cosmogonie.
- Pythonydd : celui qui systématise le monde.
Cette renaissance ne semble être qu'un aspect particulier d'un grand mouvement d'idées qui aurait pénétré le monde civilisé six siècles avant notre ère. Il y avait alors des sectes qui par leur science, leur vie austère, leur morale supérieure (1), faisaient opposition à l'envahissement de l'erreur et du mal que l'ignorance générale avait fait naître.
Origène, citant Celse, dit que les peuples les plus sages sont les Galactophages d'Homère, les Druides des Gaulois et les Gètes ; ces derniers, établis sur le Pont-Euxin, sont appelés aussi Galactophages parce qu'ils ne se nourrissaient guère que de lait et de fromage.
C'est évidemment parmi ces sages qu'il faut chercher le fondateur ou la fondatrice d'une nouvelle congrégation qui va devenir une société secrète appelée le Rite d'Hérodom.
(1) Que jamais le sommeil ne ferme ta paupière,
Sans t’être demandé : Qu’ai-je omis ? qu’ai-je fait ?
Si c’est mal, abstiens-toi : si c’est bien, persévère.
Médite mes conseils ; aime-les ; suis-les tous :
Aux divines vertus ils sauront te conduire.
J’en jure par celui qui grava dans nos cœurs,
La Tétrade sacrée, immense et pur symbole,
Source de la Nature, et modèle des Dieux.
Mais qu’avant tout, ton âme , à son devoir fidèle,
Invoque avec ferveur ces Dieux, dont les secours
Peuvent seuls achever tes œuvres commencées.
Instruit par eux, alors rien ne t’abusera :
Des êtres différens tu sonderas l’essence ;
Tu connaîtras de Tout le principe et la fin.
Tu sauras, si le Ciel le veut, que la Nature,
Semblable en toute chose, est la même en tout lieu :
En sorte qu’éclairé sur tes droits véritables,
Ton cœur de vains désirs ne se repaîtra plus.
Tu verras que les maux qui dévorent les hommes,
Sont le fruit de leur choix ; et que ces malheureux
Cherchent loin d’eux les biens dont ils portent la source.
Peu savent être heureux : jouets des passions,
Tour à tour ballotés par des vagues contraires,
Sur une mer sans rive, ils roulent, aveuglés,
Sans pouvoir résister ni céder à l’orage.
Dieu ! vous les sauveriez en désillant leurs yeux...
Mais non : c’est aux humains, dont la race est divine,
A discerner l’Erreur, à voir la Vérité.
La Nature les sert. Toi qui l’as pénétrée,
Homme sage, homme heureux, respire dans le port.
Mais observe mes lois, en t’abstenant des choses
Que ton âme doit craindre, en les distinguant bien ;
En laissant sur le corps régner l’intelligence :
Afin que, t'élevant dans l’Ether radieux,
Au sein des Immortels, tu sois un Dieu toi-même !

(A. Fabre d'Olivet, extrait des Vers Dorés de Pythagore, Perfection)

LE RITE D'HÉRODOM
Il existe encore dans la Franc-Maçonnerie moderne un Rite dit d'Hérodom, qui est considéré comme la continuation directe du Rite qui a précédé tous les autres. On l'appelle aussi Rite de Kilwinning, et encore Rite ancien et de Perfection.
On a beaucoup cherché l'étymologie du mot Hérodom, sans rien trouver parce qu'on n'est pas remonté assez loin dans l'histoire des sociétés secrètes. On y retrouve le mot latin hœres, héritier, au génitif pluriel hœredum, et, pour comprendre la réelle signification de ce mot, il faut se rappeler que Junon est appelée Souveraine, Hera, en grec, et que ceux qui avaient hérité étaient appelés Hérès. Ceux qui servaient Junon étaient les Hérésides, et c'est de ce mot qu'on a fait héritier.
Des représentations symboliques en l'honneur de Junon étaient appelées Héréenes, d'où Hérodom.
Les initiés de Kilwinning donnaient le nom de Très-Sage à leur président.
Ragon, ayant à parler de la légendaire montagne d'Hérodom, l'appelle une « montagne fictive ». (Rituel du Maître, p. 72,)
Ida est la montagne consacrée à Cybèle, quelquefois appelée Idæe, ou surnommée Idéenne. Les Corybanthes, qu'on trouve dans les Mystères, sont appelées Idéennes.
Rappelant les traditions passées, on montre que la grande Déesse des Galates portait le nom de Mater Idæa, que ses fidèles lui prêtaient serment sur le dolmen (eedt signifie serment, et hito pierre noire), et que de Madre Idæa on a fait Madrid. Enfin, sur les pierres qui formaient cette enceinte olympienne étaient les momies, c'est-à-dire les Grandes Déesses, oor-ahn (oor, grand, ahn, parent), ce qui fit donner au ciel symbolique le nom de Ouranos (Dictionnaire Celtique).
Nous trouvons encore une autre façon de représenter le Mont Ida. Le pays Kymris se disait aussi Cimmérien, et de ce mot on fit cime ; comme de Kaldée, qu'il avait formée, on fit crête ; une élévation, une montagne, une cime.
De là cette métaphore : « entasser montagne sur montagne pour escalader le ciel ».
Et pour prouver que ce sont bien les Kymris qui ont cette supériorité, on rappelle qu'un prêtre de Bélénus, d'après Ausone, est appelé Beleni Ædituus (professeur). Or les prêtres de Bélénus, ce sont les Druides.
Rappelons que les Kymris ou Belges, et les Gallois d'Armorique sont les deux grandes divisions du rameau celte gallois (Galls, Galli, Galates, Galatæ). Ce rameau diffère essentiellement du rameau gaélique d'Ecosse et d'Irlande.

Le rite d'Hérodom se compose actuellement de 25 degrés ; mais sa première classe, qui fut sans doute la primitive, comprend trois degrés comme les Mystères druidiques. Ce sont les trois degrés de l'Ecole Pythagoricienne.
Si nous rapprochons maintenant le nom de Junon de sa forme première, nous voyons que c'est un dérivé du nom de Ana (Jana) qui signifie ancien.
Hera représente donc l'héritage de la science ancienne, celle qui fut formulée dans l'A-Vesta par Ardui-Ana-ita.
Le mot as (ans ou hans), qui signifie ancien (d'où ancêtre), est le titre honorifique des Mères (les anciennes). De là, la hanse germanique et les villes hanséatiques.
La Mère, appelée aïeule, donne l'idée du culte des ancêtres. On honore la Voluspa (Edda) et Taoth, la première révélatrice.
C'est ce qui irrite l'orgueil des masculinistes. Pourquoi honorer une femme et pas un homme ? Et c'est là le premier germe de l'idée qui fit créer des dieux mâles.
Nous trouvons ces nouveaux Mystères en Egypte, d'où ils passent à Corinthe où Isis porte le surnom de Pélasgique.
En l'honneur de Cybèle, on célébrait les Phrygies. Cette Déesse est la Mère de la Phrygie, la Mère Phrygienne (Mater Phrygia), la bonne Mère, Mâ, appelée Dindymène par les Grecs. (N'est-ce pas de ce mot qu'on a fait dinde ?) De la Grèce, ces Mystères passent à Rome vers le temps de Sylla, dit-on.
Les Mégalésies étaient des fêtes et des jeux solennels en l'honneur de la Grande Mère des dieux.
Les Matralies étaient des fêtes en l'honneur de Matuta. La fête des Dames romaines était appelée Matronalies.
Il y avait aussi les Matères ou les Mères, qui étaient symbolisées par des Déesses révérées à Engyon, ville de Sicile.
On célébrait aussi des Mystères à Samos, île de la mer Méditerranée, vis-à-vis de l'Ionie, en l'honneur de Junon qui y était adorée et qu'on avait surnommée Samienne.
On appelait lustration une cérémonie religieuse très fréquente chez les Romains. Elle se faisait ordinairement par des aspersions, des processions, des sacrifices d'expiation. Les plus solennelles à Rome étaient celles des fêtes lustrales, qui se célébraient de cinq ans en cinq ans, d'où vient l'usage de compter par lustres (comme les Olympiades). C'était la période de renouvellement des unions consacrées pour cinq ans.
Le mot lustration, qui éveille une idée de propreté, rappelle le mot sabéisme (voir l'article sur la Perse) qui contenait la même idée ; ce qui prouve que les hommes n'ont gardé que ce souvenir, alors que toute la partie abstraite de l'enseignement donné dans les Mystères avait disparu. Les ministres de Cybèle se nommaient Galli, ainsi que les ministres de Mabog. (Voir Cailleux, Or. Celt., p. 298.)
On ridiculisa Cybèle et les Sibylles.
De Cybèle on fit Cyboleth, en attendant les Catholiques qui en feront Saint Sabadius, et comme les Sibylles avaient rétabli la loi de la communion sanctifiée et réglementée, la Sibylle devint le vase d'élection, ce qui fera donner le nom de ciboire au vase dans lequel les prêtres catholiques conservaient les hosties consacrées, image des anciens épis de la Déesse Cybèle.
La Sibylle garda le prestige mystérieux de la femme cachée comme l'antique Schyl (Achille) d'Homère, dont elle semble une résurrection. Faisons remarquer que les Mystères sont toujours fondés par trois femmes : un triangle. Et c'est de là que vient l'idée du tré-pied des Prêtresses. Dans la langue germanique, trois se dit drey et pied fus. Voilà donc un nom, Dreyfus, qui a une haute signification mystique.
La Prêtresse, pour enseigner, s'asseyait sur un trépied sacré, ordinairement d'or ou d'argent, devenu une espèce de petite table triangulaire qui existe encore dans les Loges maçonniques.

LES SIBYLLES CONNUES
Les Sibylles étaient des femmes qui enseignaient dans les Mystères, qui parlaient ou qui écrivaient.
Quelques-unes ont laissé un nom dans l'histoire. Artémis est le nom de la Sibylle de Delphes, qu'on nommait aussi Daphné ; nom donné aussi à Diane. Nicostrate est une fameuse Sibylle surnommée Carmentis et Carmenta, du mot latin Carmen, parce qu'elle ne donnait jamais ses enseignements qu'en vers. La Sibylle de Cumes était appelée Déiphobée ou Démo, ou Démophyle, ou Hiérophyle, ou Amalthée. On croit aussi qu'une savante appelée Sabra était la Sibylle de Cumes.
Il faut croire que cet endroit était un centre d'enseignement où ont brillé plusieurs femmes.
La Sibylle Erythrée, Erophyle, parlait à Samos.
L'Hellespontique à Marpèze, bourg de l'Hellespont.
La Lybienne en Lybie. La Tiburtine, qu'on appelait Albumée, était une fameuse Sibylle qui rendait ses oracles dans les forêts de Tibur (aujourd'hui Tivoli). Cette Sibylle, qui était la dixième, se nommait aussi Abuna ; elle était révérée comme Déesse.
Hésyschia (silencieuse), à Clazomène, était une Prêtresse de Pallas qui faisait ses fonctions sans parler.

LES LIVRES SIBYLLINS
En 604 avant notre ère, on institua à Rome des Décemvirs pour garder les Livres Sibyllins. On donnait donc une grande valeur à ces livres. Mais on ne l'avoue pas. Voici ce qu'on raconte dans les histoires modernes :
« Une vieille femme, qu'on disait être la Sibylle de Cumes, vint présenter à Tarquin le Superbe (de 534 à 509) neuf volumes d'oracles dont elle demandait un prix exorbitant. Tarquin ayant refusé de les acheter, elle en brûla trois et demanda encore le même prix pour les six autres. Nouveau refus. Elle en brûla trois encore et demanda toujours le même prix. Le roi, voyant, là quelque chose de merveilleux, acheta les trois derniers et les déposa au Capitule. »
Telle est la légende.
Des prêtres étaient chargés des Livres Sibyllins, qu'ils ne pouvaient consulter que sur un décret du Sénat et qu'il leur était défendu de montrer sous peine de mort. On croyait que ces Livres contenaient les destinées de Rome.
Donc, à Rome, comme partout, nous trouvons des Livres sacrés écrits par des femmes. Nous ne savons pas ce que contenaient ces livres, mais les soins pris pour les cacher nous prouvent qu'ils renfermaient les vérités que les hommes n'aiment pas à entendre dire. La grande importance qu'on leur reconnaissait est, du reste, pour nous une indication précieuse.
Pendant que les Romains enfermaient ainsi la parole sacrée de la Femme qui les gêne dans la libre manifestation de leurs instincts, ils se disputaient le pouvoir.

LES VAL-KYRIES
Les Sibylles continuent l'œuvre des Val-Kyries, qui étaient les Prêtresses de Vénus. Elles exerçaient la suprématie spirituelle (Val ou Bal, vallons, a fait Val-Kyrie). Kyria signifie Maîtresse.
Ce nom porté chez les Hindous y est devenu un vocable, Kri ou Çri, qui se met devant les noms de femme pour leur donner un caractère de suprématie spirituelle.
Les Grecs le représentent par un monogramme fait de deux lettres, le X et le P (le chi et le ro).
Ce mot fait kritère, kriterion (critérium), jugement divin. De Kyrie on a fait kurion, chef d'une curie, quand le prêtre a pris la place de la Prêtresse, et on nous, dira que le curiom c'est le prêtre qui préside aux sacrifices d'une curie, le chef d'une curie. Les Catholiques en ont fait le mot curé.
La légende raconte cette profanation en ces termes :
« La vérité menacée, c'est la Valkyrie gardée dans un château de flammes dont les approches sont défendues par les rochers, par les nuages, par les fantômes, par les esprits des ténèbres. »
Cependant, la vérité peut être conquise par les chevaliers sans peur et sans reproches. On les appelle Catanes parce qu'ils font partie d'un ordre et en portent la chaîne (Catena).
On peut rapprocher les Kyries des Galli, prêtresses dont le nom se retrouve dans Galla-Thea.

RÉACTION DE LA FORCE CONTRE L'ESPRIT
Chaque manifestation féminine est toujours suivie d'une manifestation masculine.
Les femmes viennent d'instituer le culte de l'Esprit, les hommes vont instituer le culte de la Force.
Le nom donné à la Déesse, HERA, en qui on faisait résider la noblesse et la souveraineté, va être mis au masculin, HER. Ce mot fera Her-man (frère, chef) ou Gher-man (cousin) et signifiera un souverain, un maître.
En suédois, il signifie une armée, parce qu'une armée est composée d'hommes. Heria, c'est la dévastation, Herbod, la déclaration de guerre, Herbunal, les armes et l'appareil militaire.
Her-ôll est le chef des Her-man, l'homme fort. Ses ennemis le surnommaient Ogmi, qui signifie « la puissance » (mauvaise) ou la grande armée (des hommes). Ce mot est composé de Hug-mûch. Le premier terme, hug ou huge, signifie grand ; conservé en anglais il signifie très vaste ; il a servi de racine au mot augere, comme au français augmenter.
Le second, mûch, conservé en allemand, y a pris, par la suite, une signification analogue à celle du mot may, d'où Mayer, un puissant, un maître. « Le mot mayer, dit Fabre d'Olivet, vient de mah ou moh, force motrice. On dit encore en anglais may, en allemand mühe. Nous avons changé le mot mayer en celui de Maire ».
Ce nom Her-ôll, en se chargeant de l'inflexion gutturale dans celui de Hercôll, ou Hercule, est devenu célèbre dans le monde entier. On appelait Irminsul, ou plutôt Herman-Sayl, le symbole de ce dieu représenté par une lance.
Si nous nous rappelons que ces hommes guerriers étaient en opposition avec le monde gynécocratique où régnait l'Esprit féminin, nous comprendrons pourquoi on leur donna un nom qui indique la grossièreté et l'infériorité : Her-cul (1). Et ce mot voulait dire un chef de soldats.
D'après Cailleux, Saldures, en celtique, représente l'élite des guerriers. Du mot celtique Soldure, en gallois Sawldwr, s'est formé, par analogie, l'anglais soldier, le belge soldær, le français souldait (soudard) et soldat. (Les hommes de guerre que l'on salarie.)
On écrit Hercule ou Herkul.
Le premier travail de ce dieu, c'est sa victoire sur le lion de Némée. Cet animal (sphinx), selon Diodore, était d'une grandeur énorme et ne pouvait être blessé ni par le feu, ni par l'airain, ni par les pierres : c'est la force spirituelle de la Déesse.
Et admirons l'ignorance des Grecs ! Ils donnent à Herkul deux fils, l'un nommé Celte et l'autre Galate !...
Quand le mot Her-kul descendit des Hyperboréens chez les Grecs, où l'on défigurait tout, on donna à l'homme fort, Her-cul, le nom de Hera-clès, et on justifia ce changement en disant que cléos signifie gloire.
On confondit Hercule avec Hera-clite (celle en qui résidait la gloire de l'Esprit), et on changea la signification des mots ; on prétendit que Hera-clède signifie « un homme armé en guerre ».
Et c'est ainsi que les étymologistes qui voudront, plus tard, tout expliquer à la plus grande gloire de leur sexe, diront que Héraclès vient de Heer (héros) et cléos (gloire). Aussi c'est le nom que se donnaient les grands orgueilleux révoltés, il signifiait pour eux « les mâles, les forts, les illustres ». Ils le faisaient dériver du mot held, « un héros ».
Herkul va s'appeler Hérold chez les Celtes, d'où on fera Roll, Raoul, Rolland, nom qui, décomposé, Roll-and, signifie « l'homme fort dominant sur une étendue de terre ».
(1) On dit qu'Her-cul avait parcouru les mers assis dans un pot, in scypho (De Grave)

TRANSFORMATION DU DRUIDISME
L'institution d'une société secrète pour sauver la vérité de la destruction nous montre l'étendue du désordre que le « déluge de Ram » avait produit. Il fut le point de départ d'une guerre intestine qui ne devait jamais finir.
Les Druidesses, d'abord toutes-puissantes, perdaient peu à peu leur influence, elles sentaient que leur autorité chancelait, on les révérait moins ; le Druide se libérait de tous ses devoirs envers elles, mais non pas sans luttes. L'homme ne veut pas accepter les injustices de la Nature, il se déclare l'égal de la Déesse, en attendant qu'il se mette au-dessus d'Elle. En la voyant déifiée, il se disait : c'est injuste ! Pourquoi ce qui est bien pour Elle serait-il mal pour moi ? Et s'appuyant sur ce raisonnement, logique en apparence, mais faux dans le fond, il marchait à la conquête de sa liberté morale, il rejetait toutes les entraves qui le gênaient.
Les Druides jusque là fidèles à la science sacrée, se divisèrent. Les vrais initiés continuèrent à servir la sainte cause, mais les esprits faibles se laissèrent entraîner dans la voie de la révolte et s'affranchirent peu à peu de la direction féminine.
Ceci nous explique pourquoi le Druidisme est présenté sous deux aspects : tantôt c'est la doctrine supérieure et ses ministres sont des hommes de bien ; d'autres fois c'est une affreuse superstition, qui succède au culte simple des premiers temps, en même temps qu'une religion intolérante et farouche.
Pour expliquer cette transformation, il faut envisager l'évolution des facultés humaines.
L'homme change en avançant dans la vie ; celui qui était docile dans ses années de jeunesse subit l'atteinte de la réaction physiologique de son sexe, et cela lui donne une nouvelle physique qui engendre l'audace. Il subit, en même temps, la réaction psychique qui fait naître en lui l'erreur et l'orgueil. Ceci nous explique pourquoi les hommes de cette époque devinrent impatients de toute sorte de joug, s'irritèrent de la moindre contrariété, rejetèrent toute discipline et se firent de la liberté à reconquérir un idéal sauvage auquel ils sacrifiaient tout, même leur vie.
Mais leur conscience n'était pas encore engourdie, et ils sentaient toute l'horreur de leur sacrilège ; aussi ils cachaient dans les sombres forêts leur culte devenu farouche et cruel, en même temps qu'ils se donnaient l'air austère. C'est la suprême hypocrisie qui va naître.
Ajoutons, cependant, pour leur défense, qu'il faut tenir compte de la calomnie répandue sur la religion druidique par les Grecs et les Latins qui ont présenté les Druides comme des hommes sanguinaires. La question reste à étudier dans son origine et dans son évolution.
Il en est de même des immenses richesses qu'ils surent accaparer.
Rappelons que la propriété collective familiale est à la base de toute société matriarcale. Donc, au début, les Druides n'avaient pas de propriétés. Mais par la suite ils prélevèrent un revenu ; de plus, ils recevaient des dons et, ainsi, devinrent propriétaires d'une grande quantité de terre attachée aux sanctuaires, ce qui mit entre leurs mains des trésors immenses.
Déjà en Chaldée un fait analogue se produisait. Les officiants appelés Patesi formaient une caste privilégiée près des Déesses. Ils étaient investis de biens, mais qui étaient inaliénables et dont ils n'avaient que la gestion, le fonds restait à la communauté.

LA SCIENCE DES DRUIDES
Les Druides vont changer la science. Celle qu'ils vont faire sera l'expression de l'orgueil masculin.
M. Dottin nous dit : « Une glose de Senchus Mor, recueil de jurisprudence irlandaise, nous apprend que les Druides irlandais disaient que c'étaient eux qui avaient fait le ciel et la terre, la mer, le soleil, la lune, etc. Et il est possible que ce soit là le dernier mot de cette cosmogonie druidique dont, sans la connaître, on s'est plu à vanter la profondeur scientifique. » (Etudes sur l'antiquité celtique, p. 379.)
Voilà un auteur qui confond la science des Dryades et la parodie qui en a été faite par les Druides. Et c'est quand la science est devenue absurde qu'elle est enseignée avec le plus d'éclat. Ainsi, chez les Irlandais, les Druides sont entourés de nombreux disciples. Cathbal avait auprès de lui cent hommes qui, sous sa direction, apprenaient le Druidisme (Druidecht).
Les Dryades, qui avaient étudié la botanique, connaissaient les propriétés de toutes les plantes.
Les Druides vont leur disputer cette connaissance. Ainsi, d'après Pline, Apulée et Marcellus, le gui, fécondant et antidote, guérit tout. Le trèfle (visumarus) est bon contre le vertige. La jusquiame (belinuntia) guérit les maux de l'aine et du pied ; la verveine est un remède contre l'ophtalmie ; la bitoine (vettonia) sert à faire un vinaigre bon pour les maux d'yeux et d'estomac et guérit les morsures de serpent ; avec le rodarum on fait un onguent contre les tumeurs et les abcès, à condition que l'arbuste n'ait pas été touché par le fer et que le patient, après l'onction, crache trois fois à droite ; l'onguent est encore plus efficace si la friction est faite de la main droite par trois hommes de nations différentes ; l'herbe aux corbeaux sert d'antidote ; la pierre de la source de la Saône est un fébrifuge (Qui combat et guérit la fièvre).
Puis n'oublions pas que Ram a fait un Zodiaque ; on dira que certaines herbes magiques mises en rapport avec les décans du Zodiaque ont des vertus curatives (Dottin, Etudes sur l'antiquité celtique, p. 368).
Les Druides vont imiter le culte des Dryades.
Tous les neuf mois, ils célèbrent une fête dans laquelle neuf personnes par jour sont sacrifiées pendant neuf jours consécutifs. C'est ainsi qu'ils imitent le sacrifice sacré qui donnait la vie après neuf mois de gestation. C'est de là qu'est venu l'usage des neuvaines.
On appelait ceux qui étaient désignés pour être voués à la mort et on leur faisait croire qu'une Divinité terrible demandait leur vie.
On met déjà le Principe divin au masculin. On enterrait vivantes de jeunes vierges ; on les précipitait dans les fleuves.
Ce fut une époque de carnage général ; une jalousie furieuse, déchaînée, poussait les hommes, une épidémie de meurtre sévissait. Et c'est Ram qui avait déchaîné ce mouvement !...
Les Druides représentaient le serpent (l'homme méchant) par Hu.
Des ailes déployées représentaient l'esprit divin.
Quand, plus tard, les prêtres masculinistes imiteront les Mystères, ils diront que c'est Hu, devenu Houve, qui a fondé les Mystères d'Is et de Helstown. Et comme ils changeront l'esprit de l'enseignement en y introduisant la psychologie masculine ils mettront dans ces cérémonies des jeux obscènes qui les flatteront.
Pour eux (et encore même pour les Bretons modernes), le mot Houve signifie tout à la fois bêche (qui ouvre la terre) et mariage (Dict. flam. de Darcy).
Puis nous trouvons Hu-Kadarn, héros assis sur le trône d'or des Déesses et qui va passer pour le Père de la race celtique.
Si le chêne est devenu, chez les Gaulois, l'emblème du sexe mâle, c'est à cause de la forme du gland, qu'on oppose à la fleur de l'Acacia qui représente le sexe féminin. L'arbre de vie était célébré dans les Mystères le jour du solstice d'hiver (Noël). Pour imiter cette fête, les masculinistes allumaient des flambeaux de bois résineux autour de leurs vieux chênes.
Le culte du chêne s'explique aussi parce que c'est sur cet arbre que s'attache le gui, qui symbolise le Prêtre ; c'est une plante parasite qui, comme le sacerdoce masculin, vit aux dépens de la société qu'elle étouffe comme le parasite étouffe l'arbre sur lequel il se greffe. Donc, on reprochait aux Druides, qui prétendaient prendre la place des Druidesses, de s'affranchir du travail masculin.
Les Druides se justifiaient en disant que le gui, c'est l'image de l'homme uni à Dieu, car l'antique Déesse est remplacée par un dieu mâle qui aime le sang des victimes.
Ces explications ne convainquaient personne, et comme le chêne était appelé tann, d'où l'on fit tannare (tanner), il est resté dans le langage vulgaire que tanner quelqu'un, c'est l'ennuyer.
Et le gui fut appelé le rameau des spectres.
Le grand mot des Mystères, institués par les Déesses, était « la renaissance » promise aux initiés.
Mais ce mot voulait dire une nouvelle manière de vivre, plus morale.
C'est ce mot renaissance qui va créer une confusion voulue dans les esprits pervertis. On va confondre revivre moralement avec revivre dans un autre monde.
Les Druides sanguinaires, qui aiment les sacrifices humains, forme religieuse du crime et de la folie, enseignent qu'il y a une autre vie, semblable à celle-ci, pour consoler ceux qu'ils tuent (L'autre monde des Druides, c'est la copie du monde féminin, mis sur le plan du surnaturel.).
Toutes les passions masculines furent transmises à l'âme des ancêtres : ils devinrent jaloux comme les hommes, comme eux avides et soupçonneux ; et sur cette base on vit alors les Druides instituer un culte nouveau, le culte de la mort, donnant ainsi un prétexte à la satisfaction de leurs instincts sanguinaires qui commençaient à se manifester. On tue, on tue tant qu'on peut, en mettant les crimes sous l'égide de la religion !
Le Druide prend la direction des cérémonies, qui, dès lors, au lieu de sanctifier la vie, furent des prétextes de mort. Les sacrifices changèrent de forme et de signification. On immola des animaux. Les mots changeaient de sens : le sacrifice, ce n'est plus le sang que la Mère donne, séparant ainsi d'elle-même le principe qui fait la chair de l'enfant ; on feint de ne plus comprendre cette loi physiologique, et l'on dit : « Les puissances de la Nature veulent un sacrifice sanglant », et l'on fait croire qu'on va les satisfaire en leur offrant le sang d'une victime, en tuant, alors que le sacrifice que voulait l'Eternelle Nature, c'est celui qui donne la vie, non la mort.
Les Druides, fourbes et menteurs, disaient à la foule : « La Druidesse demande un messager pour aller visiter les ancêtres et leur porter des nouvelles de leurs descendants. »
C'était l'instinct masculin cherchant la cruauté et la justifiant par le mensonge. On précipitait les malheureux qui y croyaient sur la lance du Hermansayl, ou on les écrasait entre deux pierres, ou bien on les noyait dans un gouffre.
Les Druides avaient introduit dans leur culte le surnaturel. Pour eux, Hésus fut le Dieu incréé, la cause première, le Dieu suprême qui préside à tout. Ils adoptèrent l'immortalité de l'âme, comme tous les Prêtres, et les récompenses ou les châtiments dans une autre vie. Cela permettait de supprimer la justice de ce monde qui avait été instituée par des femmes. C'est dans les époques de décadence et de désordre que ces croyances sont imposées pour donner aux victimes du despotisme les consolations qui devaient leur faire supporter le régime injuste de l'usurpateur.
Comme les chevaliers portaient des colliers et des bracelets d'or, les Druides les imitèrent et portèrent, en même temps, des couronnes de chêne.
Ils devinrent envahissants, se firent prêtres, médecins, sacrificateurs, devins, philosophes, législateurs : tout. Ils furent hommes et femmes à la fois.
Le Druide se fait aussi magicien, puis il enivre de cervoise le Celte crédule et lui procure, dans le sommeil de l'ivresse, le songe d'une vie enchanteresse dans les forêts walhaliennes.
La Tour d'Auvergne dit : « Les chefs laïques n'étaient que les exécuteurs de leurs volontés, mais ils n'obtinrent ces avantages qu'après avoir écrasé tous les autres pouvoirs sous le poids de la superstition. »
Dans les Commentaires de César (L. VI), il est dit des Druides : « Les hommes abandonnés des dieux sont des hommes perdus ; on les évitait comme on évite une contagion que l'on craint de gagner. »
Le portrait fait d'eux par de Grave leur donne un certain prestige, mais qui s'effondre dans l'autoritarisme d'un cléricalisme imbécile. Il dit :
« Les Druides de Gaule sont réputés les plus justes des hommes. Aussi les fait-on juges des contestations publiques et privées. S'il y a eu un crime de commis, si un meurtre a eu lieu, si l'on se dispute à propos d'héritage ou de limite, ce sont eux qui décident et qui déterminent les amendes et les châtiments. Si un particulier ou un homme public ne veut pas s'en tenir à leur sentence, ils lui interdisent les sacrifices, c'est là le châtiment le plus grave chez eux ; ceux auxquels a été faite cette interdiction sont mis au nombre des impies et des criminels ; tout le monde s'écarte d'eux, on fuit leur approche et leur conversation pour ne pas recevoir quelque dommage de leur contact ; s'ils déposent une plainte, on ne leur rend pas la justice. »
Les femmes furent l'objet de la jalousie féroce des Druides, qui font d'elles des espèces de sorcières pouvant se transformer en animaux divers.

LA LANGUE DÉFORMÉE
La fatuité fait reconnaître le Druide, qui ne comprend plus la pensée abstraite, mais fait des grammaires, pose des règles de langage, défait la langue primitive et prétend imposer ses réformes et ses lois absurdes.
Le déluge de Ram avait fait régner la grande nuit sur la pensée humaine, la grande rébellion avait tout changé, la langue comme les idées.
La Femme était obligée de se taire, terrorisée. C'étaient les hommes qui exprimaient: leurs sentiments et ils étaient mauvais.
D'abord, ils verront dans la Fée (Fata) le Fatum, c'est-à-dire le destin qu'il faut subir. Ce n'est plus une chose qui est désirée c'est une chose imposée et qui cause une fatigue, Fatigo, en même temps que Fastico qui désigne l'homme fatigué, épuisé. Donc il rend la Fée responsable de ses fatigues, alors qu'elle ne s'est adressée qu'à son esprit. Mais son enseignement, dont on ne veut plus, est représenté maintenant comme une chose magique, Fascino, qui consiste à faire des charmes, à jeter des sorts pour nuire aux hommes, et le mot Fascinum va signifier charme, maléfice. Tout cela servira d'excuse à l'homme fatigué, pour exprimer son dégoût, son dédain, son mépris, Fastidio, et le mot Fastiditus va signifier rejeté, méprisé, dédaigné. Tout cela va se traduire en lui par de l'aversion, de l'orgueil, de la morgue, de l'arrogance, Fastidium, et alors le mot tant respecté, tant exalté, va devenir un terme de mépris. La pauvre Faée va devenir Fæcis, Fæx, mots qui signifieront lie, bourbe, vase, dépôt, résidu !... Fæx populi : la lie du peuple, la plus vile populace.
Mais comme, malgré tout, les mots gardent leur prestige, des hommes imiteront les anciennes Fées, ce qui les fera accuser de sottise : Fatuitas. En effet, quand la Fata est masculinisée, elle n'est plus que le Fat, et Fatuus désignera l'insensé, le sot, l'impertinent, le fou, le bouffon.
Puis viendront ceux qui feront la langue pendant l'époque de la mythologie, et pour eux Fatua deviendra l'épouse de Faunus. Puis, plus tard encore, viendront ceux qui feront la Rome impériale, et ceux-là, mettant tout le passé dans leur système de domination, feront du mot Fascis un symbole de force, le faisceau de verges, surmonté d'un fer de hache, qu'on portait devant les premiers magistrats de Rome.
Voilà donc un mot qui a servi à désigner la puissance de l'esprit féminin, et qui sert ensuite à rendre les honneurs à l'autorité masculine, au pouvoir de l'homme !

Nous venons de voir comment l'évolution du mot donne la clef de l'évolution des idées, et comme ce système de psychologie éclaire l'histoire de la formation des langues.
Nous n'avons considéré le mot Faée (Fée) que dans ses altérations latines. Nous avons aussi à le considérer dans ses altérations grecques.
La première chose à considérer, c'est le changement d'orthographe qui résulte de la prononciation des lettres grecques. En effet, ici l'F va se changer en Ph. Ainsi la Fée va devenir Phæthusa, mais on lui donnera un frère Phaéton, fils du soleil, qui sera lui-même Phœbus, et de là viendra le mot Phara, d'où Phare.
Il ne faut pas oublier que le Grec est le plus grand orgueilleux et le plus grand masculiniste du passé.
Nous sommes dans une période de transition ; on dit encore, pour désigner les anciens combattants qui défendent la vérité révélée par la science antique des Fées, la Phalange, c'est-à-dire ce qui sert de levier, et Phalangita, le soldat d'une phalange. C'est l'initié ; il est aussi Phalanx, mais ces soldats vont devenir les prêtres d'Apollon, Phineos.
Pharus (Pharos) ne sera plus l'esprit qui éclaire, ce sera une ville d'Egypte.
Pharæ sera une ville de Laconie.
Des peuples prendront des noms qui rappelleront l'ancienne lutte.
Les Phæaces (habitants de Corcyre) deviendront les Phéniciens. Ce mot Phæaces, au singulier, est Phæax, d'où Phénix.
Quand la Femme ne sera plus l'Esprit, mais le sexe, elle sera comparée à la Phiala (coupe évasée), et ceux qui la considéreront ainsi seront les Philistæi et les Philistini (les Philistins, peuple de Macédoine).

Les Celtes écrivent avec les mêmes caractères que les Grecs, mais ceux-ci ont défiguré la langue ; ils ignoraient l'idiome celte, dont le leur tirait cependant son origine.
Les Grecs et les Latins ne nous ont transmis aucun mot de la langue celtique sans donner à ces mots une terminaison conforme au génie de leur langue, à son euphonie. Pomponius Méla dit que la prononciation des mots gaulois et leur mécanisme étaient si difficiles à saisir, qu'il était impossible aux Romains et aux Grecs de citer un seul de ces mots dans leurs ouvrages sans en altérer la forme et le sens (L. III).
Les Latins disaient du celte : « La langue des barbares, plus voisine de l'origine du monde que les langues polies et cultivées, devait être, par cela même, plus agréable à la nature et aux dieux immortels. »

Comment nier l'influence de la Femme quand d'un seul mot qui la désigne : Fée, on fait tant de choses ? Et nous n'avons pas fini.
Si nous cherchons l'origine des langues égyptienne et hébraïque, nous allons aussi y trouver des racines celtiques, et d'abord le mot racine Faée. Ce mot va devenir faraï ou pharaï, parler, et c'est de ce mot que les Egyptiens feront le mot Pharaon (l'inspiré qui parle). Et les Hébreux, de cette même racine, feront Prophétesse (premier oracle) ; les Grecs qui copiaient tout en feront le mot Philippique (Discours).
Les mots Pharao, Pharaonis, resteront dans la langue grecque, mais qui les rapprochera de l'ancienne Fata ? Qui saura que le nom de Phasias, donné à Médée, en vient, ainsi que Phædra dont on fait la fille de Minos (personnage légendaire) ?
C'est Apollon qui, dans la Mythologie gréco-latine, va résumer toute la vie spirituelle des Déesses celtiques. Mais son culte sera précédé de celui de Dionysos qui va représenter le déchaînement du sexe mâle.

LES CULTES NOUVEAUX EN GRÈCE
DIONYSOS
C'est au VIème siècle que la Grèce vit apparaître le culte de Dionysos, le Dieu des ivresses furieuses, le sadisme déïfié, entraînant un bruyant cortège de Satyres, de Thyades et de Ménades qui l'entouraient de leurs danses échevelées.
Ces Orgia avaient la prétention d'être un culte religieux. Disons, du reste, que, dédaignées des classes élevées et des penseurs, elles n'entraînaient que la foule inconsciente et inculte. Le culte de Dionysos, cette apothéose des jouissances bestiales, servait de base à la fraternité universelle des pervers, unis dans le vice. Ce fut un insolent défi jeté à la sagesse divine, l'ancienne Théosophie.
Le temps que les anciens appelèrent « le siècle dionysien » fut le début de l'effondrement de la morale féminine. Michelet apprécie ainsi cette époque : « Cette révolution semble s'être accomplie de 600 à 500, dit-il. Mais les choses se précipitèrent. Au Bacchus d'Eleusis, qui seul garda quelque décence, va se mêler l'ignoble engeance des petits Bacchus de l'Asie (Sabaz, Attis, Adon, etc.), tout cela avant 400. Le grand Bacchus qui déchira Orphée, le sauveur, disait-on, des femmes et des esclaves, Dieu de la liberté (de délire et d'ivresse), ce Bacchus, avec de telles masses, était un tyran dans la Grèce. Il en imposait par la terreur.
« Hérodote, qui lut, comme on sait, son histoire aux jeux d'Olympie en 452 (4 ans après la mort d'Eschyle), est tellement sous cette impression qu'à chaque fois qu'il trouve Osiris, le Bacchus égyptien, il déclare qu'il se tait et qu'il n'ose parler. » (La Bible de l'humanité, p. 255.)
A l'entrée de ce siècle (le VIème), dit-on, une terreur sacrée s'empara d'Athènes, qui appela à son secours le Cretois Epiménide qu'on appelait « le nouveau Curète ».
Les Curètes étaient des personnages des temps antiques, qui avaient défendu les Déesses. On les disait compagnons de Zeus et aimés des Dieux.

LUTTE CONTRE LE NOUVEAU CULTE
La lutte des femmes contre le nouveau culte fut formidable. La terreur s'était emparée d'Elles ; elles sentaient l'outrage fait à leur sexe par l'orgie masculine et formèrent des bataillons d'Amazones décidés à empêcher, par la force, cette profanation de la religion.
La reine Nicæa s'avança à la tête d'une armée de femmes à cheval pour combattre ces nouveaux adversaires. Les auteurs masculins nous montrent les femmes vaincues. Nonnos, entre autres, dans son seizième livre, nous représente Dionysos comme vainqueur des Amazones ; il décrit la résistance de Nicæa et son final assujettissement à Bacchus, « car le vin enflamme l'amour et dompte la femme ».
D'après Pausanias, les Amazones fuirent devant Bacchus comme plus tard devant Héraclès (il serait donc postérieur ?) sous la protection d'Arthémis éphésienne.
Eschyle, dans les Euménides, leur fait dire plusieurs fois les jeunes Dieux. Si ce mot atteignait Phœbus, bien plus directement il touchait Bacchus, dernier-né de l'Olympe (Hérodote). « Les terribles Déesses accablaient cet intrus du fond de leur antiquité », dit Michelet. Donc la femme lutta contre cette révolution masculine, on ne peut le nier. Et cependant on le nia.
Quand l'homme s'émancipe, c'est-à-dire se soustrait à la contrainte sexuelle imposée par la loi morale (d'origine féminine), il se figure que la femme partage sa joie, alors que c'est ce qui crée sa douleur ; il se figure que la Femme aussi va s'émanciper de quelque chose, alors que la loi morale ne lui crée pas de contrainte et que c'est la domination sexuelle de l'homme qui lui en crée une, terrible ! C'est pour imiter la Femme dans son privilège sexuel que l'homme brave la morale, sans comprendre que le culte aphroditique ne peut pas passer d'un sexe à l'autre, Aphrodite ne peut être que Femme ; quand l'homme l'imite, il est monstrueux. Si des femmes ont suivi l'entraînement bacchique, comme certains auteurs l'affirment, sans doute pour excuser les hommes (Diodore les montre suivant l'armée de Dionysos), c'est parce que les bacchants les excitaient à participer à leurs débauches, c'est parce qu'ils les enivraient. Du reste, le vin, le raisin, devint un symbole qui remplaça l'épi de Déméter.
On nous dit que sept nymphes de Dodone suivirent Dionysos par le monde et furent, comme Hyades, mises parmi les étoiles.
Que les hommes aient glorifié les femmes qui les encourageaient dans leurs vices, cela est évident, car c'est dans l'instinct masculin. Mais il est aussi dans l'instinct de l'homme de se justifier quand il a mal agi en reportant sur les autres la responsabilité de ses actes, et, dans le cas qui nous occupe, nous voyons les hommes chercher à atténuer leurs fautes, d'une part en prétendant qu'elles furent partagées par les femmes, d'autre part en prétendant être soutenus par elles et agir pour elles.
C'est ainsi que Dionysos, qui vint renverser la Religion féminine et le régime gynécocratique, prétendit servir l'intérêt féminin et restaurer sa puissance.
C'est toujours ainsi, du reste, que les usurpateurs se présentent au public, comme des sauveurs.
Dionysos prétend donc relever le régime gynécocratique et rendre à la Femme son pouvoir.
« Présentée ainsi, dit Bachofen, la religion dionysiaque paraît être un appui pour le principe démétrien, et cependant elle occupe une place importante dans les causes qui hâtèrent la fondation victorieuse de la théorie paternelle.
« Cette religion donne la place prépondérante au principe masculin et fait plus que toute autre pour la dégradation de l'homme et sa chute au-dessous de la Femme. »
Donc, quand l'homme triomphe dans les luttes de sexes, il est dégradé ! C'est profondément vrai.
Dionysos est si peu le sauveur des femmes qu'il se met lui-même au rang des vainqueurs des Amazones, comme Persée, Thésée, Héraclès.
« Mais (et c'est ici Bachofen qui parle) la femme oublie vite les hostilités, elle pardonne, et la lutte finit par une réconciliation et une alliance ; la haine de l'homme pour la femme se change, chez le vainqueur, en amour. Comme Persée, comme Thésée, touchés, éblouis par la beauté de l'ennemie expirante, deviennent amoureux d'elle, ainsi Dionysos s'unit à Nicæa, la prêtresse d'Arthémise, et dans leur traité de paix il dit qu'il ne veut pas de destruction, mais qu'il apporte à la femme amour et rédemption. »
Son but est de l'amener à une union paisible avec l'homme, sa loi, « abandon à l'époux », c'est la condition de son « mystère ».
Donc ce n'est pas une lutte, mais un traité de paix qui va obliger la Femme à se livrer à l'homme. C'est ainsi qu'il arrive toujours à ses fins.
Et Bachofen ajoute que les secousses, les combats qui accompagnaient le mouvement ont surtout contribué à en propager le souvenir. Le nouveau culte, souvent accompagné de sacrifices féminins (on tuait les femmes qui ne se livraient pas), fut le plus aimable et le plus terrible des cultes. On le justifie en le présentant comme un sacrifice expiatoire pour les crimes des anciens temps (c'est ainsi qu'on appelle la liberté sexuelle de la femme) ; c'est une punition infligée par le Dieu nouveau (Pausanias, Strabon).
Donc, on punit la femme pour ne pas s'être livrée à l'homme quand elle avait encore le pouvoir de lui résister ! Maintenant l'homme triomphe et la femme est vaincue. Et on nous dit que les peuples acceptèrent avec joie cette nouvelle vie qui leur apportait l'union et la paix !
Que les hommes aient éprouvé cette joie, on le comprend, mais la femme !...
Comment ! c'est pour plaire aux femmes que l'on institue le culte phallique, cette obscénité qui leur fait horreur ! Et cette infâme religion eut un succès immense, elle devint presqu'universelle, tant la perversion du sens moral était partout accentuée.
Il faut insister sur le caractère hypocrite de ce culte qui glorifie l'homme en prétendant sauver la femme, parce que le même fait se retrouvera plus tard, et il est bon de savoir quels furent les précédents de ces manifestations psychiques des hommes.
Voici quelques détails que les historiens ne craignent pas de donner sérieusement sur ce culte nouveau :
Dionysos s'entoure de Bacchantes ; seize Matrones æoliennes forment son cortège ; la Prêtresse célèbre ses sacrifices ; elle lui est, en même temps, une épouse, car avec lui commence l'assujettissement, c'est-à-dire le mariage. A Thèbes, ce sont des femmes qui célèbrent ces mystères. Les femmes seules s'approchent de son sanctuaire, elles seules lui font des sacrifices. En Egypte, les femmes portent son image. Dans les processions en son honneur (plus tard à Alexandrie), les femmes occupent les premiers rangs ; certaines d'entre elles (les Charités) tissent un péplum pour Dionysos. Ce péplum est un vêtement féminin. Les mères lui sacrifient leurs enfants. Les femmes æoliennes le cherchent, apprennent qu'il est chez les Muses. Une autre fois, on le voit avec les Grâces. Les femmes æoliennes l'appellent dans les ondes de la mer, demandent que le Dieu au pied de taureau vienne les féconder, et l'on voit encore sur les dessins de beaucoup d'urnes des femmes montées sur des taureaux (symbole mâle) représentant les obscènes mystères du culte bacchique.
Dans la description des Bacchanales romaines, on accentue surtout ceci, que les hommes en sont exclus ; les Matrones seules sont Prêtresses, aucun homme ne doit s'approcher des Bacchus ; la curiosité de Pentheus fut considérée comme un crime.
Enfin, la folie va jusqu'au sadisme, et on voit dans les fêtes syriennes les femmes flagellées jusqu'au sang sur l'autel de Dionysos.
A partir de ce moment, la femme perd sa place symbolique dans le Ciel. Elle devient l'astre secondaire Sémélé, et c'est la lune que Dionysos implore pour lui demander la victoire.
Quel chaos mental !!...
Toutes les femmes, pour les Dionysiens, ont le caractère lunaire : Déméter, Cérès, Ariane, Aphrodite, Athéné, Arthémis. Comme Reine lunaire, la femme est toujours en quête de nouvelles fécondations ; elle suit éternellement le soleil et emprunte de son aurore l'éclat dont elle se pare.
Des profondeurs de la terre dans laquelle Sémélé est tombée, assimilée à la matière, Dionysos la ramène et lui fait partager son immortalité en la mettant dans le firmament sous le nom de Dhyane.
C'est ce Dieu grotesque qui distribue des places au ciel. Maintenant, on nous le montre ramenant sa Mère du royaume des ténèbres. (Ce n'est plus la femme qui ramène l'homme du monde des morts, c'est l'homme qui en ramène la femme. Il n'y a qu'à renverser les rôles et les idées anciennes, point n'est besoin d'inventer.) Comme on le voit, c'est la femme qui est sauvée, alors que c'est l'homme qui était perdu.
Dionysos superbement accorde la rédemption des morts. C'est le fou qui sauve le sage. Il cherche sa Mère, et Héraclès lui amène le chien Cerbère, symbole de l'hétaïrisme ; l'homme couvre de mépris la femme libre.
Tous les symboles sont renversés. La femme va représenter la nuit (puisque c'est l'homme qui est le soleil), et, pour le prouver, on célébrera dans le silence de la nuit les mystères bacchiques qu'on lui offre.
Et pendant que l'homme descend ainsi jusqu'au dernier degré de la débauche, il exige de la femme une chasteté absolue. C'est la loi des mystères dionysiens. La pure matrone seule peut voir le Dieu. Les femmes affirment par serment qu'elles sont pures avant de prendre part aux mystères de l'homme. Ce serait, si c'était raisonné, la condamnation de la fonction sacrée de la femme, l'Ovulation, sanctifiée dans le culte des grandes Déesses dont l'épi est le symbole. Mais cette condamnation n'est que la copie du culte féminin qui exigeait la pureté des hommes.
Et pendant qu'il renverse ainsi l'ancien culte, Dionysos prétend s'allier à la pure Déméter aux fêtes de laquelle le nom des hommes ne doit pas être prononcé. Et on nous dit, après cela, que Dionysos est le Dieu des Femmes, que tous les côtés de la nature féminine trouvent en lui leur satisfaction ; c'est Bachofen qui dit cette monstruosité ; et il ajoute, comme preuve à l'appui, qu'à l'hostilité amazonique et à l'hétaïrisme déréglé le Dieu, ami des femmes, oppose la loi du mariage et l'union sexuelle comme loi exclusive (imposée à la femme). Il montre à la femme la grande loi dans laquelle sa nature peut seulement trouver une paix stable.
Donc le sacrifice de sa liberté est regardé par Dionysos et par Bachofen comme l'idéal féminin ! Et quand la femme s'est ainsi soumise, on lui dit « qu'elle est arrivée à une existence supérieure », qu'elle a trouvé l'harmonie de la vie sexuelle parce que l'homme y a trouvé la sécurité du vice. Mais la femme ne raisonne pas du tout de la même façon, et ce qui le prouve c'est sa lutte contre ceux qui veulent l'assujettir.
Ces auteurs prennent la résignation dans l'impuissance des femmes modernes comme une preuve qu'elles sont satisfaites.
Dionysos, du reste, pour amener les femmes au sacrifice qu'il leur demande, leur promet, comme compensation, une existence future. La Mère qui, pendant son séjour ici-bas, remplit les ordres dionysiens, c'est-à-dire accepte le mariage, est appelée, après sa mort, à une union éternelle avec le Dieu auquel elle s'est vouée.
Donc ce qui est pour la Femme un sacrifice ici-bas, l'union sexuelle imposée, lui est promis comme récompense avec une durée éternelle ! Peut-on, à ce point, mêler et confondre la psychologie masculine à la psychologie féminine ?... Et on fait croire à la Femme que c'est un grand bonheur qu'on va lui donner, et un grand honneur. La Mère ainsi soumise va être dotée d'une couronne qui brillera au firmament, elle jouira de la félicité de Psyché, elle sera parée comme une épouse d'une beauté parfaite, apparaîtra sur un lit de roses, et ainsi elle sera digne de recevoir son seigneur Dionysos, « le Dieu désiré ».
Quelle ironie et quelle folie !... Et on ajoute que c'est ainsi qu'il est « le sauveur tant désiré et tant cherché » ! Il est venu libérer les femmes... de leur liberté et de leur dignité, dont il les a... sauvées !!
Mais, comme cela pourrait ne pas aller tout seul, il ajoute à ses arguments la peur ; il menace, se donne comme Pluton, le Dieu terrible auquel il faut obéir.
Et ce n'est pas tout, il ne se contente pas d'être pour la femme le fécondateur corporel, il prétend aussi s'emparer de son esprit, il veut être pour Elle « le centre de toute son existence dans ses différentes phases ». Il prétend régler les sensations féminines suivant ses caprices, en même temps qu'il prétend lui créer une vie intellectuelle conforme à sa propre mentalité ; il s'empare du cœur et de l'esprit de la femme et l'oblige à accepter ses aberrations surnaturelles comme des vérités. Il est le Dieu de l'orgasme et de la folie, et tout cela a pour symbole le vin qui produit l'ivresse et fait taire la raison. Par dérision, on représente Dionysos comme étant le conducteur des Muses (Musagète).
Son ignorance va jusqu'à attribuer à la jeune fille les conséquences de la sexualité mâle ; c'est à elle qu'on donne « l'amour du sang », ce signe si caractéristique de la dégénérescence masculine : « La jeune fille prend plaisir à voir palpiter la chair tremblante du chevreau découpé, cette amante inconsciente n'épargne pas la vie jeune et fraîche », dit-il.
Il ne savent donc pas, ces hommes, que c'est tout le contraire, que la femme a l'horreur du sang alors que l'homme en a l'amour ?
Il doit y avoir encore ici une substitution de sexes. On a mis jeune fille pour jeune homme, ce qui n'est pas étonnant, puisque dans cette religion tout est renversé.
D'après Apollodore, l'enfant nouveau-né (le jeune Dieu) est confié a Ino-Matuta et, sur le commandement de Zeus, élevé comme une fille, et c'est comme une fille qu'il se présente à Aiola.
Il y avait donc, à cette époque gynécocratique, un honneur à être élevé comme une fille. Le mythe nous le montre passant les premiers temps de sa vie dans la société des jeunes filles, pour imiter Achille, ou Sardanapale (ces deux personnages sont passés du féminin au masculin).
Toutes les grandes Divinités, les Mères florissantes, entrent en relation avec lui par le mariage (il épouse les Déesses). Toutes sont accueillies dans son culte ; il n'aime pas la solitude, veut la Femme près de lui, toutes les femmes, sa sexualité exubérante veut les aimer toutes.
Sur le conseil de Bacchus, Pentheus prend des vêtements de femme et le voile d'Agave. L'homme veut se faire femme. Il ne lui a pas seulement pris les privilèges de sa nature, il lui prend ses vêtements. C'est dans des habits de femmes que les guerriers bacchiques combattent. C'est du reste aussi dans des vêtements féminins que nous voyons les prêtres d'Héraclès. Et plus tard, au temps de Plutarque, le fiancé saluera sa fiancée affublé d'habits féminins.
Dans les mystères bacchiques, dont les cérémonies religieuses sont des jouissances obscènes, les hommes portent des vêtements féminins transparents. Ils sont ainsi représentés par un grand nombre d'œuvres d'art provenant de tombeaux.
Cependant, tout le monde n'accepte pas cette élévation de l'homme. Dionysos-Bacchus est remis à sa place par ceux qui font de lui le représentant du tellurisme poséidonien (la Terre matière et l'eau qui éteint). Ces deux principes sont représentés par Neptune et Bacchus, Dieux fécondateurs, destructeurs de l'Esprit.
La légende dit : « C'est pour cela que presque tous les Grecs sacrifiaient à Poséidon-Dionysos. Instruit dans son enfance par un Hermès, ce Dieu est identifié avec Osiris dont le Phallus est nommé Fécondateur et transporté par les ondes du fleuve au son des trompettes ; il répand de sa bouche un jet d'eau fécondateur sur Ampélos, qui ambitionne le prix de natation ; il est honoré par des régates et reçoit des noms de poisson (Tarquin est aussi représenté avec des attributs de poisson).
« On érige le Phallus dans le lac marécageux de Lernais où il entend les louanges des grenouilles ; on le représente en relation intime avec les animaux des marais, parmi lesquels le serpent, les canards et certains oiseaux que l'on fête au mois de Poséidon. »
Mais, si l'eau éteint le feu de l'esprit, il est un autre feu qu'elle n'éteint pas, c'est celui de l'amour. C'est pour symboliser ce fait que l'on nous montre l'eau unie au feu. Bachofen continue : « Dans l'humidité et dans la chaleur, le Phallus dionysiaque agit, également triomphant du contraste qui semble séparer les deux éléments. » Ce feu impur est représenté par Vulcain.
Avec Héphaïstos (le Vulcain des Grecs), Dionysos est intimement uni. Il règne dans les feux volcaniques, dans l'orage et l'éclair ; il est parent de Phaéton jouant avec l'éclair. Il est une création de la foudre divine, que la Mère ne peut supporter dans l'Arcadie !
« Mais les limites de l'atmosphère terrestre, qui arrêtent Phaéton et Bellérophon, ne retiennent pas Dionysos ; au-dessus d'eux, il s'élève au Ciel où il est représenté sur un trône.
« Là, il apparaît comme conducteur des danses célestes, comme le maître des astres, avec le manteau d'étoiles ; dans ce ciel il accueille ses dévoués, lui le Phallus uranien couronné d'astres. Cependant, il est surtout le roi du firmament nocturne, Lunus, et on célèbre ce genre de royauté en allumant des flambeaux et des lampes pendant les mystères nocturnes. »
Mais ce Lunus-Dionysos est sujet à des changements ; c'est pourquoi on arrive à l'identifier avec Hélios, alors il apparaît comme sol in nocturno hemisphœrio, il n'est pas la pure lumière de l'astre privilégié, laissée à Apollon, qui va représenter l'Esprit ; Dionysos ne représente jamais que la nature phallique créatrice, c'est-à-dire le pôle générateur qui cherche la matière féminine ; c'est pourquoi il abaisse la femme à un rôle tellurique.
Bacchus est le degré inférieur de la force solaire. On ne le fait pas grave comme Apollon, mais on l'unit à la plaisanterie, l'espièglerie, la fureur, l'inégalité d'humeur, comme Eros Gaius entraînant les femmes.
On a trouvé une corrélation entre Dionysos et Osiris.
Plutarque prétend qu'Osiris, c'est Dionysos, qui n'est qu'une autre forme du Dieu des morts. Du reste, on lui fait la même légende : la parodie de la femme vaincue, mais attendant sa résurrection. Dionysos est déchiré par les Titans (parce que les Titans ont déchiré la femme) ; la terre recueille ses membres épars (parce que le monde féminin a été dispersé), elle fait surgir des plaintes et le Dieu naît une seconde fois, revenant des régions inférieures.
Macrobe dit que le soleil des régions inférieures s'appelle Dionysos comme Osiris. Or le soleil inférieur, c'est l'âme descendue dans le sexe.

DIONYSOS FONDATEUR DE LA PATERNITÉ
Dionysos, représentant le Père par le soleil fécondateur et la Mère par la terre fécondée, devait naturellement donner au Père la première place. Mais cette façon d'envisager les choses ne considère que la vie sexuelle, non la vie spirituelle.
L'homme est le sexe premier ; la femme le sexe second. Donc le Père a la suprématie, cela est évident, dans la vie sexuelle.
Mais quand on considère la vie spirituelle, quand on regarde l'humanité par le pôle cérébral, c'est-à-dire élevant la vue de bas en haut, les choses sont renversées ; la femme est le soleil et l'homme son reflet.
Toutes les religions primitives avaient ainsi envisagé l'humanité parce qu'elles émanaient de la femme qui regarde de bas en haut. Il était donné à l'homme avancé dans sa sexualité, et dont Dionysos est le type, de créer une religion qui, regardant l'humanité de haut en bas, renverserait les principes primitifs, mettrait l'homme le premier et prendrait pour emblème de sa supériorité le phallus.
Bachofen, envisageant cette question, dit : « Le passage de la suprématie maternelle au pouvoir paternel forme le pôle le plus important dans l'histoire de la guerre des sexes. Il y a dans le passage au système de paternité une opposition absolue de l'ancien point de vue. Si l'union de la Mère avec l'enfant repose sur la connexité matérielle physique, si elle est reconnaissable et toujours vérité, la paternité procréatrice montre un caractère entièrement opposé ; aucun rapport sensible ne l'unissant à l'enfant, elle ne peut, même dans le mariage, se défaire du caractère d'une pure fiction ; ne participant à la procréation que par l'intermédiaire de la Mère, elle n'apparaît que comme un potentiel éloigné. En même temps, elle représente dans sa nature, comme cause révélatrice, un caractère immatériel, tandis que la Mère, créatrice et nourrice, s'affirme comme « matière », comme réceptacle de la semence et comme nourrice.
« Le règne de la paternité marque un empiétement de l'existence humaine sur les lois naturelles. »

LES INCONSÉQUENCES DES CULTES NOUVEAUX
Le but de l'homme, en créant le culte masculin, avait été de faire prédominer la vie sexuelle de l'homme et de supprimer celle de la femme, c'est-à-dire de renverser l'idée contenue dans les religions primitives qui sanctifiaient le sexe féminin et donnait un frein au sexe masculin.
Mais comment l'homme qui, pour la satisfaction de ses besoins sexuels, cherche la complicité de la femme, pouvait-il arriver, comme il le désirait, à éteindre toute la sensualité féminine et à la contraindre à une chasteté absolue, en même temps qu'il lui demandait son concours pour ses satisfactions personnelles ? C'est cette aberration, qui devait se perpétuer dans toutes les religions anthropomorphiques, que nous voyons apparaître avec le culte de Dionysos, et voici ce que Bachofen dit du résultat obtenu :
« Si Dionysos oppose à l'amazonisme le mariage et la maternité comme loi suprême de sa religion, ce principe portait en soi un nouveau danger de décadence.
« Si l'idée primitive du culte bacchique fut de régler la vie sexuelle et de fonder l'institution du mariage et de la maternité, la mise à nu du phallus (exhibé cyniquement) devait favoriser un développement de la vie sexuelle dont l'excès paraissait être le but de la religion même. A la place de la suppression des instincts de la nature féminine, un déchaînement complet arriva, et fut favorisé par la loi bacchique qui exigeait de la femme un abandon complet à la virilité inépuisable du jeune dieu.
« La vie de la femme fut dirigée vers un naturalisme sensuel qui revêtit la forme d'un mérite religieux. L'ivresse sexuelle était excitée par Dionysos, qui exigeait de la femme un abandon complet et en faisait la condition de son salut. La stimula devient le type caractéristique de la femme dionysienne (la Bacchanale).
Comme stimula, la femme bacchique est une Aphrodite tentatrice, coquette, qui enchaîne l'homme à elle, une Pandora qui fait prévoir par les immortelles le sort réservé à l'humanité, une Triade dont l'amour pour Dionysos, agrémenté de pantomime, fait tomber les maris dans les bras de leur femme, les maris toujours prêts à augmenter leur fécondité et à observer les lois du dieu phallique.
« Tous les efforts de la femme doivent être dirigés dans le but de donner à l'existence le plus grand charme, elles doivent augmenter leur beauté naturelle par toute l'ingéniosité de l'art (c'est le commencement de la coquetterie, des fards, des teintures, etc.). Cette première conséquence est le signe du règne de l'homme, c'est en même temps l'avènement de l'art et des Beaux-Arts.
« Par ces charmes, Hélène doit enflammer, éveiller, même dans le vieillard, le désir, et se préparer à recevoir le jeune dieu.
« Dionysos a fondé son règne sur la femme, mais, au lieu de la sanction religieuse qui élève la matrone au centre du mystère, c'est le raffinement de son charme sexuel qui lui est laissé, et qui lui fournit les armes avec lesquelles elle reprend le royaume de son dieu. Une nouvelle gynécocratie s'élève. Le même dieu qui détrônait la femme de sa hauteur amazonique et la détrônait de son ancien pouvoir, lui rendit toute sa puissance, par la direction religieuse dont il la revêtit et, plus tard, par le développement sexuel érotique auquel son culte la conduisit.
« Les mêmes faits se produisirent chez tous les peuples de l'antiquité qui furent voués au culte bacchique. Une religion qui fait de la vocation (?) sexuelle de la femme la base de son salut, était capable d'enthousiasmer l'humanité et de la conduire à la création des chef-d’œuvres de l'art, en prose et en plastique.
C'est par elle qu'on arriva à la réalisation du plus sublime idéal de la beauté. Mais éviter la corruption et la débauche morale d'un tel régime fut impossible.
« Dans une pareille aberration, c'est l'homme qui tombe le plus bas, c'est lui qui fut la principale victime de la religion bacchique. Chaque civilisation érotique sexuelle conduira au même résultat de relever la femme au-dessus de l'homme, de faire de celui-ci un instrument de jouissance, de doter celle-là de tous les charmes et d'une existence raffinée.
« La femme se détourne avec mépris de l'homme qu'elle voit dans une telle dégénérescence. La faiblesse morale du sexe mâle accroît toujours la force du pouvoir du sexe féminin. La prédominance spirituelle et corporelle est du côté de la femme.
Au point de vue de la sexualité, la femme surpasse l'homme que l'aiguillon du désir anime beaucoup plus et qui ressent la jouissance sexuelle dix fois plus.
« Dionysos, qui a renversé la femme et l'a assujettie à sa masculinité, est le fondateur d'une nouvelle gynécocratie sexuelle érotique, et son culte est devenu le commencement et l'origine de l'abaissement de l'homme. »
Il est certain que le régime féminin primitif avait été la source de toutes les vertus qui élèvent l'homme, que le régime masculin fut la source de tous les vices qui l'abaissent.
Si la première forme religieuse faisait régner l'ordre, la seconde fit régner le désordre.
L'influence dissolvante de la religion de Dionysos amena la dégradation des hommes, les rendit méprisables en les vouant à toutes les bassesses. Leur infériorité morale créa « le mépris de la Femme », car les mentalités perverses font toujours de la femme l'image de l'homme, et ce fait est le plus sûr diagnostic de la folie.
Les peuples qui surent se soustraire à cet entraînement, tels les Lyciens et les Eliens, gardèrent purs les principes démétriens.

LA GRÈCE C’EST L’HOMME - ELLE INSTAURE LE MASCULINISME
« L'hellénisme est uni étroitement à l'histoire de la paternité. L'hellénisme veut obtenir tout par ses propres efforts ; dans la lutte, il reconnaît sa victoire paternelle ; combattant, il s'élève au-dessus du matriarcat auquel il appartenait auparavant ; combattant, il arriva à sa propre divinité. La source de l'immortalité n'est plus pour lui dans la Femme génératrice, mais dans le principe qui engendre, il se revêt de la gloire de la Divinité que l'ancien monde n'accordait qu'à la Femme.
« L'héllénisme se pose comme l'ennemi de ce monde gynécocrate. Avec l'autorité maternelle tombent aussi ses conséquences. L'évolution de la Paternité nous montre des côtés tout autres de la nature humaine ; un tout autre monde d'idées en résulte.
« Hérodote reconnaît dans la civilisation égyptienne l'antithèse de la civilisation grecque et surtout attique. A côté de celle-ci, l'autre lui apparaît comme un monde renversé. Si Hérodote avait comparé les deux grandes époques historiques de l'évolution grecque, leur contraste l'aurait conduit aux mêmes expressions d'étonnement et de surprise. » (Bachofen.)

LE CULTE D’APOLLON
Apollon, l'homme jeune et lumineux, le poète, vint à lui seul remplacer toutes les Muses.
On l'appelle Phoïbos (rayonnement solaire).
On le fait naître de Léto (la nuit-femme) dans l'île aride de Délos, comme on fait naître Dionysos dans une bourgade de la Béotie.
Ses attributs sont l'arc et la cythare.
Dans le culte qu'on lui rend, nous voyons les anciennes couleurs symboliques interverties. Le rouge qui, d'abord, a représenté l'élément générateur féminin, devient l'emblème de la force fécondatrice masculine. C'est l'homme qui va représenter le phénomène mensuel de l'autre sexe, et la pourpre sacerdotale, qui en était l'emblème, va recouvrir les Prêtres et les Rois, parce qu'elle a recouvert les Prêtresses et les Reines.
Par contre, la couleur blanche, qui jusque-là avait symbolisé l'élément mâle, est maintenant dévolue aux femmes.
La veille de la fête du Dieu Apollon, vêtues de blanc, elles vont dans son temple jurer de se soumettre à la fidélité conjugale.
L'usage des bijoux en or et des fards leur est interdit. C'est le commencement du système d'enlaidissement que la jalousie de l'homme impose à la femme. La beauté est maintenant symbolisée par le Dieu adolescent. C'est à lui qu'on donne la beauté féminine.
Ce système devait progresser et prendre un développement considérable dans les religions modernes.
Les couronnes, les guirlandes dont on parait la Déesse sont remplacées par le laurier donné au Dieu.
Tandis qu'on ne pouvait approcher du sanctuaire dionysien qu'en vêtement de femme, à Delphes aucune femme n'avait la permission d'entrer dans le sanctuaire d'Apollon. C'est la contrepartie de ce qui avait lieu dans le temple de la Déesse où l'homme n'entrait pas, où son nom même ne devait pas être prononcé, dans les mystères féminins, comme à Eleusis entre autres, où la fille seule est initiée, le fils ne peut l'être, ou comme à Samothrace, où la force procréatrice mâle ne peut être mentionnée.
Maintenant, dans les mystères apolloniens, le mâle apparaît comme le centre de tout.
Les Prêtres d'Apollon étaient tenus d'observer une rigoureuse chasteté pendant leur temps d'office.
La succession par la ligne maternelle est considérée par les Apolloniens comme une erreur qu'il faut rejeter. C'est la succession par la ligne paternelle qui va la remplacer et qu'on va considérer comme un progrès.
Une idée nouvelle est introduite dans le monde, celle de la création universelle, cherchant par-là à supprimer le rôle de la Mère dans la génération. Toute la période apollonienne a défendu cette folie, que l'on résume ainsi :
Au-dessus du Père mortel est Apollon, la source de la paternité.
Si l'homme engendrant personnellement se croit père, c'est une erreur qui le trompe, car le vrai Père, c'est Apollon qui donne à l'enfant un Père mortel.
On impose à la Mère la croyance que c'est le Dieu même qui l'a fécondée, afin de lui faire considérer comme un honneur une fécondation qu'on lui fait accepter comme un devoir religieux, ce qu'elle n'admettrait pas si elle venait d'un homme mortel.
On enseigne au fils qu'il peut se consoler d'être né du sein maternel d'une mortelle (depuis que l'homme est immortel, c'est la femme qui est devenue mortelle) en considération qu'il doit ses jours à un Dieu immortel, à Apollon lui-même. Le rôle de sa mère est effacé, elle n'a fait que le mettre au monde et le soigner. (On a vu dans ceci une transition entre le culte bacchique et le Catholicisme ; et, en effet, l’Apollonisme prépare les religions modernes.)
Chaque enfant est considéré comme un effet de la force spirituelle du Dieu solaire.
Dans le culte d'Apollon, le fils est supérieur à sa procréatrice « et son éclat se répand victorieusement sur les ténèbres nocturnes de la femme ».
Cependant Apollon, veut bien reconnaître qu'il vient de la femme, et c'est pour cela qu'il porte encore en lui le caractère nocturne comme Hemera (l'ancienne Déesse de la lumière). Le sceptre passe de la main de la Mère dans celle du fils, mais dans la Mère repose la dignité suprême.
On voit dans ces singulières idées les contradictions de l'esprit de l'homme qui veut se déclarer le premier et cependant est ramené, comme malgré lui, à la vérité et aux lois de la nature.
Les lois de la procréation avaient fait l'objet de grandes discussions, et étaient représentées dans les différentes formes religieuses avec un caractère exclusif donnant la suprématie à la Mère d'abord, au Père ensuite.
Dionysos était né de Sémélé, fille de Kadmus. Ensuite, un Dieu s'approche d'elle au milieu de la foudre et des éclairs, il est alors accueilli dans la hanche paternelle procréatrice, qui sert à l'homme de matrice, après cela il est mis au monde une seconde fois. D'abord fils d'une Mère, il devient ensuite fils d'un Père (1).
Voilà les idées bizarres que fait naître cet instinct d'imitation de l'homme qui veut absolument pour son sexe les conditions de l'autre sexe.
D'abord, Dionysos et Héphaïstos étaient nés d'une Mère sans Père. C'est pour imiter ce phénomène qu'on fait naître Minerve d'un Père sans Mère.
Dans le culte apollonien, on considère la Vierge sans Mère comme le symbole de la paternité la plus pure, parce que cela indique que l'homme a renoncé à l'union avec la terrestre Déméter ; il a procréé sans accouplement, il ne s'est pas abandonné à la fécondation matérielle qui fait succomber l'homme sous les charmes de la Femme. Si Minerve est née sans Mère, c'est parce qu'elle veut élever sa ville d'Athènes à la plus grande supériorité spirituelle. Aussi cette ville est surtout attachée au culte apollonien ; c'est là que tous les vainqueurs des femmes trouvent le meilleur accueil, la retraite la plus sûre. C'est là qu'Oreste se réfugie ; ainsi qu'Œdipe, Thésée, Héraclès, tous ceux qui luttèrent contre la gynécocratie. C'est là, à Athènes, que triomphe le droit paternel. Là, on punit celui qui médit non seulement de son propre père après sa mort, mais aussi du père d'un autre Athénien.
C'est un curieux hommage rendu à la Divinité paternelle par un peuple dont les ancêtres Pélasges avaient appartenu au culte des Déesses et au régime du matriarcat, par un peuple qui, jusqu'à la fin, laissa aux Matrones la législation et ne cessa jamais de célébrer les mystères de Déméter. Aussi il ne faut accepter les faits racontés par les historiens que sous toutes réserves ; ils sont plus souvent destinés à justifier le nouveau régime qu'à enregistrer des événements réellement survenus.
Les savants, qui considèrent Apollon comme antérieur à Dionysos, ont cherché comment le Dieu bacchique avait pu supplanter le Dieu solaire.
Si l'introduction d'Apollon dans le Panthéon grec fut antérieure à cette époque, son rôle fut d'abord effacé ; c'est pour réagir contre les orgies dionysiaques que l'on voulut opposer à l'homme-sexe l'homme-esprit. C'est après le 6ème siècle qu'il grandit dans l'Olympe, et si nous trouvons le nom d'Apollon mêlé à des écrits antérieurs, cela provient de l'habitude qu'avaient les anciens historiens de reporter à une date éloignée les faits nouveaux qu'ils voulaient faire accepter. Eschyle, parlant des Dieux d'Homère, les appelle « des jeunes Dieux », des « Dieux nouveaux ».
Mais c'est du temps d'Eschyle qu'ils sont nouveaux, non du temps d'Homère qui ne les a pas connus. Ils ne semblent nouveaux dans Homère que parce qu'ils y sont introduits par les réviseurs du texte.
Du reste, c'est une évolution psychologique naturelle, et qui s'est produite partout, qui fait entrer l'homme dans la lutte par le sexe d'abord, l'instinct est tout-puissant, par l'esprit ensuite, pour se justifier en imitant la spiritualité féminine, mais alors, comme il sort de sa nature, il divague, le Dieu n'est jamais que la caricature de la Déesse.
Les historiens nous montrent Apollon et Dionysos comme deux rivaux.
Bachofen, que nous suivons, continue ainsi : « Au-dessus de l'ivresse bacchique dans laquelle la force du mâle triomphe, plane la pure Divinité d'Apollon qui n'est jamais en proie au vertige des sens.
Apollon faisant vibrer la lyre aux sept cordes, que n'écoutent que les pures, c'est à lui qu'est voué le collier d'Aphrodite. En lui l'humanité a abdiqué toute matérialité phallique, elle a atteint le degré supérieur de son évolution. »
Il est bien évident que ce sont les caractères de la spiritualité féminine qui lui sont donnés, mais alors pourquoi en faire le fécondateur universel ?
Et Bachofen poursuivant :
« Comme le soleil dans sa force, la paternité dionysienne cherche éternellement la matière, désireuse d'être fécondée.
« Tout autre est la période apollonienne, qui se dégage de l'éternel va et vient de la nature masculine, de son éternel mouvement d'ascension et de descente, mouvement uni à l'idée de la procréation.
« L'idée qui règne maintenant est celle d'une source lumineuse, invisible dans l'immense royaume du Soleil, abandonnant complètement toute idée d'union avec la matière féminine.
« Si Dionysos a élevé l'idée de la paternité au-dessus de la maternité, Apollon se dégage complètement de toute union avec la Mère. Sa paternité est exempte de l'élément maternel, elle est purement spirituelle.
« La paternité dionysiaque est procréatrice ; la paternité apollonienne est spirituelle.
« L'assujettissement durable et complet du principe maternel n'est possible qu'au grade apollonien. C'est le triomphe du principe métaphysique du Dieu-homme. » (Bachofen.)
Mais Dionysos et Apollon sont des rivaux ; ils attendent, regardant à qui les immortelles donneront la victoire.
Nonnos nous montre leurs disputes devant une assemblée de Dieux. Apollon, sûr de sa victoire, lève les yeux, mais son adversaire fait circuler la coupe pleine d'un vin généreux ; alors Apollon, rougissant, baisse les yeux à terre, car il ne peut rien offrir de comparable à un pareil don.
« L'exubérance sexuelle de Bacchus l'emporte sur la spiritualité métaphysique d'Apollon. Comme dans les Bacchanales romaines, le jour apollonien est vaincu par la nuit bacchique. Le vin qui agit sur les sens et l'esprit triomphe, c'est lui qui a le pouvoir d'unir les êtres dans l'amour et dans l'amitié, il est le symbole de l'excitation qui chancelle entre le plaisir et la douleur. »
C'est Dionysos qui hérite des pouvoirs de Zeus, ce n'est pas Apollon. Ainsi finissent les luttes de la conception phallique et de la conception spirituelle de la paternité. La réelle nature masculine se retrouve dans Dionysos, c'est ce qui fait sa force.
La faiblesse de la conception apollonienne vient de ce que peu d'hommes sont capables de comprendre le modèle qu'on leur propose dans Apollon. Son sens abstrait (l'homme-femme) échappe.
Et Bachofen ajoute cette phrase bizarre : « Dans la fondation d'un culte, on est donc forcé de considérer d'abord le matérialisme humain ; seulement, celui qui fonde le surnaturel sur le naturel est sûr de la réussite. »
Pourquoi alors fonder un surnaturel ? Le naturel suffit. Mais il s'agit des luttes de sexes, ne l'oublions pas ; du reste, l'auteur nous le rappelle par la réflexion suivante : « Devant la supériorité métaphysique de l'homme, la femme se subordonne pour toujours. »
Combien cette idée d'un Apollon dominateur est loin des illusions de la Femme qui veut voir dans ce Dieu l'homme jeune, beau, aimant et aimé, chantant la louange de la Femme et lui offrant ses prières, son cœur et sa vie !
Ce rôle très humain serait le plus beau, il en ferait l'homme idéal. Au lieu de cela, on nous donne un homme qui est une copie manquée de la Femme, on gâte la légende de ce Dieu en voulant le faire trop grand. On lui donne un rôle qui l'amoindrit en le faisant sortir des limites de la masculinité, on en fait un Dieu sauveur, alors qu'il pense à asservir ; l'inspirateur des Sibylles, alors que c'est la femme qui inspire l'homme ; un guérisseur, alors que l'art médical est encore uniquement pratiqué par les Asclépiades.
C'est lui qui tue le serpent Python (l'homme méchant), alors que c'est lui qu'on appelle Apollon-Pythien. Il préside à la musique et à la poésie, prenant ainsi la place des Muses. On en fait un Dieu vengeur (un Némésis), alors que c'est la femme qui est outragée par son culte. Il voulut aussi rendre ses oracles ; chercha un lieu pour fonder son sanctuaire ; s'installa à Delphes comme pour narguer la grande Déesse ; là, se fit divin, prit le trépied de la Femme et s'y agita en convulsionnaire (2).
On lui donne comme attributs : le cygne, le coq, le laurier, le palmier, l'olivier. Tout cela représente la sexualité masculine.
Le cygne en est une figure : on voit dans ses deux ailes ouvertes et son cou flexible un immense phallus ; le coq en est la force génératrice ; le palmier s'incline ; le laurier triomphe et l'olivier est le signe de la paix après l'orage parce qu'il produit l'huile pour l'onction.
On fait de lui le lumineux.
Quand Apollon est représenté par le Soleil, la femme est représentée par la Lune (3).
Le voilà donc devenu sur-humain par ce renversement des facultés de chaque sexe ; ainsi symbolisé, il figure une sorte de Vénus mâle qui n'est pas dans la Nature, mais qui flatte l'homme.
C'est le travestissement représenté dans Pindare par la peau de léopard dont il revêtit Jason. Et lorsque L'homme fut ainsi féminisé, il fut, dit-on, l'objet d'une grande vénération.
C'est un cas moral d'inversion sexuelle ; le mot vénérer lui-même a un sexe, il vient de Veneris (génitif de Vénus).
En résumé, c'est l'homme qui va représenter l'esprit féminin pendant que la femme ne représente plus que le principe tellurique, la terre, ce qui est inférieur. La Mater Deum, auparavant seule considérée, s'efface, et l'idée de la vie, de la lumière, de la résurrection passe dans l'homme où elle fait triompher la paternité.
C'est un contraste frappant avec l'ancienne religion et l'ancien régime familial.
C'est au 6ème siècle que la Grèce éleva les premiers Temples, qui furent de grandes constructions architecturales. Sur le mont Parnasse, à mi-côte au-dessus de la ville de Delphes, s'élève le sanctuaire d'Apollon.
Les constructions des hommes sont grandioses ; ils cherchent à frapper l'imagination, à éblouir les yeux pour mieux imposer leurs dogmes et faire plus solennelle leur propre glorification.
Tout autour régnaient d'autres petits monuments que les partisans du nouveau régime venaient bâtir là, sans ordre. Cent petits temples attestent les sentiments orgueilleux des peuples grecs, qui, sur cette colline, ont, de mille manières, érigé l'image de l'homme. Tous les vainqueurs de la Femme y sont : Hermès, le prêtre qui cache ; Hercule, l'athlète qui frappe ; Jupiter, le Père qui foudroie. La statuaire perpétua ces luttes, immortalisa les héros qui terrassèrent la Femme, et l'on se demande si ce mot héros n'est pas une façon d'écrire Eros.
C'est sur ce mont que, les jours de fête, la jeunesse est amenée en longues théories, pour glorifier le Dieu (Apollon est surnommé Théorius).
On enseigne à l'enfant que là il va admirer la beauté suprême, la suprême bonté, que là se célèbre le culte sacré, et ainsi on le détache de l'ancienne religion, on pervertit sa pensée, on obscurcit, sa conscience.
Et c'est au sein de la belle Nature, sur une colline superbement posée en face de la mer, non loin du Temple de la Déesse redoutée, qu'on osa ainsi diviniser l'homme. Et la montée de ce temple, ainsi peuplée de Dieux mâles, fut une via sacra !
Quel enseignement pour le jeune homme à qui l'on semble dire dès l'adolescence :
« Ne crains pas la Femme, vois comme nous l'avons vaincue, adhère ce que nous avons fait de l'homme qui était derrière elle !
Le voilà maintenant dominant le monde ; apprends à être orgueilleux et fier de ton sexe, imite les héros qui terrassèrent la faible créature sans force, sois « glorieux » comme eux, lutte aussi, terrasse aussi celle qui te résistera, ose tout, les Dieux mâles te soutiennent. »
Et cela s'appelle une religion ! Naturellement, elle devait rallier les hommes, elle était la sanction de leurs instincts ; aussi, combien ils trouvèrent vraie cette première tentative qui devait aboutir au Dieu unique des temps modernes ! Ce fut une des formes de la genèse du Dieu-homme, une de ses premières étapes.
Combien il devait grandir encore pour arriver à remplir l'univers et conquérir l'exclusif privilège divin !
Le jeune homme entrait dans le Temple pénétré de respect et, pour le gagner tout à fait on lui faisait le récit miraculeux de l'enfance du Dieu, on troublait sa raison comme le rusé qui, perfidement, verse l'alcool homicide à celui qu'il veut tromper.
Michelet nous conte ainsi cette histoire : « Phébus était né colérique, un Dieu sévère, vengeur. Dans la sauvage Thessalie où il parut, son arc, souvent cruel, lançait des fléaux mérités.
Dur pasteur chez Admète, humble ouvrier à Troie, dont il bâtit les murs, il n'était pas encore le Dieu des Muses. Demi-barbare et Dorien qu'il est d'abord, le génie ionique et l'élégance grecque l'adoptèrent, l'embellirent, vont toujours le divinisant... Ainsi le Dieu des arts est lui-même une œuvre d'art. Il est fait peu à peu, de légende en légende. Il n'en est que plus cher à l'homme et plus sacré. Il prend, de plus en plus, un cœur d'homme ; à lui accourent les criminels involontaires. Oreste y vient, perdu, désespéré, tout couvert du sang de sa Mère (que son père lui a fait verser).
Il est de près suivi, serré par les Euménides, son oreille effarée sent souffler leurs fouets de vipères. » (Ce sont les Femmes autrefois appelées propices que l'on appelle maintenant Vipères.)
Les Jeux de Delphes sont les plus grandes réjouissances alors. Un bel enfant, figurant le Dieu, est conduit en pompe dans le bois voisin où il cueille le laurier, il en orne le Temple, puis chante la victoire du « Dieu de Lumière » sur le sombre dragon de la nuit (la nuit qui est femme maintenant).
Et des jeunes filles venaient prendre part à ces jeux qui avilissaient leur sexe et les humiliaient devant l'homme ! Puis les jeunes gens luttaient, les athlètes combattaient, les courses bruyantes de chars, les tumultes, les accidents souvent sanglants qu'elles occasionnaient rappellent les courses modernes avec leur tumulte profane. Et c'est un Dieu-Esprit que l'on célèbre ainsi ?
Dans les cultes masculins, l'art remplace la raison, la musique tient lieu de logique, la statuaire parle aux yeux et, pour faire taire la pensée, les couleurs qui éblouissent tiennent lieu de réflexion.
Tout y est, moins le vrai.
Le culte d'Apollon ne créa pas seulement l'art profane, il créa aussi la solidarité masculine, réunissant dans ces fêtes les fils de toutes les provinces, les jeunes combattants flattés de jouer un rôle dans ces joutes ; enfin, on institua des députations d'hommes âgés (image des Matrones) chargés de décerner des prix. Ces députés furent appelés des Amphictyons. Bientôt ils formèrent un corps considérable et on s'habitua ainsi à les prendre pour arbitres dans d'autres occasions, dans des querelles de particuliers ou de villes. C'est ainsi qu'ils s'érigèrent en juges et peu à peu prirent la place de Thémis. Le nouveau culte justifiait cette usurpation, l'encourageait.
Cependant, les féministes luttaient. On leur répondait par l'insulte et le mépris. C'est alors que nous voyons une nouvelle idée surgir : « Qui méprise Proserpine en meurt » Mort morale seulement, et cela n'effraie pas l'homme ; mais cela crée une nouvelle superstition : « Si on en mourait réellement ? » Et quelques-uns deviennent prudents.
L'ardeur de la lutte des deux partis nous est révélée par le serment qu'on faisait prêter aux Amphictyons ; ils juraient « de ne pas détruire une ville grecque » et « de ne pas détourner ses eaux courantes ». C'était donc cela qu'on faisait ? Et cela rappelait les travaux d'Hercule.
Nous assistons ici aux premiers essais d'association des hommes pour la lutte et la conquête du pouvoir. Combien cette fédération masculine devait prospérer, et que de mal le pouvoir brutal ainsi amplifié devait faire aux faibles, aux isolés, aux vaincus !
Bachofen résume en ces termes cette grande lutte de sexes chez les Hellènes : « Bien que le fond de la population d'Athènes soit pélasgique, elle a à la fin subordonné le principe Démétrien au principe Apollonien ; elle a vénéré Thésée comme un second Héraclès anti-féministe. A Athènes, la paternité sans mère a remplacé la maternité sans père ; et même, dans sa législation, on a accordé à la paternité l'immunité que l'antique droit des Erynnies accorda seulement à la maternité. Bienveillante à tous les mâles, secourable à tous les héros du droit solaire paternel, telle est la divine vierge Pallas Athéné. Mais sa ville fut impitoyable pour les femmes qui, défendant les droits de leur sexe, attachèrent leurs vaisseaux aux rivages d'Attique en demandant secours.
« Le contraste entre le principe Démétrien et le principe Apollonien se montre là sous sa forme la plus poignante. La même ville, dans l'histoire de laquelle on trouve des traces gynécocratiques, a apporté à la paternité son plus haut développement et, par une exagération insensée, donnée à la nouvelle direction, a condamné la femme à une subordination qui étonne surtout par son contraste avec le fond même des Mystères d'Eleusis. »
(1) C'est par un jeu de mots que l'on fit naître Minerve de la cuisse de Zeus ou de Jupiter. On confondit le mot meros (cuisse en grec) avec le mot Mérou, nom du Mont Mérou où se faisait l'initiation aux mystères de la création.
(2) Fabre d'Olivet, cherchant l'origine du culte d'Apollon, dit très judicieusement (Vers dorés, p. 22) : « Il est digne de remarque qu'Hésiode, né au bourg d'Asora, à peu de distance de Delphes, ne fait aucune mention de l'Oracle ni du Temple d'Apollon. Tout ce qu'il dit, en passant, de cette -ville, qu'il nomme Pytho, se rapporte à la pierre que Saturne avait engloutie (Théogonie, V, 500 ; Delphes était appelée Pytho à cause de la Pythie qui prononçait des oracles). Homère ne parle pas du tout de cette Pytho dans l'Iliade. Il fait seulement mention dans l'Odyssée d'un oracle rendu sur le mont Parnasse par Apollon. Mais on sent bien que c'est une interpolation. »
(3) Il est curieux de considérer comment les idées ont évolué et comment les modernes les interprètent. M. Réthoré dans Science et Religion, dit ceci : « L'âme du Soleil, d'abord logée dans l'intérieur de sa masse, fut dans la suite placée à sa surface, et là, personnifiée, elle devint, sous le nom de Phœbus, un beau jeune homme à la chevelure rayonnante ; celui-ci se détacha plus tard complètement de l'astre dont il gardait les coursiers et devint Apollon, qui put dès lors garder les troupeaux d'Admète, présider le chœur des Muses, et inspirer les Sibylles et les Pythies. » Ainsi, au lieu de voir dans les Dieux une manifestation de l'orgueil male qui grandit l'homme et l'élève jusqu'au Soleil, cet auteur fait descendre le Soleil jusqu'à l'homme à qui il donne alors un caractère surnaturel. Quelle aberration !

TRANSFORMATION RELIGIEUSE UNIVERSELLE
La transformation du Druidisme en Gaule semble être le point de départ de la grande révolte contre les Déesses, qui va transformer la Religion dans le monde entier. Ce n'est pas seulement chez les Celtes et chez les Grecs et les Latins qui en sont le reflet que la lutte se produisit, elle s'étendit plus loin et nous allons la découvrir chez les Hindous, chez les Perses et chez les Chaldéens.

LE PRÊTRE AUX INDES
Nous lisons dans « Les Champs Elysées » les curieuses lignes suivantes : « Les Brachmans sont forcés de convenir qu'ils sont eux-mêmes étrangers au bord du Gange (1), et ils ne font point scrupule d'avouer qu'ils ignorent le nom et le lieu de leur patrie, L'étymologie de leur nom, man (homme), appartient à la langue du Bas-Rhin. Mannus est le fondateur des Germains. Brachman est un nom de famille très commun dans quelques parties de la Belgique. Il y a plus de vingt familles de ce nom dans la seule ville de Gand. De plus, on trouve en Belgique une province qui porte le nom de Brakland, pays de Brak, c'est le Brabant ; son ancien nom est Brakbant ou Bracbant : Brocantus ; c'est ainsi que cette province est nommée dans les monuments du moyen âge. »
C'est de brant que vient le nom de bannen (bannir), exiler, expulser du pays. Brakman veut donc dire : homme du Brabant qui aurait été expulsé du pays. Pourquoi ?
C'est que les Brachmans sont devenus des prêtres ; alors on donne à leur nom une autre signification : les prêtres, partout, sont regardés comme des parasites qui se sont soustraits au travail pour imiter la Prêtresse, dont ils veulent, pour eux, les privilèges. Et de Grave fait remarquer (p. 172) que braken signifie reposer, avoir des loisirs. (Skolè, d'où dérive le mot Ecole, signifie en grec otium, loisir.)
Les Brackmannen étaient des gens qui s'exerçaient dans les Ecoles ou gymnases ; Strabon, et d'autres, les appellent gymnosophistes, terme qui veut dire littéralement sophiste ou savant d'Ecole ; c'est encore leur profession moderne (celle de tous les prêtres). Les Brahmanes sont obligés de faire un long cours d'études dans les collèges de leur université de Bénarès. Mais les Gymnases (mot encore usité en Allemagne) ne sont que des Ecoles de filles dans lesquelles ce sont exclusivement des femmes qui enseignent ; elles continuent l'œuvre des anciennes Val-Kyries. (Gym est une racine féminine.)
Ceci nous laisse supposer que les Brahmanes ont été expulsés du pays parce qu'ils ont voulu s'affranchir du travail de l'homme et prendre la place de la femme ; alors ils sont allés porter leur doctrine en Orient, où ils ont fondé une religion dans laquelle ils ont donné le premier rôle à l'homme. Ils donnent leur nom au soleil, Brahmâ, et en font un dieu suprême qu'ils ont seuls le droit de représenter et qui forme une trinité avec l'homme et la femme (Çiva et Vishnou) devenus égaux sur la terre. Chez les Celtes, on devait les accuser de folie, et le mot brachman a peut-être signifié homme Insensé.
(1) « Les phéniciens qui, dans les temps reculés exploitaient les mines d'or et d'argent, alors existantes dans les Cévennes, avaient, avec une juste raison, choisi cet endroit pour en faire l'entrepôt de leurs richesses, ainsi que l'indique son nom. Ganges, en latin, Agantippus (en occitan, Gange), est formé des mots phéniciens Hagan-Tzibbô, qui signifient littéralement « l'Enclos de l'or ». Ce nom, rarement prononcé dans toute son étendue, devenait, même en phénicien, le mot abrégé Gantzi. C'est-à-dire, le Trésor. C'est de là que dérive le mot Ganges. » (Fabre d'Olivet, Mes souvenirs et La Langue d’Oc rétablie dans ses principes)

LE SANSCRIT
D'après de Grave, le sanscrit, qui n'a jamais été la langue populaire des Hindous, serait le vieil allemand importé quand les Brachmanes sont allés occuper l'Inde. Plusieurs auteurs ont soutenu cette thèse, entre autres Don Paulino, directeur du Musée de Vienne, qui a fait voir une conformité frappante entre le sanscrit, le persan et le vieil allemand. Le nom même du sanscrit annonce son origine. On l'appelle tantôt hanscrit, hanscret ou samscrit, quelquefois sanscrit. On reconnaît visiblement, dans scrit ou scret, le belge scrift et le français écrit. Hanscrit est un manuscrit, Samscrit une compilation, et Sanscrit la langue sacrée des prêtres, basée sur les compilations.
Nous avons vu que hans veut dire ancien ; donc hanscrit signifie anciens écrits. Si nous cherchons des renseignements sur le culte abandonné en Celtide par les prêtres exilés, nous trouvons dans l'ancienne Belgique des souvenirs nombreux de la Déesse Isis, dont le nom rappelle évidemment la ville d'Is où se tenaient les Mystères. De Grave va encore nous éclairer à ce sujet. Il dit ceci : « Les journaux du mois d'octobre 1800 ont publié qu'on venait de déterrer à Bénarès un vieux manuscrit en langue sacrée, qui contenait un traité topographique. Cet écrit donne la description d'une île appelée Sainte. On y trouve, dit-on, les noms d'Isis et de Tamisis, et la description d'un temple en forme de pagode indienne. On a cru qu'il s'agissait de l'Angleterre, qui a été autrefois consacrée au soleil. Mais on n'a plus parlé de cette découverte, faite en 1800. Les directeurs de la Compagnie anglaise n'en parlent plus. Pourquoi ? »
Evidemment parce que ce manuscrit donne des renseignements sur ce qu'on a voulu cacher. En voici la preuve : « On trouve encore sur les bords de l'Escaut occidental une petite ville qui porte le nom de la Déesse Isis : c'est le fort d'Isen-Dicque (digue d'Isis). A peu de distance d'Isen-Dicque, il se trouve un golfe de l'Escaut qui est connu dans les cartes du pays sous le nom de Brachman. » (De Grave)
Les Suèves honoraient particulièrement Isis. Ils la représentaient sous la forme d'un bateau, la barque d'Isis qui « fluctuat nec mergitur ». Les Suèves ont été répandus en Flandre, témoin les villages de Sweveselle (salle des Suèves), de Sweveghem (séjour des Suèves). Il existait des Suèves établis sur les bords de l'Escaut, en deçà d'Anvers.
Saint Eloi dit qu'après avoir prêché la foi dans la West-Flandre, il est allé convertir les Anversois et les Suèves.

LES MAGES DE PERSE
L'origine du mouvement de révolte des Mages contre la primitive religion mazdéenne n'est pas connue ; on sait seulement que les prêtres qu'on appelle des « Zoroastres » sont les ennemis des Déesses et se disent envoyés pour les combattre. Cette question est longuement développée à l'article consacré à la « Perse ». Rappelons seulement que c'est à cause de leur révolte que les Mages ont dû être expulsés du pays de la Déesse Ardui-Ainyahita, qui habitait près de la forêt des Ardennes à laquelle elle donna son nom.
Rappelons que la Perse s'appela d'abord Eran, dont on a fait Iran, et rapprochons ce nom de celui de l'Irlande qui s'appelait l'île d'Erin, et nous verrons qu'il est bien évident que la langue de l'A-Vesta a été parlée dans le nord de l'Europe, puisque le nom de l'Irlande signifie « terre des Ires ou Aryas » Aira sur les bords de la Lys a fait Arie.
L'ancienne Arie (Iran) avait une capitale qui se nommait The Iran, d'où l'on a fait Téhéran. (Le the, article, est bien anglais.) On ne sait pas dans quelle langue l'A-Vesta a été d'abord écrit. On nous dit qu'il est resté longtemps oral et s'est transmis de vive voix sans intermédiaire de l'écriture, ce qui est faux. On n'a inventé cette supercherie que pour excuser ceux qui ont détruit les Livres. C'est cette destruction qui a fait perdre la connaissance des origines, et on s'est si bien habitué à cacher tout ce qui se rapporte aux Livres sacrés qu'on ne connaît même pas l'écriture de l'A-Vesta sur laquelle les Pehlvis ont fait leur traduction. Les Pehlvis actuels l'ignorent et font remonter leut traduction à l'origine même de l'A-Vesta, alors qu'elle ne date que du règne de Sapor II (4ème siècle de notre ère), au temps d'Abendad.
Cette question est donc restée sans solution, ce qui fait dire à Ihre dans son Introduction : « Parmi les énigmes que le 17ème siècle a proposées à la solution des savants, se trouve cette singulière harmonie entre la langue persane et la langue allemande, qui a été aperçue par Eichmann, Bochart et d'autres savants dans les langues orientales. Cette vérité est aujourd'hui généralement reconnue. Cette conformité de langage ne doit être cherchée ailleurs que dans une communauté d'origine. »
Ihre remarque que l'affinité de la langue allemande avec la persane ne se manifeste pas seulement dans les mots et les termes particuliers, mais aussi dans le génie de la langue et dans les inflexions des verbes, observations qu'il appuie d'une manière sensible par la comparaison du verbe être. Il remarque aussi que les verbes ont à l'infinitif leur terminaison en en, comme les verbes teutons. Parmi les mots persans dont la conformité avec les nôtres se présente d'une manière sensible, se trouvent les noms des membres qui composent la famille, tels pater, père ; mader, mère ; dochter, fille ; brader, frère.
On a cherché l'origine du mot Mage. C'est Maya, la Nature, qui a fait Mage, et on a appelé Mages les naturalistes. Og et Magog désignent le père et la mère. Magog a fait Majesté.
Maintenant, écoutons de Grave, qui nous dit ceci : (Ch. Elys., L. II, p. 195) : « Dans le Zend A-Vesta, il est dit que les Mages sont originaires d'un pays où les plus longues nuits d'hiver sont le double des nuits les plus courtes de l'été, ce qui ramène leur patrie vers le 50e degré de latitude, le point central de toute la haute antiquité. »
Dans Plutarque, nous trouvons aussi le souvenir de cette émigration ; il nous dit : « Les Cimmériens n'étaient qu'une petite partie d'une grande nation (la Celtide), chassée par les Scythes (Gaulois), et qui s'arrêta près du Tanaïs après avoir traversé l'Asie. Cette multitude habitait auparavant les bords de l'Océan, dans des forêts épaisses et sous un ciel ténébreux. »
Il y avait donc, dans la Gaule-Belgique, d'autres prêtres que les Druides ? C'est certain. Et César parle une fois de sacerdotes qui peuvent être différents des Druides, et Dottin, qui rapporte ce fait, ajoute : « Rien ne nous indique que les prêtres des Boii de Cisalpine que mentionne Tite-Live, fussent des Druides, ni les sacerdos de la forêt sacrée chantée par Lucain (L. III, 424. Tite-Live, XXIII, 24, 12). »
Maintenant, si on nous dit que le zend est un dialecte du sanscrit, nous répondrons que nous croyons que ces deux langues viennent toutes les deux de l'ancien Celte, dans lequel Indien signifie indi-gène.
Si on nous demande pourquoi on expulsa les Mages de la Gaule-Belgique, nous répondrons que ce fut parce qu'ils créèrent la doctrine de mensonge et de folie qu'on a appelée la Magie.

LA MAGIE
L'histoire nous dit que c'est de second Zoroastre qui créa la magie ; ce qui semble vouloir dire que c'est à une seconde génération de prêtres que l'on doit cette création. Les Mages sont des hommes qui prétendent faire des choses extraordinaires ; ils s'entourent de mystères, créent un surnaturel exubérant qui, une fois les limites de la Nature franchies, s'égare dans toutes les aberrations ; ils cherchent à étonner les esprits simples, qui aiment le merveilleux, et se prétendent doués du pouvoir de faire agir des forces occultes ; ils Invoquent les morts, les font parler ; ils prétendent commander aux éléments ; ils veulent conjurer les tempêtes, faire pleuvoir, suspendre la marche des maladies ; ils vont jusqu'à prétendre transformer, pour un temps, l'homme en animal. Ils ont avec eux toute la gamme des fous et s'adonnent à toute la variété des miracles.
Cette manifestation de la mentalité masculine, qui a existé dans tous les temps, répond à une loi psychique : Quand l'âme de l'homme descend par suite des appels de la vie sexuelle, quand son esprit devient inquiet et instable, ne comprend plus la valeur des actes à accomplir, au lieu de prendre une décision, il imite les autres. Quand il prend la place de la Femme, il imite la Femme. C'est ce que, dans les temps modernes, nous avons appelé la réflexion sexuelle ; dans l'antiquité, cela s'appelait « spéculation », de spéculum (miroir). Mais, ne comprenant pas ce qui émane de la pensée féminine, ne connaissant pas la limite de cette pensée, qui lui semble infinie, son imitation est maladroite, elle est outrée, il va au delà, s'égare parce qu'il se met dans le domaine des choses qu'il ne peut pas comprendre.
L'enseignement des Magiciennes reposait sur la puissance de leur esprit qui leur faisait connaître les lois de la Nature sans s'égarer dans un sens ou dans l'autre. Cela s'appelait « la Magie blanche ».
Le Mage qui veut l'imiter tombe tout de suite dans le miracle (de l'ancien français MIRAIL = miroir), en cherchant à sortir de sa nature pour s'élever jusqu'à celle de la Femme ; il dépasse les bornes de la puissance humaine. Cela s'appelle « la Magie noire ».

RÉACTION PROFANE EN KALDÉE (CHALDÉE)
Parmi les noms des Déesses qui furent masculinisées et profanées, il ne faut pas oublier celui de Vénus-Belisama qui, décomposé, faisait Bel-isa-ra (Isa-ra a fait Isra-el).
Avec le temps, Bel devint un dieu mâle. Dans la Norique et dans la Gaule, après quelques siècles, nous trouvons que Bel est devenu un dieu solaire. Les Scandinaves firent de Beli un dieu subalterne, et de Balder leur Apollon, en attendant les Grecs qui donneront le nom de Bélénus à l'Apollon celtique. Le nom de druide, en langue celtique, est Belech ; ce serait donc le Druide qui se serait fait glorifier sous le nom de Bel, Belus ou Belos. Il aurait bâti la ville de Babel, dit-on, et fut le fondateur (c'est-à-dire le réformateur) de l'empire babylonien, appelé tantôt Syrie, tantôt Assyrie.
L'audace sacrilège de l'impie Belochus aurait donné le signal de tous les malheurs. Ce personnage légendaire se serait fait reconnaître comme roi de Babylone et se serait déclaré monarque absolu.
Une histoire est arrangée pour donner du prestige et de l'antiquité à la révolte des prêtres. On raconte qu'un préfet de Médie nommé Arbace, secondé par un prêtre babylonien nommé Belesis, se révolta contre Sardanapale. Puis, d'après les calculs de Callisthène, il faudrait placer le règne de Belochus l'an 1930 avant notre ère.
Ce serait le Caïn du Sépher.
On donne tous les malheurs comme étant la suite de ce schisme que l'on confond avec le schisme d'Irshou. Le nom de Bel est resté dans l'histoire comme un nom générique servant à désigner l'homme qui prend un commandement. C'est évidemment de ce nom qu'on a fait « Bellone », la guerre.
A Tyr nous trouvons Bel-Tsur ; à Sidon Baal-Tsidon ; à Tarse Baal-Tars ; à Palmyre on l'appellera Belus ; en persan et en sanscrit on dira Bala ; Ballen en phrygien, et ce mot signifiera Roi. Rappelons cependant avec quelle ardeur on combattait le Bel des Babyloniens, qui devint le Baal des Phéniciens et dont les multiples aspects représentaient l'horreur qu'il inspirait. C'était Baal-Moloch (le destructeur), Baal-Bérith (la honte), Baal-Péor, Baal-Ram, Baal-Samin, Baal ou Bel-Zébuth, Baal- Itou, etc., etc.
A côté de lui se trouvait Ophin, l'homme-serpent, qu'on appelait par corruption Surnu-Bel (serpent de Bel). Rien n'est curieux comme l'histoire de l'évolution des mots. Celui que nous étudions, servant d'abord à désigner une Déesse, change d'aspect quand un homme s'en empare et prétend exercer une autorité sur les autres au mépris de leurs droits ; le mot alors s'amplifie, grandit à tel point qu'il se répand dans le monde entier, et en se propageant devient l'expression d'une force immense, d'une puissance. Mais revenons à la source de la légende, à l'homme qui s'est révolté contre l'autorité de la Femme, jusque là incontestée. Cette révolte, loin d'être acceptée par le monde féminin, est, au contraire, très sévèrement jugée et, si, Bel est glorifié par les hommes, il est maudit par les femmes qui le représentent comme un dieu de la mort. Elles en font d'abord un personnage odieux et ridicule, le Baal-Phégor de Syrie, un diable aux longues oreilles, ivrogne, luxurieux, comparé à l'âne ; c'est ce type grotesque qui, en évoluant, s'élèvera en passant par des formes nouvelles jusqu'à devenir un être innocent, de blanc vêtu, jusqu'au moment où il deviendra un grand Dieu assis sur le trône divin à côté d'Astarté. Telle est la puissance d'imagination du cerveau de l'homme.
Nous revenons à de Grave, qu'il est toujours intéressant de citer. Il dit (T. II, p. 19) : « Ce qui détermine encore plus précisément l'endroit de leur première patrie, c'est le nom de leur célèbre idole, Bel, Belus. Ce nom indique évidemment la Belgique ; Bel-gio, dont on a fait Bel-gium, signifie pays de Bel. Gio, go, gan (en grec, gè, gaia) sont des termes un peu variés qui, tous, veulent dire pays.
« Le mot Bel, de même que Bélus, Bal, Baal, devenu le titre du dieu de la plus grande monarchie de l'univers et de la fameuse ville de Babylone, offre un exemple frappant des métamorphoses littéraires opérées par la corruption du culte à l'aide du style- métaphorique. »

LE CONSEIL DES NATIONS
Les faits que nous venons de mentionner montrent que les femmes ont encore une grande autorité dans la nation, puisqu'elles ont le pouvoir de rendre la Justice qui est encore inhérente à la religion théogonique.
Du reste, c'est l'époque où, à Athènes, les prêtresses d'Hemera, Aspasie et les autres, font condamner Socrate pour son impiété.
Dans le monde celtique, c'est l'ancienne institution appelée « le conseil des anciens » ou sénat, qui fonctionne encore. Bien avant que le Christianisme eût pénétré dans les Gaules, les femmes y tenaient cette place prépondérante que l'érudit Sainte-Foix dans ses Essais sur Paris, Chateaubriand dans ses Martyrs, et après eux tous nos historiens modernes, ont signalée.
Au temps d'Annibal, plus de deux siècles avant notre ère, l'administration des affaires civiles et politiques était confiée à un sénat de femmes choisies par les différents cantons. Les documents historiques abondent à cet égard.
Henri Martin nous dit : « Le sénat ou Conseil des Nations était formé des représentants des divers cantons ; chaque tribu était une grande famille et se gouvernait par les lois de la famille.
« La terre était aux familles plutôt qu'aux individus, bien que chacun eût son lot.
« Les chefs de nation, de canton et de tribu, avaient pour conseillers les Anciens du pays et répondaient de leurs actions devant l'assemblée du peuple. » Or cette Assemblée, c'est le Conseil des Déesses-Mères, et c'est cela qui est devenu le sénat. L'âge est lié à la fonction.
De œd on fait Edda, et ce mot, qui veut dire aïeule, devient edad (âge) dans la langue des Celtibères. Tous les mots qui indiquent la direction morale, comme duc, éducation, en dérivent.
Le mot ancien, que nous voyons employé pour désigner ceux qui sont des éducateurs, doit être expliqué afin de faire comprendre comment la primitive autorité divine fut donnée à celles que les modernes appellent des anciens. Cela nous oblige à répéter encore une fois ce que nous avons déjà dit :
La première Divinité est désignée par le mot As ou Az (d'où Asie, terre des Déesses). As-gard signifie bourg ou garde de la Déesse. Mais le mot se change insensiblement en Ans, et cela à mesure que la Déesse vieillit, et ancien dérive de Ans.
La vieillesse était en grand honneur dans l'antiquité. L'âge était un titre de distinction ou de noblesse. Jornandès, en parlant du respect religieux que les Goths portaient à leurs chefs, dit qu'ils les regardaient comme semi-Anses, ce qui veut dire semi-deos (demi-dieux). Ans ou Hans servit à désigner ce qui est premier ou principal. Hans signifie en hollandais seigneur (Groote hansen, grand seigneur). De seniores populi, on a fait seigneurs. De là sénateur et senectus. Les ministres des religions, imitant les anciennes qui, dans les Mystères, étaient appelées Presbytres, ont pris ce nom dont ils ont fait le mot Prêtre. (En Chaldée, on trouve la racine Oald signifiant vieillard) Et comme senex (vieillard) fait seigneur, nous trouvons en Syrie le mot Syr, signifiant un maître, un seigneur, un sénateur.
Pour convoquer les communes, annoncer les jours de fête, les moments de danger ou autres affaires d'un intérêt public, on sonnait les cloches ; et la cloche s'appelait Bel, du nom de la déesse Bel-isa-ra. Des tours élevées, en forme de phare, prirent le nom de Bel-fort. De là est venu le mot corrompu de beffroi.
Bel (cloche qui appelle) est un symbole qui signifie chef qui commande, qui ordonne. C'est pour cela, dira de Grave, qu'on a donné ce nom au pays Bel-gio, Bel-land, qui signifie Chef-pays, pays des peuples conducteurs, instituteur des autres nations.
Ce sont les prêtres chaldéens qui ont construit à Babylone la fameuse Tour de Bel. Quand les hommes ont pris le gouvernement du monde, ils ont fait de ces tours des prisons et les ont consacrées au dieu Thor. Alors ce nom a fait torture, et celui-ci est devenu Tartare.
Les hommes ont substitué la guerre à l'Esprit. Le champ de Mars s'est appelé, d'abord, champ de Cérès. Quand les hommes écriront l'histoire à leur manière, ils diront que, lorsque la lutte d'homme à homme s'organisa, les chefs boréens furent appelés Herman (frères) ou Gherman (cousins) (la racine Her indique le sexe masculin et veut dire saillant), et ils ajouteront que les femmes se chargeaient de la subsistance des batailleurs et que c'est pour cela que le mot diète a signifié subsistance. Ce mot vient de Ædes Cereris ; il indique l'assemblée tenue dans le temple de Cérès pour s'occuper des hautes questions scientifiques, morales, sociales, qui intéressaient le pays. C'est la Diète germanique qui est devenue le sénat.
Et c'est par ironie que les hommes, qui veulent que les femmes s'occupent de leur nourriture, donnent à ce mot une signification qui indique la privation de nourriture. (Fabre d'Olivet, L'Etat social, T.. I, p. 117, note.)
Aux modernes qui mettent en doute que le sénat fût une assemblée de femmes, on a répondu ceci : « Si, dans le traité d'Hannibal avec les Gaulois, le règlement, des difficultés est confié aux matrones gauloises, si tant de traditions des âges mythiques nous montrent les femmes, tantôt seules, tantôt groupées, tantôt isolées entre elles, tantôt côte à côte avec les hommes, jugeant, votant dans les assemblées publiques, arrêtant l'ordre des batailles, négociant la paix, réglant les traités, sacrifiant pour la patrie tantôt la fleur de leur corps, tantôt leur vie même ; qui oserait accuser ces récits d'invraisemblance, leur reprocher de contraster avec ce que nous connaissons, d'être incompatibles avec les lois de la nature humaine sous sa forme actuelle ; qui oserait enfin invoquer contre eux l'auréole poétique qui les entoure ? Ce serait sacrifier le passé au présent, ce serait combattre les siècles, rabaisser l'histoire, en faire le jouet d'opinions éphémères. L'invraisemblance ! Mais les probabilités se modifient avec le temps. » (Le Droit de la Mère dans l'antiquité, Préface).

LA JUSTICE
D'abord, les cours de Justice, les assemblées d'élection se tenaient aux mêmes endroits que les assemblées religieuses, dans des cercles de pierres consacrées, situés dans des clairières. Le pouvoir judiciaire était une branche du pouvoir législatif. Manas, la raison féminine, exerçait la fonction de Grand Juge.
Virgile dit que Rhadamante, juge suprême et grand devin, forçait les coupables à révéler eux-mêmes leurs crimes et les horreurs de leur vie. C'était donc une confession, comme cela se passait en Egypte dans les célèbres jugements des morts. On paraissait au tribunal accompagné de ses amis et de ses parents et on y déployait toutes les ressources de sa race et de ses richesses pour se faire absoudre. Les principaux délits étaient ceux qui concernaient l'atteinte au droit divin, à la puissance de la Déesse, à son prestige spirituel, en un mot le manque de respect et le refus d'obéissance.
Henri Martin nous dit que « les vieilles lois gauloises punissaient les attentats à l'honneur comme les attentats à la vie », et il ajoute : « La loi des Celtes d'Irlande dit que la loi a trois objets : le gouvernement, l'honneur, l'âme. Le gouvernement, dit-elle, appartient aux chefs, l'honneur et l'âme appartiennent à tous. » Or les chefs, ce sont les Déesses législatrices.
On célébrait à Athènes les Thesmophories de Cérès, fête des lois. C'est Cérès Législatrice qui fut surnommée Thémis en Grèce. A Rome, on semble en faire deux entités différentes.
Thémis est la Déesse bienfaisante pour les hommes, qui prend la défense des opprimés, qui personnifie l'ordre et la régularité. On la confond avec Diké, Déesse de la Justice ; elle a les traits d'une belle femme au regard sévère, tenant d'une main l'épée qui châtie, de l'autre la balance qui rétablit le Droit. On dit qu'elle dirige la marche régulière de l'année, représentant par là l'ancienne idée qu'elle dirige la marche régulière des sociétés. Du reste, les mœurs du temps montrent que les hommes n'entreprenaient rien sans l'assentiment ou la consécration d'une Déesse. En voici un exemple :
Il y avait sur la Seine et la Saône une association batelière puissamment organisée. Au commencement de chaque année, les deux corporations se réunissaient sur la crête mitoyenne entre les deux bassins, saluaient du haut de ces collines le soleil levant et inauguraient la nouvelle saison par des fêtes célébrées sous les auspices de la Déesse Bérécinthe, par des festins, des jeux, des cadeaux.
On retrouve ces fêtes en Perse où les Celtes les avaient portées. La maison-mère des Druidesses de Bretagne était à Anglesey, et les Romains les appelaient Ordovices (ordo en latin, orthos en Grec, sont les racines de ce mot). Leurs jugements s'appelaient Ordalies (oor, grand, deal, jugement).
Quand les auteurs modernes ont voulu décrire les lois et les usages du monde ancien, surtout lorsqu'il s'agit de la situation de l'homme dans la famille, ils en ont toujours parlé comme si le régime familial actuel avait toujours existé. C'est cela qui constitue surtout le grand mensonge historique.
Tout le masculinisme moderne est résumé dans les lignes suivantes d'Henri Martin ; il dit :
« Leurs femmes étaient de belle apparence et de grand courage, bonnes conseillères de leurs maris, bonnes éducatrices de leurs enfants. On les prenait parfois pour arbitres dans les différends entre les nations. On cite d'elles nombre de traits d'une héroïque fidélité. »
Le mariage n'existait pas, donc les femmes ne sont pas conseillères de leurs maris. On ne les prend pas pour arbitres, puisque ce sont elles qui représentent l'autorité morale qui dirige. Le droit féminin résultant de la nature féminine réside en toute femme ; socialement il passe de mère en fille ; c'est une aristocratie.
Le droit masculin qu'on a voulu lui substituer est personnel, il ne vient pas de la nature de l'homme, il est exceptionnel et temporaire.
Pour les Grecs, le pouvoir législatif est représenté par Démi-ourgos, la Déesse-Mère (législatrice d'un peuple).
Et le pouvoir exécutif par Déma-gogos, l'homme (meneur d'un peuple).
Démos (peuple), ourgos (facteur, créateur), agos ou agogos (meneur).
Le mariage tel que les religions masculines l'ont institué ne pouvait pas exister avant le règne de l'homme. L'union n'était pas imposée, réglementée par des lois, mais seulement par l'amour et le libre choix de la femme éclairée par la science qu'enseignaient les Druidesses.
L'amour de la femme consacrait l'homme et lui conférait une dignité. L'éducation des enfants était entièrement faite par des femmes. Les enfants ne connaissaient pas leur père.
Les historiens modernes, qui ne veulent pas avouer l'existence de ce régime, diront cependant que : « Les enfants ne pouvaient aborder leur père avant l'âge de porter les armes ». C'est-à-dire qu'à l'âge d'homme ils étaient mêlés à la caste masculine dans laquelle était leur père (1).
(1) « Les Gaulois diffèrent des autres peuples, dit César, en ce qu'ils ne permettaient pas à leurs enfants de les aborder en public avant qu'ils n'aient atteint l'âge où ils sont capables du service militaire. Ils regardent comme une honte qu'un fils à l'âge d'enfant paraisse en public en présence de son père. » (Guerre des Gaules, VI, 18.)

LES MENSONGES CLASSIQUES
Parmi les mensonges historiques les plus connus, il en est un qui prétend nous expliquer la fondation de Marseille, basée sur une légende inventée pour affirmer le droit du Père, 400 ans avant le Droit romain qui a édifié le régime paternel. On raconte que 600 ans avant notre ère, un jeune capitaine grec venu de Phocée, ville ionienne de l'Asie Mineure, avait résolu de franchir le détroit d'Hercule, aujourd'hui détroit de Gibraltar. Après une longue suite de péripéties, une effroyable tempête éclata, qui brisa le navire contre les rochers de la côte. Euxène (c'était le nom du capitaine grec) et son équipage parvinrent, avec beaucoup de peine, à gagner le rivage; ils abordèrent dans un golfe situé à l'est du Rhône ; le pays voisin était occupé par une tribu de la race des Galles, les Ségobuges. Ce pays leur parut si fertile qu'ils résolurent de s'y établir ; d'ailleurs, les habitants, comme tous les Gaulois, étaient très hospitaliers ; ils furent donc accueillis avec bienveillance par Nann, chef de la tribu, qui même les emmena chez lui à un grand festin qu'il donnait en l'honneur du mariage de sa fille Gyptis.
Une coutume gauloise, ajoute-t-on, voulait que la jeune fille qui devait se marier ne parût qu'à la fin du repas. Tous les prétendants, qui étaient, pour la plupart, des chefs gaulois, se trouvaient réunis au festin, et ce n'est qu'à la fin que la jeune fille paraissait avec une coupe pleine à la main. Après avoir fait le tour de la table, au milieu d'un silence général, elle tendait la coupe au convive qui lui convenait le mieux et qui devenait son époux. Or Nann avait préparé la même cérémonie pour sa fille, et c'est à ce festin qu'il avait invité le jetine capitaine. Quand le repas fut terminé, Gyptis apparut, tenant la coupe traditionnelle à la main. Après avoir hésité plusieurs fois, elle la tendit à Euxène. La stupéfaction fut grande parmi les autres convives, mais Nann respecta le choix de sa fille et lui donna pour dot le golfe où Euxène avait abordé et quelques cantons environnants.
Ravi de cette préférence, Euxène donna à sa femme le nom d'Aristoxène, qui signifie en grec bonne hôtesse.
Devenu Gaulois par cette alliance, le jeune Grec oublia son pays et s'établit définitivement dans son nouveau territoire où il fonda la ville de Marseille. Cette légende nous apprend que c'est l'homme qui prend la nationalité de la femme par son union, c'est-à-dire tout le contraire de ce qui existe dans le régime paternel. Cette coupe que la jeune fille offre à celui qu'elle choisit, c'est la copie, ou plutôt la parodie, de ce qui se passait dans les Agapes fraternelles des anciens Mystères. Seulement, cela n'engageait pas l'avenir de la jeune fille, cela consacrait seulement son choix temporaire.

SYMBOLISME OBSCÈNE
Nous venons de voir que le Prêtre veut mettre le sexe masculin au-dessus du sexe féminin.
Cette lutte contre la loi des sexes et contre l'autorité morale de la Femme qui en est la conséquence, tout entière basée sur l'ignorance et le mensonge, est accompagnée de railleries, d'injures, de blasphèmes. C'est le sexe féminin que l'on maudit, puisque c'est dans les fonctions de son sexe que la Femme puise la force de son esprit. La lutte est obscène. Les masculinistes se font gloire de leur sexe et le représentent de différentes manières ; cela amène une réaction. Les féministes font des caricatures du phallus, que l'on va représenter par un oiseau dont le long cou s'élève entre deux ailes déployées; c'est l'oie ou la grue, et on fait de cette image le symbole de la bêtise.
On sait que les masculinistes ennoblissent toujours les emblèmes qui les représentent ; c'est ainsi qu'ils firent de ces oiseaux symboliques le cygne de Léda, les oies du Capitole, et finalement l'Aigle impérial. Et le cygne, auquel on va donner un grand rôle, va représenter la pureté. Dans la langue celtique, le mot Schwan, qui signifie cygne, fait appeler Séquanais les peuples qui habitaient entre la Seine et l'Arar. La Seine, dont le nom primitif est Sena, fut appelée Sequana (de Séquanais), et l'Arar Socoana que nous prononçons Saône.
L'oie, qui est une espèce de cygne, se dit ghanse en celtique, anser en latin, hansa en ibérique et en sanscrit, en espagnol moderne ganso.
La cigogne est restée dans les pays du Nord la représentation symbolique du sexe mâle. Dans les vieilles légendes celtiques, c'est la cigogne qui apporte les enfants. Les religions masculines ont fait de Hansa (cigogne ou grue) un symbole du dieu mâle et enseignaient que l'oie ou le cygne était un oiseau fabuleux qui boit du lait. Les sectes masculines prenaient le titre de Hansa, et une association appelée Hanse fut renouvelée au moyen âge.
Le chameau, qui a deux bosses et un long cou, a aussi représenté le phallus.
Les hommes des ports, les portefaix, étaient appelés grao (grues), d'où graii, græci, gravii, terme de mépris qui indique qu'ils n'ont pas droit de cité.
Ces hommes des ports étaient mal reçus par les habitants du pays, qui leur disaient, en celte, Vor (hors d'ici). Ils répondaient en les repoussant hors de leur ville et les appelaient, avec leur prononciation grecque, bar-bar, ce qui servit à désigner les populations du pays.
Les Grecs ne seraient pas une race, mais le ramassis de tous les hommes des ports qui emportèrent avec eux l'épithète de graïa (grue) qui devint le nom de la Grèce. Pour se venger de ces représentations, les hommes figuraient le sexe féminin par une grenouille.
Les anciennes coutumes bretonnes nous apprennent qu'il a existé longtemps un jeu qui consistait à « écarteler la grenouille ». Les Saliens (masculinistes) avaient pour emblème un taureau portant une grue sur son dos ; les Ripuaires (féministes) une grenouille. Mais le taureau fut abandonné et la grue resta seule.
Nous avons vu, plus haut, que la Déesse Pyrène donna son nom aux montagnes appelées depuis Pyrénées. Les masculinistes, par ironie, appellent les femmes Pygas, et de là Pygmées. Comme, en même temps, on les méprise et on les infériorise, ce mot Pygmées va indiquer ce qu'il y a de plus petit. Et des historiens vous diront sérieusement : « Pygmées, peuple de Lydie qui n'avait qu'une coudée de hauteur. Leur vie était de huit ans, les femmes engendraient (pour enfantaient) à cinq ans et cachaient leurs enfants dans des trous pour que les grues, avec lesquelles elles étaient toujours en guerre, ne vinssent les enlever. Leur roi était appelé Anté » (1).
Voilà un document qui nous révèle bien des choses. Ailleurs, on nous dit que Pygas, la Reine des Pygmées, fut changée en grue. Voilà donc la grue représentant le sexe féminin.
Pour savoir ce que, finalement, elle devint, citons ces lignes lues dans un journal :
« La grue est, dans les Indes, l'objet d'une vénération particulière. C'est sa forme apparente que, selon les croyances hindoues, revêt l'âme des Brahmines (les Prêtresses) quand elle a quitté son enveloppe terrestre. Protégée par cette superstition, la grue a pullulé d'une manière prodigieuse. Les bords des lacs, de la mer, des fleuves sont habités par d'innombrables troupes de ces oiseaux, qui rendent d'ailleurs de véritables services au pays, en nettoyant et assainissant les rivages. »
Et voilà comment on fait les dogmes !...
(1) Le roi des Pygmées, c'est-à-dire la Reine, est appelée Anté (avant) parce que la Femme, qui avait régné la première, avait été appelée Andarta. En basque, la Dame est encore appelée Andréa. L'homme va revendiquer cette antériorité et se faire appeler Andros, et il appuiera cette prétention sur la science qu'il prétendra avoir faite lui-même.

L'EVOLUTION RELIGIEUSE EN GRÈCE
Les grandes époques de la religion grecque sont résumées dans son histoire et représentées par les noms que ce peuple se donne.
Nous y trouvons d'abord les Pélasges qui créent la grande civilisation pélasgique, « qui tient le caractère qui la distingue, dit Bachofen, de l'importance prépondérante de la maternité ». C'est pour cela qu'ils sont condamnés et décriés par les masculinistes qui les appellent « peuples noirs » (non pas de race noire, mais de la noirceur qu'on attribue au mal).
Viennent ensuite les Héraclides (de Hercule) qui triomphent des Pélasges. C'est l'époque héroïque, celle de la grande lutte des Amazones contre les héros conquérants et usurpateurs.
Les Hellènes leur succèdent. C'est le triomphe du parti féministe qui rend à la nation le nom d'une femme, car Hélène, en Laconie, a toujours été considérée comme une Déesse. Par le nom d'Hellènes, on doit entendre les solaires, Hélices ou Iliones.
Les Orphiques qui viennent après s'opposent aux Hellènes et créent une religion nouvelle, l'Orphique Apollonienne, avec ses mystères obscènes, sa loi sévère du mariage imposé à la Femme, loi qu'on veut opposer à l'hétaïrisme, c'est-à-dire au régime de liberté de la Femme. Les Orphiques renversent la signification des mots ; pour eux, ce sont les Hellènes qui sont les lunaires, et ils vont se déclarer, eux, les solaires.
On voit alors apparaître une secte masculiniste ; les Argiens (les blancs), qui font opposition aux féministes phéniciens (les rouges).
Enfin, la division se retrouve dans les Doriens ou Achéens, parti mâle, en opposition avec les Ioniens, parti féminin.
C'est après ces étapes que nous arrivons à l'époque philosophique qui amène une décadence masculine. Cette époque est une réaction contre la fugitive renaissance de la religion théosophique, le Pythagorisme, dont les historiens masculins parleront peu, mais qui nous est révélée par les monuments.
C'est quand le parti masculin se croit vaincu que les hommes élèvent des temples à la Concorde.
Quant au nom de Grec, qu'ils se donnaient difficilement à eux-mêmes, nous venons de voir qu'il venait d'un mot celte, Graïa (une grue). Ne perdons pas de vue que la langue grecque, dans sa première forme, a été celle des Celtes, et que les noms qui ont été transmis chez les Grecs et les Latins, et que nous retrouvons dans leur mythologie, venaient du Nord.
Cette origine de leur nom prouve que les Grecs étaient mal vus, ils étaient considérés comme les suiveurs de Ram, le rejeté des nations. Le misérable orgueil qui les animait leur donna l'idée de passer pour autochtones et de s'élever au-dessus des autres nations qu'ils jalousaient.
Profitant d'une certaine analogie qui se trouvait entre les noms de leurs villes et ceux des villes de la Phénicie ou de l'Egypte, ils faisaient naître dans la Thèbe béotienne celui qu'ils appelaient le souverain universel, Hercule, qui copie la Déesse Héra. Pour eux, le Manou des Indiens devient le Minos de l'île de Crète. Ils assuraient que Persée, fils de Danaë, avait été le législateur des Perses ; ils attribuaient l'invention de la charrue à une Cérès grecque et forgeaient une infinité de fables plus absurdes les unes que les autres, pour prouver que les grandes découvertes scientifiques, faites chez les Celtes, venaient de leur pays. Il est expliqué, dans l'article « Faits et temps oubliés », ce qu'ils inventèrent, sous le titre de Cycle de Méton, ou nombre d'or, pour attribuer à un prétendu astronome grec la découverte de la périodicité des éclipses de lune faite par la Déesse Corona, qui donna son nom aux Cornouailles. On y ajouta les calculs d'éclipses attribués à Anaxagore. Nous avons aussi montré que, de Pythagore, nom d'une science, on fit un homme né en Grèce.
Puis voici Litasthène à qui on attribue la mesure de la circonférence de la terre, qui était enseignée dans les collèges des Druidesses.
Et pendant qu'ils attribuaient à la Grèce tout ce qui se faisait en Celtique, ils niaient la grandeur de ce pays à qui ils devaient toutes leurs connaissances.
Et le peuple grec, devenu arrogant, croyait à tous ces mensonges et commandait aux plus fortes têtes d'y croire.
Les Mystères établis pour faire connaître la Vérité, ouverts à un trop grand nombre d'initiés, perdaient leur influence. Les Hiérophantes, intimidés ou corrompus, se taisaient ou consacraient le mensonge. Il fallait nécessairement que la Vérité se perdît tout à fait. C'est ce qui arriva.
La Grèce, éprise d'une folle liberté, céda aux orages des passions ; elle se divisa.
A peine vainqueurs, les Athéniens et les Spartiates se brouillèrent et arrosèrent de leur sang les plaines du Péloponèse.

TRANSFORMATION DES CHAMPS-ELYSÉES ET DU TARTARE
C'est dans le polythéisme des prêtres grecs, qui introduisit Jupiter dans le Panthéon, que les antiques traditions perdirent leur signification primitive et devinrent la base d'un surnaturel ridicule.
Plutarque, qui s'en fait le narrateur, nous dit que Jupiter sentit que la force des séductions est dans les passions humaines, que les passions plaident et prononcent dans les jugements. « Ce sont les vêtements, dit Plutarque, qui corrompent les juges. »
Jupiter ordonna donc que, désormais, les juges seraient nus, c'est-à-dire morts et dépouillés de l'humanité fragile, que leur tribunal fût placé dans l'autre vie, afin que, les âmes seules jugeant les âmes, les arrêts fussent justes. Jupiter donna cet emploi à ses enfants : Minos et Rhadamante furent pour l'Asie, Eaque fut pour l'Europe. Il oublia l'Egypte où le Jugement des « morts » était antérieur à lui, ce que les Grecs ignoraient.
Voilà donc un nouveau système mensonger imaginé par les hommes pour se débarrasser du jugement des femmes. Pour donner du prestige à cette nouvelle fable, Platon raconte qu'un philosophe qui l'a instruit lui a dit que dans l'île de Délos on trouva des tables d'airain, apportées des montagnes hyperboréennes (1), sur lesquelles ce philosophe lut toute la description de l'enfer, la doctrine de l'âme immortelle, dégagée des liens du corps et descendue sous la terre dans l'empire de Pluton, empire fermé par des portes de fer, où se présentent d'abord l'Achéron et le Cocyte, au delà Minos et Rhadamante qui jugent dans les Champs de la Vérité.
C'est l'île de Délos qui a vu naître les dieux mâles dans la Grèce, île entourée de superstition et d'exagération. Diodore de Sicile et Pline en parlent ; l'un l'appelle Basilée ou royale, nom d'une des îles féministes de l'Atlantide, l'autre Osericta, mot qui signifie dans les langues du Nord « Ile des dieux-rois », île royale des dieux, c'est-à-dire des Déesses. C'est évidemment une imitation.
(1) Ces tables étaient évidemment fabriquées, ou altérées, si elles ont vraiment existé. Mais il semble que ce témoignage invoqué par Platon est un subterfuge imaginé pour donner de la valeur à la doctrine de l'immortalité de l'âme dont il était lui-même l'inventeur.

VÉNUS SPÉCULATIVE
La grande Déesse Vénus-Hemœra a été surnommée spéculative ; on la représente un miroir à la main, et le miroir s'appelle spéculum.
On sait que c'est parce que l'homme copia la Femme qu'on mit dans la main des Déesses un miroir magique qui lui montre son image et qui semble lui dire : « Tu as le reflet de mon Esprit, tu me copies, et maintenant tu me supprimes et attribues à des hommes toutes, mes découvertes scientifiques. »
Et le mot spéculation (copie) restera dans le langage philosophique des hommes. En réalité, il signifie « celui qui imite ». Mais, comme le prêtre qui s'attribue la science en fait un commerce, le mot spéculation prendra en même temps une signification qui indiquera que c'est aussi une affaire d'argent.
Un autre mot remplacera quelquefois le mot spéculation : c'est écho. L'homme qui, chez les Celtes, copie la Déesse et prétend faire des choses extraordinaires, mettant sur le terrain concret ses pensées abstraites qu'il n'atteint pas, cet homme-là s'appelle Hecho ou Hechicero, d'où est resté, dans les langues modernes, le mot écho (ce qui répète).
Les Grecs, qui changent toujours les sexes, feront d'Echo une nymphe, qui cherche à attirer un jeune éphèbe, fils du fleuve Céphise, qu'ils appellent Narcisse. Le fond de cette légende est pris aux Celtes. Narr veut dire sot et kiss baiser. Ce nom signifia embrasser son image dans l'eau. De Narr et Kiss les Grecs ont fait Narcisse.

ESOPE
Une personnalité curieuse au point de vue des substitutions de sexes est celle d'Esope, Celui qui a écrit l'histoire d'Esope le Phrygien, publiée comme introduction aux Fables de La Fontaine, s'étonne que l'on ne sache rien de la vie d'Homère et de celle d'Esope.
C'est que ces auteurs sont, tous les deux, des personnalités de sexe féminin qu'on a voulu cacher. Et il fait remarquer que ce sont eux qui ont le mieux mérité des siècles suivants. C'est toujours ainsi que cela s'est produit. On a persécuté et caché toutes les grandes femmes pendant que l'on glorifiait toutes les médiocrités et tous les imposteurs.
Cet auteur dit d'Esope : « Il me semble qu'on devrait le mettre au nombre des sages dont la Grèce s'est tant vantée, lui qui enseignait la véritable sagesse. » Mais c'est pour cela qu'on l'a tuée.
Cependant, un Grec a écrit une histoire d'Esope, mais de telle façon que La Fontaine dit : « Je l'ai suivi sans retrancher, de ce qu'il dit d'Esope, que ce qui m'a semblé trop puéril ou qui s'écartait en quelque façon de la bienséance. » Voilà un mot qui prouve encore qu'il s'agit d'une femme dont on se moque.
« On ne saurait dire s'il eut, sujet de remercier la nature ou bien de se plaindre d'elle, car, en le douant d'un très bel esprit, elle le fit difforme et laid de visage, ayant à peine la figure d'homme, jusqu'à lui refuser, presque entièrement, l'usage de la parole. Avec ces défauts, quand il n'aurait pas été de condition à être esclave, il ne pouvait manquer de le devenir. Au reste, son âme se maintint toujours libre et indépendante de la fortune. »
On vient de nous dire qu'Esope parle difficilement. Dans le premier épisode qu'on lui attribue, on le représente comme bègue et paraissant idiot, mais se faisant entendre cependant ; puis on le représente s'imaginant, dans un songe, que la Fortune lui déliait la langue et lui faisait don de l'art dont on peut dire qu'il est l'auteur.
Ceci nous fait supposer qu'Esope est une étrangère emmenée Comme esclave en Grèce, dont elle ne parle pas la langue ; c'est pour cela qu'elle est bègue ou muette ; mais elle acquiert peu à peu cette connaissance, ce qui lui délie la langue. A moins qu'il ne s'agisse d'une femme d'une timidité extrême dans sa première jeunesse, qui, avec l'âge, prend de l'aplomb et de l'audace, ce qui, aussi, lui délie la langue.
Esclave, elle est en butte aux méchancetés des hommes ; esclaves comme elle, ils l'accusent de leurs méfaits.
Un marchand refuse de l'acheter parce que son physique est repoussant, il trouve qu'elle ressemble à une outre. Elle lui répond : « Achète-moi hardiment et je ne te serai pas inutile. Si tu as des enfants qui crient et qui soient méchants, ma mine les fera taire ; on les menacera de moi comme de la bête. » Le marchand l'acheta trois oboles.
On se plaît à raconter ses traits d'esprit, les réponses spirituelles qu'elle fait aux questions qu'on lui pose, des espiègleries qui amusent et calment la colère du maître.
Comme on lui demande d'apporter, pour un repas, ce qu'il y a de meilleur, elle apporte une langue. Le lendemain, on lui demande d'apporter ce qu'il y a de pire et elle apporte encore une langue.
La langue, c'est ce qu'il y a de mieux, le lien de la vie civile, la clef des sciences, l'organe de la Vérité et de la raison ; par elle, on instruit et on persuade, on règne dans les assemblées, on s'acquitte du premier de tous les devoirs qui est de louer les Divinités.
Mais aussi la langue, c'est la mère de tous les défauts, la nourrice des procès, la source des divisions et des guerres. Si on dit qu'elle est l'organe de la Vérité, c'est aussi celui de Terreur et, qui pis est, de la calomnie. Par elle, on persuade de méchantes choses. Si d'un côté elle loue les Divinités, de l'autre elle profère des blasphèmes contre leur puissance.
On nous représente Esope comme ne manquant pas une occasion de rire et de dire des bons mots, ce qui prouve qu'elle était douée de l'esprit critique et satirique qu'elle mit dans ses fables. Son maître Xantus lui promet la liberté, mais ne la lui donne jamais. Au contraire, pour la récompenser de lui avoir fait trouver un trésor, il la fait mettre en prison. Cependant, obligé de prendre part à un débat public, Xantus emmène Esope afin qu'elle parle pour lui. Esope en profite pour montrer qu'elle ne peut pas parler si elle n'est pas libre, parce que, si elle parle mieux que son maître, elle sera battue. Xantus résistait toujours, mais, comme le prévôt de la ville menaça de la faire affranchir d'office, Xantus dut y consentir.
Crésus, roi des Lydiens, allait attaquer ceux de Samos où résidaient Xantus et Esope.
Les ambassadeurs de Crésus lui dirent que, tant qu'ils auront Esope avec eux, il ne pourra les réduire, vu la confiance qu'ils ont dans le bon sens de ce personnage. Crésus promit aux habitants de Samos de leur laisser la liberté s'ils la lui livrent. Les principaux de la ville trouvèrent ces conditions avantageuses et ne crurent pas que leur repos leur coûtait trop cher quand ils l'achèteraient aux dépens d'Esope. Elle imagina, pour se défendre, de leur conter que les loups et les brebis ayant fait un traité de paix, celles-ci donnèrent leurs chiens pour otages. Quand elles n'eurent plus de défenseurs, les loups les étranglèrent. On l'écouta.
Esope, cependant, voulut aller vers Crésus et dit qu'elle les servirait plus utilement étant près du roi que si elle demeurait à Samos. Quand Crésus la vit, il s'étonna qu'une si chétive créature lui eût été un si grand obstacle. « Quoi ? voilà celui qui fait qu'on s'oppose à mes volontés ! », s'écria-t-il. Elle répond par une parabole : « Un homme prenait des sauterelles ; une cigale lui tomba sous la main. Il s'en allait la tuer comme il avait fait des sauterelles. « Que vous ai-je fait ? », dit-elle à cet homme ; « je ne ronge point vos blés ; je ne vous procure aucun dommage ; vous ne trouvez en moi que la voix, dont je me sers fort innocemment ». « Grand roi, je ressemble à cette cigale, je n'ai que la voix et je ne m'en suis jamais servie pour vous offenser ». « Crésus lui pardonna.
En ce temps-là, Esope composait ses fables. Elle les laissa au roi de Lydie qui l'envoya vers les Samiens, qui donnèrent à Esope de grands honneurs. Elle eut aussi l'envie de voyager et de s'entretenir avec ceux qu'on appelait des philosophes.
Elle se mit en grand crédit auprès de Lycérus, roi de Babylone.
Les rois d'alors s'envoyaient les uns aux autres des problèmes à résoudre. Lycérus, assisté d'Esope, avait toujours l'avantage, et cela le rendit illustre.
Cependant, Esope se maria ; mais, n'ayant pas d'enfant, elle en adopta un, Ennus, qui la paya d'ingratitude et osa souiller le lit de sa bienfaitrice. Esope le chassa. Il s'en vengea, contrefit des lettres par lesquelles il semblait qu'Esope eût intelligence avec les rois qui étaient émules de Lycérus. Celui-ci crut à la calomnie et commanda à un officier, Hermippus, de faire mourir le traître Esope. Cet officier, qui était l'ami d'Esope, lui sauva la vie en la cachant dans un sépulcre jusqu'à ce que Nectanébo, roi d'Egypte, sur le bruit de la mort d'Esope, crût, à l'avenir, rendre Lycérus son tributaire.
Le séjour qu'elle fit en Egypte est peut-être cause que quelques-uns ont écrit qu'elle fut esclave avec Rhodope, celle-là qui fit élever une des trois pyramides qui subsistent encore.
Esope, à son retour dans Babylone, fut reçue par Lycérus avec de grandes démonstrations de joie et de bienveillance. Ce roi lui fit élever une statue.
L'envie de voir et d'apprendre lui fit renoncer à tous ces honneurs. Elle quitta la cour de Lycérus où elle avait tous les avantages qu'on peut souhaiter et prit congé de ce prince pour voir la Grèce encore une fois. Lycérus ne la laissa pas partir sans embrassements et sans larmes et sans lui faire promettre qu'elle reviendrait finir ses jours près de lui.
Entre les villes où elle s'arrêta, Delphes fut une des principales.
Sa fin est racontée de différentes manières. Voici une de ces versions :
Les Delphiens l'écoutaient volontiers, mais ne lui rendaient pas d'honneurs. Esope piquée, de ce mépris, les compare aux bâtons qui flottent sur l'onde. On s'imagine, de loin, que c'est quelque chose de considérable ; de près, on trouve que ce n'est rien. La comparaison lui coûta cher ; les Delphiens en conçurent une telle haine et un si violent désir de vengeance qu'ils résolurent de l'ôter du monde. On l'accusa de viol et de sacrilège et on la précipita.
Une pyramide lui fut élevée, les femmes vengèrent la mort de leur sage. La Grèce envoya des commissions pour en informer et en fit une punition rigoureuse.
Une autre version, résumée dans un Dictionnaire, dit ceci :
Esope (VIème siècle), esclave de Jadmon, envoyée par ce prince à Delphes pour y porter des offrandes ; les prêtres du Temple d'Apollon l'irritèrent tellement par leurs fraudes et leur cupidité qu'elle ne put s'empêcher de les accabler de ses sarcasmes. Les prêtres s'en vengèrent en l'accusant de vol. On trouva, en effet dans ses bagages une coupe d'or qu'ils y avaient cachée. Elle fut condamnée à mort pour ce fait.

La petite personne dodue, un peu obèse, comparée à une outre, qu'était Esope, n'a rien de masculin. Ses propos non plus ; quand elle disait « moi qui n'ai pas les bras d'Hercule » pour expliquer que son lot était la ruse, elle parlait bien en femme.
Quant à ses fables, qui ont couru le monde pendant toute l'antiquité, c'était bien la logique féminine cachée dans des allégories.
Boccace et La Fontaine en ont modernisé quelques-unes, d'autres circulent encore obstinément dans la mémoire fidèle du peuple, elles passent d'un pays à l'autre par des chemins que nous ne savons pas, se renouvelant et se répétant sans cesse.

LES CONTES DE « MA MÈRE L'OYE »
Les Grecs se vengent d'avoir été appelés des grues en donnant le nom d'un des oiseaux symboliques à la Mère, objet des railleries et des critiques des misogynes. Cette critique va se manifester dans un genre littéraire qu'on appelle les contes milésiens. C'est à l'endroit où vivaient les Féministes qu'on va les ridiculiser, c'est en prenant le nom d'une de leurs villes qu'on va mettre en raillerie toute la science antique.
Les récits milésiens ont pour cadre commun l'éternelle comédie, le duel ou la querelle de l'homme et de la femme.
Paul Monceau, dans Apulée, nous donne un aperçu intéressant de ce que furent ces contes. Il dit :
« Le monde est blanc et noir, toute chose a deux faces, l'une triste, l'autre gaie.
« Dans la tragi-comédie humaine, les conteurs milésiens ont regardé surtout le côté plaisant, mais sans oublier tout à fait l'autre. On trouverait de la discrétion et de la mélancolie jusque dans leur gros rire. Ils ont aimé la galanterie raffinée, le merveilleux populaire, le surnaturel, les voyages extraordinaires, la nécromancie, la magie ; et toujours sous la raillerie légère se cachait un grain de poésie.
« Les contes milésiens n'ont été réunis qu'à l'époque alexandrine, et, c'est alors seulement qu'ils prennent vraiment place dans la littérature.
« Aristée de Milet n'eut point désavoué la magie romanesque et les épisodes galants de l'Odyssée, par exemple l'histoire de Circé et de ses amoureux au groin de pourceau. La raillerie légère des poètes cycliques défigure les héros d'épopées. Elle raconte leurs équipées amoureuses ; elle prélude à ce pédantisme galant qui s'étalera plus tard dans les poésies érotiques des Alexandrins, dans les Héroïques de Philostrate et les Héroïdes d'Ovide. Elle compte méchamment les maris d'Hélène et en trouve cinq. C'est ainsi qu'Hélène devient peu à peu la femme galante dont se sont égayés les derniers poètes grecs, les latins et les modernes. Par les colonies de Milet qui couvrent les côtes de la Propontide et de l'Euxin, ces fables se répandent de tous côtés. Les émigrants portent partout avec eux leur esprit railleur et leur galante ironie ; ils ont découvert en Colchide, au pied du Caucase, et font connaître du monde entier, la magie amoureuse de Médée. Ils découvrent qu'Hélène et Achille sont devenus amoureux (sans même savoir qu'Achille est une femme) et que désormais ils règnent ensemble dans une île du Pont-Euxin, où la nuit les marins entendent résonner l'orgie.
« La fantaisie des Ioniens façonne, avec la même liberté, l'histoire nationale, et l'on retrouve dans Hérodote de vrais contes milésiens. La Fontaine l'a bien compris quand il a ramené aux proportions d'une fable galante la mésaventure du roi Candaule.

« Le bon chroniqueur d'Halicarnasse avait appris cette légende sur les genoux de sa nourrice ; il s'en est souvenu pour expliquer l'avènement de la dynastie de Gygès au trône de Lydie.
« Et les infortunes de Midas, roi de Phrygie ? Et Polycrate de Samos ? Et Crésus de Sardes ? Et la vie d'Esope ? Tous ces merveilleux récits, avant d'être sérieusement encadrés dans l'histoire, avaient égayé l'imagination railleuse des bourgeois de l'Ionie.
« De toute cette fantasmagorie galante, demi-ironique, qui pendant longtemps s'était jouée autour de l'épopée et de l'histoire, on vit enfin, dans l'Asie Mineure hellénique comme dans la France du moyen âge, sortir deux nouveaux genres littéraires le roman et le conte.
« L'expédition d'Alexandre avait fait éclore, en Ionie, toute une littérature d'amourettes exotiques et de voyages extraordinaires. »
A cette intéressante citation, ajoutons que ces récits fantastiques furent naïvement accueillis par les historiens grecs et latins des siècles suivants. Les conteurs du pays parlèrent couramment d'hommes à un œil, les cyclopes d'Homère (Hemœra), représentant l'homme qui n'a plus que la moitié de la lumière de l'esprit. On parlait aussi de l'homme qui marche à reculons, ce qui figure la régression des courants céphaliques qui a changé la forme du crâne des dégénérés, diminuant son angle facial de manière à lui donner un crâne fuyant, c'est-à-dire rejeté en arrière.
On mentionnait aussi ceux qui mangent tous les deux jours, c'est-à-dire qui obéissent à une réglementation sexuelle. Puis on représente ceux qui ensorcellent avec la langue et le regard, ou qui aboient, ou qui sautent sur une jambe unique, ou qui changent de sexe.
Ceux qui sautent sur une seule jambe représentent l'homme voulant régner seul, comme si l'humanité qui a été créée avec deux jambes pouvait marcher sur une seule.
Ceux qui changent de sexe, ce sont ceux qui se donnent les facultés et les droits de la Femme.
Ils connurent aussi les hommes-plantes, c'est-à-dire l'origine végétale ; les sirènes à pied d'âne, les iles-fromages, les voyages dans la lune, les promenades dans la baleine, les batailles d'îles flottantes. Ils composaient des recueils de métamorphoses en vers et en prose.
Le roman eût désormais ses lois, son cadre, on le prit au sérieux.
C'est que, au fond même de ce genre nouveau, « l'ironie du révolté », il y a une loi de la nature : la régression du dégénéré.
« La critique moderne a parfois cherché et naturellement elle a trouvé dans l'Amour et Psyché une profonde allégorie philosophique », dit Paul Monceau.
C'est que le roman d'Apulée ainsi intitulé (L'Amour et Psyché) résume le combat des deux impulsions sexuelles.
Psyché, c'est le nom grec de l'âme. Les aventures de la pauvre Psyché symbolisent les souffrances de l'âme féminine à la recherche du vrai, du beau, du bien, qu'elle veut trouver dans l'homme qu'elle aime. Tant qu'il lui reste attaché, il est le reflet de son esprit, il garde sa foi en elle. Mais aussitôt que le lien se relâche, le désaccord surgit ; il manifeste sa pensée retournée ou renversée, qui est la contradiction de celle de la Femme. En face d'elle, il garde l'apparence du serviteur fidèle, mais ses paroles prennent une expression nouvelle ; c'est l'ironie, le sarcasme ; il semble toujours affirmer sa foi, mais le ton qu'il y met est un démenti donné à ses paroles : c'est la mauvaise foi qui commence ; elle est d'abord cachée dans la ruse, plus tard elle deviendra cynique dans le mensonge.
L'évolution de son sexe donne à l'esprit de l'homme une direction inverse de celle de la femme ; il évolue de haut en bas ; parti de la spiritualité, il va vers la sexualité. Alors tout, pour lui, prend un caractère nouveau, il dénature les idées spirituelles et en fait des idées sexuelles ; c'est un langage spécial qu'il créé : en changeant la signification des mots, qu'il ne comprend plus comme la femme les comprend. Et à cette impulsion se mêle un peu d'envie et beaucoup d'ignorance ; il veut croire que la Femme descend comme lui dans les abîmes du sexe, ou, s'il ne le croit pas, il feint de le penser. C'est ainsi que les langues se transforment et qu'un nouveau langage apparaît, en même temps qu'un nouveau genre de littérature : le masculinisme ironique.
Monceau dit encore :
« La fantaisie milésienne ne toucha plus à l'épopée et à, l'histoire que pour les railler en passant.
« On vit naître des recueils de contes milésiens. Le plus populaire semble avoir été celui que rédigea au XIème siècle avant notre ère Aristide de Milet. C'est du moins la mine où puisèrent à pleines mains les auteurs grecs et latins. L'ouvrage prit place dans toutes les bibliothèques de lettrés ; le recueil était considérable, car nous voyons le grammairien Charisius citer des fragments du XIIIème livre.
« La popularité des contes milésiens irritait saint Jérôme.
« On trouve plus de gens, disait-il, pour lire les Milésiennes que les livres de Platon. » Les enfants des écoles s'amusaient de ces histoires, presque autant que d'une vieille parodie des formes juridiques, le Testament du cochon.
« Ces fables milésiennes, bien des gens les connaissent aujourd'hui, qui ne s'en doutent guère. Ils les ont admirées dans nos fabliaux ou nos farces du moyen âge, dans Boccace, l'Arioste ou Shakespeare, dans La Fontaine, Corneille ou Molière ; ils les ont applaudies au théâtre, au son de la musique, dans Psyché ou la Belle Hélène. Depuis longtemps, ces inventions gracieuses ou bouffonnes sont entrées dans le domaine commun de la littérature et de l'art moderne.
« Mais suivez pieusement le cours des âges en remontant de l'effet à la cause, du fleuve à la source, vous arriverez souvent vers la côte d'Asie Mineure, aux cités d'Ionie. Là-bas, dans la lumière, ont germé presque tous nos arts et nos genres littéraires. C'est là aussi que fut inventé le conte. »

Et c'est avec ces récits, qui ont la même valeur que les opérettes modernes, qu'on a écrit l'histoire grecque.

ROME SOUS LES DICTATEURS
En 498, nous voyons à Rome les Magistri populi qui sont munis d'un pouvoir illimité dans la ville et au dehors. Leurs arrêts sont sans appel, leur pouvoir menaçant jette l'effroi parmi les plébéiens.
C'est ainsi que l'autorité brutale de l'homme venait partout remplacer l'autorité morale de la Femme. On attribua à Romulus la fondation des comices ou assemblées par curies et du Sénat, qui est copié de l'ancien Conseil des Matrones, qui existait dans le régime matriarcal.
C'est pour donner de l'ancienneté à ces institutions qu'on les fait remonter au fondateur supposé de Rome. Le peuple était déjà fatigué de ce régime nouveau qui ne lui avait procuré que des impôts, des corvées, des guerres, des champs dévastés, de la misère et une crainte perpétuelle de la prison pour dette (ergastulum). C'est alors que pour mater le peuple on créa les Dictateurs.
En 493, on dut créer les Tribuns pour mettre un frein aux excès d'autorité de ces Magistri. Voici ce qui en fut l'occasion : Un jour, on vit tout à coup apparaître au Forum un vieillard pâle, exténué de maigreur, les vêtements en lambeaux. C'était un ancien centurion, couvert de cicatrices, honoré de nombreuses récompenses. Il raconte que dans la guerre sabine sa maison a été brûlée ; sa récolte détruite, ses troupeaux enlevés ; pour payer l'impôt il a emprunté, l'usure cumulant la dette lui a ôté tout ce qu'il possédait et, comme une plaie dévorante, a gagné son corps ; il a été emmené par un créancier, par un bourreau, et il montrait ses épaules qui saignaient encore des coups de fouets.
Tels étaient les résultats de cette manière de gouverner, telles étaient les conséquences de la guerre.
Alors, voyant qu'on avait été trop loin, on créa pour défendre le peuple des tribuns, qui sont l'origine lointaine de nos députés actuels. Ils avaient le droit de veto (je m'oppose), qui arrêtait l'exécution des Sénatusconsultes.
En lisant cela, cette réflexion vient d'elle-même à l'esprit ; A quoi bon faire des décrets et des ordonnances si quelqu'un a le droit d'en arrêter l'exécution en disant tout simplement : « Je m'y oppose » ? Quelle confiance avoir dans des législateurs qui ont besoin d'un contrôle ? On comprendrait cela si c'étaient des femmes qui s'opposaient à l'injustice des hommes ; mais des hommes contre d'autres hommes ? Qui les contrôlera eux-mêmes ?
On sent que la grande préoccupation de ce régime qui commence, c'est d'établir la suprématie du Père, qui aboutira au fameux droit paternel. On arrive à soustraire la famille à l'autorité de la Mère en donnant aux tribus une organisation nouvelle. On les partage chacune en dix curies, chaque curie est organisée en décuries ; les décuries étaient formées en gentes. La gens était comme une grande famille à laquelle on donna comme chef le Père, alors que, jusque là, c'est la Mère qui avait disposé de toute l'autorité familiale ; ceci prouve que cette substitution fut lente et longue et ne dut pas s'effectuer sans luttes, quoique les historiens nous disent qu'à ce moment le Père règne sur la femme, les enfants, les esclaves, et que son pouvoir sur la gens est absolu. On le présente, d'avance, comme le Pater familias ; il n'y a plus qu'une volonté, la sienne ; ses amis, appelés ses clients, étaient toujours prêts à le soutenir contre les justes revendications des défenseurs de l'ancien droit.
La famille, ainsi constituée, devait être un enfer pour les femmes ; aussi elles n'y entraient pas volontairement, et, pour en avoir, les hommes devaient les voler : de là le rapt.
Ce sont les partisans de ce nouveau régime qu'on va appeler patriciens ; ils vont mettre la noblesse de leur côté, en se déclarant une caste supérieure. Ce sont eux qui vont rendre la justice, déclarer la guerre et prendre la direction de la religion.

ROME FAIT DES LOIS (451)
Le régime nouveau faisait des progrès à Rome. Trois commissions furent chargées d'aller dans les villes grecques de l'Italie méridionale et jusqu'à Athènes, pour étudier les lois et les recueillir. C'est alors que Rome fut connue des Grecs. Elle n'était à ce moment qu'une petite ville sans importance. Même à l'époque d'Alexandre, elle était peu connue en Grèce. L'historien Théopompe ne dit qu'un seul mot de cette ville pour annoncer qu'elle a été prise par les Gaulois (en 390).
Au retour des commissions, on créa les Décemvirs. Dix magistrats patriciens, investis d'un pouvoir illimité, avaient, chacun pendant dix jours, la présidence et le gouvernement. Ils furent chargés en l'an 304 de Rome (442 avant notre ère) de rédiger un Code de lois (les douze Tables). Dix tables de lois furent exposées sur le Forum et acceptées par les centuries ; voilà la loi de l'homme, faite par l'homme et acceptée par l'homme. Impossible de ne pas voir dans ce fait la contre-partie de ce qu'avait fait la Femme dans l'ancien régime.
Pour compléter ces lois, les Décemvirs publièrent deux nouvelles tables remplies de lois iniques et gardèrent le pouvoir sans convoquer les comices. Donc ils commencent par abuser de l'autorité qu'on leur donne.
Des doutes ont été exprimés au sujet de l'authenticité de la loi des douze Tables. Quelques auteurs ont même prétendu que l'existence de ces douze Tables était une pure invention. M. Michel Bréal s'est chargé d'en défendre l'authenticité. Voici ce qu'elles contenaient, et cela nous explique pourquoi on les tenait secrètes.
Le Zodiaque de la Déesse Hathor était un résumé en douze symboles de la Loi qu'elle avait formulée dans le Sépher. Le mot Zodiaque vient de Zoè (vie) et disque (diaken en flamand). Le Zodiaque fut imité souvent, mais surtout par Ram, qui y introduisit de grands changements dans le but de le faire servir à la consécration des doctrines masculinistes qu'il préconisait.
Depuis, on le considérait comme contenant douze piliers c'est-à-dire comme soutien du régime nouveau. Ce sont les Lois des douze Tables qu'on a personnifiées et célébrées sous différents noms chez tous les peuples de la terre, Les uns en ont fait douze grandes intelligences qui présidaient aux douze mois et aux douze signes, d'autres les chantaient comme les douze anges gardiens de l'Univers. On les appelait les douze sénateurs, les douze modérateurs du monde. Les Scandinaves les célébraient sous le titre des douze Ases d'Odin.
Quoiqu'on ne sache pas ce que contenaient ces lois, on les invoquait souvent à l'appui de ce qu'on imposait. Ainsi, on nous dit que la Loi des douze Tables édictait des peines sévères contre les magiciens qui exploitaient la crédulité publique, les charlatans qui tenaient boutique de recettes qualifiées de magiques, qui tripotaient avec des formules sacrées, préparateurs de philtres, souvent de poisons, ne reculant devant aucun crime.
Les femmes, devaient se révolter de cet état de choses nouveau pour elles. On agissait sans les consulter ; bien plus, on les considérait déjà comme du bétail humain : « Le brutal Appius a chargé l'un de ses clients de réclamer, comme son esclave, la jeune Virginie, fille d'un plébéien distingué ; au mépris d'une loi récente des douze Tables, il l'adjuge provisoirement à son prétendu maître. En vain Icilius, son fiancé, et de nombreux témoins, prouvent qu'elle est de naissance libre, en vain Virginius, centurion à l'armée de l'Algide, accourt pour réclamer sa fille ; Appius la livre à son client. Alors le malheureux père, pour sauver l'honneur de sa fille (ce sont les historiens masculins qui parlent), lui perce le cœur et, tout couvert de son sang, il va soulever les soldats qui marchent sur Rome et campent sur l'Aventin. Puis, suivi de tout le peuple, et réuni à l'armée de Sabine, ils se retirent encore une fois dans l'asile du Mont Sacré. ».
Telles sont les mœurs barbares, les idées folles, et la morale bizarre de ces demi-sauvages !...
Ce fait peut être rapproché de cet autre, situé dans l'histoire de Rome un siècle avant (510) : c'est celui qui nous dit que Lucrèce, femme de Tarquin Collatin, fut déshonorée par Sextus Tarquin et se tua sous les yeux de son mari en demandant vengeance.
Comment des hommes peuvent-ils écrire des choses aussi contraires à la psychologie féminine ? Une femme qui a été violée est indignée certainement, mais elle ne se tue pas pour cela. Ce qu'elle peut faire, c'est tuer son violateur, mais pourquoi tuerait-elle la victime du crime, quand cette victime, c'est elle- même ?
Autre chose : elle se tua, dit-on, sous les yeux de son mari, mais en 510 on n'avait pas encore fait de loi qui instituât le mariage, puisque la première loi, celle des douze Tables, date du siècle suivant. On voit, dans tout cela, la préoccupation des hommes d'une époque postérieure, de mettre l'honneur de la Femme dans son esclavage sexuel, ce qui est en opposition avec la morale primitive qui l'avait glorifiée dans son sexe et dans sa liberté !
Fabre d'Olivet a bien jugé les Romains. Il dit d'eux : « Rome, trop farouche pour aimer les arts, asile d'une foule de vagabonds, sans connaissances et sans envie d'en acquérir, était tombée dans un tel état d'ignorance qu'on y posait encore un clou tous les ans à la porte du temple de Jupiter pour conserver la chronologie. Le premier cadran solaire que l'on vit dans cette ville y fut placé dans le temple de Romulus Quirinus, plus de deux siècles après l'établissement des consuls.
« Les Romains n'étaient, dans l'origine, que des sortes de flibustiers que l'appât du butin réunit, des brigands courageux dont l'unique vertu, décorée du nom pompeux d'amour de la Patrie, ne consista pendant plusieurs siècles qu'à rapporter à la masse commune ce qu'ils avaient pillé aux nations du voisinage.
Quand ces guerriers allaient en course, ils portaient pour enseigne une poignée de foin (nourriture de l'âne), qu'ils appelaient manipuli. La grue, qu'ils reçurent des prêtres saliens et qu'ils transformèrent en aigle, ne parut que longtemps après sur leurs drapeaux. L'aigle fut consacré à Jupiter. » (Etat social, t. II, p. 22.)
Rome était l'antithèse de la Gynécocratie. Centre d'événements tumultueux, violents, il y régnait une dureté qu'on appela de l'héroïsme, une absence complète d'aménité. Des scènes de carnage et de dévastation remplissent les annales de Rome. En quelques siècles, cette bourgade, qui n'était, au début, qu'un ramassis de révoltés, s'éleva, s'étendit au loin et arriva au faîte de la puissance brutale, donnant au monde l'exemple de ce que peut être une société quand la force triomphe.
Rome fit des lois abominables, des guerres meurtrières, elle eut des monstres couronnés, ses grandes femmes furent calomniées, avilies !
Ce fut une tache dans l'histoire, dont le déplorable effet dure encore !

INVASION DES GAULOIS EN ITALIE (390)
En 390, une tribu gauloise, sous la conduite d'un de leurs Brenns, entra encore en Italie et resta dans le nord de la péninsule, qui prit le nom de Gaule cisalpine.
Cette seconde descente des Gaulois en Italie mit en présence les deux puissances gauloise et romaine. Les Gaulois, ayant passé les Apennins et entamé le pays qui restait aux Etrusques, furent attaqués par les Romains. Ils mirent en pièces l'armée romaine, au bord de la rivière d'Allia, puis ils prirent et brûlèrent Rome (en 391). Ils ne purent toutefois prendre d'assaut la citadelle de Rome. Leur général, leur Brenn (mot dont les historiens romains ont fait un nom propre, Brennus), pour s'emparer du Capitole, fit escalader la nuit le rocher sur lequel il était appuyé ; c'est alors que Manlius fut réveillé par le cri des oies sacrées, et précipita dans le vide les Gaulois qui escaladaient le mur.
Dans cet épisode, nous trouvons à noter ceci : l'oie est un animal qui servit de symbole quand les femmes avaient le tort de ridiculiser les hommes. L'homme se vengea en faisant de l'oie un animal sacré, et nous la retrouvons au Capitole entretenue et vénérée, en attendant qu'elle devienne l'aigle impériale...
Nous trouvons là la même évolution d'un symbole que nous avons déjà constatée en Egypte, où le taureau sert à représenter ironiquement l'homme fort et devient le bœuf Apis, divinisé !...
Une autre forme de l'ironie est celle qui consiste à renvoyer à la Femme les accusations portées contre les hommes. C'est ainsi que nous voyons une jeune fille, Hercynie, tenant une oie dans ses mains. Faut-il faire remarquer que, dans les temps modernes, c'est cette idée renversée qui a prévalu, et que l'oie ne symbolise plus la bêtise de l'homme, mais celle de la Femme ?
Les Romains négocièrent la rançon de leur cité. On raconte que, lorsqu'ils payèrent, en lingots d'or, le rachat de Rome, les Gaulois employèrent de faux poids pour augmenter la somme qu'ils devaient recevoir. Les Romains se plaignirent ; le Brenn, c'est-à-dire le général des Gaulois, mit encore, en plus, sa grande épée dans la balance, en s'écriant : « Malheur aux vaincus ! » Ce Brennus était de la tribu des Semons, et les Semons était une colonie du pays de Sens en Champagne.
Au commencement du règne d'Alexandre le Grand, ils sont sur les bords du Danube ; en 337, ils fondent la Galicie. Après Alexandre, ils vainquirent les Macédoniens, et allèrent civiliser la Grèce.
Belgius était chef de l'armée qui attaqua le Temple de Delphes. Les chefs qui guidaient l'expédition avaient le collier d'or et la robe de lin. Ils furent vaincus en 278. Alors, ils passèrent le détroit qui est entre l'Europe et l'Asie et où se trouve maintenant Constantinople, et ils fondèrent dans l'Asie Mineure un Etat qu'on nomma Galatie ou Gaule d'Asie (1).
D'après une tradition recueillie par un compilateur grec anonyme, c'était une femme, Onomaris, qui avait guidé les Galates lorsqu'ils franchirent l'Istros et qui était devenue leur Reine dans le pays qu'ils conquirent. (Cité par Dottin, Etudes sur l'antiquité celtique, p.182)
C'est alors qu'ils introduisirent en Orient leur Dieu Hésus, dont le nom devint à la mode et se retrouve dans des familles juives (Jésus) lorsque, sous le nom de Galates, les Gaulois s'établirent en Asie, où ils fondèrent la Galilée. Ils furent plus tard les seuls peuples qui résistèrent aux Romains.
Pendant deux siècles, ils tinrent la puissance de Rome en échec. Ils furent vaincus par Annibal auquel ils s'étaient alliés.
Il n'est pas étonnant que ceux qui furent vaincus par eux les aient représentés comme des barbares ; ils étaient l'objet de la haine des Latins, qui, du reste, les confondaient avec les Celtes, qu'ils avaient aussi pris en haine, ceux-là à cause de leur supériorité.
Ceci nous explique pourquoi nous allons trouver deux opinions exprimées sur ceux qu'on appelle indistinctement des Celtes, des Kymris, des Belges ou des Gaulois. Les Grecs et les Latins confondent les différentes races qui occupent le territoire de l'ancienne Celtide et qui ont, cependant, une origine très différente.
Dans le 3ème siècle avant notre ère, le mot Galæte apparaît chez Callimaque comme synonyme de Celte. Galæte est aussi employé chez Eratosthène et dans deux épitaphes, dont l'une est celle de trois jeunes filles qui se tuèrent pour échapper aux barbares qui sont désignés successivement par les deux synonymes Keltes et Galætes (Dottin, pp. 12-13.)
Faut-il penser que ce sont les Gaulois qui ne respectaient pas les femmes, mais qu'on a rejeté leur barbarie sur les Celtes, leurs ennemis ? Il est bien évident qu'un vent de révolte soufflait sur toute la masculinité qui, partout, voulait s'affranchir de la loi morale que les hommes trouvaient trop sévère pour eux.
La révolte générale est révélée par les noms mêmes qu'ils se donnent. Chaque fraction voulait commander, aucune ne voulait obéir, l'anarchie était partout. Les Celtes divisés sont :
- Les Alains ou All-ans (égaux en souveraineté).
- Les All-mands (égaux en masculinité).
- Les Vand-ales (ceux qui s'éloignent de tout).
- Les Fri-sons (les enfants de la liberté).
- Les Quades (les parleurs).
- Les Cimbres (les ténébreux).
- Les Swabes (les hautains).
- Les Allobroges (les briseurs de tout lien).
- Les Scandinaves (ceux qui errent sur les navires).
- Les Francs (les fracasseurs, ceux que rien n'arrête).
- Les Saxons (les enfants de la nature), etc.
Et Fabre d'Olivet, qui cite ces noms, ajoute cependant : « Une sorte de vénération pour les femmes, qu'ils continuaient à regarder comme divines, adoucissait un peu, il est vrai, l'âpreté de leurs mœurs ; mais cette vénération ne resta pas longtemps générale. »
(1) Gallogræci désigne les gaulois établis en Asie Mineure. C'est un synonyme de Galates.

LES MYSTÈRES DES HOMMES
Les orgies étaient tombées dans le domaine du peuple.
Revêtues d'une apparence religieuse qui en dissimulait les désordres, elles gagnèrent facilement du terrain ; les temples se multiplièrent ; les Mystères des hommes, cherchant l'isolement, s'établirent dans les îles riveraines, dont le nom Oog (île en grec, en coréen, en garamis) resta chez un grand nombre de peuples pour signifier demeure, hogar.
Pour célébrer les Mystères, des hommes formèrent des campements provisoires, mille fois maudits par les prophètes hébreux sous le nom de Socoth Benoth (orgies de Baal (1), fête des Sichémites, mystères de Moab). Sichem vient de Sick-heim, demeure des morts.
Les Mystères des hommes n'ont pour but que le rapprochement des sexes. En quelques pays, comme à Babylone, à Sicca Venera, dans l'île de Samos, au temple de Melkart, la jeune fiancée attendait sur le parvis du temple un hôte qui pouvait être un esprit sous une forme humaine ; ou bien encore, renfermée dans le secret de la mezquita, elle recevait la visite de Bel, de Jupiter Ammon, de Brahma.
L'homme se cache sous le dieu.
Mosquée (Moschenein signifie entrer masqué).
Mosechari nous indique la destination primitive de la Mesquita : c'est là que l'homme masqué vient trouver la femme. D'après le rite romain, le sacrificateur se voile la tête.
(1) Le nom de Bal fut donné aux orgies de Bal, Moab. Mob, en anglais et en hollandais, signifie populace

SATURNALES
Les Saturnales étaient des fêtes données en l'honneur de Saturne, au mois de décembre.
Pendant que duraient ces fêtes, tout travail cessait, excepté la cuisine, et les rangs sociaux disparaissaient, les esclaves pouvaient parler comme ils voulaient et critiquer leurs maîtres.
A l'occasion de ces fêtes, on expliquait qu'Uranus se générait directement, mais que, après lui, vint Saturne, monde dans lequel on se reproduit sexuellement.

MERCURIALES
On appelait Mercuriales les fêtes de Mercure, qui étaient célébrées à Rome par une société de marchands, disait-on. Car on sait que Mercure était le dieu des voleurs ; sa divinité était un mensonge, car son éloquence et son air affable qui séduisait conduisaient les âmes dans le Tartare.
Il tient en main le caducée, fait de deux serpents représentant la trahison de l'homme sous ses deux aspects : le prêtre et le roi.
Un des noms de Mercure est Parammon, fils d'Ammon. Mercure, comme Hermès, est celui qui interprète. Pour l'excuser, on dira qu'il est le messager et l'interprète des dieux. C'est le beau parleur, « le dieu de l'éloquence », et on le représentera comme un charmeur, enchaînant le Monde par la force du discours : « de sa bouche sortent de petites chaînes qui se rendent dans les oreilles d'autrui ».
Mais ce dieu est aussi un personnage phallique. Phallus était un des quatre dieux de l'impureté ; les trois autres étaient Bacchus, Priape et Mercure. On peut voir au Musée de Rouen une statuette de Mercure tenant en sa main gauche un phallus. On appelle phallophores ceux qui, dans les fêtes infâmes de Priape et d'Osiris, portaient la figure du phallus.
Et comme ils veulent toujours mettre les femmes de leur côté, on nous dira que Phalœ était une nymphe, fille du fleuve Lyris.

LES FEMMES RÉAGISSENT
Les cultes phalliques sont l'origine de la folie masculine ; l'esprit des hommes sombre dans les orgies ; c'est une mort morale, qu'on représente par un simulacre d'abord, puis, plus tard, dans les Mystères masculins, par une mort réelle, celle d'un animal représentant l'homme descendu vers la brute. Ce fut un bélier ou un taureau, un mâle quelconque.
Au temps où l'équinoxe commençait au taureau, c'était cet animal qui était la victime. Un bélier représentait Ram. On offrait un banquet pour effacer d'avance la tache contractée par le dénouement de la ceinture (1).
On faisait remonter à Ram la révolution masculiniste.
A Rome, chaque année, pour l'immolation du Ram, 48 tribus latines se réunissaient.
Sur les bords du Tibre, aux Mystères de Raymi, on immolait un agneau noir.
A Rama, dans l'Inde, pendant la cérémonie, la foule répétait continuellement : Ram, Ram !
Le mot Ramadan vient de là.
Les Floralies se faisaient à Rome le 4 mai. En Gaule, on les célébrait aux calendes de mai. De Calendœ maianœ le peuple a fait colin-mayar. Cette fête existe encore en Angleterre et se fait à Helstown le 8 mai.
Quand les Européens sont arrivés en Amérique, ils ont trouvé le grand Caraïbe pratiquant encore, en nature, cette antique expiation, ce qui prouve que les mêmes idées avaient régné sur toute la Terre.
La victime du sacrifice, le Dévoué, était attaché au gnomon, mis à mort et mangé.
Dans Lucain et les autres poètes, dévolus signifie dévoué comme victime expiatoire.
Les Phéniciens appellent le bélier sacrifié kar. En celtique, keeren signifie expier, purifier. Dans le fameux temple de Mylasa, le pontife qui immolait le bélier victimaire s'appelait lui-même Carés.
Chez d'autres peuples, le nom est changé, mais le synonyme qui le remplace laisse voir facilement qu'il s'agit du même mystère. Ainsi Borro, en espagnol, veut dire agneau mâle d'un an, et borrar effacer (le péché). Borrico (âne) est aussi employé dans les anciens Mystères.
On connaît les deux boucs symboliques des Hébreux ; l'un (le mâle) était immolé sur place, l'autre (la femelle) était chargé des iniquités de l'homme, puis renvoyé au désert.
Chez les Celtes, l'animal victimaire s'appelait guild. C'était généralement un bélier, quelquefois un taureau. Comme le sacrifice était précédé de l'offrande, on donnait des cornes d'or au bélier. Par la suite, le sacrifice fut précédé d'un banquet, si bien que le mot guild est arrivé à signifier banquet et or. Mais il signifie aussi fille et prostituée, parce que, quand les idées s'altèrent, on fait un mélange confus de tout ce qui rappelle la vie sexuelle.
Le bœuf gras, qui est le dernier souvenir de l'animal sacrifié, s'appelle encore aujourd'hui guildos (gild, os, taureau).
En phénicien, le mot rachat, rédemption, est gæl. Mais, comme gæl signifie aussi coq, dans la cérémonie du Kippour c'est souvent un coq que l'on prend pour victime, et l'officiant, jouant sur les mots, dit avant de l'égorger : Sois mon rachat.
Gæl et gallus, chez les Tyrrhènes, signifie coq.
Dans l'ancienne Gaule, on immolait un taureau sur une pierre trouée, et la personne pour qui on offrait le sacrifice était placée dessous, en recevait le sang ; elle était alors, comme nous le voyons par les inscriptions, Renala (régénérée).
A Mexico, on égorgeait sur une pierre des victimes humaines pour le salut de l'Empereur. Souvenir de l'homme sacrifié et de la femme sauvée (ambrator).
Cette idée de renaissance prend des formes diverses. Sur les tombes qui datent de l'époque hiéroglyphique, on dessinait les animaux qui muent pendant l'hiver, comme les serpents, les tortues, les salamandres, figurant par ces emblèmes l'initié qui laisse au fond du cercueil sa dépouille, pour reparaître dans les Floralies sous une forme nouvelle (2). On y peignait de même le hanneton (scarabée), parce qu'il arrive vers le 1er du mois de mai, époque des Floralies ; on y grava le tau T et l'aspa X (deux os placés en croix).
Muer, c'est se transformer, laisser sa première enveloppe comme le saurien, la grenouille, qui, en celte, s'appelle frog. C'est de là que vient le mot défroque, nom donné au corps du mort.
Dans les Mystères masculins où on immolait un simulacre d'homme, les Suèves de la Baltique gardaient sur leur tête rasée une touffe de cheveux. C'est par opposition à cette ancienne coutume que, plus tard, à cette même place on fit la tonsure des prêtres.
Les Chaldéens de Babylone, les Assyriens, les Araméens ou Syriens n'avaient pas de sacrifices humains ; ils sont inconnus aussi, ou fort rares, chez les Arabes. Lucien parle des sacrifices de la ville sémitique d'Hiéropolis.
(1) On déliait la ceinture dans les Floralies du Temple Olympique de Salisbury. C'est cette légende qui, en se transformant, est devenue celle d'un ancien roi qui aurait ramassé, dans un bal, la jarretière de la comtesse de Salisbury. Une ceinture mystérieuse se voit à Tortosa, en Espagne ; là, l'ancien ordre de la ceinture s'appelle aujourd'hui mystiquement Ordre de la Hache. (La hache sert à fendre.)
(2) Mithra vient de Metrius. Metrius vient de Mugter, qui veut dire Mutare (muer).

LA SCIENCE ANTIQUE CACHÉE SOUS DES FICTIONS SURNATURELLES
Il est curieux de constater par quels chemins tortueux la science antique passe pour arriver à représenter toutes sortes d'erreurs, les unes grotesques, les autres absurdes et souvent obscènes, mais toujours surnaturelles. Le but principal est de changer le sexe de la Divinité.
Dans les Mystères féminins, on continuait à enseigner les Lois de la nature et particulièrement la cosmogonie, symbolisée par le Septénaire, parce qu'il existe sept principes actifs qui régissent l'Univers. Mais cette idée a déjà commencé à se corrompre.
Les Syriens avaient désigné les Forces cosmiques sous le nom d'Intelligences ; cela va servir de base à la théorie hiérarchique des Intelligences célestes distribuées dans les sphères célestes et dans les étoiles, et la distribution en sept grandes Intelligences va se retrouver partout.
Les Guèbres, descendants des anciens Perses, étaient déjà persuadés que les corps célestes étaient animés par des intelligences qui se mêlaient à la conduite des hommes. Le soleil, d'après eux, est la première intelligence. Le feu est devenu leur grande Divinité, c'est un être intelligent susceptible de tous les mouvements spirituels.
Singulière confusion entre l'Esprit vivant et le feu des astres qui a servi à le symboliser. Le feu est devenu un être divin extrait de la substance du dieu, océan de feu et de lumière, dont tous les autres feux sont émanés. Ils placent la Divinité dans la totalité du feu éthéré, dont chaque astre est une émanation. Toute cette théorie fausse est l'origine du dieu aux sept rayons, du Saint-Esprit Mère des sept maisons, des sept lampes devant le tabernacle, des sept colonnes de sagesse, des sept étoiles, des sept chandeliers d'or, des sept esprits célestes des Japonais, des sept étages du monde, des sept cieux, etc.
Les anciens figuraient le monde par un vaisseau inondé de lumière éthérée et conduit par sept pilotes ou génies. C'est ce que, dans l'époque d'ignorance, on représentera par les sept planètes. Mais cela n'était que la copie de ce qu'on avait vu dans les Mystères, lorsque la science était encore enseignée par la Déesse appelée Fides, dont le culte était établi dans le Latium. Cette Déesse, dont le nom représente collectivement les Prêtresses qui enseignaient la science, avait des temples, des hiérophantes et des hiérophantia (Prêtresses d'Hécate) qui présidaient aux initiations. Leur science, appelée hiéroscopie, fut imitée par les Aruspices. C'étaient des femmes vêtues de blanc, les mains jointes (1). Les hommes qui les assistaient étaient voilés d'une étoffe blanche et en avaient la main enveloppée. (C'est ce qui a été parodié par Pierrot habillé de blanc.)
Ces Prêtresses enseignaient l'origine du symbolisme des sept Intelligences confondues avec les sept Principes cosmiques. On a fait d'elles les sept Pléiades.
La mythologie nous dit que les Ménades et les Hyades pleurent leur défaite par leur frère Hyas ; elles sont changées en astres et, envoyées au ciel. On les nommait Ambroisie, Eudoxe, Pasithoé, Coronis, Palixo ou Plexaure, Philéto ou Phytho et Tyché.
(1) Deux mains jointes ensemble étaient le symbole de la bonne foi.

LES ARUSPICES CONTRE LES DÉESSES
Le prêtre va copier la science des Déesses, puis la masculiniser.
Pour lui, les grands dieux Cabires de Samothrace réunissent en eux le Principe actif masculin et le Principe passif féminin. Leur nom était consacré chez les Romains et dans les livres des Augures, sous le titre de Devi-potens ou dieu tout-puissant.
Puis on appela Parèdres ou Synodes les nouvelles divinités masculines. Augure, le nom qu'on donne aux prêtres romains, vient d'une racine qui signifie vautour : geier en celtique, agur en hébreu, guira en garamis.
Festus nous apprend que les Augures entendaient par les dieux mânes tous les dieux, parce que, selon leur doctrine, il se faisait, de leur divinité, un écoulement qui pénétrait tout. (Du mot latin manare, couler.)
Les Augures furent d'abord les ministres des Temples, appelés Parasites. Leurs fonctions à Athènes étaient les mêmes que celles des Epulons à Rome. Par Parasites d'Apollon, on entendait les farceurs et les bouffons. L'ironie, le sarcasme vont devenir des dogmes.
Après que la Déesse a représenté la lumière, elle va être l'emblème de ce qui l'éteint, l'eau, prenant ainsi la place des dieux océaniques.
On faisait une fête dans laquelle on promenait la statue de la Déesse. A Rome, c'était Cybèle que les Galles promenaient et qu'ils plongeaient ensuite dans l'Almon. Pour se venger, à Rome, le 15e jour de mai, qui était celui des Ides, les Vestales jetaient dans le Tibre, par-dessus le pont Sublicius, trente effigies, ou mannequins en osier, représentant des vieillards.
Si la Bonne Déesse devint pour le Prêtre un objet de crainte, une Némésis redoutable, c'est parce qu'il l'avait outragée, après avoir pris sa place. Et c'est ce qui explique la colère des dieux.

LES VESTALES AU FORUM
Cette histoire rectifiée nous fait comprendre que les Vestales eurent un rôle très important à Rome.
Longtemps elles furent une puissance morale qu'on n'osait pas attaquer. Leur résidence sacrée était le Forum, centre et cœur de Rome, qui, depuis la ruine de l'ancienne religion, a servi à toutes sortes d'usages profanes. On a entrepris des fouilles au Forum pour découvrir les vestiges des monuments immortalisés par l'histoire. Déjà on nous a restitué des vestiges de la maison des Vestales. On sait que c'est là que se trouvait le temple fameux dédié à Vesta.
Gaston Boissier, envisageant les transformations survenues dans ce lieu sacré, nous dit : « On construisit, autour de lui, des places plus vastes, plus régulières, plus somptueuses, mais qui ne furent jamais regardées que comme des annexes et des dépendances de ce qu'on s'obstinait à appeler par excellence le « Forum, romain ».
Il résista aux premiers désastres des invasions et survécut à la prise de Rome par les Wisigoths et les Vandales. Après chaque bourrasque, on s'occupait à le réparer tant bien que mal, et les barbares eux-mêmes, comme Théodoric, prenaient quelquefois la peine de relever les ruines qu'ils avaient faites. La vieille place et ses édifices existaient encore au commencement du 7ème siècle, lorsque le Sénat eut l'idée malheureuse de consacrer à l'abominable tyran Phocas cette colonne dont Grégorovius nous dit que « la Némésis de l'histoire l'a conservée comme un dernier monument de la bassesse des Romains ».
A partir de ce moment, les ruines s'amoncellent. Chaque guerre, chaque invasion renverse quelque ancien monument qu'on ne prend plus la peine de réparer. Les temples, les arcs de triomphe, qu'on a flanqués de tours et couronnés de créneaux comme des forteresses, attaqués tous les jours dans la lutte des partis qui divisent Rome, ébranlés par des assauts furieux, finissent par s'écrouler et couvrent le sol de leurs débris. Chaque siècle ajoute à cet entassement.
Après avoir cité ce qu'écrivent les hommes modernes sur ces questions d'histoire passée, nous voulons aussi citer ce que disent les femmes.
En voici une qui écrit ceci : « O Vierge aux cheveux courts, blanche Vestale, à qui consuls et préteurs devaient céder le pas ; toi qui marchais précédée des licteurs et devant qui s'abaissaient les faisceaux ; toi qui connus la gloire des apothéoses les plus magnifiques et témoignais en justice sans prêter serment ; que dirais-tu, ô toi dont les tribuns même respectaient le caractère sacré ! Que dirais-tu de la thèse féministe ?.... »

LES ÉTRUSQUES VAINCUS EN ITALIE (vers 309)
Au milieu des guerres incessantes des nations masculinistes, les Étrusques, restés fidèles aux principes gynécocratiques, se sentent chanceler au milieu de leur luxe et de leurs richesses. Ils croyaient à la fatalité de leur décadence. Leurs Prêtres annonçaient le soir prochain du monde, le dernier âge de leur puissance.
Les guerriers étrusques s'engageaient, par la loi sacrée, à mourir plutôt qu'à fuir. Vaincus près de Sutrium par Fabius, ils succombèrent en effet. Ceci nous fait savoir qu'ils avaient une antique loi sacrée, comme la Thorah des Israélites.
Au déclin de la République romaine, on mourait pour la liberté, parce que les femmes ne voulaient pas du nouveau régime. Et les hommes les imitaient et s'entretuaient pour une liberté... que la loi romaine venait de leur donner ! Les rois combattaient les Sabins, les Latins, les Étrusques. Parmi les Sabins étaient les Avintenum, les Fidènes, les Réates, les Cures, peuples de l'Italie centrale. Une partie des Sabins s'établit à Rome avec le roi Tatius, et une autre resta dans ses montagnes et fut soumise par Curius Dentatus (290 avant notre ère).
On raconte que Tarpéia, fille de Tarpéius, gouverneur de la citadelle de Rome, en ouvrit les portes aux Sabins. Cela prouve que les Sabins étaient des féministes.

LES GUERRES PUNIQUES (DE 264 A 241)
Carthage est l'antithèse de Rome : elle représente la Femme ; Rome, c'est l'homme. Aussi est-elle destinée à être vaincue.
Les mercenaires n'ont pas d'intérêt direct dans ses affaires ; les soldats romains mettent leur gloire dans le triomphe, ils combattent comme l'homme, pour vaincre. Les Carthaginois sont moins soucieux de la gloire militaire ; cependant, ils ont une marine nombreuse et une cavalerie excellente, composée de Numides, mais qui ne leur appartient pas, qui peut leur échapper et qui leur échappera, en effet, au moment décisif.
Et puis il y a entre cette nation gynécocratique et les soldats masculinistes des intérêts contraires. Les Romains, eux, sont tous soldats, tous rompus aux fatigues de la guerre, et ils luttent pour une cause qui leur plaît : la conquête, le triomphe d'un Etat qui exalte l'homme. Puis ils sont protégés par une ceinture de colonies, par des municipes et des villes alliées, dont tous les hommes les soutiennent, dont la population n'a de volonté que celle du Sénat, et qui se lève comme un seul homme quand il s'agit d'attaquer ce qui reste de la puissance du vieux monde féministe.
Aussi Carthage est abandonnée à la première agression des peuples qui l'entourent ; ses soldats, fatigués du joug gynécocratique, sont assoiffés d'indépendance et tout disposés à se révolter contre leur nation au lieu de la défendre. Leur inconstante humeur les porte vers l'ennemi, au lieu de le combattre ; ils voient dans les Romains des révoltés contre les croyances et les mœurs dont ils sont eux-mêmes fatigués ; la religion romaine, plus tolérante que celle de Carthage, est plutôt leur affaire ; le régime brutal de Rome convient bien mieux à leur caractère batailleur que le travail paisible des Carthaginois.
En même temps, les superstitions romaines les attirent par leur caractère de mystère.

DÉFAITE DE CARTHAGE
Carthage était devenue un Etat puissant.
Vers 250, elle possédait presque toute l'Espagne et y imprimait son caractère de galanterie chevaleresque, qui n'a jamais cessé d'y régner.
Le culte de la Femme, institué alors, avait pris une telle force dans le cœur de l'homme que, lorsque le Christianisme triompha, c'est à la Vierge Marie que l'Espagne rendit un culte. Carthage entretenait garnison à Malte, elle possédait les Baléares et d'autres îles. Sur les médailles de Carthage se trouvait la tête de Cérès, la lionne Déesse, devant laquelle les hommes s'inclinaient.
Le culte théogonique s'était donc conservé là, grâce aux traditions gynécocratiques de cet Etat.
La défaite d'Annibal par les Romains fut le dernier coup donné au régime féministe. Annibal avait toutes les qualités des races théogoniques. C'était une belle nature, un intellectuel. Il réunissait la culture grecque et punique, il prodiguait l'argent, voulait un dévouement absolu, une obéissance immédiate, outrageusement dédaigneux pour le reste des hommes. Justin vante la sobriété d'Annibal : « Il est constant, dit-il, qu'il ne mangea jamais sur un lit (à la manière des anciens), que jamais il ne but plus d'un setier de vin par repas et qu'il observa une telle continence qu'on n'eût pas dit qu'il était africain. »
Quelle différence avec les hommes élevés à Rome, sous le gouvernement le plus masculin de la Terre ! Mais Annibal devait avoir une belle revanche. En 216, ce fut lui qui triompha des Romains.

LES CONTRADICTIONS DES HISTORIENS CLASSIQUES
Après la victoire d'Annibal sur les Romains, il fut défendu aux femmes de verser des larmes en public. « Les femmes firent de telles lamentations, disent les historiens, qu'il fallut un arrêt du Sénat pour leur défendre de troubler la ville par leurs cris. On envoya Fabius Pictor à Delphes. Sur la réponse de l'oracle, et après avoir consulté les Livres sibyllins, deux Gaulois et deux Grecs furent enfouis vivants dans le Forum. »
Que de conclusions psychologiques à tirer de ce fait !
D'abord empêcher les femmes de manifester leurs sentiments et aller consulter l'oracle de Delphes, qui est la voix de la Femme, voix lointaine, il est vrai, et rendue merveilleuse par l'éloignement même. Puis consulter les Livres sibyllins, écrits par des femmes. Donc, s'en remettre aux décisions de l'Esprit féminin !
Pourquoi, alors, ne pas écouter les lamentations de la vraie Femme qu'on a près de soi, qui exprime sa pensée et ses sentiments bien plus clairement que l'oracle ?
C'est que, dans ce cas, il faudrait se soumettre à ses décisions, qu'on rejette d'avance, tandis que les oracles s'interprètent comme l'on veut, et, quand on leur fait ordonner des sacrifices humains, c'est qu'on leur donne un sens qui flatte la brutalité criminelle des hommes.
Au fond, ce n'est pas l'oracle qui parle, c'est leur passion. Du reste, ils font les divinités à leur image, et, comme ils aiment les tueries, ils croient que les divinités les aiment aussi. Ils font, pour leur plaire, ce qui leur plaît à eux.
Un an plus tard, en 217, à l'occasion de la bataille de Thrasimène, on décréta des prières publiques, on renouvela la fête des Saturnales dont l'objet était de représenter l'égalité qui avait régné, disait-on, parmi les hommes pendant le siècle d'or, le règne de Saturne. C'est ainsi qu'on désigne le temps heureux du Matriarcat pendant lequel il n'y avait pas eu d'injustice sur la Terre.
Mais la politique, à Rome, domine tout. C'est une école de perfidie, de ruse, de fausseté. Sans pitié quand elle triomphe, elle met l'art dans la cruauté, se fait savante dans le crime, et c'est une émulation. Ceux que Rome se donne pour maîtres sont des monstres, des fous ou des brutes ; « de la boue détrempée avec du sang », c'est le mot d'un Grec sur Tibère. Voir des masses humaines à la merci d'un Caligula, d'un Claude, d'un Néron ! Quel spectacle, et quelle leçon pour ceux qui se virent descendre si bas pour s'être révoltés contre le régime maternel, pour avoir voulu « des Maîtres » alors que la domination de la « Maîtresse » était si douce !
Quelques hommes eurent le courage de s'élever contre les innovations du régime masculin. Caton (l'Ancien ou le Censeur, de 232 à 147) restera célèbre dans l'histoire pour sa sévérité contre les nouveautés de son temps. Il fut, à Rome, le premier martyr de la conscience humaine.
Des femmes aussi voulurent parler. Nous trouvons au Forum Cafranie à qui l'on attribue des excès et intempérances de langage, dont on fait une mégère acariâtre qui, par son bavardage, aurait provoqué l'exclusion des femmes du Forum romain. Cela nous apprend que jusque là les femmes prenaient la parole au Forum, ensuite que ce qu'elles avaient à dire n'était pas pour plaire aux hommes.
On a trouvé dans les ruines de Pompéi des affiches électorales, portant des noms d'hommes et des noms de femmes.

LES CRIMES SOCIAUX - L'AMOUR MÉPRISÉ ET SACRIFIÉ
Syphax avait épousé la fille d'Asdrubal Giscon, la belle Sophonisbe (de 204 à 201).
Massinissa, un Numide allié des Romains, attaque Syphax et le fait prisonnier ainsi que Sophonisbe qui lui avait été promise autrefois. Devenue sa captive, il la prend pour épouse. Mais Scipion s'inquiète de l'influence que peut exercer sur l'esprit de Massinissa une si belle femme, dévouée aux intérêts de Carthage, et fait entendre au Numide qu'il doit choisir entre l'amour de Sophonisbe et l'alliance de Rome.
Massinissa monte à cheval, se rend auprès de sa fiancée et, sans descendre, lui présente une coupe de poison. « J'accepte, dit-elle froidement, le cadeau de noces », phrase que lui font dire les historiens masculinistes.
Telles sont les mœurs de sauvages que les historiens nous racontent... et c'est cela que l'on montre à nos fils comme de la vertu ! Ce sont les femmes sacrifiées pour le triomphe de l'iniquité, qui sont les grandes femmes de l'histoire romaine classique !...
Quant au droit des femmes, voici comment on le respectait : De 223 à 220, les Romains voulurent faire une expédition en Illyrie. C'était un pays où le régime matriarcal existait encore. Teuta en était la Reine. Le Sénat romain lui envoya des ambassadeurs. Teuta les fit arrêter, ne leur reconnaissant pas le droit de venir conquérir son pays. Cela servit de prétexte aux Romains pour s'emparer de l'Illyrie grecque où se trouvaient les ports de Dyrrachium et d'Epidamme, ainsi que de l'Istrie.
C'est ainsi que les femmes étaient dépouillées de leurs Etats et renversées de leur puissance. On va mettre l'idéal social dans la Patrie, symbole de la Paternité, représentation du droit paternel. On nous dit que Caton (232-147) est le vrai « Père de la Patrie ». C'est de lui qu'on disait : « Celui-là, ô Rome, mérite tes autels ; si jamais tu te relèves libre du joug, c'est celui-là que tu feras Dieu. »
C'est ce que firent ceux qui avaient besoin d'un « dieu » et voulaient mettre à la place des Déesses une personnalité mâle, ayant toutes les vertus que les philosophes prêchaient, y compris le mépris de la Femme.
Cependant, Caton représente la conscience qui prescrit d'écouter sa voix plutôt que celle « des dieux ». C'est que les dieux parlent comme des hommes, et la conscience, c'est la voix de la Femme qui parle à l'homme dans son moi intime.

LA MATERNITÉ DÉTRÔNÉE
Quand l'homme voulut substituer la famille paternelle à la famille maternelle, quand il vola, pour ainsi dire, une femme pour l'avoir à lui seul et la soumettre à ses caprices, ce fut le triomphe de tous les mauvais instincts de la nature masculine, le triomphe de sa jalousie, le triomphe de son instinct despotique, le triomphe aussi de sa paresse, car il se fit servir par celle qu'il choisissait. Il s'affranchit du même coup de la loi morale et, en même temps, de l'obligation du travail ; il exerça sur les enfants une domination despotique qui les terrorisa, et, par là, entra dans le monde la ruine de la vraie famille, la terreur des faibles et le désordre économique. Ce fut le premier mot de l'isolement moral, de l'abandon des impuissants, des vieux, des inutiles, le malheur de tous.
Qu'elle est loin déjà, la brillante civilisation matriarcale de l'Inde, de l'Egypte, de la Celtide, qui avait été l'œuvre grandiose de la Femme divine !
Bachofen, qui a eu pour but de raconter les causes de la défaite du Droit maternel, dit de cette transformation de la famille :
« Deux pouvoirs seuls pouvaient conserver le droit paternel et lui permettre d'évoluer : l'Apollonisme Delphique et le principe romain de l'Impérium masculin. L'histoire nous apprend que l'humanité doit plus à celui-ci qu'au premier. Si l'idée politique dirigeante de Rome porte en elle-même moins de spiritualisme que l'idée apollonienne, elle possède dans sa formation légale et dans ses relations intimes avec toute la vie officielle et privée un appui solide qui manque au pouvoir purement spirituel du dieu.
« La comparaison de cette force de l'idée politique romaine avec la force de résistance d'un principe purement religieux peut nous faire connaître la faiblesse de la nature humaine abandonnée à elle-même et non soutenue par des lois. »
Cette lutte de l'homme législateur contre la liberté de la Femme, ce drame humain, allait régner dans chaque famille, partout l'autorité morale de la Femme allait être méconnue. Chaque couple était l'image de la nation. L'homme collectif est la copie de l'homme individuel. Que seul un homme opprime une femme ou qu'ensemble les hommes oppriment les femmes le résultat est le même. Les conséquences sociales sont les conséquences familiales généralisées. Quand le ménage souffre, la société souffre. Quand la Femme ne jouit pas de son autorité maternelle dans la maison, l'Etat est un vaisseau sans pilote.
Cette époque de l'histoire nous montre une profonde révolution dans la conception antique de la famille. L'homme commence à exercer sur la Femme une domination brutale, mais c'est la femme des classes inférieures, seule, qui en est d'abord l'objet ; il n'oserait pas, ou ne pourrait pas, asservir la femme des classes supérieures qui garde encore quelque temps tout son prestige, le prestige de la richesse.
« Où est le Romain, dit Cornélius Népos, chez qui la Mère de famille n'occupe pas dans la maison l'appartement d'honneur et n'y tienne sa cour ? »
La loi romaine reconnaissait aux matrones des prérogatives dont elle privait les femmes du peuple, les esclaves et les affranchies ; elle était souverainement injuste, car toute femme est FEMME, et ce n'est pas sa position sociale qui lui donne, ou lui ôte, le privilège moral que sa nature féminine lui confère. Les lois masculines cherchaient à imposer le mariage, mais, comme il n'était pas encore accepté, on avait dû régler le concubinat beaucoup plus répandu. Quant au mariage, ce n'est, d'abord, que l'esclavage, puisque le mari paie à la famille une dot en argent ou en riches présents. Du reste, cela réussit si mal qu'à peine institué on se voit forcé d'en adoucir la rigueur par le divorce.
Avec des lois aussi brutales que les lois romaines, la famille naturelle ne pouvait plus exister. Aucune sécurité ne pouvait régner pour la Femme et pour l'enfant. Non seulement le père avait le droit de vie et de mort sur le pauvre petit qu'il avait engendré, mais les superstitions régnantes lui faisaient un devoir de la cruauté.
Lors du siège de Carthage par Agathocle, tyran de Syracuse, qui vécut de 361 à 289, on donna à dévorer à la divinité mâle 200 petits enfants.
Ovide raconte un de ces romans dans lequel un père ordonne que l'enfant qui naîtra soit sacrifié si c'est une fille, et il nous montre ce père embarrassé de cet arrêt. Il dit : « Je ne donne cet ordre qu'à contre-cœur ; pardonne, ô nature sainte ! »
Il n'est pas étonnant que, sachant quel sort attendait leurs enfants, les mères préférassent l'avortement ; c'était une pratique répandue à Rome et dans tout le monde grec, et les auteurs du temps racontent, avec un certain étonnement, que les Egyptiens élèvent tous leurs enfants et se font honneur de ne pas suivre les mœurs grecques et romaines.
Enfin, ce sont les Romains qui, les premiers, eurent l'idée diabolique de mutiler leurs enfants pour en faire des mendiants.
Et voilà le pays que Bossuet admire ! Dans son Discours sur l'histoire universelle, il dit de la Rome de 272, qu'il appelle sa plus brillante époque : « De tous les peuples de l'univers, le plus fier et le plus hardi, mais tout ensemble le plus réglé dans ses conseils, le plus constant dans ses maximes, le plus avisé, le plus laborieux et enfin le plus patient, a été le peuple romain. De tout cela s'est formée la merveilleuse milice, la politique la plus prévoyante, la plus ferme et la plus suivie qui fut jamais. »
Voilà une singulière appréciation d'un peuple qui ne sait que se battre, qui semble prendre à tâche de violer tous les droits, celui des femmes, des enfants, des faibles, des voisins, qui ne connaît que la force et la fait triompher, pour qui la guerre, le cirque, sont les plus beaux jeux, qui n'a rien d'humain, qui fait des lois iniques, qui n'a aucune stabilité dans son gouvernement, qui essaie tous les systèmes sans pouvoir en établir aucun, qui a des rois pendant 150 ans, une République après, puis un Sénat tout-puissant, puis des consuls, puis des dictateurs, puis des tribuns, puis des décemvirs, en attendant les empereurs qui seront de monstrueux assassins, et tous ces magistrats, quel que soit leur nom, abusent du pouvoir, font des folies, exaspèrent le peuple et périssent le plus souvent assassinés !
Et c'est cela que Bossuet appelle « le peuple le plus constant dans ses maximes », le plus avisé, le plus laborieux ?
Montesquieu, sous la même impression, dit : « Le Sénat agissait toujours avec la même profondeur, et, pendant que les armées consternaient tout, il tenait à terre ceux qu'il trouvait abattus. »
C'est cela qu'on appelle gouverner ?...

GUERRE CIVILE
Retournons en Gaule.
Vers le IIème siècle avant notre ère, les hommes pervertis par l'enseignement des Druides et entraînés par l'exemple des nations déjà masculinisées, commencèrent à se révolter contre le régime gynécocratique. Déjà les Druides avaient poussé les fils à occuper la place des filles, auxquelles ils ne voulaient plus laisser que les biens mobiliers, disant pour justifier leurs prétentions : « Celui-là seul qui porte l'épée a droit à la Terre. »
Les Druides allaient maintenant préparer la révolte des chevaliers. Ils parlaient en maîtres au nom de leur dieu. Cet état de choses créait un ferment de lutte dans les nations qui empêchait les hommes de toute la Gaule de s'allier pour une défense commune ; chacun voulait agrandir sa nation aux dépens du voisin, il n'y avait plus de discipline, on cherchait son intérêt particulier et on voulait dominer au lieu d'obéir comme on l'avait fait dans la gynécocratie des temps passés.
C'est cet état de révolte contre le pouvoir féminin qui avait affaibli la Gaule et l'avait livrée aux Romains.
Les Druides avaient porté un coup fatal à l'antique civilisation celtique par leur surnaturel qui corrompait les hommes ; ils avaient fait régner le désordre, encouragé les révoltes des chevaliers et même des classes inférieures. C'est l'enseignement néfaste que donnaient ces prêtres qui poussa les chevaliers, élus chefs civils ou militaires sous l'autorité d'une Déesse-Mère, à prétendre à l'égalité.
La lutte de sexes devint violente et se compliqua d'une lutte d'homme à homme entre les Druides et les chevaliers. Dans plusieurs nations, les chevaliers l'emportèrent, et il y eut, dès lors, deux tendances, l'une féministe, l'autre masculiniste. Mais cette dernière était divisée elle-même, parce que les Druides voulaient une suprématie que les chevaliers et les chefs militaires (les Brenns) leur refusaient. Les Druides furent vaincus peu à peu et le pouvoir spirituel qu'ils prétendaient représenter ne fut jamais respecté.
Les républiques celtiques, au milieu de ce désordre, furent de moins en moins unies. Les chefs masculins qui avaient admis le droit paternel voulurent rendre leur pouvoir héréditaire ; beaucoup y parvinrent malgré l'opposition des femmes, et même des Druides qui élisaient leur chef ; l'élection du chef des Druides devint même une cause de guerre civile.
La domination des chefs masculins fut tyrannique ; l'homme ne savait pas gouverner, habitué à vivre sous l'autorité matriarcale, aussi il alla tout de suite à la domination brutale.
Plusieurs tribus renversèrent ces nouveaux chefs et revinrent à l'ancien régime, d'autres les remplacèrent par un magistrat nommé tous les ans, le Vergobret annuel, ou par un Sénat comme à Rome, ou une assemblée populaire.
Toute cohésion entre les nations fut détruite par cette révolte des hommes. Quand vinrent les légions romaines, la division était complète entre les nations. C'est ce qui livra la Gaule aux Romains du Midi et, en même temps, aux Germains du Nord.
C'est Marseille qui, ayant attaqué une nation voisine, les Ligures, appela Rome à son aide. Les Romains accoururent et vainquirent les Ligures et les Allobroges, peuplades de la vallée du Rhône. Mais, une fois dans les Gaules, ils y restèrent et fondèrent la ville d'Aix.
Les Ligures et les Allobroges tentèrent de recouvrer leur territoire et formèrent une ligue contre Rome avec les Arvernes et toutes les peuplades des pays compris entre les Cévennes et les Alpes. Cette ligue fut vaincue en 118 avant notre ère, et le Sénat romain déclara le pays vaincu province romaine.
La Celtide alors était comprise entre le Rhin, les Alpes, les Pyrénées et l'Océan. Chaque nation (tribu) était autonome et soumise seulement à l'autorité morale d'une Déesse-Mère. Une fois l'an, on convoquait une assemblée solennelle dans le pays chartrain, où chaque république envoyait ses délégués. Là se traitaient les intérêts généraux du pays. Chaque nation était une république qui venait se fondre dans la grande république gauloise.
La Gaule avait compris 500 républiques théogoniques. Les Romains la réduisirent à 60 provinces.
Dans l'ancien régime gynécocratique, la Femme avait eu en partage le pouvoir spirituel et l'homme le pouvoir temporel.
La Femme étant vaincue, le pouvoir spirituel n'exista plus. La lutte divisa le pays en deux partis qui eurent chacun leur dieu. Les Druides et leurs partisans mirent au sommet de leur religion Hésus, le dieu sanguinaire, le dieu de la guerre. On tue pour plaire à Hésus, qui aime les sacrifices humains, et les philosophes de ce parti, qui représente le crime et la folie, enseignent qu'il existe une autre vie, semblable à celle-ci, pour consoler ceux qu'on tue.
L'autre parti reste fidèle à l'antique Théogonie, mais la cache dans des Mystères.
C'est sa restitution qui constitue l'éternel idéal du Monde !...

COMMENT LE SYMBOLISME ÉVOLUE : LES SOLAIRES ET LES LUNAIRES
Dans la grande lutte de sexes qui divisait les hommes et les femmes et coûta à l'humanité des flots de sang, on avait pris pour signes de ralliement des symboles astronomiques.
Il y eut d'abord les Géocentriques et les Héliocentriques. La Terre, considérée alors comme l'emblème masculin, fut regardée comme le centre du Monde. Le soleil, considéré comme emblème féminin, fut regardé comme le centre de l'Univers.
Les luttes furent d'abord locales, puis elles devinrent générales. L'Orient s'éleva contre l'Occident (1).
L'Orient, déjà envahi par les Mages, qui se prétendaient supérieurs, voulait imposer ses doctrines masculinistes aux pays du Nord, plus réfléchis, et qui restèrent plus tard attachés à la gynécocratie. Et toutes ces luttes eurent des symboles astronomiques, que des savants modernes prendront pour le fond même de la religion.
Les Mages prétendent qu'ils ont raison contre l'Occident, puisque l'apparition du soleil et sa marche progressent d'Orient en Occident.
Les Occidentaux font valoir que le mouvement des planètes se produit d'Occident en Orient. Ces antiques connaissaient donc les lois de la cosmologie tout aussi bien que les modernes.
Mais ils étaient violents, et à l'occasion de ces disputes naissaient des conflits sanglants, des guerres interminables.
Les Géocentriques avaient pris la lune comme symbole, tandis que les Héliocentriques arboraient le soleil comme emblème : il était le « grand Lucifer astral », l'Etoile du matin, la « Vénus Lucifera », l'astre éclipsé qui reparaît. Son nom signifie porte-flambeau (phosphoros). C'est l'avant-coureur de l'Aurore.
La Chine fut longtemps géocentrique. « Les livres sanscrits, dit Fabre d'Olivet, parlent de l'origine de l'empire chinois qu'ils nomment Tchandra-Dwîpa, le pays de la lune masculinisée. Le nom de Tchinas, que les Brahmes donnent aux peuples qui l'habitent, ne signifie pas absolument des impies et des réprouvés, comme celui de Yawanas, dont ils signalent les Ioniens en général et les Grecs en particulier, mais seulement des schismatiques. » (L'Etat social de l'homme, t. I, p. 285.)
La lune est tantôt Dieu, tantôt Déesse. Elle s'appelle Lunus ou Luna.
La dénomination féminine ou masculine de l'astre nocturne peut être considérée comme l'expression de la domination de l'homme ou de la femme sur la Terre.
La plus basse religion est le Tellurisme, qui voit le principe masculin dans les eaux telluriennes qui éteignent le feu, suppriment la lumière. C'est le masculin Poseïdon de la Grèce qui la représente ; c'est aussi le Mercure des Latins, souvent figuré en forme cubique, sans pieds ni mains, comme un Osiris momifié, comme un Terme. Quand on lui donnait des mains, on lui faisait tenir une escarcelle. Par « Mercure » on entendit, d'abord, l'élément humide, l'eau élémentaire qui éteint le feu de l'Esprit.
Le principe mâle était aussi représenté par la force du vent qui renverse tout.
Au Tellurisme se joint l'idée de la nuit, force chtonique (terrestre), en opposition avec le principe solaire.
Dans ce culte masculin, on comptait d'après les nuits, non les jours. On choisissait la nuit pour les combats, les jugements, les exercices du culte, les amours, et cela est toujours resté dans les habitudes de l'homme : l'amour masculin fuit la lumière, cherche les soirs pour se satisfaire.
Le côté droit a la priorité sur le côté gauche dans les religions masculines ; et le côté gauche l'emporte dans la religion féminine (2).
La main gauche est préférée dans le régime maternel, elle représente le principe féminin ; la main droite représente le principe masculin ; et cela est ainsi resté : se marier de la main gauche, c'est se marier suivant les lois de la Nature, et de la main droite suivant les lois de l'homme.
Le côté gauche (féminin) était appelé sinistra, d'où les maculinistes ont fait sinistre quand ils ont pris la femme en haine. Ces faits sont basés sur la loi des sexes et sur les caractères acquis dans la vie végétale ; c'est une preuve de plus de la science profonde acquise dès les premiers temps de la vie humaine (voir les article sur nos véritables origines et celui sur la Loi des sexes).
Renan nous apprend que la tribu de Benjamin (Ben-iamin) était appelée « fils de la droite », droitiers, par opposition aux féministes appelés « fils de la gauche ». (Histoire du Peuple d'Israël, t. I, p. 244.)
C'était une tribu peu nombreuse, composée de jeunes gens braves (c'est-à-dire qui bravaient) et qui avaient une mauvaise réputation. Il suffit, pour s'en convaincre, de lire les Juges (XXXXI) pour voir quelles étaient leurs horribles mœurs (voir l'article sur l'Israélisme).
Les Benjamites avaient leur centre à Gibéa, à une lieue de Jérusalem.
Les monnaies en Gaule représentèrent, jusqu'au Vème et IVème siècle avant notre ère, l'Agni ou Soleil Eternel, figurant le « germe d'or », naissant lui-même de l'arc-en-ciel, symbole de l'Isis celtique des Druides.
En Arabie, la lune fut d'abord représentée par l'être mâle, Sin ; plus tard, par les Déesses et les Dieux mêlés Alilat-Naila-Sawaha-Monat.
Mais l'évolution religieuse faisait monter l'homme dans la hiérarchie divine. La puissance religieuse masculine eut trois degrés : elle commença par le Poséidonisme, l'homme ténèbre qui éteint les lumières, noie l'Esprit ; c'est le Tellurisme.
De là, elle monte dans le ciel, mais y occupe la seconde place : c'est la phase lunaire.
Enfin, l'ambition de l'homme grandissant avec son orgueil, il prend la première place, il devient un Dieu solaire. Alors, dans la confusion qui règne, le soleil devient la Terre. C'est pour cela que le nom de l'astre radieux, Sol, devient le nom du terrain sur lequel nous marchons.
Dans le symbolisme exubérant de cette époque, nous voyons aussi que les choses abstraites et concrètes sont divisées en deux genres : le féminin et le masculin.
On donne un sexe aux facultés et aux objets qui les représentent. C'est ainsi que nous retrouvons partout, dans le langage, cette opposition de l'Esprit et de la Force, c'est-à-dire des facultés féminines et des facultés masculines.
Ce dualisme est répandu partout, il fait le fond de la Religion et des traditions populaires.
Mais il ne faudrait pas chercher dans les formes de langage dérivées des formes archaïques le genre donné primitivement aux choses, puisqu'il y a eu, à l'époque de l'histoire que nous étudions en ce moment, renversement des idées primitives au profit de l'homme, par conséquent des genres primitifs.
C'est ainsi que, dans les langues archaïques, le mot Esprit est féminin, le mot Force est masculin. Le renversement nous a amenés à un esprit masculin et une force féminine.
Mais les altérations des langues n'ont pas été partout aussi complètes. Les régions méridionales vont plus vite dans la décadence et, par suite, dans le renversement qui en est la conséquence. Les régions septentrionales restent plus près des lois de la Nature, des formes primitives de la société. « Les Druides, entraînés par l'esprit de leur culte, dit Fabre d'Olivet (L'Etat Social, p. 189), prononcèrent le genre féminin le premier et frappèrent ainsi le langage boréen d'un caractère indélébile, d'un caractère entièrement opposé à celui du langage sudéen. Ayant à désigner, par exemple, des objets dont le genre n'existe que dans les formes du langage, ils appliquèrent le genre féminin ou masculin d'une manière opposée à l'opinion constante du règne hominal, attribuant le genre féminin au soleil et le masculin à la lune. » C'est-à-dire en contradiction avec les idées renversées, car la nature des choses est, au contraire, conforme au langage primitif.
Et Fabre d'Olivet ajoute :
« Cette contradiction a disparu dans un grand nombre de dialectes celtiques, à cause de l'ascendant qu'y ont pris les dialectes atlantiques avec lesquels ils se sont mêlés, mais, dans le centre de l'Europe, le dialecte allemand a conservé cette singularité. Dans ce dialecte, le soleil, die sonne, l'air, die luft, le temps, die zeit, l'amour, die liebe, etc., sont du genre féminin, et la lune, der mond, la mort, der todt, etc., sont du masculin. La vie, das leben, est du neutre. »
La femme (sexuelle) est neutre, das weib. C'est son Esprit qui est féminin, non son corps qui était représenté par un animal (le sphinx). Donc, le genre qualifie l'être spirituel, non l'être sexuel. Dans la vie sexuelle, il y a renversement des Principes ; c'est pour cela que l'organe sexuel féminin était du masculin (le kteïs) et l'organe masculin du féminin, ce qui est resté dans quelques langues.
Chez les Celtes, le féminin était le genre noble, le premier ; le langage boréen restait propre et en opposition avec le langage sudéen déjà renversé ou impropre.
Une autre clef psychologique du langage primitif est celle-ci : La femme vit dans le présent ; l'homme, lorsqu'il se sent descendre dans l'évolution, espère un jour remonter, il enfante l'avenir et remet à un temps éloigné ce que ses facultés amoindries ne lui permettent plus de faire. De cette différence naît cette singularité : c'est que, dans les langues primitives faites par la femme, il n'y a pas de futur, on ne parle qu'au présent ; la femme dit Je sais, « j'ai trouvé » ; l'homme dit on saura, on trouvera (même lorsqu'il s'agit d'une chose trouvée depuis longtemps). Le temps futur n'est introduit dans la langue que lorsque l'homme veut exprimer des idées lointaines. (Les idiomes celtiques qui n'ont pas éprouvé le mélange des idiomes atlantiques, tels que le saxon, l'allemand, l'anglais, etc., n'ont pas de futur simple, d'après Fabre d'Olivet.)
Il est curieux de constater que le futur désigne en même temps l'avenir et la fonction génitrice de l'homme (3), ce qui semble indiquer que pour lui l'avenir est dans sa descendance, non en lui-même.
Donc, entre la pensée féminine et la pensée masculine, une profonde différence se manifestait. Mais l'homme, devenu présomptueux, voulait imposer ses vues, faire prévaloir son instinct, imposer sa volonté. Cela engendrait de terribles luttes. « Les sectaires se multipliaient dans tous les partis, dit Fabre d'Olivet (L'Etat Social, p. 270), et lorsque, forcé de se prononcer en faveur de l'un d'eux, il (le Prêtre) maintint la domination du sexe masculin sur le féminin, l'antériorité du mâle sur la femelle et sa plus grande influence dans l'univers, il passa pour tyrannique et son orthodoxie, qu'il fut obligé d'appuyer d'une certaine force légale, devint une affreuse intolérance. Les esprits irrités fermentèrent en secret, s'échauffèrent et n'attendirent qu'une circonstance favorable pour faire explosion. »
On comprend que les esprits s'irritaient quand on voit ce que ces hommes firent de la religion. C'est Fabre d'Olivet lui-même qui va nous le dire en nous montrant les cultes dégénérés partout en frivoles cérémonies ou en superstitions lugubres, quand elles n'étaient pas ridicules, à l'exception de quelques sanctuaires secrets où la vérité réfugiée ne trouvait d'asile que sous les voiles les plus épais (L'Etat Social, T. II, p. 2). L'Egypte même n'offrait plus dans sa mythologie sacrée qu'un inextricable chaos où la raison égarée se perdait. Le dragon des Atlantes, confondu avec le crocodile, recevait les adorations d'un peuple imbécile. Le bélier de Ram usurpait les autels du soleil et le taureau des Celtes était adoré en place de la lune. Comme chaque astre du ciel était désigné par un animal, une foule d'animaux divinisés envahissaient les temples.
En Perse, comme la lune, au lieu d'être considérée comme possédant la faculté mâle, était regardée, au contraire, comme représentant la faculté femelle de l'Univers, ce n'était plus un taureau qui lui servait de symbole, mais une vache, et la vache devenait pour les Hindous dégénérés l'objet d'une stupide vénération. Ainsi, la vache rousse, prise par les Juifs aux Perses, joue un grand rôle. En se frottant des cendres de cet animal, les Juifs se purifiaient de toute espèce de souillures (Nombres, ch.XIX). On sait que, chez les Perses, la vénération de tout ce qui vient de la vache est poussé jusqu'à l'extravagance. Qui ne connaît le pongol des vaches aux Indes ? Personne n'ignore que, de nos jours encore, les sectateurs de Shiva vénèrent non seulement ces animaux, mais même leurs étables qui sont des lieux saints.
Le chien attribué à Mercure, appelé le Prophète, ou le Ministre divin, rappelait l'idée de tous les envoyés providentiels et, selon la contrée, recevait les noms de Boudh, de Nabo, de Job, d'Anubis, etc. En sorte que le peuple, s'accoutumant à voir son prophète représenté sous la figure d'un chien ou seulement avec la tête de cet animal, transportait sur le chien le respect qu'il avait pour le prophète (4).
On voyait aussi des chérubins à tête d'homme, de taureau, de lion et d'aigle (ils deviendront les emblèmes des quatre évangélistes).
Il en était de même de la colombe blanche ou rouge qui distinguait Vénus (destinée à devenir le Saint-Esprit de la Trinité chrétienne), de la tortue qui appartenait à la Terre, du loup, de l'ours, du sanglier qui était le symbole de Mars, de la grue, de l'épervier, de l'aigle qui caractérisait Jupiter, etc.
D'abord l'Egypte, et ensuite toute la Terre, fut couverte de pratiques religieuses aussi fantastiques que puériles. Cette situation de la Terre, telle qu'elle existait environ six siècles avant notre ère, était le résultat presque inévitable des divisions qui avaient eu lieu dans l'empire universel et de la dégénérescence qui les avait suivies dans toutes les institutions morales et politiques.
Ce fut alors que s'établirent presque partout deux doctrines parfaitement distinctes, l'une, vulgaire, conforme aux idées de la multitude, l'autre, secrète, destinée seulement à donner au petit nombre la connaissance de la vérité et l'explication des pensées des sages. Plusieurs initiations nouvelles s'ouvrirent, les anciennes prirent un caractère nouveau. On mêla aux traditions cosmogoniques des anciens Mystères des connaissances positives sur les sciences, sur les arts même et jusque sur la politique. Pour la première fois, il y eut des sociétés secrètes dont les membres, unis par les mêmes principes, se juraient fidélité inviolable et se reconnaissaient même, parmi les autres initiés, à de certains signes. La société pythagoricienne fut la plus étendue et la plus féconde en grands hommes. C'est pour les imiter qu'on fonda les Orphiques, les Mithriaques, les Nazaréens, etc. Les Esséniens, les Isiaques, les Samanéens, les Tao-sse furent d'autres sociétés féministes, fondées toutes dans le but d'arrêter la corruption, de secourir les femmes, de s'opposer au despotisme des rois ou aux débordements des peuples. Ces sociétés se multiplièrent partout.
(1) L'Occitanie est la partie occidentale de l'Europe, que les Hindous nomment Varâha ; la partie orientale est appelée Kourou.
(2) Au moyen âge, les femmes portaient à droite l'écusson de leur mari sur leur robe juste et montante, à gauche les armes de leur famille.
(3) Les latins ont créé le verbe « futuere » qui veut dire : faire la vie future. « FUTUERE » : Temps qui exprime une action ou un état à venir ; mais qui signifie également « avoir des rapports sexuels ».
(4) De Kùôn (chien) vient Kunismos dont on fait cynique, nom que les féministes donnaient aux prophètes masculins et en Grèce aux philosophes.

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La guerre du Mahâbhârata, qui est regardée par les savants comme fabuleuse, est considérée par les Hindous et les occultistes comme un fait historique. C'est la lutte de sexes entre les Sûryavanshas et les Chandravanshas.
Après avoir eu pour cause première le double aspect de la lune (cause des sexes), c'est-à-dire le culte des principes mâle et femelle, la lutte se termine par l'adoption des cultes solaire et lunaire distincts.
C'est ce qui nous explique que les Hindous avaient des dynasties solaires et lunaires, gynécocratiques et androcratiques. Ils se glorifient encore, s'enorgueillissent, de s'intituler des Sûryavanshas et des Chandravanshas, c'est-à-dire des dynasties solaires ou lunaires, ce qui veut dire féministes ou masculinistes.
On trouve une profonde signification physiologique et psychique dans toutes les légendes sexuelles. Ainsi, une allégorie représente Soma (germe fécondant de l'homme) par la lune ; il est produit par le barattement de l'océan de vie à une époque très ancienne où les Rishis trayaient la Terre dont le veau était Soma ou la lune. Deus Lunus, Phoebé, a donc représenté le roi Soma avant de représenter les Déesses. Voilà une façon d'expliquer l'origine des sexes bien obscure. Il est évident que Soma représente le pôle sexuel, donc inférieur de l'homme, et que c'est la polarisation sexuelle masculine qui en est la cause, et cette polarisation avait pour principe l'action de la lune sur l'arbre embryon.
Mais comment retrouver la loi des sexes dans un symbolisme si peu clair ?
Quoi qu'il en soit, un grand fait est acquis, c'est l'intervention de la lune dans la symbolique sexuelle.
Lunus est le symbole des hommes en Syrie et en Mésopotamie, où la lune était adorée comme un Dieu, jamais comme une Déesse, ce qui fut expliqué par une superstition masculine par Spartien qui disait qu'on croyait que ceux qui prenaient la lune pour une Déesse et non pour un Dieu seraient constamment esclaves de leurs femmes, mais qu'au contraire ceux qui la tiendraient pour un Dieu seraient toujours les maîtres.
Les Palmyriens adoraient la lune sous le nom de Malachbelus. Ils la représentaient comme un homme avec un croissant dans le dos.
Chez les races sémitiques, le soleil fut longtemps féminin et la lune masculine. Cette dernière conception avait été tirée par eux des traditions atlantéennes. La lune était appelée « le Seigneur du Soleil », Bel-Shemesh, avant le culte de Shemesh.
L'ignorance des causes premières de cette distinction et des principes occultes expliquant la loi des sexes conduisit les nations au culte anthropomorphique des idoles (l'homme-Dieu).
Pendant la période dont il n'est pas parlé dans les livres du Pentateuque, c'est à-dire depuis l'exil de l'Eden (Âge d'Or) jusqu'au déluge allégorique (la révolte de l'homme), les Sémites adorèrent Diviniser, « le souverain des hommes », qu'on n'osait pas nommer ; c'est la Déesse, c'est la Soffet, on nous dira : c'est « le Juge », symbolisé par le soleil, on dira d'elle « le soleil de Justice ».
Le soleil était « la Reine du Ciel », jusqu'au jour de la révolte. Alors, la Déesse fut ridiculisée, et Astarthé devint Astaroth et fut représentée par la lune.
La lune en Egypte était l'œil d'Osiris, et nous voyons le soleil représenté par un chat (caricature du sphinx), et le chat, étant l'animal aimé par la Femme, devint le symbole féminin.
Plus tard, ce fut la lune qui fut représentée par le chat, appelé man en égyptien.
La Déesse solaire Pasht, à figure de chat, veille en écrasant sous sa patte le serpent des ténèbres, l'homme méchant, son éternel ennemi.
Le chat était tenu en grande vénération dans la ville de Bubaste, qui portait un deuil sévère lors de la mort des chats sacrés. Là, Isis était représentée par une lune à tête de chat (1).
En Grèce, nous voyons Sémélé qui est, selon Nonnos, « portée ou élevée au ciel » après sa mort. C'est son ascension. Là, elle préside sous le nom de Reine du Monde ou de l'Univers.
A son nom, comme au nom d'Hathor, d'Hécate et des autres Déesses, tous les démons tremblent. Mais quand vint le jour de la révolte, on fit de Diane (cette belle Déesse du jour) une Diana-Luna. Et on nous racontera dans les Métamorphoses d'Ovide que Diane se couchait dans la lune sous la forme d'un chat lorsqu'elle cherchait, avec d'autres Divinités, à échapper à la poursuite de Typhon.
Maen (lune) est masculin d'abord. Le lunus des Latins est masculin aussi au début, il deviendra plus tard luna.
Quand l'homme met la femme sur le plan sexuel masculin et se met, lui, sur le plan spirituel féminin, c'est que sa raison s'est obscurcie, il a perdu la science qui l'éclairait et ne se laisse plus guider que par ses instincts, c'est le commencement de la folie.
Cela exaspère la Femme, qui devient pour lui « la Déesse vindicative », le Dieu jaloux des Hébreux.
Dans les Mystères séléniques, toutes les grandes Déesses sont rabaissées au rôle sexuel : Nephtys ou Neit, Proserpine, Milytta, Cybèle, Isis, Astarthé, Vénus et Hécate.
Les féministes se vengent en renvoyant le symbole lunaire à leurs ennemis, Apollon, Dionysos, Adonis, Bacchus, Osiris, Athys, etc., toutes personnalités légendaires qui n'ont été que le reflet des Déesses, donc ce qu'est la lune en face du soleil.
Et c'est pour symboliser ce reflet que la Déesse porte un miroir dans lequel l'homme en se regardant fait de la spéculation (de spéculum, miroir).
Maintenant, on comprendra facilement que ce qu'on appelait « le monde sub-lunaire », c'est le monde gouverné par l'homme, Lunus.
Bachofen dit :
« La marche victorieuse des droits paternels est représentée partout comme l'œuvre des héros du soleil. Le matriarcat devient l'œuvre des divinités chtoniques.
« Dans le matricide d'Oreste et d'Alcméon, le mythe a ainsi compris la lutte entre l'ancien monde et le nouveau principe. Le sort d'Oreste peint les luttes et les secousses qui ont déterminé la victoire de la paternité. »
Toutes les Déesses lunaires avaient un double aspect, l'un divin (le primitif) et l'autre infernal (le secondaire), toutes étaient les Vierges-Mères d'un fils, « le soleil » (le dieu), né d'une façon immaculée.
Raoul Rochette montre la Déesse lunaire des Athéniens, Pallas ou Cybèle, Minerve ou bien Diane, tenant sur ses genoux son jeune fils, invoquée à l'époque de ses fêtes sous le nom de « la seule Mère de Dieu », assise sur un lion et entourée de douze personnages (les douze grands Dieux).
Le symbolisme des Divinités lunaires est mélangé d'une façon si inextricable qu'il serait impossible de séparer les uns des autres des glyphes tels que l'œuf, le lotus, les animaux sacrés, l'ibis par exemple et le serpent, si nous ne connaissions l'origine de ces emblèmes et l'usage qui en a été fait dans les luttes de sexes.
Les Pères de l'Eglise, qui adopteront toutes ces idées sans les comprendre, feront de la lune le symbole de Ihaveh (Heva).
(1) Osiris est représenté, dans la première phase religieuse, sous la forme d'un Dieu, Lunus, Aoch, reflet du soleil (imitation de l'Esprit féminin). Quelquefois, c'est un enfant coiffé du disque et du croissant : Khons-Lunus. Ou, par dérision, c'est Thot (la Vérité) qui est appelée Thot-Lunus ; elle est ornée du disque et parfois de la plume d'autruche. Dans le papyrus Cadet, on la voit assise au milieu d'une barque, sous les traits d'un homme barbu ; elle est adorée par quatre cynocéphales.

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« La France, hier soldat de Dieu, aujourd'hui, soldat de l'humanité, sera toujours le soldat de l'idéal. »
(Georges Clémenceau)


À suivre : CONSÉQUENCES DE L'INVASION ROMAINE

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